DMS : Chapitre 41
DMS : Chapitre 43 cadeau :p

Chapitre 42 – La Neuvième Vie (1)

 

Ce type essayait encore de me draguer ?

— Mais ce que tu peux être lourd ! Tu n’as toujours pas compris que tu ne m’intéresses pas, toi ? Tu te prends pour qui ? Bordel, on dirait cet idiot de Krahn ! m’énervai-je.

Il sourcilla immédiatement.

— Krahn ? Le Sympathique ?

Aaah ? Il le connaissait, alors. C’était l’un de ses amis ? Mais il avait prétendu ne pas connaître sa secte, pourtant. Si je lui disais qu’il allait passer un siècle en-dehors de la cité à cause de moi, il deviendrait fou de rage.

Et il ne manqua pas de poser la question qui fâche, bien entendu.

— Comment le connais-tu ?

Il me regardait droit dans les yeux, d’un air des plus sérieux. Terminé l’ai jovial, fini le comportement frivole et dragueur. Il était un architecte jusqu’au fond de ses os, il avait des amis, il avait des ennemis, et à cet instant précis, je pouvais le sentir. Il me fit légèrement froid dans le dos.

— Je… Et toi ? finis-je pas tenter.

Avant tout, il fallait que j’essaye de détourner la conversation. S’il apprenait ce que j’avais fait, il serait peut-être capable de se venger en personne, là, sur place. Et plus que tout, ma petite excursion au sud de la ville allait s’en trouver grandement perturbée. Il fallait que je noie le poisson à tout prix.

Et dire que de tous ceux sur qui j’aurais pu tomber, il fallait que ce soit un type qui connaissait Krahn ! Encore un coup de ma malchance. Je décidai à ce moment précis que même si je n’avais pas tué la déesse de la chance dans une vie antérieure, le jour où j’allais la rencontrer, je ne me priverais pour rien au monde.

Contre tout attente, il grimaça.

— Krahn, cet enfoiré est le fils du Maître de la plus grosse secte rivale de la Neuvième Vie. Ils sont basés dans le centre de la ville, pourtant ils possèdent une puissance et une influence phénoménale ici, dans le sud. Ils ont un département ‘magie’ de premier ordre. Je suis moi-même le fils d’un ancien de ma secte, ce qui m’a d’ailleurs permis d’y entrer un peu automatiquement malgré l’absence de recrutement, et on peut dire que je suis bec et ongles avec cet enfoiré de Krahn.

Marquant une légère pause, il soupira avec sévérité. Soutenant toujours mon regard avec le plus grand sérieux, il continua aussitôt.

— Je ne comptais pas te balancer ouvertement les affaires de la secte et prétendre ne pas les connaître, mais… Tu as prononcé un nom auquel je ne pouvais réagir. Et si tu le connais, alors quoi qu’on en dise, nous ne pourrons pas nous entendre, toi et moi.

Une secte rivale ? Je comprenais, maintenant. Il n’était pas du tout ami avec lui, il le détestait !

Pardon, Dame Chance, je retire ce que j’ai dit, et peut-être que je ne te tuerai pas une nouvelle fois lorsqu’on se verra !

Je me devais de rassurer ce type sous peine de me faire cataloguer comme une alliée de ce bouffon de Krahn le banni. Finalement, peut-être que j’allais pouvoir profiter de la situation.

— Et je l’aurais traité d’idiot si j’étais proche de lui ? Tu penses ? lui demandai-je pour toute réponse.

Ses yeux perdirent immédiatement un peu de leur feu.

— Hmm… En effet, non, admit-il. Mais tu n’as pas répondu à ma question. Comment le connais-tu ?

Je bombai le torse – la poitrine – et m’étonnai d’ailleurs qu’il n’ait pas déjà fait de réflexion quant à ma perte de volume, et lui répondit fièrement.

— Il m’a assassinée il y a quelques temps. Je l’ai dénoncé et il s’est rebellé face au grand type de l’administration, comme l’idiot qu’il est. Il s’est fait bannir de la ville pour un siècle.

— … ?!

La mâchoire de mon interlocuteur tomba en même temps que ses épaules.

— Je, tu, il… Mais… Ils t’ont laissée le dénoncer ?! Comment ? La secte devrait pourtant avoir le pouvoir de te restreindre à volonté ! Entre leur puissance politique et l’utilisation de la magie, il ne devrait pas y avoir moyen pour toi d’arriver au bout de ta dénonciation ! s’écria-t-il en agitant les bras comme pour chercher une réponse dans l’air ambiant.

Il n’en revenait pas, ce qui ajoutait à mon sentiment de puissance. Eh oui, même un type hautain et orgueilleux du sud pouvait me regarder comme ça, avec ce petit air qui disait à quel point il venait de changer d’avis sur moi.

