MoL : Chapitre 93
MoL : Chapitre 95

Chapitre 94 — Spectres

 

Le lendemain, Zorian et Kirielle firent leurs adieux à Rea et sa famille et se rendirent chez Imaya. Une fois là, ils découvrirent que celle-ci ne s’était que peu inquiétée pour eux è elle avait deviné qu’ils avaient dû trouver un abri pour la nuit à cause de la sévérité de la tempête.

Il rencontra également Kael et Kana officiellement. Le Morlock se montra un peu plus méfiant que dans ses souvenirs, mais il supposa que c’était normal. Il les accueillait habituellement à la gare et les charmaient avec des gestes – et une conversation – maîtrisés dès le départ… et il n’en avait rien fait cette fois. Les circonstances différaient, et sa réaction également.

C’était un souci très mineur, cela dit. Zorian savait que Kael allait s’ouvrir à lui, tôt ou tard. Au pire, qu’il se montre si distant pour l’instant était une bonne chose. Un peu comme l’interaction avec Ilsa au tout début de cette itéra —

Il se figea soudain, se frappant la tête une paire de fois, violemment. Non. Non ! Pas d’itération ! Il n’y avait plus de boucle temporelle ! C’était le truc réel, là ! Il devait se le rentrer dans le crâne une bonne fois pour toutes.

Son comportement étrange lui valut d’étranges regards de la part d’Imaya, qui lui demanda si tout allait bien.

Une fois Kirielle installé et qu’il avait clarifié certaines choses avec Imaya, Zorian laissa là un simulacre chargé de protéger les lieux, et s’en alla trouver Zach. Il finit par tomber sur lui, assis sur le rebord de la fontaine de l’Académie, faisant nonchalamment courir sa main dans l’eau, perdu dans ses pensées.

— C’est étrange, lui dit-il quand il approcha. La fontaine n’a pas fonctionné, pendant des années, et ce n’est que récemment qu’elle a été réparée et repeinte. Mais pour moi, elle a l’air parfaitement normale. En fait, je crois que je ne me souviens même pas de son apparence avant ce mois-ci.

— C’est logique, fit Zorian en haussant les épaules. Tu l’as vue ainsi pendant des dizaines d’années.

Même Zorian avait du mal à s’en souvenir, et il n’était resté dans la boucle bien moins longtemps que Zach. Il possédait la capacité de conserver des souvenirs importants dans des paquets mémoriels pour un temps infini, mais cela ne fonctionnait que pour des choses qu’il choisissait avec soin. Tous les autres souvenirs se dégradaient lentement avec le temps, comme pour toute autre personne.

Zach ne répondit pas. Il se leva et fit signe à Zorian de le suivre.

— J’ai un peu faim, dit-il. Allons à la cafétéria pour voir ce qu’ils ont à offrir. Je crois que je n’y ai pas mis les pieds depuis… En fait, j’ai oublié de quoi avait l’air la bouffe, là-bas.

— Moi de même, admit Zorian. Pourtant, on a arrêté d’y aller pour une raison. La nourriture de la cafétéria n’a rien de spécial, je te l’assure. Qu’est-ce qu’il se passe, Zach ?

— Je ne sais pas. C’est juste un truc qui me trotte dans la tête, depuis quelques temps, répondit Zach et haussant les épaules. Dis, tu as déjà trouvé ce que tu allais faire après ce mois ?

Zorian hésita.

— Il y a tellement de choses incertaines concernant ce mois qu’il est un peu idiot de planifier des choses plus éloignées pour l’instant, dit-il avec précaution. Même si nous survivons tous les deux et que la ville ne finit pas totalement dévastée, l’invasion pourrait nous laisser en fuite, ou déclencher d’autres Guerres de Fractionnement. Si l’on ignore tout ça, par contre, je pense que je me contenterai d’amasser un peu d’argent…

Zach le regarda d’un air entendu.

— Bon, ok, beaucoup d’argent, admit Zorian. Et puis j’ouvrira un centre de recherche pour étudier la nature du mana. Peut-être que je trouverai un moyen de dupliquer la structure stabilisatrice que Quatach-Ichl et toi possédez autour de votre âme. Ou peut-être serai-je capable de découvrir comment conserver du mana en-dehors de conteneurs, assimiler le mana plus efficacement, rapidement, ou quelque autre révolution majeure. C’était un peu mon rêve, quand j’étais gamin. Inventer un truc qui changerait la face du monde et sa façon dont la magie est utilisée. J’ai fini par abandonner ce rêve dans la case utopies fantaisistes, que je n’avais aucune chance de réaliser… mais peut-être devrais-je l’en ressortir maintenant.

— C’est toujours très difficile, nota Zach. Si un mage talentueux avec beaucoup d’argent pouvait, seul, révolutionner le monde de la magie, ça arriverait plus souvent que ça.

— Pas d’importance, décida Zorian. Si j’échoue, c’est ok. Je n’ai aucun intérêt à vivre sur un paquet d’argent, ou à me lancer dans des manœuvres politiques, alors que ferais-je d’autre de ma fortune et de mon temps ?

