Chapitre 92 – Le pire donjon du monde ? (2)
— Mademoiselle ? Veuillez décliner votre identité.
Nous étions sur le point d’entrer dans la ville entourant le château de Camelot, en passant par une grande porte qui trouait la muraille d’enceinte. Ils laissaient aller et venir les aventuriers à leur guise mais ils m’avaient arrêtée, moi.
Tous deux regardèrent Friderik d’un œil suspicieux. Après tout, il s’agissait d’un monstre qu’ils n’avaient sans doute jamais vu : un slime en forme de loup. Mais son comportement calme et serein les marqua également. Il m’accompagnait au pas et se contentait de regarder autour de lui d’un air pacifiste, curieux et… heureux.
— Je suis un Paladin, je viens de Roram. Voici mon familier.
Ils jetèrent encore un coup d’œil à Friderik, cherchant à le jauger avec certitude. Ils se sentirent obligés de demander encore quelques précisions le concernant.
— Un Paladin qui possède un familier ?
Celui qui parlait fronça légèrement les sourcils. Ce type n’était pas un PNJ, c’était un garde de la ville, un habitant local. Il ne voulait pas qu’il arrive malheur à Camelot et prenait donc toutes les précautions. Effectivement, un Paladin n’était pas une classe capable de posséder un familier… Mais puisqu’il ne faisait pas partie du système, je doutais fort qu’il en connaisse toutes les subtilités. Même les architectes à qui j’avais demandé des informations ne connaissaient pas tout, et même Joc, qui en faisait pourtant partie depuis belle lurette, n’était pas omniscient. Alors de simple gardes humains ?
— J’ai appris une compétence à usage unique. Le système, vous savez. Renseignez-vous, ce slime était le boss d’un donjon aux alentours de Roram, précisai-je alors, de nombreux explorateurs étaient présents lorsque j’en suis sorti avec lui.
Le deuxième garde se frappa le front, comme s’il venait de réaliser quelque chose d’important.
— Oh ! Roram, bien sûr ! C’est dans ce village-ci qu’il y avait ce donjon imprenable ! Un cousin est venu me rendre visite la semaine dernière et m’en a parlé. Les explorateurs locaux avaient un mal fou à tenter de le terminer et butaient sur ce boss étrange. C’est bon, Marth, tu peux la laisser passer. Elle dit vrai.
— Oh, vraiment ? répondit-il, si c’est ainsi alors c’est bon. Mais faites attention à ne pas semer de trouble à Camelot, mademoiselle. Les choses pourraient rapidement dégénérer en votre défaveur si vous tentez de violer la loi ou de semer le grabuge. Haha, bonne journée à vous !
Sur ces mots, les deux gardes s’écartèrent et nous laissèrent passer. Friderik avait gardé un calme olympien tout du long, le faisant réellement passer pour un familier docile. Il garda cependant le silence après notre passage par la porte de la ville, conscient qu’il ne pouvait pas être question de faire un faux pas maintenant. Pas à Camelot.
Friderik n’avait pas vraiment de but. Tout ce qu’il voulait, c’était pouvoir continuer à se battre et dévorer de l’équipement afin de gagner des statistiques ; tout ça parce qu’il voulait m’être utile.
La ville était animée. Beaucoup plus grande et peuplée que Roram, elle était également composée d’une plus grande variété de personnes. On n’y voyait pas que des paysans, il y avait aussi pas mal de gens habillés de façon plus riche, plus noble et accompagnés parfois de gardes personnels tandis qu’ils entraient et sortaient des boutiques avec pignon sur rue.
Je me promenai un peu au hasard des rues, me perdant entre les maisons et les commerces, observant les gens et les gardes vivre leur vie en cette soirée déjà bien sombre, illuminée de la clarté des torches qui servaient de lampadaires.
