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Chapitre 129 – Invasion 5/

 

Peu après, Yu Ilhan arriva au Venezuela, dans une ville sous un ciel bleu, qui pullulait de monde ; il pouvait entendre les gazouillements d’une multitude de conversations, toutes plus importantes les unes que les autres pour ceux qui les tenaient. Il pouvait entendre des clients de magasins tentant de négocier les prix, en vain. Il pouvait entendre tout ce qu’il y avait à entendre dans une ville vivante et certainement insouciante.

Il y était venu pendant son millénaire solitaire. Et c’était peut-être ironique, mais il trouvait cette situation encore plus étrange que lorsqu’il n’y avait plus personne.

— Comment… ?

— Oh, mon Dieu, s’exclama Liera. Ce vendeur de fruits, cette ménagère qui lui achète des choses, et même le vendeur de l’autre côté de la rue… Ce sont tous des deuxième classe !

—Ont-ils mené une enquête avant de nous envahir ? s’interrogea Spiera. C’est presque comme s’ils étaient en train de jouer à un jeu de rôle à la taille d’un pays.

Il y avait définitivement des gens qui ne s’étaient pas déguisé sous une peau humaine, au Venezuela. Probablement les touristes habituels. Cependant, ils achetaient joyeusement des pommes à un vendeur de deuxième classe sans la moindre once de suspicion ; ce qui signifiait qu’ils n’avaient rien noté d’inhabituel.

Yu Ilhan trouva d’un seul coup cette scène effrayante. Son imagination venait de se transformer en une moitié de réalité, devant ses yeux. Ils tentaient d’assimiler la Terre !

— Mais la langue… ? bafouilla Liera, confuse. Comment font-ils pour la langue ?

— Des artefacts, expliqua Spiera, les dents serrées. Grâce aux artefacts. Comment est-ce possible… Ils n’ont pas prévu ça depuis un ou deux jours, c’est clair !

Ainsi, une telle chose était sans doute sur le point d’arriver également en Chine… S’il ne pouvait l’empêcher, alors ce qui arriverait… venait de lui faire remonter un frisson de peur panique du coccyx jusqu’aux cervicales.

Le problème se trouvait désormais dans le fait que le Venezuela était entre leurs mains. Il ne pouvait même plus essayer de prédire à quoi point leur plan avait déjà progressé.

Il n’y avait qu’une chose positive : ils avaient commencé par un archipel isolé de l’Atlantique. S’ils avaient dévoré tout le continent sud-Américain avant ça, ils n’auraient eu aucun besoin de se tourner vers ces îles.

Yu Ilhan songea à ce qu’il fallait faire afin de stopper cette invasion. Comment pourrait-il décimer ces enfoirés qui venaient de bouffer un pays entier… ?

Et il réalisa une chose.

— Attends, je peux les différencier ?!

— Parce que leur niveau moyen est plus élevé que celui des touristes ? osa Liera.

— Non, claqua Yu Ilhan en la regardant d’un air bête. Il y a beaucoup de touristes de haut niveau également. Je peux simplement… le faire… Ha ha…

Et comme il tentait d’expliquer la chose à Liera, il comprit.

— C’est parce que j’ai acquis leurs archives après avoir tué des milliers d’entre eux, lâcha-t-il tout bas.

Ç’avait été ainsi également lorsqu’il avait décimé les Dragons. Il en avait tué tellement qu’à un certain point, il savait quel Dragon utilisait quel genre de magie, ou quelle était leur faiblesse personnelle.

Et là, c’était pareil. Comme il avait massacré tant et tant des résidents d’un seul et même monde à la suite, il avait fini par comprendre leurs caractéristiques et pouvait désormais les reconnaître. Comme s’il déterminait le type d’un monstre en l’observant, ou qu’il chassait une proie en la pistant parce qu’il comprenait ses mouvements.

Même s’ils utilisaient un déguisement spécial qui ne pouvait être percé à jour à l’aide de la magie, ils ne pouvaient assurément pas tromper les Archives Akashiques.

— Alors, c’est comme ça, hein…

Yu Ilhan se surprit à sourire, d’un rictus légèrement sadique et satisfait : il n’avait plus besoin de se creuser la tête inutilement. Maintenant que les choses étaient devenues claires, toute l’hésitation précédente, tous les doutes engrangés, tout était devenu sans importance. Il était celui qui allait les supprimer de la surface du globe, de toute façon, alors que lui seul pût les reconnaître était amplement suffisant !

