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Chapitre 221 – Je viens te chercher, maintenant 5/8

 

— Pourquoi enverrait-elle un signal après trois ans ? râla Liera. Ne sait-elle pas que nous avons progressé, Ilhan et moi ? Pfiou, heureusement que j’ai réglé ce détail avant qu’il n’eût été trop tard.

— Arrête de délirer, tu veux ? lui rétorqua Yu Ilhan.

Il l’ignora plus avant, et se tourna vers Yumir et les 9 300 membres de l’Armée du Dragon.

— Nous allons nous rendre sur un monde appelé Breya, annonça-t-il. Vous pourriez vous battre là-bas, ou simplement vous reposer durant tout notre séjour.

— Le papa du héros est un homme si bon.

— Nous ferons n’importe quoi !

Yu Ilhan se dit que ces enfants étaient trop naïfs. Bien sûr, il était reconnaissant qu’ils fussent prêts à le suivre sagement, mais il allait devoir leur rentrer un peu de logique dans le crâne pour que leurs prochaines décisions eussent l’air plus… réfléchies.

— Mit, dis-leur qu’ils ne doivent pas avoir confiance en autrui si aveuglément.

— Ok, mais ils t’écoutent certainement parce que tu es mon père, tu sais.

— Ce serait bien si ce n’était que ça…

Si possible, il voulait démarrer après les avoir équipés méticuleusement, et désiraient vérifier ce qui était arrivé à leurs parents, aussi…

Mais Na Yuna avait fait parler d’elle après tout ce temps, et ça devait être important. Il n’avait pas le loisir de décider de ses priorités.

Il laissa Liera s’accrocher à lui et continua à s’adresser à l’armée de son fils.

— La compétence va s’activer sous peu. Je vais devoir vous faire quelque chose juste avant, alors ne résistez pas.

— Ouais !

— Ok !

En fait, il avait déjà activé Distorsion, parce qu’il savait que ça prenait un long moment. Comme la puissance de cette compétence était extraordinaire, ce genre de détails n’était pas important.

Grâce à sa compétence Archivage, il possédait un grand nombre d’archives lui servant à se rendre sur Breya. Aussi le seul problème restait les pierres magiques nécessaires pour voyager entre les dimensions…

— Je vais tous vous accepter comme membres de ma Flotte.

— C’est quoi, une Flotte ?

Sans compter la Forteresse Volante qui pouvait traverser les dimensions avec lui car elle était considérée comme une partie de son équipement, il aurait normalement dû consommer une quantité astronomique des pierres pour permettre le transfert de ce nombre de personnes. Seulement, ce n’était plus le cas. Plus depuis qu’il avait acquis la compétence de Commandant de Flotte en même temps que sa sous-classe de Voyageur Dimensionnel. Ainsi, il pouvait bondir de monde en monde avec les membres de sa Flotte sans coût additionnel !

— Ok, je ne sais pas ce que c’est mais on va le faire !

— Ouah !

— Mais comment devons-nous appeler le papa du héros ?

— Le héros est notre héros et maître !

La loyauté des enfants envers Mir tendait vers la foi aveugle. Yu Ilhan ne prévoyait pas de les contrôler de la sorte, dans tous les cas. Yumir était sage et réfléchi, et il serait capable de les diriger sans son interférence. Il avait juste besoin de lui donner des directives, à lui.

Il n’était ni leur héros, ni leur maître.

Mais il était…

— Vous pouvez m’appeler… Capitaine !

— Ah, il a de nouveau perdu les pédales, soupira Liera.

— Ok, capitaine !

Comme il venait d’acquérir la sous-classe, il lui était impossible d’accepter les 9 300 membres de l’armée du Dragon comme membres de son équipage. Cependant, il parvint à en intégrer 5 000, donc plus de la moitié. Ce nombre prouvait à quel point sa nouvelle sous-classe était absurde.

— On dirait que je vais devoir dépenser des pierres magiques pour les 4 300 qui restent…

— Est-ce que ça ira ?