— Incroyable, réalisai-je, je suis vraiment à Camelot…
La ville possédait réellement un style d’architecture médiévale occidentale, et plus particulièrement… Oui, Anglaise. Certains signes ne trompaient pas. Pas une ancienne étudiante en architecture telle que moi, en tout cas.
Peu à peu, la nuit fut totalement là. L’obscurité avait quelque peu fait cesser l’activité dans les rues et même si quelques marginaux ne dormaient toujours pas, la plupart étaient désormais bien cloîtrés chez eux. Les lumières vacillantes que je voyais au travers des volets clos me semblaient étrangement attirantes, comme une bonne soupe chaude au coin du feu en hiver.
Je secouai la tête. Ce n’était pas le moment de me sentir nostalgique. J’étais à Camelot pour plusieurs raisons ; l’une d’entre elle étant la construction de mon donjon, ce qui était chose faite.
Mis à part le donjon, je tenais à découvrir la vérité au sujet de Lancelot et de la clique du Roi Arthur. Il était un autochtone, Lancelot ne l’était pas. Ce problème me travaillait alors qu’il ne me concernait pas le moins du monde mais la curiosité d’une femme était tout aussi légendaire et implacable que ma malchance innée.
— Si j’ai sans doute tué la déesse de la chance dans une autre vie, j’ai sûrement été celle de la curiosité !
Sans trop savoir pourquoi je m’étais exprimée à voix haute, je haussai les épaules. Soudain, j’entendis des bruits de pas derrière moi. Tournant légèrement la tête, je me rendis compte que je m’étais aventurée dans une ruelle malfamée – ou qui en avait tout l’air – et que plusieurs autres bruits de pas s’ajoutaient au premier.
— Des criminels qui veulent me détrousser dans une ruelle ? Je pensais que Camelot était une ville sûre ?
Exprimant une légère moue, je jetai un regard à Friderik. Il n’était pas plus inquiet que moi et se contenta de hocher la tête avant de se retourner.
— Friderik, leur équipement est pour toi. Allez !
Friderik le loup gris et transparent exhiba un rictus sadique, impatient de tester ce nouveau corps qu’était désormais le sien. Il se jeta immédiatement en avant en direction des pas qui résonnaient dans la ruelle annexe.
Mais aussitôt arrivé au croisement, il s’immobilisa et hésita l’espace d’une seconde. Il n’était pas idiot : s’il n’avait pas attaqué immédiatement, il devait y avoir quelque chose.
— Friderik, reviens, fais attention… murmurai-je juste assez fort pour qu’il puisse me comprendre.
Il fit quelques pas en arrière dans ma direction et son expression se fit plus neutre, comme s’il ne ressentait plus vraiment le moindre danger.
Le groupe qui arriva dans la ruelle ou nous nous trouvions était en réalité composé de cinq gardes armés et équipés d’armures scintillantes. Ce n’était pas le même statut que ceux que j’avais vus à l’entrée, c’était sûr !
Ils s’approchèrent au pas, dans une formation serrée et celui qui semblait être leur chef m’adressa directement la parole.
— C’est une bonne nuit pour se promener, exploratrice.
Il me salua poliment mais jetais des coups d’œil curieux à Friderik, sans arrêt. Je savais bien qu’ils ne m’avaient pas croisée là par hasard. Ils m’avaient suivie pour une raison particulière. Alors je n’attendis pas qu’il y aille par quatre chemins.
— Pourquoi m’avoir suivie jusqu’ici, …chevalier ?
Il hésita un moment et hocha la tête.
— Chevalier en effet. Je suis capitaine dans la garde de la ville et pour répondre à votre question, j’ai été envoyé vous trouver afin de vous inviter dans un endroit… particulier.
Là, il m’avait prise au dépourvu. Clairement, oui.
— Je… ? Un endroit particulier ? Qui vous envoie ? répliquai-je en bafouillant légèrement.
Était-ce le roi ? Je ne pouvais croire qu’un capitaine en armure scintillante pouvait être envoyé par quiconque à l’exception du roi Arthur. Instinctivement, je fis un pas en avant cela dit, sans doute rassurée par l’atmosphère pacifiste qu’il dégageait.
