MoL : Chapitre 3
MoL : Chapitre 5

Chapitre 4 – Les étoiles tombent

 

— J’arrive, j’arrive, maugréa Zorian en avançant vers la porte d’un pas lourd.

Vraiment, qu’avaient-ils tous avec cette façon frénétique de toquer ? Qui exactement était de l’autre côté, si désespéré d’entrer dans la chambre ? Il ouvrit la porte pour se trouver face à face avec le visage d’Akoja parfaitement mécontent.

— Ako ? Qu’est-ce que tu fais là ?

— C’est à moi de te demander ça, rétorqua-t-elle. Pourquoi es-tu toujours chez toi ? Le bal est –

— Dans deux heures, l’interrompit Zorian. Je peux m’y rendre en dix minutes à peine.

— Honnêtement, Zorian, pourquoi es-tu toujours obligé d’attendre le tout dernier moment pour faire quelque chose ? Ne réalises-tu pas le mauvais exemple que tu donnes ?

— Le temps est précieux, répondit simplement Zorian. Et je vais me répéter : que fais-tu là ? Je ne pense pas qu’il soit dans tes habitudes d’aller chercher les gens quand ils ne sont pas assez en avance à ton goût.

— Miss Zileti m’a dit de venir, admit Akoja.

Zorian cilla. Il semblait qu’Ilsa voulait s’assurer qu’il n’ « oublie » pas. Hah. Alors que l’idée lui avait bien traversé l’esprit, il savait qu’il ne pouvait plus fuir.

— Elle a aussi dit que tu n’avais pas pu trouver de partenaire, alors ce sera moi pour la soirée, continua la déléguée sur un ton plus subtil, trouvant soudain le cadre de porte plus intéressant à regarder que les yeux de son interlocuteur.

Zorian fit la moue. Comment est-ce que « refuser d’amener une partenaire » avait-il pu se transformer en « incapable d’amener une partenaire » ? Ilsa, comme sa mère, semblait avoir une fâcheuse tendance à « traduire » ses mots en quoi que ce fut qui lui convenait mieux. Toutes deux s’entendraient sans doute à merveille.

— Quoi qu’il en soit, habille-toi et nous pourrons y aller, reprit Akoja avec un soudain regain de confiance. Tu pourrais très bien te contenter de ces vêtements, mais pas moi.

Zorian la fixa pendant une seconde entière, tentant de décider que faire. Il était à moitié tenté de lui claquer la porte au nez et de refuser de participer à cette farce, mais il supposa qu’Akoja n’y était pour rien si elle avait été embarquée dans cette affaire. Vraisemblablement, elle avait eu des plans plus plaisants pour la soirée qu’accompagner un type qui n’avait pas envie d’y aller. Il la tira rapidement dans la chambre et se rendit dans la salle de bains pour s’y habiller.

Zorian avait vraiment de l’estime pour les talents de manipulation d’Ilsa, par contre – s’il était venu seul à ce fichu truc, il y serait allé habillé comme il l’était, aurait passé le moins de temps possible sur place avant de partir et aurait évité le contact des gens avec un zèle poussé à son paroxysme. Et maintenant ? Il ne voulait pas non plus ruiner la soirée d’Akoja et il allait donc devoir faire un minimum d’efforts. Oui, Ilsa et sa mère iraient aussi bien ensemble que les deux chaussures d’une même paire…

Le chemin vers le bal se fit en silence. Zorian refusa de lancer une conversation, même s’il sentait qu’Akoja trouvait le silence perturbant et pesant. Le silence, il lui convenait parfaitement et il savait qu’il ne serait pas à l’aise avec grand-chose au cours de la soirée. Le temps que ça allait durer, il tenait à profiter de sa paix.

Ce qui ne dura pas longtemps – la salle que l’académie avait préparée pour cet évènement n’était qu’à dix minutes de marche de la résidence. Au moment où ils approchèrent, ils furent accueillis par une large foule devant l’entrée, peuplée d’étudiants excités engagés dans des discussions animées.

Zorian sentit le sang lui quitter le visage face à ce rassemblement de personnes. La migraine menaçait d’arriver à tout moment rien qu’en les regardant.

