MWLU : Chapitre 127
MWLU : Chapitre 129
〈 128. Un Orque et une demoiselle (3) 〉

 

Après avoir passé près de 18 heures dans cet endroit glauque, Kim Yu-Rin se trouvait dans la hutte de pierre tandis que Sae-Jin l’Orque gisait sur son lit. Tous deux tentaient de s’assoupir – cependant, la tête emplie de choses compliquées, c’était trop demander.

Dans le cas de Kim Yu-Rin, au moment où elle s’était couchée, la curiosité et des questions concernant l’Orque l’assaillirent, accompagnées de l’inquiétude constante pour se subordonnés qui avaient sans doute été happés par l’explosion.

Ils sont sûrement sains et saufs, hein ? Ils sont rapides. Ils feraient mieux d’aller bien…

Contrairement à elle, les pensées de l’Orque restaient concentrées sur la situation immédiate et sans doute tout aussi urgentes.

Ça serait vraiment trop hasardeux de rester près d’elle trop longtemps. Je dois sortir le plus rapidement possible ou rester loin d’elle…

Tout d’abord, l’instinct le plus basique de l’Orque était problématique. Bien sûr, il avait toujours avec lui cette potion spéciale sous forme ‘spiritualisée’ et qui pouvait réprimer lesdits instincts.

Comme la forme de l’Orque devenait de plus en plus puissante à mesure que les jours passaient, il avait déjà failli à plusieurs reprises perdre totalement le contrôle et devenir fou furieux face à ces stupides monstres qui lui tapaient sur le système.

Bien entendu, il n’y en avait pas dans ces souterrains sombres, mais tout de même et quoi qu’il fasse, il existait une existence encore plus menaçante, là, tout près de lui.

L’Orque tourna la tête et jeta un rapide coup d’œil en direction de la hutte. Il s’était assuré de sa solidité et avait même ajouté une fonction cachée pour qu’une fois que la porte était fermée de l’intérieur, elle se verrouillait automatiquement. Cela dit, comme elle n’était faite que de pierre, il était également vrai qu’il pouvait la détruire en l’espace de quelques secondes s’il entrait dans une rage folle.

Suffisant pour quatre jours… Ça devrait aller.

Après avoir vérifié ce qu’il lui restait de potions, il soupira longuement.

Les deux protagonistes se battant chacun dans leur propre arène cérébrale finirent par se laisser happer lentement par le doux poids du sommeil tandis que les heures passaient.

Et le jour suivant arriva, et dans cet espace ténébreux, il était difficile de dire s’il faisait jour ou non.

Kim Yu-Rin s’éveilla de son profond sommeil grâce aux bruyants Pphung ! Pphung ! provenant de l’extérieur – et par extension, par les sons montant de son estomac tandis qu’elle reprenait connaissance. Ouvrant lentement les yeux, elle se leva du doux lit de pierre – de façon contradictoire, c’était étrangement le cas – et jeta un œil hors de la hutte.

Kwahang !! Kwahang !!

L’Orque frappait le pauvre sol innocent avec assiduité.

« …Mais qu’est-ce qu’il fout ? »

Kim Yu-Rin sortit de sa tanière, la tête pleine de questions.

Lorsque la porte craqua en pivotant sur ses gonds, l’Orque tourna la tête vers elle.

« Que fais-tu ? »

Elle se frottait encore les yeux tout en s’interrogeant sur son but.

« Je fais des vibrations. Pour dire aux gens qui viennent pour nous, nous sommes là. »

« …Ah. »

Comprenant finalement où il voulait en venir, elle s’assit sur une chaise de pierre qui semblait s’être matérialisée comme ça, juste un instant auparavant.

Elle décida de rester auprès de l’Orque et de l’observer tandis qu’il s’attelait à la tâche afin de finir de se réveiller. La vue de ces muscles noueux, le son cristallin de la masse, les gouttes de sueur scintillant dans l’obscurité dans la lumière dansante du feu de camp, et puis les cheveux de l’Orque, humides d’efforts…

Tandis qu’elle profitait joyeusement de la scène, d’un seul coup, elle entendit le bruit de ‘quelque chose’ qui courait en tout hâte dans leur direction, plus loin. Surprise, Kim Yu-Rin bondit aux côtés de l’Orque.

« C’est un monstre !! Prépare-toi à te battre !! »

Elle s’écria sans trop y penser et attrapa son arme à sa hanche, Gungnir. Une habitude, un automatisme né de toutes ces années de combats acharnés.

