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Chapitre 48 – En route vers le camp des géants (1)

 

Cela faisait maintenant plusieurs heures que je marchais, suivant à la lettre les instructions données par Teacup sous forme de carte. Et je devais avouer qu’il connaissait les lieux ; il avait dessiné la carte en quelques minutes à peine et elle était si précise ! Elle définissait clairement les endroits à éviter, ceux où les monstres – les chupacabras pour ne citer qu’eux – avaient l’habitude de se regrouper, les terriers de diverses créatures que je préférais ne pas croiser ainsi que les territoires arpentés par des prédateurs plutôt féroces et dotés d’un excellent odorat.

Des flèches appuyées de notes expliquaient à quel moment passer, comment faire pour ne pas se faire repérer ; il avait même mentionné le bosquet aux slimes dans lequel j’avais aidé FeiLong à trouver ses plantes. Je pouvais y pénétrer si je me faisais pourchasser par un chupacabra et ils n’oseraient pas me suivre.

Les slimes étaient apparemment réputés pour être friands de la viande de chupacabra et si l’un d’eux s’approchait de l’étang, ils se jetteraient sur lui. Aussi les pauvres chiens noirs monstrueux évitaient par tous les moyens d’entrer dans le bosquet, quitte à abandonner une proie pour sauver leur vie.

— Et dire que j’ai réussi à venir ici toute seule, admirai-je, fière de moi. Je n’ai effectivement pas vu le moindre monstre dans la plaine des chupacabras.

Remerciant Teacup intérieurement, je m’aventurai au-delà du bosquet sans prendre le temps de m’y arrêter. Si j’en croyais la carte, j’allais bientôt arriver dans une autre plaine, mais infestée de serpents, cette fois. Plus puissants que les chupacabras, ils étaient de niveau 70 minimum. Évidemment, la carte m’indiquait comment traverser leur repaire sans les alerter.

— Alors comme ça, constatai-je, ils sont aveugles, et si je ne fais pas de bruit, je peux passer lorsqu’ils sont le moins alertes, à la tombée de la nuit.

Teacup savait vraiment tout sur tout ! Je m’étonnais que FeiLong n’en avait pas fait autant et qu’il avait préféré affronter les monstres en ma compagnie.

— Hmm… Peut-être qu’il s’est servi de la magie, suggérai-je tout en avançant. FeiLong n’a pas l’air très calé en magie. On dirait plus une espèce de vieux sage qui sait se battre, haha… Serait-il un artiste martial qui s’ignore ?

Pendant que je traversais la plaine des serpents, le duo d’explorateurs qui n’avait toujours pas réussi à conquérir le nid d’Izdasa était de retour. Je pus constater que le paladin Wayne était équipé différemment, cette fois-ci. Il avait abandonné son armure blanche et cabossée pour s’équiper d’une armure argentée un peu plus légère et rutilante.

— Hah, il s’est acheté un nouvel équipement.

Et il me confirma aussitôt ce que j’avais deviné :

– Bon, Khestun. Nous allons voir si dépenser autant dans cette armure valait le coup. J’espère que ces 20% de résistance aux maladies vont m’être utiles.

– Ha ha ha ! Laisse-toi mordre, dans ce cas ! se moqua le moine en riant comme s’ils n’allaient pas faire face à des situations de vie ou de mort quelques minutes plus tard.

Tout en esquivant les zones de repos où je savais que les serpents se doraient sous le soleil, j’observais mon donjon d’un esprit peu concentré sur la tâche.

— Décidément, avec une carte pareille, je pourrais aller n’importe où dans le monde et ne pas craindre pour ma vie…

Malheureusement, elle ne décrivait que le chemin pour me rendre jusqu’au camp des géants vignerons.

– Regarde-moi ça, Wayne. Je ne me suis pas fait mordre, cette fois, se vanta le moine Khetsun en exhibant son corps intact après avoir tué tous les varans des cavernes. Les salamandres d’eau représentaient désormais plus une formalité qu’une difficulté pour lui et il les passait presque les yeux fermés avant de s’attaquer aux varans sur les murs.

— Et maintenant, il reste Izdasa et Friderik. Mais je pense qu’ils s’attendent à l’attaque surprise du slime, après ce qui leur est arrivé hier…

Et effectivement, je voyais déjà les deux compères fouiller la salle sans s’approcher du nid. Ils cherchaient du bout de leurs armes dans chaque creux, chaque dessous de pierre, entre les piliers… Ils cherchaient évidemment à déloger le slime.

Cela dit, ils se fatiguèrent en vain. Je ne pouvais pas voir Friderik dans le donjon parce qu’il n’était pas un de mes monstres, mais je soupçonnais fortement son absence. Il devait être devant un miroir, en train de les regarder s’amuser dans le donjon ; sans doute attendait-il son heure pour se jeter dans le donjon et leur faire leur fête.

De mon côté, à force de ne pas faire attention où je mettais les pieds, j’avais décroché du chemin que la carte me conseillait.

— Uh-oh… Je n’aurais pas dû autant regarder le donjon, réalisai-je.

