Chapitre 56
Je m’appelle Binÿe et j’étais une fière membre de la tribu de la forêt d’Ellin. Mes ancêtres nous avaient toujours dit que nous avions été expulsés d’Elfenheim deux millénaires plus tôt, bannis vers notre monde actuel ; c’était une vieille histoire qui s’était déroulée longtemps avant ma naissance.
Pendant de nombreuses années, mon peuple avait tenté de trouver le chemin du retour, en vain. Finalement, trois ans auparavant, un indice était apparu et concernait évidemment l’Arbre du Monde. C’était la chance idéale, qui pourrait nous permettre de rentrer chez nous. L’ensemble des tribus elfiques s’unirent sous une même bannière et avancèrent vers ce qu’on appelait la Fosse. Nous étions même accompagnés par l’Ancien Dragon vert et ses quatre enfants, qui étaient les protecteurs de notre peuple depuis des lustres déjà.
Mon rôle dans tout ça ? Simplement prendre soin des personnes âgées et des plus faibles. Même au sein des standards des Elfes, j’étais relativement jeune.
Personne parmi nous n’avait une seule fois considéré la possibilité d’une défaite. Seul l’ambassadeur ayant visité la Fosse pour confirmer les rumeurs avait levé la voix contre cette idée, et personne ne l’avait écouté.
Malheureusement, le résultat de la bataille fut plutôt horrible. Parmi ceux d’entre nous ayant participé, peu parvinrent à en réchapper. La plupart mourut aux mains de la puissante Liche et redevinrent poussière. Seuls ceux ayant réussi à perdre la vie par d’autres moyens purent avoir le privilège de revenir à la vie sous l’attention du Dragon. Ils parvinrent alors à s’échapper, tout ça pour finir en esclavage aux mains des humains.
Bien que nous ayons tenté de sauver nos semblables en nous alliant à nouveau, ce fut un échec total. Au lieu de ça, une chasse à l’Elfe de grande envergure prit place et une expédition visant à tous nous réduire en esclavage fut lancée.
Les humains étaient des êtres cruels à tirer parti de mon peuple en des temps si durs pour nous.
Eux, qui avaient construit leur gloire et une civilisation extraordinaire grâce à notre tutorat, s’était maintenant retournés contre nous. Ils attaquaient nos villages et capturaient nos frères et sœurs, que nous résistions ou non.
Et la raison en était simple…
« Vous êtes un ramassis de pourritures, vous avez osé attaquer Necropolis. »
C’était une logique simple amenée par le marché sur lequel flottaient de nombreux et merveilleux nouveaux produits que Necropolis avait rendus disponibles. De la nourriture révolutionnaire, des armes améliorées, des bijoux, et tant d’autres choses. Tout était de la meilleure qualité et les prix restaient compétitifs, leur permettant de facilement contrôler le marché continental. Chasser et capturer les Elfes afin d’obtenir la moindre chance de commercer avec Necropolis était devenue une cause lucrative et justifiée.
D’un jour à l’autre, mes anciens amis humains étaient devenus hostiles et il était réellement trop tard pour les membres de ma race. À l’exception de quelques Hauts-Elfes reclus, la plupart avaient été capturés. Même nos plus formidables guerriers ne furent pas aptes à opposer une vraie résistance, exténués suite à la guerre récente.
Je ne fis pas exception, bien entendu – même si j’avais au début réussi à m’échapper – et me fis attraper après un an de cavale. Menottes, verrous, et au trou.
Un jour, un garde vint jusqu’à l’endroit où je devais être vendue comme esclave et proclama :
« Nous avons un ordre royal de conscription de tous les esclaves Elfes. »
Il n’y avait que peu de différence entre la valeur de nos vies et celles de criminels coupables. Nous étions traités comme des animaux et notre avenir était incertain. Je ne pouvais pas reprocher tous ceux qui préférèrent le suicide à cette vie misérable, même si je parvenais moi-même à rester quelque peu positive dans tout ça.
J’avais même partagé mon optimisme avec l’un de mes collègues dans l’esclavage, ce à quoi il avait immédiatement répondu :
« C’est parce que tu n’es qu’une petite fille qui ne sait rien du monde. L’espoir que tu portes est le privilège des ignorants. »
J’étais devenue furieuse d’entendre ça, mais il avait probablement raison.