Il m’adressa un sourire énigmatique mais me répondit tout de même, la lumière orange d’une torche se reflétant dans ses yeux.
— Une personne importante, exploratrice. Une personne importante. Non, ce n’est pas le roi qui m’envoie, je lis dans votre regard ce que vous vous dites… Celui qui m’envoie se fait appeler Seigneur Ombre et il désire vous voir immédiatement.
— Immédiatement ? m’étonnai-je, mais comment sait-il que… Et que me veut-il ?
Le garde secoua la tête lentement comme pour me dire que je posais trop de questions.
— Je sais que vous n’avez pas trouvé d’endroit où dormir, n’est-ce pas ? À cette heure tardive, vous ne trouverez plus d’auberge ouverte et prête à vous recevoir. Alors… laissez-vous inviter. C’est un simple conseil amical.
— Un conseil amical, hein ? répliquai-je avec agressivité, je sais ce que ça veut dire quand on dit ça.
J’aurais aimé lui rétorquer plus que ça et lui faire comprendre ce qui était arrivé à tous ceux qui avaient menacé Qian Wuying par le passé – y compris Joc possédé par le système – mais je ne pouvais pas risquer d’offenser un type comme lui, un garde sans doute capable de maîtriser facilement les fauteurs de trouble d’une zone d’une étoile ; je ne pouvais pas prendre le risque de me faire tuer.
— …Où se trouve ce Seigneur Ombre exactement ? Qui est-il ? Je… Je vais venir avec vous alors vous pouvez bien me le dire.
J’écartai les bras.
— Où voudriez-vous que je m’enfuie ? lui lançai-je d’un ton évident.
Il secoua la tête encore une fois, résigné cette fois.
— Bien. Il y a une chose que vous n’avez pas comprise, exploratrice. Je suis venu vous inviter, pas vous forcer la main. Mon conseil amical l’était réellement. Mais puisque vous avez d’ores et déjà accepté, alors je vous parlerai de lui en chemin.
Il était venu en toute amitié ? Ce n’était pas ce que me disait son accoutrement, son arme et les quatre ou cinq types derrière lui. Mais après tout, peut-être disait-il vrai ? Je m’approchai de lui, rapidement suivi par Friderik, toujours aux aguets mais n’en laissant rien paraître.
Il m’escorta dans la nuit et à travers un labyrinthe de ruelles et de virages, de croisements et d’escaliers – j’étais certaine qu’il voulait simplement me perdre avant d’arriver à destination – nous finîmes par arriver face à une vieille et grande porte de bois, presque celle d’une grange. De l’autre côté, je pouvais entendre des rires et des chants et l’odeur de l’alcool en imprégnait le bois comme s’il en avait trop vu depuis si longtemps.
Sans attendre, le garde poussa la porte et la lumière, les chants et les rires, l’odeur d’alcool et… celui du sang… Hein ? Je me retournai inconsciemment vers le garde.
— Pourquoi cette odeur de sang ? lui demandai-je aussitôt.
Il m’adressa un sourire mais n’en dit pas plus, m’invitant simplement à le suivre d’un signe de la main avant de franchir la porte entrouverte.
— Hm…
L’espace d’une seconde, je caressai l’idée de faire demi-tour et de me sauver. Cet endroit était étrange au possible et je ne pouvais pas me permettre de me mettre en danger. Je jetai un coup d’œil à Friderik, qui me murmura tout bas, d’une voix que moi seule put entendre.
— C’est bon. Ce n’est pas une odeur de sang humain.
Ses nouvelles capacités de loup lui permettaient donc de faire la différence ? C’était extraordinaire. Cela dit, je lui fis totalement confiance et franchis moi aussi le pas de la porte.