— Alors… Je suis toujours une toge blanche qui ne vaut que son petit centre de la ville ? lui demandai-je de façon un peu hautaine.

— …N’en fais pas trop, se reprit-il. Je veux bien reconnaître que tu as des talents cachés, mais tu n’es pas la seule qui aurait pu parvenir à faire ça. Je suis simplement étonné que quelqu’un se soit enfin décidé.

— On va dire ça, hein… compromis-je.

— Je te l’ai déjà dit, je veux que tu rejoignes ma secte. Si je ne t’estimais pas capable, je ne te l’aurais pas proposé, pour commencer.

Ah, oui, ce n’était pas parce que j’étais une fille et que je te plaisais, gros con ?

Ce mec changeait d’avis aussi vite que tournait le vent un jour de tempête. Il m’avait dit à peine quelques minutes plus tôt qu’il voulait me recruter par ce que j’étais à son goût. Maintenant, c’était parce que j’en avais les capacités ? À d’autres. Il cherchait des excuses. Il avait des vues sur mes formes depuis la première fois. La voilà, la réalité.

Mais la situation avait quelque peu changé. Si j’entrais dans une secte rivale à celle de l’Eau Trouble, je pourrais alors bénéficier d’un certain niveau de protection et ne plus craindre de me faire attaquer, enlever ou séquestrer. Rien que pour ça, accepter son offre valait déjà le coup.

Cependant, j’avais émis des conditions, et je comptais m’y tenir. Il était hors de question que je devienne la gentille chienne d’une secte qui me ferait faire toutes les basses besognes du monde sans me demander mon avis. Je voulais rester libre, quitte à les rejeter et me faire un nouvel ennemi à la puissance démesurée. J’étais sans doute un peu trop arrogante alors, mais que pouvais-je y faire ? Même en m’en rendant compte, je n’arrivais pas à me résigner.

Et j’allais m’en assurer immédiatement.

— Je t’ai dit que je pourrais accepter ton offre, mais… j’ai posé des conditions. Les acceptes-tu ? Elles ne sont pas négociables, tu sais, lui rappelai-je.

— Et je t’ai déjà dit que je ferais de mon mieux, mais tu demandes beaucoup, aussi ne puis-je pas te promettre que les anciens vont accepter. Pour ce qui est de ta liberté, je peux la garantir. Notre secte est ainsi faite, et à moins d’avoir un poste à responsabilités, tu pourras faire ce que bon te semble tant que tu ne ternis pas notre nom.

— Et pour la création de mon sort ? ajoutai-je, rassurée par sa réponse précédente.

C’était tout de même pour ça que j’étais là, à la base. C’était une condition tout aussi importante.

— Je ne peux rien promettre. C’est compliqué de créer un sort, surtout un sort inutile. Nous allons devoir fournir les ressources, et qu’as-tu à offrir en échange ?

Je fronçai les sourcils.

— J’ai débarrassé la ville de l’héritier de la secte rivale, et ce pour un siècle entier. Tu ne crois pas que c’est déjà assez ?

Il me sourit d’un air un peu désolé, comme s’il savait que j’allais dire ça et qu’il était évident que ça n’avait pas valeur d’argument.

— Ce n’était pas lié à ton arrivée, malheureusement. Les anciens vont demander ce que tu as à offrir, j’en suis persuadé. Tu sais, ceux qui s’occupent de ça sont spéciaux. Ce sont des savants avant toute chose, et il va falloir les convaincre. Je vais m’arranger pour te faire accepter quoi qu’il arrive, comme je te l’ai dit, mais si tu arrives les mains vides, ils vont mal te voir et tu n’auras alors aucune chance d’obtenir ce que tu réclames. À moins que je parvienne à faire jouer ma réputation, mais même ça, ce n’est pas gagné. Même si je demande à ceux qui me sont le plus proches de t’aider, il est possible qu’ils refusent.

— Oh… Je vois. C’est donnant donnant, alors ? compris-je.

— Tu peux voir ça comme ça.

Donc, si je résumais bien la situation, ce type – qui ne s’était toujours pas présenté – était l’ennemi de mes ennemis. Il souhaitait que je rejoigne sa secte parce qu’il avait en quelque sorte craqué sur moi – sans remarquer que ma poitrine avait diminué de volume – et il pourrait me permettre d’obtenir ce pour quoi j’étais venue là si on avait de la chance ou si j’avais quelque chose à offrir en retour.

Que demander de plus ? C’était mieux que tout ce à quoi je m’étais attendue.

J’avais tout à y gagner à essayer !

— Bien. Selon ces conditions, j’accepte.

— V… Vraiment ?! bafouilla-t-il, pris au dépourvu par mon annonce soudaine.