Malheureusement, peu importe l’intensité de ses suppliques envers Akoja, elle refusa de le laisser attendre en périphérie de la foule jusqu’au début du bal. Pour se venger, Zorian parvint à accidentellement perdre sa partenaire au moment où tout le monde entrait et se fondit dans la foule. Il ricana tout bas, se demandant combien de temps il lui faudrait pour le retrouver et aurait été surpris qu’elle y parvienne en moins de trente minutes, sachant qu’il était très fort à ce petit jeu : éviter d’attirer l’attention d’une personne en particulier tout en se fondant dans la masse.

Pour un supposé simple bal scolaire, l’évènement entier était étonnamment luxueux. Les tables débordaient de nourriture, la majeure partie composée de plats exotiques que Zorian ne pouvait même pas identifier et la pièce était décorée de peintures de haute qualité et de sculptures mouvantes animées d’une façon préprogrammée. Merde, même les nappes étaient brodées de motifs compliqués et si doux au toucher qu’elles avaient probablement été tissées dans des matériaux monstrueusement onéreux. Bon nombre des étudiants étaient ouvertement béats face à leur nouvel environnement et même Zorian, qui avait pourtant l’habitude de ce genre de choses, fut un peu choqué. Il finit par hausser les épaules et fit de son mieux pour se fondre dans la foule afin d’échapper à Akoja.

Il tourna entre les tables en attrapant occasionnellement l’un ou l’autre plat lorsqu’il aperçut quelque chose qui attira son attention alors qu’il était assidûment en train d’observer les gens tout en évitant quiconque pourrait avoir l’ingénieuse idée de vouloir converser avec lui. Il put voir pourquoi Ilsa était si déterminée à atteindre la perfection pour tout ce qui touchait à ce bal – mis à part les coûts exorbitants de tout ce qui le composait. Les étudiants n’étaient pas les seuls présents. Il y avait là des représentants de plusieurs guildes, de maisons, de sociétés et d’organisations. Et pas uniquement de l’Alliance, mais même de l’étranger, d’autres continents. Un homme au moins portait l’uniforme bleu clair distinctif d’Abnasia, une petite délégation de Hsan et une femme à la peau sombre dans une robe si colorée que Zorian doutait que quiconque l’ait loupée à présent. Il erra en se demandant quel était vraiment le but de ce bal, ces personnes n’étant absolument pas venues pour une simple fête scolaire, avant de décider qu’il s’en foutait bien. Les gens comme eux vivaient dans leur propre monde et possédaient d’autres standards de ce qu’important signifiait.

Une heure plus tard, la première danse était sur le point de commencer et Zorian alla à la rencontre d’Akoja. Elle fulminait et n’avait pas l’air de le croire quand il lui annonça qu’il s’était réellement perdu et qu’il n’avait pas réussi à la trouver jusqu’alors. Elle parvint cependant à se retenir de lui coller la baffe de sa vie et il la guida vers la piste de danse sans même répliquer lorsqu’elle lui écrasa les pieds « par accident » à plusieurs reprises.

— Les gens te demandent, finit-elle par dire, fatiguée d’avoir suffisamment pilonné les pauvres orteils de son partenaire.

— Eh bien, je n’étais pas loin, répondit Zorian avec un léger sourire en coin. Ils n’avaient qu’à venir me voir.

— Tu n’as plus de raison de ne pas répondre à leur demande, du coup, maintenant, fit remarquer Akoja.

— Mais Ako, on danse, là. Je ne vais certainement pas abandonner une belle fille comme toi, pour rien au monde. Je t’ai laissé seule trop longtemps, tu sais, dit Zorian de façon éhontée, sans même une trace de moquerie au fond de la voix ; c’était pratiquement une compétence.

Elle le regarda avec insistance mais Zorian put constater qu’elle avait apprécié le compliment.