Peu après, un monstre apparut pour de vrai. Elle tira rapidement son épée et pointa sa lame en direction d’un énorme Loup.

« …Vite, attrape ton arme, il est gigantesque ! C’est… Un La… »

« …Pas besoin. »

Une Kim Yu-Rin ultra tendue prit une posture de combat. Mais L’Orque gloussa simplement avant d’approcher du Loup d’un pas nonchalent.

« Quoi ?! Attention ! Je sens une puissante aur… »

Avant que ses mots effrayés n’aient pu en venir à un terme, l’Orque commença à gratter la tête du Loup, calme et posé. Et la bête accepta le geste d’affection, les yeux en croissants et la langue sortie, c’était réellement adorable, comme s’il était redevenu un chiot. Ses oreilles s’abattirent vers l’arrière et sa queue balayait l’air en un contentement silencieux.

Sans aucun doute, c’était un monstre pur et dur, géant, noir et… C’était un Lakcorn. Elle en avait vu la dépouille, elle pouvait reconnaître ce monstre mutant.

« C’est mon familier. »

Elle faillit en laisser tomber son épée.

« …Pardon ? »

« Nom, Cornlak. Tu as vu, je l’ai chevauché face au monstre. »

« …Ah. Aha. »

Même s’il était compliqué d’accepter ces faits, elle n’avait pas le choix. Après tout, elle avait été témoin de la situation, elle avait vu de ses propres yeux. Kim Yu-Rin plaça son arme dans son fourreau et se rassit sur la chaise. Puis, elle passa son temps à observer avec attention un Loup occupé à japper comme un chien heureux et ne s’occupant pas du tout d’elle.

D’ailleurs, elle adorait les poupées, petites et velues. Bon, elles étaient adorables, après tout.

Bien sûr, ce Loup n’était pas petit, pas du tout. Mais à voir le charme qu’il dégageait comme s’il n’était rien d’autre qu’un petit renard et non un monstre de presque trois mètres de long, c’était bien trop…

« E, excuse-moi ? »

Incapable de le supporter plus longtemps, elle ouvrit la bouche avec peine. Les joues rouges qu’elle offrait en disaient long.

« Mm ? »

« Puis-je… Puis-je aussi, uh, ah, euh… toucher ton Corntruc ? »

« Cornlak. »

« Oh, désolée. Cornlak. »

L’Orque hocha la tête et tapota gentiment le dos de son Loup. Kim Yu-Rin se leva furtivement de sa chaise et s’en approcha. Même s’il grognait un peu envers elle, quand Sae-Jin lui indiqua mentalement de se contrôler, l’animal se coucha paisiblement sur le sol.

Elle tendit prudemment la main et lui caressa le dos. D’un seul coup, ses yeux faillirent sortir de leurs orbites ; s’il fallait décrire la sensation qu’elle venait de ressentir, ce serait assurément ‘doux’ et ‘soyeux’. La fourrure d’un Loup normal était dure et rugueuse, celle de celui-là était dans une tout autre dimension.

Elle avait l’impression de toucher la peau d’un nouveau-né, tellement douce et élastique. Son humeur fit un bond majestueux rien qu’à son contact – c’était vraiment un tout nouveau monde que ses mains n’avaient jamais expérimenté auparavant…

« Ouah… »

Ses yeux étincelaient dangereusement tandis qu’elle continuait de lui labourer le dos de ses dix doigts. Au début, elle ne le caressait que d’une main, mais elle avait rapidement senti le besoin affolant de faire ressentir ça à son autre main également. C’était vraiment à ce point, si addictif et attirant.

Hyuuuu, Hyuuuu…

Se sentant soudain proverbialement violé par Kim Yu-Rin, Cornlak lança à l’Orque un regard empli de toute l’impuissance du monde, regard qui fut renvoyé par l’Orque et lui signifiant de supporter encore un peu. (NdT : Il y a là une blague que je n’ai pas pu traduire. En fait, « Yu-Rin », en Hanja, peut également vouloir dire « viol », ou « invasion de l’espace d’autrui ». En fait, l’auteur a écrit que le Loup s’était fait « Yu-Riné » par « Yu-Rin ».)

 

****

 

Dans ces souterrains sombres ne se trouvaient plus que deux personnes et un Loup géant. Tout ce qu’ils pouvaient faire restait simple. Ils se parlaient pour tuer le temps.

Tout en se trouvant dans le giron chaleureux de Cornlak, Kim Yu-Rin posa un certain nombre de questions à l’Orque tout en étudiant attentivement ses réactions.