— Pourquoi es-tu aussi surpris ?! C’est toi qui n’as pas arrêté d’insister ! lui rappelai-je.

— C’est vrai, c’est vrai. Mais tu enivres mon esprit, je n’arrive pas à penser lorsque je suis à tes côtés.

— Oh merde. Arrête ça tout de suite.

— …

Il croyait qu’on était des amis, ou quoi ? Ou pire, des amants ?

Après l’avoir rapidement remis à sa place, je me dépêchai de me présenter.

— Je m’appelle Wuying. Qian Wuying. Et toi ?

— Teacup. Enchanté, me répondit-il en souriant fièrement.

— …Hein ?

— Oui ?

Il se moquait de moi ?

— Tu te moques de moi ? m’enquis-je aussitôt la pensée m’ayant traversé l’esprit.

— Pardon ?

Une ambiance glaciale de confusion s’installa entre nous et nous ne savions plus que dire. Je pris quelques secondes pour souffler et y penser avant de lui répondre.

— Pardon, mais… Tu as dit que tu t’appelles Teacup ?

Il hocha la tête, heureux que je brise la glace qui nous avait soudain séparés.

— Exact. Tu as entendu parler de moi ? espéra-t-il d’un seul coup.

— Absolument pas, fis-je en brisant tous ses espoirs naissants.

Je lui dis ça comme si c’était la chose la plus normale du monde, puisque je ne le connaissais réellement pas.

— Mais… Alors, pourquoi as-tu réagi ainsi ? Je t’ai choqué ? tenta-t-il de comprendre.

— Hm… Tu ne te moquais pas de moi, tu t’appelles Teacup ?

— Oui, oui. Je suis Teacup, confirma-t-il rapidement et avec assurance.

— Puis-je… savoir d’où tu viens ? De quel plan, de quelle planète ?

Il me regarda de haut en bas pendant quelques secondes avant de répondre franchement.

— Normalement, c’est un tabou. On peut en parler, mais poser la question ne se fait pas. Seuls les curieux qui t’ont accueillie à ton arrivée ont dû te poser la question, n’est-ce pas ? Pour pouvoir te présenter à quelqu’un de chez toi…

— …Hmm… Je suppose ? Désolé si… commençai-je à m’excuser.

— Mais ce n’est pas grave. Pour te montrer ma bonne volonté, je te le dis volontiers. Je viens de la petite planète Algapan.

— Oh. Donc tu ignores tout de la Terre… N’est-ce pas ? supposai-je.

— La Terre ? Erm… Oui. J’ai entendu ce nom une ou deux fois de la part de quelques connaissances, mais… haussa-t-il les épaules indifféremment.

— Chez moi, il existe une langue dans laquelle ton nom signifie ‘Tasse de thé’, coupai-je.

— …

— …

— …Oh. Je comprends, répondit-il finalement, les yeux sombres et la mine déconfite.

Il marmonnait, comme s’il avait honte de porter son propre nom, désormais. Merde. J’avais mis les pieds dans le plat. Il avait l’air chiant, comme type, collant et malpoli, mais il avait eu la décence de m’inviter dans une secte énorme et ennemie de la secte de l’Eau Trouble, par-dessus le marché. Il allait même faire des efforts – même si sa motivation restait douteuse – pour m’aider à obtenir ce que je désirais.

Je pouvais bien faire amende honorable. Ma première impression de ce mec était pire que ce qu’il valait en réalité, je commençais à le comprendre tout doucement.

— Ah, mais… Tu sais, avec le nombre incalculable de langues existant dans l’univers, tous les noms doivent bien vouloir dire quelque chose de ridicule quelque part… lui sortis-je d’un seul coup pour rattraper ma boulette.

— …De ridicule…

Il baissa les yeux, honteux et déprimé. Merde ! Je n’avais rien arrangé !

— Et puis, et puis, tu sais… J’aime bien le thé ! continuai-je sur ma lancée afin de lui remonter un peu le moral.

— …

— Eh, allez, tout va bien ! essayai-je une dernière fois, décidée à avoir fait tous les efforts possible s’il n’allait pas mieux après ça.

— …Tu aimes le thé et pourtant tu m’as agressé au début… finit-il par m’adresser tout bas.

Allait-il vraiment se lancer dans cette parodie de dépression amoureuse ? Il fallait que je le calme directement. Lui attrapant le menton, je lui relevai la tête pour le regarder droit dans les yeux, d’un regard dur. Si lui remonter le moral ne fonctionnait pas, peut-être qu’un soupçon de domination allait être plus efficace.

— Oh. C’est toi qui m’a traitée comme un objet, je te rappelle. Ne me force pas à revenir sur ma décision, le menaçai-je ouvertement.

Il reprit ses esprits tout en reculant d’un pas.