Plus loin devant moi, je pouvais apercevoir une dizaine de serpents.

— Des… Des serpents, ça ?! faillis-je m’écrier sous le coup de la surprise. Ce sont des vrais monstres, oui !

Chaque reptile devait mesurer plus de dix mètres de long et pourrait m’engloutir en une seule bouchée si l’envie lui prenait d’ouvrir la gueule. On aurait dit ces gigantesques boas que l’on pouvait voir dans les émissions de télé et qui vivaient en Amérique du Sud, mais en version encore plus effroyable et dormant en famille !

Douuuucement…

Je voulus faire demi-tour afin de retrouver la route que j’étais supposée prendre. Mais derrière moi, à quelques mètres à peine, venait de s’allonger un de ces putains de serpents géants ! Il se faisait rôtir sous le soleil de ce début d’après-midi, la tête levée et les yeux fermés.

Je ne savais même pas que les serpents pouvaient fermer leurs yeux ? Ils ont des paupières ? Ah, ce sont des monstres, on s’en fout !

J’étais coincée et n’osais plus bouger un cil. Et s’il tournait la tête et me reniflait, avec ses grosses narines et son énorme langue à faire des pssst pssst pssst ? Je me mis à frissonner alors qu’il faisait encore chaud. Je ne savais pas si j’avais réellement horreur des serpents ou si leur taille avait tout à y voir, mais je ne me sentais pas bien du tout à ce moment précis.

Je fais quoi, maintenant ?

Dans le donjon, le duo que je surveillais toujours du coin de l’esprit avait entamé un combat contre Izdasa. Je pus voir l’œuf qu’elle avait pondu et qui n’avait pas éclos. Le paladin avait engagé Isdaza et la tenait à distance avec son bouclier pendant que le moine l’attaquait de loin en se servant de son bâton à bout de bras.

Petit à petit, il grignotait ses points de vie et elle n’arrivait pas à tenir la route. Elle était faite pour la ponte, pas pour le combat au corps à corps avec deux types expérimentés !

Soudain, alors que ma mère des varans était sur le point de tomber pour de bon en sifflant, ses morsures toujours arrêtées par le bouclier expert de Wayne…

Splash !

J’entendis, dans leur dos, un bruit sourd et gluant.

Friderik ! Il a décidé d’agir !

Je m’attendais évidemment à le voir surgir comme un héros masqué et même s’il ne parviendrait sans doute pas à sauver la mère pondeuse à temps, il pourrait s’occuper d’eux rapidement ensuite. Après tout, il ne fallait pas plaisanter avec sa résistance physique, il était tout de même issu d’un slime de roche…

Et à ma grande surprise, ce qui apparut ne fut pas mon petit slime d’amour.

— Quoi ?! m’écriai-je pour de bon.

Ce qui venait d’apparaître dans le donjon, arrivant depuis l’entrée de la salle et surgissant dans le dos des intrus impudents, ce n’était pas la petite boule informe à laquelle je m’attendais ; derrière les deux explorateurs occupés à achever le boss du donjon décidément incapable de les oppresser, c’était un autre varan !

— L’œuf ?! réalisai-je. Mais non ! Il est toujours dans le nid, intact !

Le serpent face à moi leva la tête et la tourna dans ma direction en sortant une langue des plus assurées. Il m’avait entendue, ça ne faisait aucun doute.

— Quelle conne… lâchai-je, une main sur le visage, exprimant à la fois ma honte et mon incrédulité face à mes propres erreurs.

Il avança vers moi, glissant lourdement sur le sol herbeux, parfaitement au fait de ma position et de la saveur de mon corps.

Je ne pensais pas que le premier à sortir sa langue devant moi dans le but de me bouffer toute crue serait un putain de serpent…

Un réflexe de dernière seconde traversa ma moelle épinière, je ne sus par quel miracle du destin.

— Entrave !

Je venais de me souvenir de ce sort, et espérais si fortement qu’il me permettrait de m’enfuir !

Et comme je m’y attendais, le serpent s’arrêta net, comme s’il venait de se faire ligoter par un millier de chaînes invisibles. Sa tête se plaqua au sol, incapable de bouger ; il ne pouvait même plus ouvrir la gueule.

— C’est bien, couché ! lui chuchotai-je en sautant au-dessus de lui, tout en priant pour que le sort d’entrave fasse son effet pendant suffisamment longtemps pour me permettre de prendre une bonne distance.

Ce fut sans compter sur ma malchance légendaire – ou la différence entre nos niveaux – car à peine quinze mètres plus loin, je l’entendis déjà glisser à nouveau dans les herbes, clairement à ma poursuite.

— Et merde !!

De l’autre côté des dimensions, Izdasa tomba. Je sentis mon petit cœur fragile se déchirer une fois de plus, comme à chaque fois que l’un de mes boss, un de mes bébés, se faisait exécuter. Et je me souvins également de cette fabuleuse propriété qu’était la toute-puissance qui m’avait déjà permis de tuer un gobelin d’un seul coup, ce jour-là.