Il lui demanda comment avait-il vécu jusqu’alors, pourquoi l’avait-il chassée à ce moment ; pourquoi avait-il appris à parler Coréen, et encore où avait-il trouvé un tel Loup mutant pour en faire un familier. Et puis, où était-il jusqu’à présent, avant de faire une apparition surprise après tout ce temps ?

Toutes ses réponses furent concises – il l’avait chassée parce qu’il ne l’aimait pas, et pour tout le reste, elle n’avait pas à le savoir.

« … »

Ainsi, suite à ces réponses courtes et inutiles, elle était plutôt fâchée. Avec des lèvres courbées dans un sens désagréable, elle observait le feu tout en martyrisant le dos du pauvre et innocent Cornlak. Sae-Jin se dit que les pellicules pourraient tomber comme la neige à ce rythme.

« Au fait… »

Kim Yu-Rin ouvrit la bouche à nouveau, juste au moment où le Loup n’en pouvait plus.

« …Connais-tu un humain du nom de Kim Sae-Jin ? »

Elle posa la question tout en fixant l’Orque d’une paire d’yeux d’aigle. Se tendant légèrement, Sae-Jin se trouva face à un sérieux dilemme. Cette femme suspectait définitivement quelque chose. Même s’il n’avait aucune idée de ce qu’elle pouvait avoir en tête, sans aucun doute, il se devait de marcher sur des œufs, là…

« Je le connais. »

« Et comment l’as-tu connu ? »

« Pas tes affaires. »

Immédiatement, elle attrapa violemment une touffe de poils sous sa main. Le Loup, surpris, leva la tête et elle s’excusa rapidement et sincèrement en lui caressant gentiment le flanc.

« Bien sûr, ça ne me regarde peut-être pas, mais… Je demande puisque je ne l’ai jamais vu entrer dans le village, pas même une fois. »

« … »

L’Orque ne répondit rien. Il était actuellement occupé à imaginer le genre de chose qu’il pourrait lui rétorquer.

Cependant, Kim Yu-Rin prit son silence pour un autre « pas tes oignons » et fronça les sourcils, insatisfaite. Elle finit par cracher tout haut ce qu’elle avait sur le cœur, tout ce qui tournoyait dans sa tête jusqu’à présent.

« Tu fabriques des armes pour lui ? »

« … ?! »

Face à cette question des plus soudainement inattendues, l’Orque tourna la tête pour observer Kim Yu-Rin. Elle exécuta alors un mouvement expert afin de subtiliser la masse qui pendait à la hanche de l’Orque.

« Que… ? »

« Regarde bien. Tu vois ça ? Cette marque ici, et… »

Kim Yu-Rin désignait une certaine marque sur la partie métallique de la poignée, et tendit l’autre main pour se saisir de Gungnir…

« Mon épé… Huh ? Que ? Où est-elle ? »

…pour la dégainer mais elle n’était plus là. Elle tapota hâtivement à la recherche de l’arme un peu partout sur son corps.

« Mais, mais, mais, pourquoi… Je ne peux pas l’avoir perdue, non ?! Non, elle était là, il y a quelques… »

Tandis qu’elle passait du rouge au violet et du violet au bleu tout en ne parvenait pas à cacher sa confusion, l’Orque pointa silencieusement du doigt vers le Loup. Elle tourna les yeux et évidemment, il y avait le bout d’une garde d’épée qui dépassait de sa gueule. Elle laissa immédiatement sortir un long soupir de soulagement.

« Uh, whew… »

Comme l’arme de son maître avait été dérobée, le loyal Cornlak avait à son tour volé la possession du voleur…

« Eii, tu m’as vraiment surprise, là, tu sais, gros bébé. Rends-moi ça, s’il te plait. »

Finalement, la couleur commença à devenir normale sur son visage. Kim Yu-Rin attrapa la poignée qui dépassait pour récupérer son épée, mais le Loup ne faisait pas mine de vouloir la lâcher.

Il pouvait bien être appelé l’Avatar du Lakcorn d’Inde, sa mâchoire possédait une puissance qui excédait les dix tonnes ; peut-être même encore plus. Peu importe l’entraînement par lequel elle était passée en tant que Chevalier, sans l’aide du mana, elle ne pouvait espérer gagner contre une pression pareille.

« H… Eh, allez, arrête de plaisanter et… Euh !! Euh !! Non, attends ! Eh !! C’est quoi, ton problème ?! »

Elle lutta, la poignée en main, pendant un temps considérable, avant de soudainement réaliser ce qu’il se passait – et elle envoya la masse de l’Orque voler vers lui.