Et dire que dégommer ceux présents sur l’archipel aurait donné de tels résultats… Il y avait déjà pensé à plusieurs reprises par le passé, mais il semblait bien que la chance lui souriait exactement quand il en avait besoin, aux moments les plus appropriés.

De plus, ils l’avaient cherché. À partir de ce moment, ils allaient payer pour leur arrogance et leurs tromperies envers les Terriens.

— Je n’avais même pas réalisé qu’il pourrait être possible de les différencier à l’aide des Archives Akashiques ! s’indigna Spiera.

— Eh bien, nous pensions qu’ils étaient tous les mêmes humains… se dédouana Liera. Et il n’y a pas beaucoup d’opportunités de tuer quelques milliers d’humains en un coup… Oh ! Je ne veux pas dire que tu as mal fait, Ilhan !

— C’est bon, je sais, la rassura-t-il.

Il décida de ne pas se laisser diriger par le concept extrêmement ambigu du bien et du mal. Il se résolut encore une fois à simplement se protéger lui-même, à protéger ses proches, à rester fidèle à son cœur, et de résolument arpenter le chemin vers lequel il se tournait. C’était en partie pour ça qu’il avait pu supporter un millénaire de solitude.

Aussi, même si ce qu’il était sur le point de faire semblait vraiment démoniaque, Yu Ilhan s’en foutait pas mal.

— Kuaaak !

— Kyaak !

— Mais qu’est-ce qu’il se passe, merde ?

— Cour… Kahk !

Lorsque des gens se mirent à crever dans la rue, le marché sombra naturellement dans le chaos. Chacun courait de son côté afin de se protéger dans cette panique, et les touristes étaient encore plus affolés.

— Q… Qu’est-ce qu’il se passe ?!

— Je me souviens de ça ! Susanoo a utilisé quelque chose comme ça !

— Putain, les gens sont tous en train de mourir !

Nombre d’entre eux parvinrent à quitter les lieux en vie, mais personne n’était plus rapide que Yu Ilhan sur Terre. Se déplaçant çà et là sans perdre de temps, il fit pleuvoir la mort sur tous les étrangers à son monde qu’il pouvait trouver.

— Sauvez-moi !

— Kyaak !

Quand plus rien d’autre ne fonctionna, ils tentèrent de se mélanger au groupe de touristes, ce qui s’avéra un doux rêve également. Les lances de Yu Ilhan les trouvaient avec une précision chirurgicale.

Il fallait moins d’un dixième de seconde à une lance en os de Dragon pour apparaître dans les airs, voler jusqu’à sa cible, et la tuer. Si la cible en question n’était pas au minimum une troisième classe déjà bien avancée, il lui était simplement impossible de réagir.

— Merde !

À ce moment, ils réalisèrent que quelque chose clochait. Comme ils avaient été découverts avant de pouvoir passer à l’étape suivante de leur plan, se déguiser était devenu inutile.

— Nettoyez-moi ça !

— Faites un rapport à la hiérarchie !

Comme si cette bataille avait été promise depuis des lustres, tous avaient une arme cachée quelque part sur eux et prêt à être sortie. Et ils les sortirent. Les envahisseurs se mirent à tuer les touristes.

Il se montraient plutôt vicieux. Ils tentaient de supprimer la moindre preuve alors même qu’ils étaient écrasée sous une attaque nourrie. Peut-être s’étaient-ils cachés exprès pour ce faire.

— Bien sûr, je l’avais prédit aussi, nota Yu Ilhan.

— Khaaaak !

— Kahk !

Bien qu’il fût difficile de lire tous les mouvements de tous les gens présents dans la zone, le problème fut résolu lorsqu’il se mit à balancer des projectiles sur tous ceux qu’il voyait. De plus, certains touristes avaient également remarqué quelque chose et tentaient de se diriger vers les résidents.

— Putain, comment est-ce que… !

— Trouvez l’ennemi ! Si une rumeur fuite avant qu’on n’ait fini de travailler, ce sera fini !

Tous les survivants se déplaçaient avec insistance. Certains pour trouver leur ennemi, d’autres pour effectuer des rapports, et d’autres encore pour échapper à cette calamité soudaine.

Et un seul, pour buter ces putains de connards de merde.

— Plus d’un millier de morts en moins d’une minute, calcula Liera.