Malheureusement, ça ne l’empêcha pas de le traîner à la rencontre d’un groupe de personnes, et un autre, et un autre encore. Zorian haïssait se faire montrer comme ça mais il commençait à penser qu’Akoja agissait sous les ordres d’Ilsa et il ne s’en prit pas à elle. Il fut surpris que son errance travaillée ait fonctionné pendant si longtemps, en réalité. Zorian se retrouva donc à mémoriser de nombreux visages, des voix et des noms, des titres et ce malgré le fait qu’il s’en fichait bien. C’était une chose instinctive pour lui et il le faisait même quand il ne le désirait pas – l’héritage d’une famille qui avait tenté de le transformer en animal de fête.

— Kazinski ? Oh, êtes-vous par chance lié à…

— Daimen et Fortov, oui, coupa Zorian en faisant de son mieux pour masquer l’irritation dans sa voix.

— Oh, eh bien, quelle chance, répondit cette femme. Je dois dire que votre frère n’est pas mauvais, un violon entre les mains.

Elle fit des gestes en direction de la scène où le club de musique de l’académie jouait une chanson relativement calme et paisible. Fortov était officiellement un membre ordinaire de l’orchestre mais se trouvait évidemment être le musicien le mieux placé sur scène. Sa présence, comme toujours, attirait attention et commentaires.

— Quel instrument jouez-vous ?

— Aucun, avoua Zorian.

Sa famille avait tenté de lui faire apprendre à jouer un instrument puisqu’il s’agissait d’une chose mondaine prisée des riches et de ceux prétendant l’être, mais fut désespérée par Zorian, toujours décalé d’un demi-ton. Il n’avait aucun talent au niveau musical, et en vérité, il ne s’y intéressait pas du tout, même s’il pouvait faire semblant pour se montrer poli. Ce fut l’une des plus grandes déceptions de sa mère, car Daimen et Fortov étaient tous deux plus que bons en musique – Daimen jouait du piano et Fortov du violon. Ils n’étaient pas des prodiges à proprement parler mais suffisamment doués pour impressionner le genre de personnes qui fréquentait ce type de fête.

— Je n’ai pas l’oreille musicale, reprit-il, contrairement à mes frères. Personnellement, je suis plus intéressé par l’étude du son qui emplit la salle de façon technique afin que tout le monde l’entende au même volume et sans réverbération, peu importe la distance à laquelle ils sont assis.

Par manque de chance, ni la femme ni quiconque autour d’eux ne purent répondre à cette question. Apparemment, personne d’autre que lui ne s’était même occupé de remarquer ce détail. En fait, Zorian avait une notion distincte de ce que les gens trouvaient habituellement important ou non. Bah – ces gens n’aimaient pas particulièrement la magie, pourquoi étaient-ils là, à un bal organisé par une académie de magie, dans ce cas ?

Heureusement, Akoja décida d’avoir pitié de lui à ce moment et le mena vers une table proche afin d’y trouver quelque chose à manger. Quelques autres étudiants de leur classe les rejoignirent et entamèrent une conversation sans intérêt. Zorian n’y contribua pas vraiment, trouvant qu’une discussion sans but n’était d’aucun intérêt. Il se contenta de hocher la tête à plusieurs reprises sans vraiment les écouter et gloussa quand les autres gloussaient bien sûr, balayant tout commentaire lui étant destiné et lui reprochant d’être trop silencieux et lui demandant de s’éveiller un peu.

Il s’apprêtait à mordre dans le morceau de gâteau qu’il s’était choisi lorsqu’Akoja lui envoya un coup de genou dans la jambe. Il lui jeta un regard exprimant une question silencieuse.

— Mauvaise fourchette, murmura-t-elle.

Zorian baissa les yeux sur le couvert qu’il tenait dans la main et réalisa qu’il était supposé utiliser la toute petite fourchette destinée aux desserts. Il haussa les épaules et planta la fourchette géante qu’il avait dans la main dans le gâteau malgré tout.

— Je sais, marmonna-t-il en retour.

Ce qui sembla être la goutte d’eau.

— Zorian, explosa-t-elle, la voix portant une complainte. Pourquoi es-tu si difficile ? C’est juste une nuit ! Je sais que je ne suis pas celle que tu voulais pour cette soirée mais…

— Ce n’est pas ça, l’interrompit Zorian calmement. Ce n’est pas comme si je voulais une partenaire, pour commencer. Je comptais venir seul.