À ce moment seulement, Cornlak lâcha Gungnir sans se faire prier.

« …Et maintenant, regarde ça. »

Après avoir récupéré son trésor, Kim Yu-Rin gratouilla la tête du Loup comme pour lui dire qu’elle ne lui en voulait pas et montra la petite marque gravée à la base de la poignée.

Même l’Orque fut surpris par cette révélation. Bon, la plupart des gens ne sont, après tout, pas conscients de leurs petites habitudes.

« Tu peux voir ça, toi aussi, non ? »

« … »

L’Orque regarda son accusatrice droit dans les yeux. Heureusement, il ne semblait pas qu’elle puisse avoir le moindre soupçon concernant la double identité de Sae-Jin et de l’Orque. Et c’était vraisemblable, après tout. Qui au monde aurait pu imaginer un scénario dans lequel l’Orque et l’humain étaient une seule et même personne ?

« Ouais, et ? »

Et ainsi, l’Orque décida de rester très strict. Il avait prévu de ne rien dire qui n’était pas nécessaire et la laissa continuer à mal interpréter les choses pour le reste de sa vie.

« …Pardon ? »

« Et ? Et alors ? »

« Non, attends… Tu as fait ça ? »

« Peut-être ? Peut-être que Kim Sae-Jin l’a fait, et j’ai emprunté ? »

L’Orque durcit encore plus son expression et fronça les sourcils.

« Mais quand même… »

« Peu importe. Kim Sae-Jin, j’ai confiance bien plus qu’en toi. Et pas tes oignons. Arrête de dépasser les bornes. »

…Evidemment, il se faisait confiance à lui-même bien plus qu’à quiconque. Vraiment.

Comme si elle avait encore quelque chose à dire, Kim Yu-Rin bougeait ses lèvres. Au bout du compte cela dit, elle retourna s’asseoir en soupirant profondément. Puis, elle attrapa Cornlak d’un air désespéré et se mit à soupirer pour le Loup.

« Eh, tu ne voudrais pas venir chez moi plutôt que chez cet Orque ? »

« Hmpf. »

L’Orque renifla et attacha la masse à sa hanche. Après quoi, les deux prisonniers ne prononcèrent plus un mot pendant un long moment.

Dix minutes, puis vingt, et une heure plus tard… Le temps continuait sa course irréversible tandis que le pauvre bon vieux Cornlak recevait toujours plus de caresses indésirables.

Soudain, les vents se mirent à souffler dans cette arène sombre. Pouvait-ce être l’équipe de secours ? Tous deux se retournèrent.

Cependant, au lieu de visages tant attendus, ils remarquèrent une créature aviaire traînant par là-bas.

Piaillant comme un jeune poulet, c’était un petit oiseau blanc qui ressemblait fort à un corbeau-mésange coréen complété par une paire d’yeux ronds et brillants ainsi qu’un bec petit et étroit. Son corps était plutôt gros pour un oiseau et se trouvait être aussi massif qu’un chiot et intensément adorable.

« …Qu’est-ce que c’est, ce truc ? »

Tandis que l’Orque essayait de trouver l’origine de l’étrange aura masquée par cette apparence mignonne, soudain, Kim Yu-Rin se leva comme si elle était en transe.

Elle commença alors à marcher lentement et en titubant en direction de l’oisillon XXL.

Ce fut à ce moment précis que l’Orque sentit toutes les cloches d’alarme sonner aux quatre coins de sa tête.

Le flot de ce dangereux mana suintant autour de son bec, c’était un genre d’attaque de souffle…

FFFHHHHEEEECCCKKK !!!

Ce putain d’oisillon mignon cracha d’un seul coup une vapeur de flammes blanches. C’était là la matérialisation des Flammes Blanches, les plus puissantes et les plus infernales flammes qu’on pouvait trouver.

PAAAAAHAAANG !!

Les Flammes Blanches du souffle s’avérèrent posséder une puissance destructrice hors du commun tandis que l’attaque s’étendait en demi-lune. Ce fut le moment où la grotte sombre fut illuminée comme si y brillaient mille soleils.

Raka
Les derniers articles par Raka (tout voir)
MWLU : Chapitre 127
MWLU : Chapitre 129

Related Posts

10 thoughts on “MWLU : Chapitre 128

Répondre à Raka Annuler la réponse

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Social Media Auto Publish Powered By : XYZScripts.com