— Ne jamais dire jamais, lui lança Zach avec un sourire plein de dents. Une fois marié, tu pourrais bien découvrir que ta femme n’est pas aussi détachée des fortunes matérielles que toi.

— Tu n’es même pas marié toi-même, pouffa Zorian, clairement amusé. Comment pourrais-tu savoir quelque chose à ce sujet ? Ne parle pas comme un vieux con !

— Mais je suis un vieux con, protesta Zach. D’une certaine façon, je suppose. Quoi qu’il en soit, j’espère que tu réalises que ce genre de trucs est exactement ce pourquoi la boucle temporelle aurait été parfaite, hein ?

— Oui, mais je n’avais pas le temps de me concentrer sur ce genre de projet accessoire et hautement théorique. Plutôt amusant, mais vrai. La vie peut être controversée, parfois, répondit Zorian en haussant les épaules. Bien sûr, avant de pouvoir me lancer dans de tels monstres de projets, je dois d’abord rembourser toutes les personnes à qui je dois tant. Et le faire sans attirer l’attention ou révéler mon identité va s’avérer… compliqué.

— Peux-tu seulement le faire, au point où nous en sommes ? demanda Zach. Nous avons perdu la plupart des notes et autres calepins, quand tu as été obligé de quitter ton corps.

— J’ai gardé le plus important dans ma tête, et le reste peut être reconstruit avec quelque effort. Peut-être que ça prendra des années, mais je suis sûr de pouvoir le faire.

Il se montrait délibérément optimiste, plus que ce qu’il ressentait. Tant de choses avaient été perdues… Zorian souffrait rien qu’à y penser. Il avait utilisé des paquets mémoriels pour préserver les informations les plus importantes, juste au cas où… mais c’était juste une petite partie de la totalité. Il ne pouvait pas intégrer dans ses souvenirs l’énorme quantité de connaissances que le groupe avait réussi à obtenir à la toute fin.

Reconstruire cette immense librairie et en distribuer les différentes parties aux personnes concernées sans créer une émeute qui lui reviendrait dans la face allait s’avérer difficile.

— Ça veut dire que tu as déjà redonné ses notes à Kael ? demanda Zach, curieux.

— Non, pas encore, infirma Zorian en secouant la tête.

Il possédait en réalité une version plutôt complète des notes de Kael. Il avait toujours mis la priorité sur ses recherches, principalement parce qu’ils étaient de vieux amis, et il n’avait donc pas besoin d’en reconstruire la majeure partie.

— La situation est très bizarre, maintenant. Je ne veux pas l’impliquer dans ce bordel si je n’y suis pas obligé, et je ne peux pas lui les donner et le laisser vaquer à ses occupations, victime de son destin.

— Est-ce que tu veux lui parler de la boucle ?

— Idéalement, j’aimerais garder tout le monde à l’écart de ça, sauf peut-être Xvim, Alanic et les Aranea de Cyoria, affirma Zorian. Je ne suis pas certain que ce soit possible, par contre. Nous avons déjà prévu de faire évacuer tout le monde, et nous allons devoir leur fournir une bonne explication pour ça. Au minimum, informer Daimen de certaines choses pourrait s’avérer nécessaire pour obtenir sa coopération.

— Daimen serait en effet utile, tant par son talent que par ses relations, confirma Zach. En parlant de Koth, comment se passent les négociations avec les Adeptes ?

— Plutôt bien, jugea Zorian. Nous n’avons pas encore atteint le point du marché scellé, mais c’est normal. Je ne pense pas que nous devions leur dire quoi que ce soit à propos du voyage temporel. Les clés pour les Portes Bakora sont largement suffisantes. Nous devrions avoir notre ticket pour Koth d’ici quelques jours, au maximum.

— Parfait. Je me sentirai déjà bien mieux une fois Princesse à mes côtés, expliqua Zach. Avec son aide, même Quatach-Ichl ne peut pas nous soumettre de force. Je mettrais ma main au feu que Robe Rouge tente de négocier une alliance avec lui, et qu’il essaye de le faire aussi vite que possible.

— C’est probable.

— Je n’aime vraiment pas ça, continua Zach. Toi, au moins, tu es en contact avec tes simulacres, mais je n’ai même pas ce luxe. Je n’ai aucune idée de ce qui se passe jusqu’à ce qu’un simulacre m’envoie un rapport, et je ne peux qu’attendre. Je me sens inutile et stupide.

— Les simulacres se débrouillent bien, le rassura Zorian. Je suis plus inquiet quant au fait que nous ne puissions pas trouver de preuves solides sur les buts de Robe Rouge, mais côtoyer nos simulacres n’aurait pas aidé, de toute façon.