— Ouais, non seulement le coût est très réduit grâce à ma nouvelle classe, mais je possède des tonnes de pierres magiques.

— …

Yu Ilhan laissa Liera observer le contenu de son inventaire. Pendant un moment, elle faillit s’imaginer qu’il existait un autre monde dans cet inventaire, tant de mana était accumulé à l’intérieur !

— C’est quand même pas mal, non ? ricana Yu Ilhan.

— Ou…ais…

En combinant les pierres qu’il avait récoltées durant les trois années passées sur Terre et celles que Yumir lui avait données, on pouvait dire que ce qu’il avait gagné lors de sa célèbre vente aux enchères était insignifiant. Voilà un autre effet du développement complètement stupide de la Terre.

— Bon, ce n’est pas surprenant quand on pense qu’elle a donné naissance à un monstre de sixième classe.

— Je peux voir tes jambes trembler, Ilhan.

Liera n’avait pas vu tant de pierres magiques en un seul endroit, même lorsqu’elle était un Ange. Et si Yu Ilhan se mettait vraiment en tête de déclarer la guerre aux existences supérieures ? Elle commença à prendre peur. Bien sûr, cela ne voulait pas dire qu’elle ferait marche arrière !

— Ouah, le château tremble !

— Regardez ! Dehors, ça devient brumeux !

Distorsion était finalement activée. Yu Ilhan vérifia que tous ceux se trouvant à bord de la Forteresse Volante étaient prêts pour le transfert, et se contenta alors d’un petit cri.

— C’est parti !

— Kyaaaaaak !

— Kugh ! C’est vraiment un pouvoir absurde !

La Forteresse Volante, Liera, Yumir, les 5 000 membres de la Flotte et les 4 300 passagers bondirent tous d’un coup avec lui.

 

***

 

Na Yuna décida de reconnaître qu’elle était désormais acculée.

— J’aurais dû réaliser, lorsque les prêtres ont commencé à me regarder avec des yeux pervers.

Comme elle l’avait prédit, l’empereur de Li Catarana avait immédiatement fait avancer son armée pour envahir Elforce. Il l’avait fait dès lors qu’elle eût rejeté sa proposition. Na Yuna, le Pape et Kang Hajin défendaient les lieux à l’aide de leur propre armée, et Breya était un monde où l’Eglise de Leytna possédait une puissance majoritaire. Il était possible de bloquer l’avancée de l’ennemi.

Néanmoins, depuis un certain temps, la puissance de l’Eglise avait commencé à vaciller. Des rumeurs à propos de la Sainte Vierge, Na Yuna, se mirent à circuler, et la foi pour Leytna perdit son intensité. Ils s’étaient préparés à cette perte de dévotion aussitôt la guerre démarrée, mais c’avait été trop rapide.

Leur foi ébranlée, l’armée était devenue plus faible. Peu après, ils s’étaient fait repousser par l’envahisseur impérial. De nombreuses terres s’étaient vues conquises, et les citoyens qui n’avaient pas pu fuir à temps rencontrèrent de sérieuses difficultés. Na Yuna serrait les dents et commandait toujours son armée, mais le drapeau de la victoire avait déjà changé de camp.

Des traîtres avaient rapidement émergé, certains d’entre eux ayant tenté de prendre Na Yuna en embuscade. Comme elle n’accordait pas facilement sa confiance, elle s’était vue capable de préparer des contremesures, mais sans ça, la guerre aurait pris fin de la pire des façons possible.

Le coup de grâce avait été le quatrième Grand Cataclysme. Le terrain du continent avait changé, et un nombre important de monstres émergé. Li Catriana avait profité de cette résurgence pour ravager des terres en masse, à un point tel que Na Yuna avait réalisé que l’Armée du Démon de la Destruction était derrière tout ça.