Le serpent allait me rattraper en quelques secondes de toute façon, alors quoi qu’il arrive, ma meilleure option restait… Oui, il fallait que je tente le coup. Entrave s’était avérée inefficace, après tout.

Me retournant subitement, je plissai les yeux. Le serpent était aveugle ; il ne pourrait pas me voir esquiver au tout dernier moment. Il mettrait quelques secondes à me retrouver si je me débrouillais bien, que ce fut à l’odorat ou à l’ouïe.

Et comme je m’y attendais, il était déjà là et une gueule béante bondissait vers moi. Deux énormes crocs sans aucun doute venimeux et on ne pouvait plus acérés dégoulinaient de ce qui pouvait aussi bien être de la salive que du poison – ou un mélange des deux. Et puis, pourquoi m’en faire ? S’il m’attrapait, le poison était bien le dernier de mes soucis, je me ferais avaler en un mouvement de sa part.

J’eux à peine le temps, par je ne sais quel exploit, de me décaler de côté. Je sentis cette explosion de colère et de tristesse en moi en même temps que le contact froid des écailles qui glissa in extremis sur mon épaule.

Je lui envoyai mon poing au vol. Je pensais au moins le blesser si je parvenais à le frapper assez fort. Dans le meilleur des cas, il pourrait même abandonner le combat et s’enfuir, la queue entre les jambes – proverbialement.

Je sentis l’impact monstrueux liée à la perte de mon boss et je pus même avoir le temps de constater, presqu’au ralenti, la chair de monstre se déformer sous mon coup. C’était comme si je frappais un simple sachet en plastique, la peau du monstre n’offrait pas plus de résistance qu’un vulgaire sachet de courses !

KSIAAAIOUIII

Il émit un son atroce, savant mélange de gémissement, hurlement et sifflement avant de s’effondrer devant moi, inerte et la langue pendante.

— Hein ?

J’étais choquée. Si j’en croyais les informations détaillées par la carte, ces monstres étaient au moins de niveau 70, j’avais toutes les ambitions du monde mais pas… pas en dégommer un d’un seul coup.

Le cratère que j’avais laissé sur le côté de sa tête lui avait sans doute défoncé ce qui lui servait de cerveau. Je ne voyais que cette possibilité. Il ne se résorbait pas, je lui avais définitivement enfoncé le crâne.

[Schéma de serpent géant acquis.]

— …Il est vraiment mort… chuchotai-je, toujours peu consciente de la réalité.

Abandonnant là la carcasse dont je n’avais alors aucune utilité, je me précipitai vers la route plus sûre indiquée par la carte tout en jetant un œil sur ce qui se passait dans le donjon.

Et je dus m’arrêter, m’appuyer contre un arbre solitaire, et bien analyser ce que je voyais parce que je ne pouvais pas croire ce qui essayait de s’imposer comme une réalité indéniable.

— Huh ?

Le lézard qui était apparu n’était clairement pas le petit d’Izdasa, qui était toujours dans son œuf, bien au chaud à l’intérieur du nid.

Non, ce qui était en train de terminer d’étouffer les deux explorateurs totalement impuissants, c’était…

…c’était un slime gris ayant pris la forme d’un varan de plus d’un mètre de gabarit.

Raka
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15 thoughts on “DMS : Chapitre 48

  1. Merci pour ce chapitre 

    Nouvelle compétence overpeté de slime. (Que ce soit comme familier ou comme réincarnation, il faut toujours prendre le slime, toujours)

    PS:J’adore notre architecte préféré ; « c’est des monstres, on s’en fou »

  2. Merci pour le chapitre
    C’est sûrement à cause de le compétence berseker une fois un boss vaincu que l’héroïne a pu tuer le serpent rappeler vous ils nous avais été montrer cela avec feilong devenu boss de son propre donjon

  3. vu les cartes reprécise possible de la part des mages, pourquoi les architecte n’attende pas d’etre dans une zone sûr non-loin des monstre de haut niveau qu’un explorateur tue leur boss pour profiter du boost pour obtenir des shéma puissant ? ou alors, vu que les architecte ne sont ps limité a 1 donjon, faire 1 donjon principal hardcore et 4-5 donjon volontairement très faible pour qu’il se fasse régulièrement nettoyé et donc profiter régulièrement de ce boost, ma foi, relativement puissant.

    1. Aaah pour cette explication faudra patienter au-delà du chapitre 60, on en parle bien plus tard quand elle aussi se pose la question.

      Sans parler du fait que cette carte est due à un sort créé de toutes pièces sur demand et que trop peu de gens possèdent. 

    2. je me suis aussi posé cette réflexion, bizarre que en quelque millénaire aucun n’y est pensé

  4. Trop génial !!!! Vous êtes sûr qu’elle ne ressent pas déjà les effet de la cuvée a plusieurs km de distance, parce qu’être aussi… Drôle de par sa bêtise faut le faire !!

    « Et dire que j’ai réussi à venir ici toute seule, admirai-je, fière de moi. » Cet aspect le fera tjrs autant marré !! Merci pour le chapitre Raka !

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