— On dirait que ce n’est pas qu’un pays qui soit impliqué, grimaça Spiera. À moins de posséder une puissance capable de régner sur leur propre monde, c’est impossible.

— Bougeons.

Il lui fallut deux heures pour nettoyer la capitale. Comme il se déplaçait en éradiquant les envahisseurs d’un endroit, ces derniers ne pouvaient même pas communiquer avec les autres, et se contentaient de faire leur boulot là où ils devaient être. Yu Ilhan leur en était très reconnaissant.

Il balança ses lances, tua, et récupéra les cadavres dans son inventaire avant d’aller voir ailleurs. Comme s’il forgeait son équipement, il répétait maintenant un geste machinal, plus proche de la machine que de l’être humain. Ce massacre calculé et systématique était glaçant.

Même Spiera, qui se préoccupait bien moins de ce que pensait Yu Ilhan que de ce dont il était capable, commença à se sentir quelque peu gênée. Cependant, le principal concerné n’exposa pas le moindre intérêt pour cet état d’âme soudain.

Pendant ce temps, les survivants, ceux de la Terre, tentaient d’envoyer des choses à l’aide de leurs téléphones portables tout en échappant à la tragédie provoquée par Yu Ilhan. Malheureusement, internet était hors d’état d’usage au Venezuela.

— Merde, ça ne fonctionne pas ! C’est une nouvelle extraordinaire concernant Susanoo, qui massacre des gens !

— Putain ! Il faut prévenir… !

Vraiment, s’ils pouvaient faire ça, ils auraient mieux fait d’aller se planquer à la place. Ces gens étaeient vraiment des cas désespérés. Les observant, Spiera hocha la tête.

— Je savais qu’internet était un truc corrompu, dit-elle.

— Haha, bien fait pour eux, rajouta Liera.

— Hé, les interrompit Yu Ilhan, il vous arrive quelque chose, à vous les Anges ? Je ne vais pas me moquer, promis ?

Elles décidèrent de ne pas oser un mot de plus. Yu Ilhan n’avait pas le temps d’insister et continua son nettoyage de printemps à grande échelle.

— Kuaaaaak !

— Toi ! Terrien ! C’était toi !

Qu’il s’agît de monstres ou d’humains, ils ne laissaient pas souvent de pensées derrière eux. Mais comme Yu Ilhan en avait tués tellement, il avait fini par en collecter plutôt pas mal.

Et puisqu’il prévoyait de décimer tous les étrangers sur Terre, il s’en fichait un peu ; cela dit, après n’avoir toujours pas été capable de les déraciner totalement malgré la purge de plusieurs grandes villes, il s’arrêta quelques instants.

— Je devrais interroger quelques personnes, maintenant, décida-t-il.

Il se trouvait actuellement à Bolivar, la plus grande ville du pays. Il avait exterminé quasiment tous les envahisseurs dans toutes les villes qu’il avait traversées jusqu’alors.

S’il ne pouvait pas trouver l’endroit par lequel ils étaient arrivés au Venezuela depuis leur monde, il allait devoir se rendre en Guyane, au Brésil, en Colombie peut-être. Mais vraiment, il ne souhaitait pas imaginer une telle situation : non seulement cela voudrait-il dire que les dégâts étaient déjà étendus à ce point, mais la possibilité que nombre d’entre pussent survivre deviendrait trop importante.

Aussi, il lui fallait désormais connaître l’endroit exact.

— Les interroger ? s’étonna Liera. Comment ?

— Est-ce le pouvoir d’un Dieu de la Mort ? musa Spiera. Je ne pense pas que tu sois un Dieu de la Mort contrôlant et dominant les âmes, par contre ?

Oh, alors il y avait de tels Dieux, également ? Huhu. Bref. Il fallait dire qu’un Dieu de la Mort violent, qui consumait la force de vie pour en faire une flamme, était rare. Bien qu’il eût appris l’Enchantement d’Âme de Reta Kar’Iha, ce n’était que ça.

— Alors tu ne sais pas encore… conclut-il. Les compétences ne sont que la cristallisation des possibilités humaines.

— Bien sûr que nous le savons, s’offusqua légèrement Liera. Même si j’ai l’air d’avoir vécu plusieurs vies et… #$%

Elle se couvrit la bouche en se rendant compte de ce qu’elle disait sur son propre compte. Cependant, comme Yu Ilhan faisait mine de n’avoir rien entendu et se contentait de rire en son cœur et en silence, Spiera ricana.