Et tout était devenu clair. N’y avait-il pas déjà un passif entre l’Armée de la Lumière Brillante et celle du Démon de la Destruction travaillant ensemble afin de s’approprier Na Yuna ? Il ne s’agissait que d’une vulgaire extension du même plan.

Elle était isolée sur Breya, incapable de rentrer sur Terre. Le contrat entre l’Armée des Cieux et les mondes avait également perdu ses effets, et maintenant que les Terriens pouvaient être blessés par les autochtones, l’Armée du Démon de la Destruction avait passé un pacte avec l’empire.

Ils avaient probablement laissé entendre qu’ils accepteraient tous les désirs de l’empereur… et le jetteraient du haut d’un pont à la première occasion venue. Pour faire simple, l’Empire, Elforce, et même Na Yuna, tout n’était qu’un paquet de cartes dans les mains des vrais ennemis. De quoi soupirer à répétition durant de longues soirées d’hiver.

— Bon sang, les hommes sont tous des pervers. Combien de mondes se font entraîner dans cette histoire, exactement ? Pourquoi Dieu m’a-t-il faite si mignonne ? Merde.

— Yuna. Tu es vraiment arrogante, même maintenant.

L’armée qui croyait encore en la déesse de la beauté, Leytna, s’était retirée dans la région sacrée que Yu Ilhan avait supervisée en y reconstruisant un temple. Et ils ne savaient pas combien de temps ils allaient pouvoir tenir.

Les soldats avaient diminué en nombre. Certains l’avaient trahie. L’ennemi avait amenuisé leur foi, les avait détruits, avait fait resurgir leurs désirs humains. Si Elforce était détruite ainsi, le continent allait vraiment entrer dans une ère de chaos et de destruction.

— Et ils me feront tout un tas de trucs pas cool ! Comme dans ce hentai, ou cet autre hentai !

— Une fille ne devrait pas dire ce genre de choses, lui envoya une vieille femme en la frappant sur le front.

— Hiing, votre Sainteté, mais…

Elle n’était pas n’importe quelle vieille femme. Au-dessus de ses cheveux blancs se trouvait une couronne de pierres sacrées enveloppées d’une lueur rouge. Le symbole de l’autorité suprême, le Pape de l’Eglise de Leytna. Elle avait également été une beauté légendaire dans le passé, et celle qui avait vu le potentiel en Na Yuna, celle qui lui avait accordée sa position à la succession de l’Eglise.

Na Yuna bouda face au Pape toujours calme, même dans cette situation.

— Est-ce que votre Sainteté va bien ? demanda-t-elle quand même.

— Eh bien, j’ai vécu tout ce que je devais vivre. C’est pour toi que je suis inquiète.

La vieille prit un air sombre. Elle se mit à pincer les joues de Na Yuna de ses mains ridées, et s’accorda une toute petite voix.

— Yuna, est-ce que tu penses te sacrifier ?

— …

Elle avait vu juste. Na Yuna tenta de faire passer ça pour une plaisanterie, d’en rire, mais ça n’avait pas prise sur le Pape, qui se mit à la consoler, d’une voix inquiète.

— Bien que les choses que tu vas vivre dans un futur proche vont être très difficiles… Il faut vivre pour pouvoir faire quelque chose. Survis, survis et supporte les épreuves, et peut-être seras-tu capable de revoir la personne que tu aimes, un jour.

— …Votre Sainteté. Je veux vivre ma propre vie~.

Na Yuna répondit après avoir vérifié que personne ne les entendait. Hors de la tente, Kang Hajin et ses gardes du corps étaient stationnés, immobiles, incapables de saisir ce qui se disait à l’intérieur.

— Je ne compte pas me donner à eux, continua-t-elle. Ma vie serait terminée au moment où je le ferais. Même si je retrouve ma liberté après un moment, je ne serais alors plus jamais la même. Et je… déteste ça. Penser à la façon dont je reverrai Ilhan… Plutôt mourir ici et maintenant.