Elle le regarda, l’air choqué. Visiblement brisée émotionnellement, et Zorian ne pouvait comprendre pourquoi.

— T… Tu préférais y aller seul plutôt qu’…qu’avec m…moi ? bégaya-t-elle.

Ow, merde.

Tout ce temps, il avait imaginé qu’elle gardait un œil sur lui et qu’elle le collait pour cette raison, mais… Et si elle avait vraiment voulu venir avec lui ? C’était…

Elle prit la fuite avant qu’il ne put trouver quoi que ce fut à dire.

Il jura tout bas et enfouit son visage dans ses mains. Voilà pourquoi il avait horreur de ce genre d’évènement.

 

___

 

Une heure plus tard, il était à peu près certain qu’Akoja n’était plus au bal et qu’elle ne reviendrait pas. Il ne désirait pas spécialement lui courir après au milieu de la nuit, alors il réprima l’envie de sortir. D’ailleurs, qu’était-il supposé lui dire ? Il ne saurait même pas par où commencer. Zorian songea à rentrer à son tour, mais il finit par simplement monter sur le toit du bâtiment pour observer les étoiles. Il n’allait pas vraiment dormir de toute façon.

Pour se garder l’esprit occupé, il nomma en silence toutes les étoiles qu’il voyait. Grâce à son intérêt pour le sujet datant de sa tendre enfance et du cours d’astronomie qu’ils avaient eu en première année à l’académie, il en connaissait pas mal. Il lui fallut une bonne heure avant d’arriver à court de noms.

Lundi allait être étrange. Zorian ne se leurrait pas : leur petite scène avait été observée et serait LE sujet de conversation pour les semaines à venir. En considérant qu’Akoja était le chouchou de la plupart des professeurs, ils pourraient même unanimement décider de rendre la vie dure à Zorian pour un petit bout de temps, également.

Qu’ils aillent tous se faire foutre, merde.

Ce fut le son des feux d’artifice qui parvint à le sortir de ses pensées. Il était apparemment minuit et le festival avait désormais officiellement commencé. Zorian se détendit un peu en admirant les gerbes colorées fleurir sur un ciel nocturne, chacune explosant à sa propre façon et le tout était définitivement magnifique. La plupart se dissolvaient en des notes mourant rapidement après l’éclat initial, mais certaines d’entre elles persistaient à briller, comme des fusées de détresse plus que comme de vrais feux. Elles décrivaient des arcs de cercle avant de retomber vers la terre comme des étoiles filantes et Zorian fronça les sourcils, perplexe. N’auraient-elles pas déjà dû exploser ?

Celle qui retomba le plus près de lui s’abattit sur l’une des résidences de l’académie dans une détonation. L’explosion fut si bruyante et lumineuse que Zorian fut momentanément aveuglé et sonné, reculant en titubant avant de tomber à genoux, le bâtiment tout entier tremblant sous ses pieds.

Secouant la tête, clignant des yeux pour faire disparaître ces myriades de points lumineux qui lui encombraient la vue, il parvint à se remettre debout tant bien que mal. Il fixa l’endroit où la résidence se tenait debout encore quelques secondes auparavant. Le bâtiment entier avait virtuellement été rasé à blanc et tout ce qui pouvait être brûlé dans son voisinage immédiat était toujours en flammes ; des formes étranges se dessinaient et mouraient dans les flammes de l’épicentre de l’accident.

— Attends une minute…

C’était sa résidence !!

Il s’effondra à nouveau, genoux à terre, en comprenant les implications de ce qui venait de se passer. S’il avait décidé de rester dans sa chambre comme il l’avait initialement prévu, il serait mort à l’heure qu’il était. C’était une pensée des plus glauques et tristes mais putain, qu’est-ce qu’il se passait, là ?! Ce n’était pas un feu d’artifice, c’était absolument certain ! On aurait dit un sort d’artillerie de très haut niveau !