— Plusieurs vies ? Tu es gentille… Des dizaines, oui…

— N… Non ! Je ne suis pas SI VIEILLE !

Ne se préoccupant pas de la super mini-guerre entre les Anges, Yu Ilhan s’affaira de son côté.

— Nous n’avons rien à te dire ! lui répondirent des voix, de concert.

— Nous ne sommes qu’une infime partie ! ajouta une autre. Le grand plan a déjà débuté et quelqu’un comme toi sera incapable de lui nuire !

Il se fichait un peu de ce que racontaient les pensées qu’il avait collectées. Yu Ilhan seul se serait pas capable de leur faire grand-chose, de toute façon. Aussi, il sortit sa lance du Dragon à huit queues.

— Orochi !

— Kroooaaaaaaaar !

— C’est l’heure du repas. D’abord, bouffe-les tous, et garde vingt d’entre eux en vie.

— Krrrrrrrraaaaaaaaaar !

L’interrogation des âmes venait officiellement de démarrer.

— Ne penses-tu pas que tu devrais plutôt appeler ça prédation des âmes ? tenta Liera. C’est profond, quand même… Les pensées ont leur propre monde…

Certaines d’entre elles étaient plus tenaces que d’autres. Elles furent naturellement toutes dévorées par Orochi, et se rendant compte de ce qu’il se passait, les pensées survivantes, sous le choc, décidèrent de laisser échapper un fragment de vérité.

— Alors vous venez de Ferata, résuma Yu Ilhan.

— Ouiiiiiii !

Cette information acquise, il jeta un coup d’œil vers les Anges. Toutes deux acquiescèrent. Elles devaient être en train de songer aux Anges travaillant avec ce monde, Fetata. Bien sûr, comme elles n’étaient en contact avec personne à ce moment, les punitions viendraient plus tard.

— Cela a été prévu par le grand Empire Ferata Ma Kadra depuis que les Terriens sont venus dans notre monde. C’est devenu possible après que l’Armée de la Lumière Brillance nous eût contactés.

— Oui, oui, c’est la vérité !

Plus elles parlaient, plus elles révélaient.

— Alors, reprit Yu Ilhan, vous faisiez attention car nous ne pouviez ouvrir qu’une porte à la fois, et vous vous êtes concentrés sur le Venezuela et les îles limitrophes parce que vous deviez établir une base solide avant que les gens occupés par les Mondes Abandonnés fussent aptes à se tourner vers vous.

— C… C’est exactement ça ! confirma une pensée. Cela ne fait que trois jours que le plan a débuté sur Terre. Nous n’avons sécurisé aucun territoire au-delà du Venezuela… ! Si les chevaliers de deuxième classe s’installent avec succès, alors les soldats de première classe afflueraient et prendraient la peau des autres pays ! C’est le plan !

Comme s’il demandait la météo à Alexa, Yu Ilhan se mit à rire et confirma une dernière fois.

— Donc, où le donjon se trouve-t-il ? demanda-t-il.

— Il ne sera découvert par personne, tout en étant à la fois placé dans un endroit idéal pour nous permettre d’attaquer le Venezuela et les îles proches… C’est un donjon situé dans les profondeurs de l’Atlantique.

Regardant Spiera avec intensité, Yu Ilhan se mit à pouffer.

— Tu vois, ma prédiction ?

— …Cet humain commence vraiment à me taper sur les nerfs…

Yu Ilhan investit deux heures de plus afin de décimer tous les Feratéens qu’ils pût trouver au Venezuela. Puis, il se tourna vers les pays voisins et ne put découvrir aucune trace de leurs gens.

Bien qu’il se déplaçât le plus rapidement possible, ce pays était fini, à l’exception de quelques endroits reculés et vraiment isolés. Yu Ilhan ne pouvait les sauver, et devait prévenir le pire des scénarios.

Bien qu’il ignorât quels moyens de communications les Fatatéens utilisaient pour contacter leur monde natal, cela faisait déjà plusieurs heures que le massacre avait pris place, et les renforts pouvaient très certainement arriver.

Rien ne bien ne pourrait arriver s’ils savaient que Yu Ilhan les avait massacrés tous, jusqu’au dernier. Il lui fallait bouger, et immédiatement.

Ce qu’il avait fait n’était que le commencement, il le réalisait.

Il allait être temps de s’attaquer à leur base.

Raka
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