— Tu as raison, mais j’en ai sacrément marre d’attendre, se plaignit Zach. Ce n’est juste pas mon style, tu le sais, non ? Une fois la main sur l’orbe impérial et Princesse de notre côté, on sera capables de vraiment passer à l’offensive. Je me ficherai pas mal de ce que prépare Robe Rouge, à ce moment. On ira le trouver, et on le fracassera en bonne et due forme. Si on démolit la base ibasienne sous Cyoria et qu’on ferme leur portail, l’invasion est terminée. On verra s’il ose toujours se cacher derrière ses simulacres quand ça arrivera.

— Hé ! Zorian ! Hé, par ici !

Ils étaient à peine entrés dans la cafétéria qu’une vois familière résonna. C’était Benisek – le joyeux garçon rondouillet et obsédé par les filles que Zorian fréquentait, longtemps auparavant. Malheureusement, la boucle temporelle ne s’était pas montrée tendre avec leur amitié. Benisek pouvait être vraiment ennuyeux et étriqué, et tant d’années n’avaient fait que rendre cette réalité plus évidente pour Zorian. Il avait, au bout d’un moment, complètement arrêté de le côtoyer.

Il se sentait un peu mal à ce propos. Benisek avait ses défauts, mais l’ancien Zorian aussi. Il ne pouvait pas vraiment ignorer l’appel de son camarade sans avoir l’air d’un parfait connard, et il s’approcha à contrecœur. Zach lui emboîta le pas, s’invitant à la réunion.

— Salut, Ben, entama Zorian tout en attrapant une chaise à proximité pour s’asseoir à ses côtés, copié par Zach, tout sourire. Tu as l’air heureux. Pressé de démarrer une nouvelle année scolaire ?

— Je veux, mon n’veu ! s’exclama l’autre en souriant d’une oreille à l’autre. Nous sommes des aînés, maintenant ! Nos possibilités de dragues viennent d’entrer dans une toute nouvelle dimension !

— Oh, putain que oui ! lui renvoya Zach, le poing en l’air. Pour l’amour des filles !

— Pour l’amour des filles ! le suivit Benisek, levant lui aussi les deux poings serrés vers le plafond.

— Pour l’amour de dieu… les mima Zorian, tentant d’ignorer les regards posés sur eux. Nous sommes dans un lieu public.

— Et ? lui lança Benisek. Alors, vous deux, vous traînez ensemble, maintenant ? Depuis quand ?

— Depuis quelques jours, lui répondit Zorian. Ne m’en parle pas. C’est une longue série de malentendus, un poing dans la gueule à la gare, ma petite sœur attaquant Zach en retour…

— C’est super intéressant, trancha son vieux camarade. Tu ne peux pas me dire un truc pareil et me laisser comme ça, mec.

Il fronça légèrement les sourcils et envoya à Zorian un regard un peu étrange.

— Attends… Tu me dis que tu as emmené ton ennuyeuse petite sœur à Cyoria ?

— Ouaip, confirma Zorian en hochant la tête plus que nécessaire.

— Aïe, grimaça Benisek. Mes condoléances. Tu vois, je t’avais dit qu’être trop sérieux et responsable allait finir par te retomber dessus… Ma famille n’imaginerait même pas une seconde me laisser emmener mes petites sœurs ! Tu devrais être un peu plus comme moi, Zorian !

— L’idée elle-même m’horrifie.

— Bah, tu ne sais pas ce qui est bon pour toi, se mit à rire Benisek, avant de regarder Zach. Bien que… Si tu continues à fréquenter notre cher ami Zach, ça pourrait changer rapidement. J’ai entendu que ta vie récente a été un peu… excitante.

— Oh, oui. Totalement explosive, confirma Zach.

— Alors… L’attaque dont j’ai entendu parler… ?

— C’est vrai, fit Zach en haussant les épaules. Mais je n’y étais pas. J’étais de sortie, cette nuit-là, à danser et picoler, et j’ai manqué la fête.

— Ha ha ! Voilà la meilleure façon d’esquiver la mort ! explosa de rire Benisek en s’avançant pour lui mettre un petit coup sur l’épaule, que Zach bloqua, provoquant la chute de la bonne humeur de son agresseur, d’un coup bien plus solennel. Mais mec, je dois dire, c’est une semaine sacrément extravagante. D’abord, l’attaque sur la maison Noveda, et maintenant ce truc avec les villages en Holakor… Il se passe quoi, avec ce monde ? J’espère vraiment, vraiment que ce n’est pas un prélude à la guerre, tu sais ? C’est un peu égoïste, mais je veux que mes jours à l’Académie restent paisibles et amusants.

Zach et Zorian échangèrent un regard confus, légèrement inquiet. Ce n’était pas quelque chose de connu, au sein de la boucle temporelle. Et ça, ça puait.

— Que veux-tu dire, les villages en Holakor ? lui renvoya Zorian aussitôt. Nous ne savons rien de ça.

— Non ? Ah ? s’étonna honnêtement Benisek. Vous deux deviez prêter plus attention aux évènements récents, dans ce cas. Je sais que les journaux d’Eldemar n’ont pas reporté grand-chose à ce sujet, mais vous devriez garder les yeux sur les nouvelles continentales. Toi, tu es l’héritier d’une Maison Noble, et toi… Bon, tu es Zorian. Je sais que tu n’aimes pas entendre parler de ton frère, mais…

— Dis-moi, soupira Zorian.