Zorian ne pouvait pas clairement dire si c’était une conséquence de son ouïe perturbée par tout ça, mais il remarqua que les légères vibrations provenant des acclamations de la foule avaient cessé. En jetant un coup d’œil du côté de la ville, il constata que ce qui venait d’arriver à sa résidence n’était en rien un cas isolé – partout où l’une de ces retombées enflammées avait frappé, elle n’avait laissé que dévastation dans son sillage. Il ne bénéficia que de quelques secondes pour réfléchir à tout ça avant de remarquer une autre salve de flammes commençant à s’élever dans le ciel, au loin. Ce barrage de tirs n’était plus masqué par les feux d’artifice et il était évident qu’il s’agissait de sorts d’artillerie, désormais.

Ils étaient attaqués.

Comme les tirs retombaient déjà vers le sol, Zorian se mit à paniquer. Qu’était-il supposé faire, merde ?! Fuir aurait été inutile, il ne savait même pas quelles étaient les cibles des assaillants ! Il pouvait tout aussi bien se retrouver à courir directement dans la gueule du loup et exploser sans laisser de trace s’il fuyait à l’aveugle.

— Attends une minute…

Qu’avait-il à voir avec tout ça ? Il y avait une flopée de mages plus que capables dans le bâtiment. Il n’avait simplement qu’à les prévenir et les laisser gérer la situation. Zorian se précipita en direction du grand hall.

Il avait à peine posé le pied dans les escaliers lorsqu’il tomba nez à nez avec Ilsa et Kyron.

— Zorian ! Que faites-vous ici ? demanda Ilsa sans perdre de temps.

— Euh… Je suis simplement sorti prendre l’air… se brouilla Zorian. Mais ce n’est pas important, là !

— Je suis d’accord, confirma Kyron. Gamin, c’était quoi cette explosion ? Ne me dis pas que c’est quelque chose que tu as fait ?

— J’aurais eu du mal, affirma Zorian. Des espèces de flammes tombent partout sur la ville et détruisent tout ce qu’elles touchent. On dirait un puissant sort d’artillerie.

Ilsa et Kyron échangèrent un regard inquiet avant de se tourner à nouveau vers lui.

— Retourne auprès d’Akoja et des autres dans le hall, intima Ilsa. Nous allons voir ce qui se passe et téléporter tout le monde en sécurité si nécessaire.

Sans attendre, ils le poussèrent pour se précipiter sur le toit, le laissant retourner dans le hall en titubant. Akoja… Akoja n’étais pas dans le hall. Elle était partie. À cause de lui. Elle était là, quelque part, dehors, déjà morte peut-être…

Il secoua la tête et bannit ce genre de pensées morbides de son esprit. Il sortit son compas de divination et lança rapidement un sort de divination afin de la localiser. Il n’était même pas certain du résultat puisque le sort ne servait qu’à retrouver des personnes avec lesquelles vous étiez familier – en d’autres termes, des amis et de la famille. Heureusement, il semblait qu’être son camarade de classe était suffisant pour que le sort établisse une connexion.

Il prit une profonde inspiration et raffermit sa résolution. Il avait besoin d’avoir des nerfs à toute épreuve pour ce qu’il s’apprêtait à faire. Peut-être risquait-il de se faire tuer mais… eh bien, c’était un peu sa faute. Il ne pourrait plus se regarder dans le miroir si Akoja y restait à cause de lui.

Spectre insaisissable, il se faufila entre étudiants agités et dignitaires étrangers, ignoré et laissé en paix jusqu’à se trouver proche de la sortie. Il se glissa à l’extérieur et se mit à courir aussi rapidement que possible dans la direction indiquée par le compas.

 

___

 

 

Les trolls étaient des créatures plutôt sournoises. Il en existait plusieurs sous-espèces, mais la plupart étaient des individus de trois mètres de haut recouverts d’une peau épaisse et dotés de capacités régénératives surnaturelles : ils pouvaient rattacher un membre tranché simplement en le tenant sur la plaie pendant quelques instants. Les trolls des forêts étaient la sous-espèce la plus connue et peuplée, possédant une peau d’un vert vif et errant dans la grande forêt du nord. Tandis que Zorian aperçut une troupe de trolls traverser la rue, éclatant les fenêtres et hurlant de manière inintelligible, il se fit remarquer qu’il était heureux que la fumée acide provenant des bâtiments carbonisés proches, masquait sa propre odeur. Ses manuels disaient tous qu’un troll des forêts possédait un odorat monstrueusement développé.