— Yuna…

Si jeune. Elle était si pure, mais si faible en même temps. Cependant, la résolution dans ses yeux était incroyablement profonde, et le Pape réalisa que le pire était en train d’arriver.

— Ne penses-tu pas à la mort un peu trop à la légère ? tenta-t-elle.

— Non. J’ai déjà réfléchi à tout ça. Maintenant que je ressens la puissance divine, je sais que ce n’est pas la fin. Bien que… Bien que je ne sois plus capable de revoir Ilhan si je meurs…

Le nom qui sortait de sa bouche de plus en plus souvent. Rien qu’à entendre les sentiments présents dans sa voix lorsqu’elle le prononçait ne laissait pas de doutes quant à la relation qui les liait.

— Et même en sachant que tu ne le reverras pas, tu…

— Cela dit, je vais quand même buter au moins un de ces putains de porcs en plus, si je le peux !

Elle sentit toute la tension du monde se relâcher et hurla. Et ce faisant, elle réalisa que l’ennemi était arrivé.

Une aura rose caressa son corps. La puissance divine surpuissante et écrasante de la déesse de la beauté, comme si elle était descendue en personne !

La tente s’ouvrit et l’armée qui entourait la région sacrée était visible. L’armée d’Elforce, qui comprenait à peine 10 000 individus, mais tous des élites possédant au moins leur troisième classe.

— Hajin, préparons-nous à nous battre. Allons les massacrer !

— Kugh, je me prépare !

La puissance de Na Yuna emplit la région entière et rendit chaque paladin conscient de tout ce qu’il se passait. Ils étaient peut-être désavantagés, mais la raison pour laquelle ils tenaient bon n’était autre que celle-ci.

— La Sainte Vierge est là ! NOUS ! NE ! PERDRONS PAS ! FACE A CES IMBECILES !!

— UOOOOOOOOH !

À moins que Na Yuna ne stoppât l’émission de ses pouvoirs magiques, les paladins ne battraient jamais en retraite. Ils crièrent tous, emplis de courage, en brandissant lances et boucliers vers l’ennemi, l’Empire qui avait marché jusqu’à cette région.

Le Pape s’écria, témoin de cette scène. Elle avait vécu plus de deux cent ans après avoir obtenu sa quatrième classe, mais les pouvoirs de Na Yune éclipsaient déjà les siens, d’une bonne marge, du haut de sa troisième classe.

Si elle pouvait gagner sa quatrième classe, ou devenir une existence supérieure… ?

Oui. Elle ne pouvait pas se sacrifier dans un endroit pareil. Le Pape sut quelle était sa résolution, désormais.

— Yuna. Fuis.

La vieille s’avança. Elle aussi irradiait les terres du pouvoir de la déesse, et devenait de plus en plus jeune comme si le temps remontait sa course. Elle laissait échapper tout le mana qu’elle avait emmagasiné grâce à une méthode spéciale durant des dizaines d’années.

— Je vais tous les bloquer, alors fuis. Fuis vers un lieu où ils ne pourront pas t’influencer.

— Votre Sainteté ?!

Voyant un visage qu’elle n’avait jamais vu auparavant, Na Yuna se sentit ailleurs, absente. Et son interlocutrice, qui avait déjà retrouvé l’apparence de ses vingt ans, en avait la voix également.

— Je vais leur montrer que ma beauté n’est toujours pas flétrie. Ils vont sans doute se laisser avoir, oui.

La Pape plaça la couronne sur la tête de Na Yuna. Elle représentait l’Eglise elle-même, tout en étant l’artefact le plus puissant que l’institution religieuse possédait. Le transfert de possession tout simple qui venait de prendre place se produisait naturellement, selon ses désirs. La Pape, qui sentit les yeux de Na Yuna s’embuer, s’avança en souriant légèrement.

— Eh bien, qu’attends-tu ? Va, Yuna !

Elle se tourna vers le champ de bataille en silence.

La dernière guerre de l’Eglise de Leytna face à elle.

Raka
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