— Bon. Mais tu vas devoir me divertir plus tard, avec l’histoire dont tu as parlé tout à l’heure, le fit chanter Benisek.

— Marché conclu, accepta immédiatement Zorian, qui inventerait un truc sensé, l’heure venue.

— Très bien. Je n’oublierai pas. Quoi qu’il en soit, le bruit court qu’un certain nombre de villages en Holakor, le gros pays voisin à l’ouest d’Eldemar, tu sais ? On dit qu’ils ont été frappés par une espèce d’attaque récemment. Une attaque étrange et brutale. Les rumeurs parlent d’un bain de sang, avec des centaines de victimes.

L’humeur de Zorian s’effondra immédiatement.

Il était certain d’avoir désormais un indice sur les activités de Robe Rouge.

 

___

 

Plus tard dans la journée, Zorian retourna chez Imaya, ses pensées toujours fixées sur ce que Benisek lui avait appris. Avec Zach, ils dépêchèrent immédiatement une paire de simulacres à Holakor pour enquêter sur la situation, mais il leur faudrait un moment avant de pouvoir rejoindre les villages en question. Pendant ce temps, ils ne pouvaient que chercher à deviner ce que Robe Rouge fabriquait.

Il n’eut pas beaucoup de temps à consacrer à ces réflexions, en revanche. Il fut interrompu par Taiven, qui vint le voir afin de le recruter.

Zorian ne voulait pas lui parler de la boucle temporelle. Comme Kael et un certain nombre des autres membres de leur groupe de marqués, elle ne pouvait pas l’aider, et lui parle de l’invasion ne ferait que l’exposer au danger. Enfin, un danger plus grand que celui qu’elle courait déjà.

Parfois, il se demandait s’il ne serait pas plus simple de juste dire à tout le monde ce qui s’était passé. La boucle temporelle, tout ça. Et puis laisser le gouvernement central se débrouiller avec toute cette misère. Mais lorsqu’ils avaient discuté de cette possibilité avec tous les autres marqués, dans la boucle temporelle, ils avaient tous unanimement admis que c’était une solution très malheureuse à ce problème. Le gouvernement était corrompu et avide de pouvoir, le roi actuel favorisant une position agressive envers toute menace interne. Une fois les que les forces d’Eldemar auraient écrasé la menace, Robe Rouge, le culte, et les Ibasiens, ils se seraient tournés vers eux.

Et tous ceux qui savaient pour la boucle temporelle et l’invasion souffriraient avec eux.

Appeler les militaires serait plus ou moins une victoire garantie… pour Cyoria et ses citoyens. Cependant, ils auraient également fini par payer le prix de leurs bonnes actions. Ce n’était pas un choix qu’ils désiraient faire. Ils n’étaient pas des anges philanthropes, après tout. Aussi, il fut décidé de leur fournir un rapport qu’une fois que la piste ne pourrait plus être remontée jusqu’à eux. C’était une sécurité qui prendrait du temps à être mise en place, mais ne prendrait pas le mois complet. C’était la seule raison pour laquelle Zorian acceptait que Robe Rouge gagnât du temps. À moins qu’il les aveuglât avec un mouvement secret, Zach et Zorian étaient assurés de gagner.

Bien sûr, si les plans de Robe Rouge les aveuglaient vraiment, ils préfèreraient alors se démasquer et tout révéler au grand jour plutôt que de permettre à la ville de succomber et voir un ancien monstre aux pouvoirs divins relâché dans la nature. C’était pourquoi il était important de garder la plupart des gens dans l’ignorance pour l’heure. Si l’armée devait soudain encercler la ville et poser des questions, moins ils en savaient, mieux ils se porteraient.

Pourtant, il ne pouvait pas simplement refuser l’offre de Taiven et l’envoyer mourir dans les tunnels. Et il la laissa donc entendre une partie de ses secrets.

— Quoi ? se plaignit-elle. Pourquoi me regardes-tu comme ça ? J’ai quelque chose entre les dents ?

Elle fit courir sa main sur son visage, et sa langue sur ses dents de devant. Elle tourna même la tête pour vérifier qu’elle était bien la cible de ce regard étrange. Zorian ne savait pas si elle feignait la surprise à ce point, ou si elle croyait honnêtement que quelqu’un pût avoir surgi dans son dos, mais… Il admit qu’il l’avait bel et bien fixée un peu trop longuement.

— Taiven, ce boulot dans lequel tu veux te lancer est une énorme mise en scène, lui dit-il finalement. Tu devrais t’en éloigner, vraiment.

— Huh ? Que veux-tu dire ? demanda-t-elle en plissant les paupières. C’est une simple mission de cherche-et-trouve dans les tunnels sous la ville. Combattre quelques araignées géantes, trouver le truc perdu, sortir. Fin de l’histoire.