— Ah ! Non ! Ne t’en fais pas, ça va ! Regarde, je vais bien ! Haha… Allez, allons-y, je vais te montrer où se situe la secte, et te présenter aux anciens, le superviseur, les savants… Quant aux autres membres, eh bien, c’est moins important, tu les rencontreras au fur et à mesure.

 

**

 

Le bâtiment était gigantesque. On aurait dit un de ces bâtiments abritant les thermes romains, à la grande époque. Le genre à posséder une cinquantaine de bains et à pouvoir accueillir des centaines de personnes sans qu’elles ne se marchent dessus. Et encore, ce n’était que la devanture…

En grand sur la façade et de façon presque arrogante était gravé le nom de la secte, en lettre capitales coulées de dorures.

LA NEUVIEME VIE’

Sous ce nom aux allures grandioses et hautaines se trouvait ce qui devait sans doute être le slogan de ladite secte. Puissant et m’as-tu-vu, il dominait la rue à plus de cinq mètres de hauteur au-dessus de la grande porte d’entrée.

L’EXCELLENCE ENFIN ATTEINTE’

— Ah, quand même… Ils ne se prennent pas pour n’importe qui… commentai-je pour moi-même.

Teacup se tourna vers moi en m’entendant et me fit une petite grimace.

— Ne dis jamais ça devant eux.

Je lui répondis par un sourire effacé.

— Ne t’en fais pas, je ne suis pas idiote. Allez, montre-moi.

Après être entrée à sa suite en dépassant l’énorme arche de pierre qui servait de porte d’entrée, nous nous retrouvâmes dans une vaste pièce qui ressemblait quelque peu au salon de luxe dans lequel j’étais arrivée sur ce plan. Il y avait là une dizaine de canapés rouges et des tables avec des verres et de bouteilles… d’alcool ?

— Je croyais qu’on ne se nourrissait pas, ici ? m’étonnai-je sincèrement. Après tout, je n’avais pas bu, n’était-ce que la moindre goutte d’eau, depuis mon arrivée sur ce plan.

Teacup se tourna vers moi d’un air étonné en me reprenant.

— Ah ? On n’a pas besoin de manger, mais est-ce que ça doit nous empêcher de nous faire plaisir ? La vie serait si triste…

— …

Je n’avais pas vu les choses sous cet angle. Moi qui pensais que puisque nous n’éprouvions pas le besoin de nous nourrir, je ne serais pas capable de trouver le moindre truc à me mettre sous la dent… Voyant mon désarroi, il m’expliqua.

— Nous avons créé de l’alcool par magie. Nous nous en servons pour nous divertir, pour recevoir des invités, pour fêter ce qui doit l’être, entre autres choses. Ne t’en fais pas pour ça et suis-moi, nous allons directement dans le bureau du Superviseur. C’est le plus haut gradé des anciens et le bras droit du Maître de Secte.

— Nous n’allons pas voir directement le Maître ?

Il secoua la tête.

— Non. Il est absent ces jours-ci, il est parti en expédition, seul. Et de toute façon, il laisse le Superviseur s’occuper de tout ça même lorsqu’il est là. Il lui fait entièrement confiance.

— Ah, très bien. Allons-y, dans ce cas.

Sur ces mots, une espèce d’alarme se déclencha, comme dans une caserne de pompiers. Tous ceux qui je voyais précédemment vaquer à leurs occupations se mirent à courir dans tous les sens, pressés et paniqués.

— Qu… Qu’est-ce que c’est ?! m’affolai-je.

Raka
Les derniers articles par Raka (tout voir)
DMS : Chapitre 41
DMS : Chapitre 43 cadeau :p

Related Posts

18 thoughts on “DMS : Chapitre 42

  1. Merci pour le chapitre !!!!

    Petite correction : »Après tout, je
    n’avais pas bu, n’était-ce que la moindre goutte d’eau » .
    Ça ne serait pas plutôt « ne serait-ce la moindre goutte… »

  2. si j’étais cynique, je dirais que le fait de voir une femme affole toute la ruche, mais je ne le dirais pas !

    Merci pour le chapitre et vivement la suite !

  3. Merci pour le chapitre !

    ——-

    « Je l’ai dénoncé et il s’est rebellé face au grand type de l’administration, come l’idiot qu’il est. » => « Come »

  4. Au chapitre d’avant pourquoi teacup a dit qu’il ne connaissait pas la secte de l’eau trouble si c’est LA guilde rival à la sienne ?

    1. Pour éventuellement ne pas balancer les affaires de sa secte ?
      Parce qu’il avait décidé de ne pas accorder sa confiance avant que [ ] ?
      Parce qu’il avait sans doute une raison ? 🙂

Répondre à Coco Annuler la réponse

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Social Media Auto Publish Powered By : XYZScripts.com