En temps normal, il se serait demandé ce qu’un attroupement si important de ces créatures faisait au milieu d’une ville humaine, relativement loin de leurs terres natales ; mais les lames et les masses qu’ils brandissaient lui apprirent tout ce qu’il avait besoin de savoir. Il s’agissait d’armes trop avancées pour avoir été confectionnées par ces monstres, qui étaient trop primitifs, ne possédaient pas le savoir nécessaire et étaient incapables de travailler le métal. Ceux-là étaient des trolls de guerre. Quelqu’un les avait armés et lâchés dans la ville.

Une fois les trolls partis, Zorian se détendit légèrement et tenta de deviner ce qu’il allait devoir faire. Quel idiot. Pourquoi, oh, pourquoi avait-il décidé de fuguer sans demander l’aide d’un professeur ? Encore une fois, il avait estimé que les retombées enflammées étaient les seuls dangers qu’il allait rencontrer et que retrouver Akoja ne s’avèrerait pas être un gros problème. Au lieu de ça, il avait trouvé une cité envahie par des monstres. Ce n’était pas un accident. Ce n’était pas une vulgaire attaque terroriste. C’était une invasion ! Malheureusement, il ne possédait plus le loisir de choisir s’il allait retourner ou non au hall du bal – une grande partie des forces de l’envahisseur se dirigeaient vers l’académie, lui coupant toute possibilité de retraite. Gardant cette contrainte à l’esprit, Zorian reprit la route en direction d’Akoja. Il resta dans les ombres, sachant que l’envahisseur remarquerait rapidement quiconque s’amuserait à courir en terrain découvert, comme ce gamin… hein… ce gamin, qui… qui se tenait juste… là…

Zach ?!

— Par ici ! cria Zach en agitant la main. Je suis là, animaux stupides ! Venez me chercher !

Zorian sentit sa mâchoire tomber face à la stupidité sans bornes dont il était témoin. Mais qu’est-ce que ce foutu idiot avait dans la tête ?! Peu importe le talent d’un étudiant, il n’y avait pas moyen qu’il puisse faire face à ces monstruosités qui ravageaient la ville à ce moment précis. Il était cependant trop tard pour agir – attirés par les cris de Zach, les trolls revenaient déjà en courant, donnant des mouvements de masse et un cri de guerre collectif qui précéda une charge chaotique en direction du gosse humain qui venait de les provoquer. Zach avait adopté une posture qui indiquait clairement qu’il comptait affronter les trolls et c’était totalement fou – que prévoyait-il de faire face à une créature capable de régénérer pratiquement n’importe quelle blessure ? Seuls le feu et l’acide étaient assez puissants pour leur infliger quelque chose de permanent et ils n’avaient pas –

Zach raffermit sa prise sur son bâton, l’autre main tendue vers la charge monstrueuse. Zorian fut coupé court par ce développement et ne parvint même pas à mettre en place la pensée suivante qui devait lui traverser l’esprit. Une boule de feu rugissante sortit de la main de Zach et explosa en plein milieu de la formation des trolls. Quand les flammes disparurent, seuls des corps carbonisés chutèrent.

Zorian fut choqué. Une boule de feu lancée de la sorte se trouvait être un sort du troisième cercle et nécessitait une quantité de mana non négligeable. Bien plus que ce que pouvait posséder un élève de l’académie. Même Daimen n’aurait pas pu lancer ce sort à l’âge de Zach. Pourtant, non seulement ce dernier l’avait fait, et fait proprement, mais il n’avait en plus même pas l’air drainé. Au lieu de ça, quand une nuée de becs de fer l’attaqua peu après en faisant pleuvoir leurs plumes mortelles sur l’adolescent, celui-ci dressa simplement un aegis – un putain d’aegis !! – autour de lui et bombarda les oiseaux de petites boules de feu qui traquaient leur cible comme autant de missiles de feu. Zorian était en transe face à cette scène : son camarade de classe combattait seul des hordes de monstres sans visiblement fournir le moindre effort. À tel point qu’il faillit ne pas remarquer que l’un des loups hivernaux qui attaquaient Zach s’était détaché de la meute et s’approchait furtivement. Presque. Heureusement, une espèce d’instinct de base l’alerta du danger et il se jeta sur le côté au moment précis où des crocs allaient se refermer sur sa gorge depuis un coin d’ombre proche.