— Les araignées géantes sont des Aranea, lui avoua Zorian. Elles sont bel et bien géantes, mais aussi intelligentes, et douées en télépathie. À moins de savoir ce que tu fais et de venir préparée, elles peuvent te faire perdre connaissance avant que tu ne puisses ouvrir la bouche.

Taiven recula d’un pas suite à cette description, ses yeux s’élargissant.

— Merde, jura-t-elle. Cafard, comment tu —

— Et ce mec n’est pas un passant innocent qui a perdu un truc coûteux dans les tunnels, continua Zorian. Il espionne les Aranea et il s’est fait prendre la main dans le sac. Ce qu’il cherche, c’est un outil permettant de briser des barrières magiques, qui est actuellement en sécurité dans le trésor Aranea, pas perdu dans un tunnel sans le faire exprès.

— Cafard, comment sais-tu tout ça ?! s’écria-t-elle, un peu plus féroce cette fois, pour éviter d’être coupée une deuxième fois.

— Huh, s’étonna Zorian. Je suis surpris que tu ne m’accuses pas simplement d’être un menteur.

— C’est trop sérieux, grimaça-t-elle. Je ne pense pas que tu inventerais un truc pareil. Et tu n’es pas vraiment du genre à faire des plaisanteries de ce type. Maintenant, dis-moi.

— Eh bien, je le sais parce que je suis un ami des Aranea, lui dit-il. Elles m’ont appris comment contrôler mes pouvoirs psychiques, après tout.

— Tes… quoi ? balbutia-t-elle lentement. Pouvoir psychiques ? Comme dans télépathie ?

[Parmi d’autre choses, oui,] lui envoya-t-il, directement d’esprit à esprit.

Elle recula encore d’un pas, et le regarda d’un air effrayé. Pendant un moment, Zorian crut qu’elle allait se ruer hors de sa chambre et fut sur le point de tenter de la rassurer. Mais elle ferma les yeux, prit une profonde inspiration, et se força à se calmer.

— Merde, dit-il en se massant les tempes. Tu sais vraiment comment révéler un secret, toi.

— Je devais m’assurer que tu me prennes au sérieux, avoua-t-il.

— Eh bien, mission accomplie, haut la main, fit-elle, un peu mécontente, le regard suspicieux. Tu n’as pas lu dans mes pensées sans permission, hein ? Depuis combien de temps ça dure, d’ailleurs ?

— Jamais je ne l’ai fait, non, lui assura Zorian. J’ai découvert ça seulement récemment.

— Bien. Bien, murmura-t-elle. Bien que je ne sois pas très ravie de te voir garder de tels secrets. Spécialement quelque chose comme ça… si… louche. Je ne savais pas qu’il existait une colonie d’araignées intelligentes sous la ville. Elles ne sont pas là légalement, n’est-ce pas ? Et toi, tu traînes avec elles et tu apprends des trucs de magie mentale, comme si ce n’était rien ? Que me caches-tu d’autre ?

— Tu es juste fâchée de ne pas avoir été invitée dans cette aventure louche ? demanda Zorian, détectant ses inquiétudes.

— Ben oui, putain ! cria-t-elle en balançant son poing vers son épaule.

Il le dévia sans problème, la faisant cligner des yeux à deux reprises. Son mouvement n’avait pas été si exceptionnel, mais il réalisa soudain qu’il n’avait jamais fait ce genre de choses avant la boucle temporelle.

…Oups ?

— Tu sais que j’ai raison, cela dit, dit-elle, ignorant l’incident et la surprise, croisant ses bras devant sa poitrine. C’est sacrément dangereux, ce que tu as fait, et tu aurais au moins dû avoir un garde du corps, là en-bas.

— Toi ? supposa Zorian.

— Et qui d’autre que moi connais-tu, comme incroyable mage de combat ? demanda-t-elle sur un ton rhétorique, se raidissant légèrement en une posture fière.

— Ben… Je fréquente Zach Noveda, ces derniers temps, et il est plutôt doué en magie de combat…

— L’hériter Noveda ? N’est-ce pas l’un de tes camarades de classe ?

— C’est ça.

— Un étudiant de troisième année, et tu le compares avec moi ? S’il te plaît, pouffa-t-elle. Tu me sous-estime bien trop, Zorian. On dirait que je vais devoir te défier correctement un de ces jours, juste pour élargir tes horizons et de laisser développer une nouvelle perspective.

Zorian ne put s’en empêcher. Il se retint de rire à gorge déployée face à elle, mais un large sourire resta gravé sur son visage, et il n’y avait pas moyen de l’en faire disparaître.

— Quoi ? demanda-t-elle. Merde, il y a quoi de si amusant dans ce que j’ai dit ? Tu veux te battre tout de suite ? C’est ça ?

Plus tard, Zorian réalisa qu’Imaya commençait certainement à le voir comme un type bizarre. Très bizarre. D’abord, il y avait eu cet incident, lorsqu’il s’était frappé la tête tout seul, et maintenant, cette fille qui le chassait dans la maison en lui demandant de se comporter en mec.