« Vous êtes tous désormais esclaves de Necropolis, préparez-vous à bouger. »
La déclaration soudaine était faite par un des officiels du royaume et nous fûmes rapidement répartis entre plusieurs transports. Ils nous avaient parqués comme du bétail et nombre d’entre nous ne survécurent même pas au voyage. Pourtant, leur mort ne faisait que peu de différence en considération de la quantité d’Elfes qu’il restait. Un nombre sans fin de charrettes d’esclaves, aussi loin que les yeux pouvaient voir… Je me demandais s’il s’agissait là de tout ce qu’il restait de mon peuple.
« Vous avez entendu les rumeurs ? Il y a des monstres à Necropolis. »
« J’ai entendu qu’il se nourrissaient d’Elfes ! »
« Pourquoi est-ce que notre leader a voulu combattre le Roi de la Fosse ? Même le Dragon n’a rien pu faire ! »
Des complaintes pouvaient être entendues çà et là. Cependant, contrairement à eux, je possédais toujours un semblant d’espoir. J’avais vu les merveilleux produits créés à Necropolis pendant ma cavale. J’imaginais qu’une cité qui pouvait donner naissance à de telles merveilles ne pouvais pas être si barbare qu’on le disait.
Je nourrissais toujours l’espoir que Necropolis serait un havre de paix, bastion d’artisans qui pouvaient produire des objets et même de faire pousser de la nourriture meilleure que tout ce que nous pouvions faire nous-mêmes.
Nous arrivâmes en vue de la ville en plein milieu de la nuit.
« Nous allons continuer à pieds, à partir d’ici. »
* Jelgluk *
Les esclaves furent descendus des charrettes un après l’autre et mis sous entraves afin qu’ils ne puissent pas tenter des trucs loufoques. En levant la tête, je ne pouvais pas en croire mes yeux.
Un village Elfe possédait toujours une certaine beauté naturelle. Les villes humaines étaient désorganisées et sales en comparaison, malgré le sentiment de « chez-soi » qu’elles pouvaient dégager.
Cependant, la cité que j’avais face à moi était une chose que je n’avais jamais vue. Un arbre de pierre poussant du sol et s’éclipsant dans le firmament nocturne, brillant et scintillant, se mêlant aux millions d’étoiles dans le ciel. Toutes ces pierres se mêlaient à la perfection pour créer une pièce maîtresse, un chef d’œuvre de nature et d’architecture.
Je n’étais pas la seule sous le choc et l’émerveillement. Notre convoi tout entier était figé dans une perplexité notable, prêt à pleurer devant la beauté de ce qu’il nous était donné de voir.
« Vite ! Bougez ! Je ne veux pas manquer les jeux, aujourd’hui ! »
Nous étions tous cois, le regard fixé sur cette cité magnifique et nous avancions donc très lentement. Les gardes qui devaient gérer tout ça n’étaient pas très heureux et nous nous faisons souvent remettre au pas.
Même si c’était douloureux, nos esprits restaient concentrés sur la majestueuse création de pierre. Pas un seul d’entre nous ne pouvait imaginer que ceux qui avaient construit cet endroit étaient assez barbares pour se nourrir de notre chair.
« Imaginez un peu si nous pouvions vivre dans cette ville… »
Malgré l’affinité des Elfes avec la nature, il était impossible de ne pas admire la cité. Elle était faite de pierre et sans doute créée par ces saloperies de Nains dégueulasses, mais nous n’en étions pas moins captivés.
« Si la ville est si belle, je crois que je pourrais bien y vivre même en tant qu’esclave… »
Nombre d’entre nous avaient passé les quelques dernières années chassés et en fuite. Un destin pire que celui d’un esclave et c’est pour cette raison que nous l’acceptions avec une aisance étonnante.
Après quelques temps, nous arrivâmes à ce qui semblait être le palais royal.
Il était grandiose au-delà des mots, ses tours étaient si hautes qu’elles semblaient percer les cieux.
Le pont-levis nous vit nous faire escorter dans la cour principale où nous attendîmes, arrivant encore par milliers. Finalement, le dernier d’entre nous nous rejoignit et nous étions serrés les uns contre les autres dans une immense cour.
Elle était faite de pierres rares et un grand observatoire – une tour – pouvait être aperçu au bout de l’un des jardins du palais. Le sommet était décoré de gemmes somptueuses et irradiait d’une aura malsaine et de mauvais augure.
Les Elfes étaient des créatures sensibles capables de prédire un danger à l’aide de leur sixième sens. Pour cette raison, tous les Elfes dans la cour avaient le regard braqué sur cette tour, et ils l’observaient comme si elle était leur ennemi mortel.