*
De l’autre côté m’attendait un grand homme, vêtu d’une robe à capuchon totalement noire. Il arborait, dans l’ombre de sa capuche, une barbe naissante et grisonnante et me fixait d’yeux que je ne pouvais pas distinguer. Par-dessus tout, il souriait aimablement, comme s’il ne me voulait pas le moindre mal.
— Bonjour, Wuying.
Ce fut ses premiers mots.
— Bienvenue dans l’antre de l’Ombre.
Ses deuxièmes mots me parurent bien moins aimables dans leur forme. Je déglutis et me demandai si tout compte fait, j’avais bien fait de passer cette porte. Je regardai Friderik d’un air un peu hésitant, mais l’homme en noir ne me laissa pas le temps de parler.
— Je suis le Seigneur Ombre, et voici mon domaine, où tu es la bienvenue. Toi et moi, nous allons faire de grandes affaires ensemble, je le sens !
Perplexe, je serrai la main qu’il me tendait, ne sachant que faire d’autre.
Au bout de quelques secondes, il reprit la parole en souriant à nouveau.
— Tu te poses des questions, n’est-ce pas ? fit-il calmement. Eh bien, je vais y répondre. Non, ce garde ne travaille pas pour le roi. Quoi que. Si. En réalité, il fait partie de l’armée du roi Arthur. Mais je le paie grassement et on peut dire qu’il est à mon service, haha… C’est un peu comme une garde personnelle, il fait en sorte que rien n’arrive à cet endroit, grâce à son statut de capitaine de la garde.
— Quoi ? Un garde du… hésitai-je en secouant la tête pour mieux réaliser.
— Ce que nous faisons ici est légèrement hors de la portée du roi. C’est illégal, pour ainsi dire, haha. Mais nous aimons vivre dangereusement, n’est-ce pas ?
— Illégal ? rétorquai-je en levant un sourcil.
Il disait des choses de plus en plus étranges.
— Et d’abord, comment connaissez-vous mon…
— Nom ? me coupa-t-il. Hah. Je sais beaucoup de choses, Wuying. D’où tu viens, ce que tu fais. Ton niveau. Tu viens de Roram, n’est-ce pas ? Tu es la seule à avoir terminé ce donjon et tu as même apprivoisé ce slime surpuissant.
— Je…
Pendant un instant, j’avais eu peur qu’il ne me dise que j’étais une architecte… Mais il s’avérait qu’il en savait moins qu’il se l’imaginait, tout compte fait. Pourtant, en savoir autant sur moi relevait d’un réseau d’informateurs exceptionnellement efficace vu la distance impliquée.
— J’ai pris note de ton arrivée dans la ville. Ce ne pouvait être que toi, en effet… Maintenant, laisse-moi en venir au fait. Que dirais-tu de te faire un paquet d’or ?
— De l’or ? Mais comm…
— Fais combattre ton familier dans l’arène clandestine. Il y combattra d’autres monstres, tous amenés là par un moyen ou un autre par d’autres explorateurs. Tu verras, je ferai en sorte qu’il nous rapporte tout l’or du monde !
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Merci pour le chapitre
Pas terrible le rebondissements actuel
Bah, si ça te plaît pas lis autre chose hein…
Ou écris-le toi-même xD
Merci pour le chapitre
Merci pour le chapitre
C’est trop peu 2 chaps par semaine
Merci pour ce chapitre
Merci pour le chapitre
Merci pour ce chapitre 🙂 !
Bon ben prochain chapitre, combat dans une arène du style Pokemon ^^. Friderik var pouvoir augmenter son niveau comme ça :p.
Sois pas si pressé.
Oh je ne le suis absolument pas ^^ ! De toute façon, le prochain chapitre sortira demain alors on aura pas trop de temps pour attendre ^^. Je disais ça vu comment le chapitre se termine. Enfin, tu me diras qu’ils ne sont pas obligé de le faire directement mais bon, ne sait-on jamais :p ???
Merci pour le chapitre !
Merci pour le chapitre