Zorian ne savait pas comment allait évoluer son amitié avec Taiven dans le futur, considérant le fait qu’il ne pouvait pas masquer l’intégralité de ses compétences pour toujours… mais au moins, sa visite actuelle avait illuminé sa journée.

 

___

 

Robe Rouge avait choisi ses cibles avec précision. Bien que situé à la frontière d’Eldemar et relativement proches de Cyoria, Holakor était plutôt difficile d’accès. Entretenant des relations plutôt inamicales avec Eldemar – situation pas très inhabituelle avec les voisins proches – l’endroit se trouvait être un pays montagneux équipé d’un piètre réseau de transports et de nombreux villages de montagne isolés. Attendre leur destination fut intense en mana, leur demanda de nombreuses téléportations et l’usage d’autres sorts çà et là, et s’orienter était une plaie, par-dessus le marché. La région entière pullulait de soldats à la recherche des coupables et tentant de contrôler les informations et les personnes qui entraient et sortaient du pays. De plus, les cartographes d’Holakor n’avaient apparemment pas effectué un travail très soigné, parce que certains des villages frappés par les attaques n’étaient même pas marqués sur les cartes publiques.

Pourtant, Zach et Zorian étaient pleins de ressources, et leurs simulacres également, par la force des choses. Il leur fallut moins de deux jours pour arriver dans les villages dont Benisek leur avait parlé, afin d’enquêter sur la situation.

Les résultats furent glauques. Benisek avait fait mention de centaines de victimes… et il ne fallut qu’un seul coup d’œil au premier village visité pour réaliser que l’estimation était au minimum sévèrement inférieure à la réalité. Le village était un charnier, un bain de sang. Sur les trois cents habitants, la plupart avaient été massacrés. Seul un jeune couple qui avait fui le village en douce pendant la nuit et un vieux chasseur qui avait passé la nuit dehors avaient survécu à l’hécatombe. Les attaquants n’avaient même pas pris la peine de piller les lieux – l’objectif était visiblement la mise à mort massive et indiscriminée.

Les autres villages avaient plus ou moins subi le même sort. Une attaque soudaine et écrasante, lancée pour tuer autant de personnes que possible. Parler des coupables était compliqué, puisque tous ceux qui pouvaient les avoir vus étaient morts, mais il était clair qu’il s’était agi d’un groupe armé. Un groupe contenant des Trolls de guerre, des monstres variés et nombre de morts-vivants. Un groupe qui semblait capable de se téléporter un peu partout, parce qu’ils avaient frappé plus de dix villages en l’espace d’une seule nuit avant de disparaître totalement.

En additionnant les indices, Zach et Zorian estimèrent que le compte des victimes atteignait les milliers. Les autorités du pays avaient placé toute la zone en quarantaine, craignant une panique de masse si la vraie mesure des massacres devenait publique. Pourtant, ce genre de réaction ne servait qu’à gagner du temps. Zorian était certain qu’ils n’arriveraient pas à cacher la vérité plus d’une semaine.

Au début, ni lui ni Zach ne purent comprendre ces attaques. Qu’essayait-il d’accomplir en détruisant des villages d’Holakor de cette façon ? Était-ce une espèce de sacrifice à grande échelle ? Zorian ne se considérait pas comme un expert en magie du sang, mais il ne le pensait pas. Les meurtres avaient été trop rapides, pas assez ritualisés. Désorganisés.

Au bout du compte, ils se rendirent chez Alanic à la recherche de réponses. Il était l’une des personnes qu’ils avaient décidé d’informer de l’existence de la boucle temporelle et de l’invasion, car il était extrêmement compétent et présentait déjà un énorme danger pour l’envahisseur – ils ne le mettaient pas dans une position encore plus délicate ce faisant. Jusqu’à présent, il n’était toujours pas convaincu qu’ils lui disaient la vérité, mais les informations qu’ils lui avaient apportées étaient relativement parlantes en elles-mêmes. Après tout, les petits calepins que Zorian avait dupliqués depuis les paquets mémoriels les contenant avaient été écrits par Alanic en personne, et listaient toutes sortes de groupes criminels et de caches qu’ils avaient découverts au fil des itérations. Même si Alanic jugeât qu’ils lui mentaient ou avaient un problème dans leur tête en disant être des voyageurs temporels, il tenait un livre écrit de sa main, qui mentionnait des choses qu’il était le seul à savoir, et qui listait des choses dont la légitimité était facile à vérifier.

Alanic jeta un œil aux informations qu’ils avaient compilées à propos des attaques sur les villages, et rejeta l’idée d’une invocation gigantesque de démon ou toute autre forme de magie du sang.

— Les invocations du sang sont étonnamment faciles à réaliser, mais pas si faciles, dit-il. Les victimes doivent être menées vers un point central. Leurs forces vitales doivent être mélangées avec soin et rassemblées en un cercle magique massif. Les préparations sont simples, mais longues, et quelqu’un les aurait remarqués et arrêtés. Les autorités d’Holakor n’auraient pas loupé un truc pareil, et vous auriez vu les preuves qu’ils auraient manquées.