« Vous pensez qu’ils nous ont amenés ici juste pour nous massacrer ? »
« Putains de démons ! Pourquoi nous avoir fait ça ! »
« Si vous vouliez nous voir morts, pourquoi nous avoir épargnés, nous, les guerriers ?! »
Un ramdam s’éleva parmi les Elfes. Ils étaient dans une situation qui avait même vu leur ennemi défaire leur précieux Dragon protecteur, et ils étaient totalement impuissant face à lui de ce simple fait.
« Silence. »
Un voix féminine, calme mais détonante, résonna à travers la cour comme un écho sombre et imposant. Le silence tomba comme une chape de plomb et la majorité des Elfes se vit même incapable de respirer.
« Vous êtes tous les membres d’une race stupide qui a choisi d’agir contre mon mari. Si cela ne tenait qu’à moi, vous seriez déjà tous réunis en un tas de cendres, mais il est un Roi empli de compassion et il vous a permis de vivre en tant qu’esclaves. »
De tels mots insultants leur donnaient tous les droits d’être en colère, mais étrangement, ils les emplirent d’espoir et d’ambition.
« Mais si un seul d’entre vous tente de nous trahir et de se rebeller, je lui offrirai une mort qui lui fera souhaiter d’avoir plutôt été torturé pendant un millénaire. Et ce, peu importe la compassion de mon bien-aimé… Attends, arrête ça, Johra ! Eh, non ! »
Elle laissa échapper un rire tonitruant.
« Ha ha ha ha ! »
Nous étions tous si nerveux que nous ne pûmes que choisir de rire de concert, sans même nous en rendre compte. La situation fut d’un seul coup des plus étranges.
« Assez ! Voulez-vous tous mourir ? Non ! Johraaaaa ! Arrête ou je te, ha ha… te mords ! »
Apparemment, la voix appartenait à une personne qui se faisait embêter par le Roi Johra. C’était clairement une querelle d’amoureux qui pouvait rendre la moindre femme envieuse, après tout, elle était mariée au dirigeant absolu d’un tel endroit…
« Hmm, bien, j’aime ce silence. Quoi qu’il en soit, vous devriez remercier mon mari, qui a sauvé votre vie de la cruauté des nobles humains. Cela dit, je ne veux pas de bouches inutiles à nourrir, vous devrez gagnez votre pitance en travaillant. Utilisez votre travail ici pour vous repentir pour votre tentative ridicule d’invasion, et soyez heureux que mon mari vous permet de vivre dans cette vi… Non, Johra, non ! Hiiiing… Vous pouvez rejoindre vos quartiers, maintenant. Alpeon, guide-les. Johra, non ! Ne me fais pas ça quand je prends ma voix la plus sérieuse ! HHHiinnggg… »
La dernière phrase était décidément charmante et affectueuse. Ils devaient vraiment s’aimer l’un l’autre pour se parler ainsi. Nous avions à peine appris ce que serait notre futur en tant qu’esclaves, et personne ne se trouva capable de s’élever contre ses paroles.
Évidemment, la voix était celle d’un Dragon, nous autres Elfes pouvions facilement reconnaître leur voix. Et il aurait été incroyablement stupide pour n’importe lequel d’entre nous de vouloir contredire un Dragon.
Nous nous montrâmes donc d’accord avec ses proclamations. La raison pour laquelle nous étions devenus des esclaves était claire : nous avions tenté d’envahir l’endroit où vivait un Dragon et nous pouvions alors tous bien en comprendre les retombées.
« C’est un monstre ! »
« Arrêtez de geindre inutilement et avancez vers vos quartiers. Le nombre qui vous a été assigné vous permettra de trouver vos habitations. »
Une créature dorée brillante possédant un torse humain et le bas d’un termite nous guida tout en nous parlant.
Nous arrivâmes bientôt face à un grand bâtiment de pierre, déçus par son apparence simple et rugueuse, tristes d’apprendre que ce serait notre nouvelle demeure. Cependant, une fois à l’intérieur, je fus la première des plus surprises en voyant les lieux. Chaque espace personnel contenait deux pièces séparées et s’en trouvait plutôt spacieux. Il y avait même un lit plutôt bien fabriqué et un bureau sur lequel se trouvaient des feuilles blanches.