— Alors, on parle de quoi ? demanda Zach, soudain frustré. Pourquoi ont-ils tué tous ces gens ? Ce n’est pas une simple soif de sang, j’en suis certain. Ça a été réalisé avec la coopération complète de Quatach-Ichl et ses sbires. Il n’y a pas moyen qu’il puisse accepter un mouvement pareil s’il n’en tire pas un quelconque bénéfice.

Alanic regarda encore les papiers en silence, tournant les pages en fronçant les sourcils. Près d’une minute plus tard, Zach et Zorian attendant patiemment sa réponse, il leva les yeux.

— J’ai presque envie de dire que ça ressemble à une opération massive de fauchage d’âmes, leur dit-il. Sauf que… rassembler des âmes n’est pas si simple non plus. Afin de les récolter par milliers, les attaquants doivent avoir accès à des milliers de conteneurs. Même s’ils pouvaient en fabriquer autant, la logistique brute qu’implique leur déplacement en pleine nuit dans les montagnes… Puis le temps nécessaire pour lancer les sorts en question… Capturer chaque âme avant qu’elle ne parte vers l’au-delà…

Zach et Zorian virent chacun le visage de l’autre blanchir.

— Merde, jura Zach tout bas.

— Quoi ? s’enquit rapidement Alanic, les sourcils toujours bas, clairement dérangé par les informations que ces deux adolescents lui avaient apportées.

— Ils n’ont pas besoin de tout ça parce qu’ils ont le puits des âmes de Sudomir, expliqua Zorian.

— Le puits des âmes ? répéta lentement le prêtre, qui baissa à nouveau les yeux vers ses notes. Est-ce écrit également ?

— Ça l’est, confirma Zorian. Vous n’avez pas encore dû atteindre cette partie.

Alanic feuilleta rapidement le calepin en question jusqu’à arriver à la partie intéressante. Zach et Zorian attendirent qu’il finît de lire, discutant calmement entre eux.

— Bon, finit par lâcher Alanic en fermant le calepin d’un coup sec. Non seulement suis-je maintenant certain qu’il s’agit d’une opération gigantesque de récolte d’âmes… mais je pense que je sais également ce qu’ils vont en faire.

— Oui. Nous aussi, lui annonça Zach d’un air grave. C’est plutôt évident, maintenant.

— Sudomir prépare ses bombes à banshees plus tôt que prévu, conclut Zorian pour eux trois.

 

___

 

 

Malgré les récents développements, Zach et Zorian dédièrent de ne pas manquer le premier jour de classe à l’Académie, pour trois raisons. Premièrement, ils voulaient espionner la maison Iasku afin d’avoir une bonne idée de ce à quoi ils allaient se frotter avant de se lancer dans tout projet périlleux. Deuxièmement, ils allaient avoir accès à Koth sous peu, ce qui allait grandement améliorer leurs capacités, et l’attente était tout à fait raisonnable.

Mais la troisième raison était plus subtile. Ils se montrèrent en cours ce jour-là parce que c’était sans doute la dernière fois qu’ils en auraient l’opportunité pour le reste du mois. Après le premier jour, il était improbable qu’ils eussent le temps de s’intéresser à leur scolarité et de fréquenter l’Académie. Ils pouvaient alors aussi bien profiter de l’occasion pour rencontrer leurs anciens camarades pour un moment, finir de récupérer, et se préparer mentalement pour ce qu’ils avaient à affronter.

— Tu es en retard.

Zorian tourna la tête vers Akoja, qui se tenait face à la porte dans une posture solennelle, la liste des étudiants dans les mains. Elle le regardait d’un air froid, plein de jugement, en tapotant son pied au sol.

Il lui envoya un sourire en réponse, la faisant soudain perdre son sérieux et tourner les yeux, mal à l’aise.

— Désolé, lui dit-il. Les choses sont un peu chaotiques pour moi, ces jours-ci.

— Eh bien… lui dit-elle sérieusement, retrouvant rapidement sa confiance. Ne laisse pas ce genre de choses se reproduire à l’avenir, ok ?

— Je crains que ce ne soit pas possible, répondit Zorian d’un air malheureux, en secouant la tête lentement. Je serai probablement absent ce mois-ci. Beaucoup absent.

— Ce n’est pas une bonne idée de manquer les cours en début d’année ainsi, lui expliqua-t-elle.

— Je ne suis pas d’accord. Le début de l’année est le meilleur moment si on doit être absent, lui rétorqua Zorian. Ce n’est que répétition de choses qu’on a déjà apprises l’année précédente, ainsi que des sujets très simples à étudier. Je rattraperai tout ça en un éclair, tu verras.

— Entre déjà en classe, soupira-t-elle, abandonnant la bataille.