C’était clairement un endroit dans lequel un noble aurait pu vivre…
« C’est… vraiment ma chambre ? »
« De dehors, nous ne pouvions pas le voir mais c’est vraiment très bien agencé à l’intérieur. Regardez ce bois, on dirait qu’il vit ! Ce meuble a dû être fabriqué par quelqu’un qui connait très bien les arbres ! »
Nous étions proches de la nature et pouvions apprécier le travail effectué par un quelconque artisan de génie.
« Mais qu’est-ce qu’il se passe, ici ? »
Une petite fille du nom de Pirin, qui allait partager la chambre avec moi, avait levé la voix. Malgré son apparence juvénile, elle était brillante et mature ; les Elfes ne vieillissaient pas vite et même une enfant pouvait avoir déjà une certaine expérience de la vie.
« Je pense que Necropolis nous teste. »
C’était la première chose qui m’était passée par la tête.
« Un test ? »
« Oui, un test, afin de voir si nous sommes dignes de rejoindre Necropolis… ou pas. »
« Pourquoi se donneraient-ils tout ce mal ? »
Pirin était clairement confuse par mes paroles.
« Necropolis est une ville pour tous, pour toutes les créatures non-humaines, toutes celles qui se sont fait persécuter par les humains, et ça s’applique clairement à notre cas, désormais. »
« Mais ne sommes-nous pas des esclaves ? »
« Je… Je pense que c’est uniquement une punition pour avoir attaqué Necropolis par le passé, et que ça n’a rien à voir avec le fait que nous pourrions vivre ici. »
« Mais quel choix avions-nous, à l’époque ? Retourner dans notre terre natale a toujours été notre plus grand but. »
« C’est uniquement notre point de vue. Si on se met à leur place, nous sommes uniquement des envahisseurs. »
« Devrions-nous seulement parle de tout ça à voix haute ? »
Je continuai à discuter avec Pirin toute la nuit durant, d’une voix basse et sourde, mais nous ne pûmes en venir à une conclusion logique. Le seul point sur lequel nous étions tombées d’accord, c’était que nous en savions trop peu sur ce qui avait poussé notre peuple à tenter d’envahir Necropolis par la force.
Bientôt profondément endormies, le confort du lit que nous n’avions pas connu depuis tant d’années ne nous fut pas accordé pour très longtemps.
* Toc toc toc *
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Merci pour le chapitre ET JOYEUX ANNIVERSAIRE À XIAOWAZ.FR DÉJÀ 3 ANS du premier poste
Merci pour le chapitre Raka !!
3 ans ? Combien de posts alors ? et combien de lues ? Ce serait chouette d’avoir une petite news avec des petites stats pour notre site préféré 😀
2 588 articles et plus de 35 000 commentaires depuis le tout début. Par contre, le nombre de lus, je ne sais pas.
Combien de dons et quel somme total et les somme maximaux verser en une fois ?
ARGENT !!!
Je compte ça tout de suite
Merci pour le chapitre et pour dms Raka au poulet
Hmmmmmm pouleeeeeeeet….
A les commantaire ont déjà été comptè
Le poste avec le plus de vus en avait 16 sur les page où g comptais et ct un TDG le deuxième execo sont un TDG ET UN BTTH avec 14 commentaires
Les vues d’un simple chapitre s’élèvent à plusieurs milliers en une journée.
Tu vas avoir du mal à trouver un article avec 16 vues…
Ct des commentaires et ct sur l’une des premières publication
Alors fais un tour sur les chapitres 1 ou les annonces de nouveaux LN, tu verras 😉
Rectification le premier est un TDG avec 58 COMME TAIS !
« j’ai compte sur les ~20 pages du fond »
Merci pour ce chapitre
C’est bien de changer de point de vue de temps en temps.
ta raison je commençais a m ennuyé du point de vue de johra
Merci pour le chapitre
Merci pour ce chapitre et bon anniversaire au site !!!!
Merci pour le chapitre
Super chapitre ! 3ans déjà que je lis ton travail, sa passe vite quand même ! 🙂
3 ans que tu me lis ? Eh bah ! Je suis pas waz, hein hahaha
« Tros cool je serais un bon petit jul…. esclave » ^^
Merci pour ce chapitre et félicitation pour les 3 ans.
Merci pour le chapitre
Merci pour le chapitre
Merci pour le chapitre !
les elfes : »comment osez vous vous défendre quand on essaye de vous tuer en vous trahissant après que vous nous ayez offert l’hospitalité, bande de monstres ! »