Il leva le pouce dans sa direction en souriant, et fit ce qu’elle demandait, chantonnant tout bas en se choisissant un siège. Zach se trouvait déjà là, Akoja n’ayant pas prêté plus attention que nécessaire à l’héritier Noveda. Zorian salua quelques-uns de ses camarades avec qui il se souvenait avoir été légèrement plus amical avant la boucle temporelle, provoquant quelques réactions çà et là à cause de son comportement inhabituel, et se rendit à l’avant de la salle.

Il choisit un endroit habituel à côté de Briam et son Drake de feu, Zach directement derrière lui.

Et comme il s’y attendait, la petite créature couchée sur les genoux de Briam se mit immédiatement à siffler lorsqu’il approcha. Briam referma rapidement ses mains autour du lézard orangé et se mit à chuchoter doucement afin de le calmer. Le Drake se détendit un peu, mais garda le regard fixe sur Zorian, alerte et nerveux.

Celui-ci ignora le spectacle, se laissant simplement choir sur son siège et observant calmement autour de lui. Il ne comprenait toujours pas ce que le petit Drake trouvait de si alarmant chez lui en particulier. Il avait jadis tenté d’entrer dans l’esprit de l’animal pour trouver la réponse, mais ça n’avait pas aidé. Il n’était pas une créature intelligente. Il fonctionnait à l’instinct, et quelque chose de profondément enfoui en lui l’avertissait que Zorian était dangereux de façon très unique, parmi tous ceux rassemblés dans la salle. Le Drake ne comprenait pas pourquoi, mais faisait confiance à ses instincts.

Sentait-il les pouvoirs mentaux de Zorian, bien que n’étant pas psychique lui-même ? Zorian possédait-il quelque capacité dont il n’était pas conscient ? C’était un mystère. D’après ce que Briam lui avait expliqué, il n’était pas unique à ce regard. Les Drakes de feu pouvaient être très étranges et posséder un tempérament certain, et Zorian n’était pas la première personne à avoir provoqué cette réaction, souvent pour des raisons obscures. Finalement, l’influence du mage avec qui l’animal était lié tendait à adoucir ce comportement agressif, et les Drakes matures apprivoisés étaient apparemment bien plus placides et fiables lorsqu’il s’agissait d’interagir avec un étranger.

— Désolé pour ça, s’excusa Briam. Il est encore un peu mal à l’aise avec les gens qu’il ne connait pas.

— Ne t’en fais pas, le rassura Zorian en agitant la main comme pour s’excuser lui-même. Félicitations pour ton nouveau familier. C’est une sacrée étape pour toi, non ?

— Ouais, s’extasia Brim en caressant le Drake comme un chat apeuré. C’est génial.

Ils passèrent un moment à discuter avant le début des cours. Bien qu’il fût prématuré de s’en inquiéter si tôt, il ne pouvait s’empêcher de se demander comment il allait gérer l’école à l’avenir. Ses camarades de classes étaient gentils, certains d’entre eux des cibles de choix s’il désirait s’en faire des amis… mais il était tellement plus capable qu’eux et ce n’était pas drôle du tout. En plus, les cours eux-mêmes allaient s’avérer intensément rébarbatifs et ennuyeux au possible. Est-ce qu’un scientifique de génie pouvait prétendre être un élève d’école primaire sans se trahir bien vite ? Zorian sentait qu’il était dans la même situation. Pourrait-il prétendre être un élève normal, pendant deux ans ? Était-ce possible, pour quelqu’un comme lui, une personne avec une puissance d’archimage et une décennie d’expérience et d’entraînement intensif en des domaines que la plupart ne verraient jamais, de se lier d’amitié avec ces adolescents ?

Peut-être que Taiven, celle de la boucle temporelle, avait eu raison, et que sa tentative pour se reconnecter à ses anciens amis et camarades était ultimement vide de sens…

Heureusement, ces pensées quelque peu déprimantes furent rapidement interrompues par l’arrivée d’Ilsa. Elle leur offrit un monologue de présentation particulier, spécifique au premier jour de classe, et démarra la leçon. Zorian s’était déjà préparé pour un temps reposant et ennuyant, à ne pas suivre un cours qu’il avait déjà entendu des dizaines de fois. Et il fut surpris quand, soudain, la porte s’ouvrit dans un fracas pour laisser entrer un autre adolescent.

Il était grand, ses cheveux blonds en bataille et ses vêtements passés semblaient tous deux avoir vu des jours meilleurs. La porte avait été ouverte avec tant de force que Zorian le soupçonna de l’avoir enfoncée à l’aide d’un coup de pied plutôt qu’avec la main. Elle rebondit contre le mur dans un énorme bang et se referma dans le même mouvement derrière lui.

Comme il marchait vers l’avant de la salle, il balaya les lieux du regard. Pendant un moment, Zorian croisa celui-ci et se trouva à observer des yeux d’un orange vif, au milieu desquels se trouvaient des pupilles fendues, qui avaient du mal à contenir l’agression et la colère qui en suintaient.

Veyers Boranova venait d’arriver.

Raka
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