Zorian s’insulta tout bas en regardant le loup reprendre ses repères après un bond manqué pour se préparer à attaquer une nouvelle fois. Il aurait réellement dû s’attendre à se faire prendre pour cible, vu l’attention que Zach attirait juste à côté. Il aurait mieux fait d’utiliser le combat de Zach comme distraction pour fuir quand il en avait eu la chance. Maintenant, c’était trop tard : Zorian savait qu’il n’était pas assez rapide pour distancer un loup hivernal et il ne possédait aucun sort de combat qui lui permettrait de se défendre. S’il survivait à cette soirée, il irait définitivement apprendre quelques invocations, aussi inutiles pouvaient-elles être à son niveau. Et c’était un « si » très improbable.

Une boule de force lumineuse s’écrasa sur la tête du loup, la faisant exploser dans un bouillon sanglant suivi de fragments d’os et de cervelle. Zorian ne savait pas s’il devait être dégoûté par cette pluie gore qui venait de s’abattre sur lui ou rassuré d’avoir la vie sauve, juste un peu plus longtemps. Il remarqua également que les effets de la boule lumineuse étaient un peu trop efficaces pour être un simple missile magique ; il supposa qu’il s’agissait d’une nouvelle preuve du talent de Zach en matière de magie.

— Zorian ? Mais qu’est-ce que tu fais là ?!

Zorian regarda Zach avec spéculation. Il remarqua le parterre de corps qu’il avait laissé derrière lui et jeta un œil avide vers le bâton dans sa main droite ainsi qu’à la ceinture emplie de baguettes programmées. Pour une prétendue témérité, il était assurément venu bien préparé ! Presque tenté de lui poser exactement la même question, il décida finalement que ça pourrait provoquer des tensions inutiles. Zach venait de lui sauver la vie, après tout. Zorian décida de jouer l’honnêteté – peut-être que son camarade accepterait de l’aider à retrouver Akoja, considérant ses capacités offensives…

— Je cherche Akoja. Elle a quitté le bal un moment avant que les attaques ne commencent et c’est un peu ma faute.

— Mec, grogna Zach, dire que je suis même allé jusqu’à m’embêter à m’assurer que tu irais au bal. C’est comme si tu voulais vraiment te faire tuer !

— Toi ? reprit Zorian sur un ton incrédule. C’est toi qui a dit à Ilsa que j’avais décidé de ne pas y aller ? Tout ce temps, j’avais accusé Benisek ! Comment l’as-tu su, pour commencer ?

— Tu restes à chaque fois dans ta chambre, et tu te fais tuer lors du tir de barrage initial à tous les coups si je ne fais pas quelque chose. Et laisse-moi te dire un truc, te convaincre de ne pas rester dans ta chambre sans avoir recours à la violence ou impliquer Ilsa est une putain de corvée. Tu peux vraiment être un âne bâté quand tu t’y mets, soupira Zach.

Zorian le fixa en silence, confus. La façon dont Zach lui présentait les choses, c’était comme si c’était un truc qui arrivait tous les jours !

— Mais assez avec ça, coupa Zach sur un ton joyeux. Allons chercher Akoja avant qu’un truc ne décide de la bouffer. Tu connais le chemin ?

Ainsi fut-il. Ils traversèrent les rues enflammées de la ville en ne laissant qu’une traînée de corps derrière eux. Zach ne tentait même pas d’éviter les monstres et se contenta de les massacrer sur place tel un dieu vengeur en colère. À un moment, ils furent même attaqués par une horde de squelettes et un mage ennemi, mais Zach ouvrit tout bêtement une fissure dans la terre sous leurs pieds et cette dernière les avala sans leur demander leur avis. Zorian garda les lèvres closes de manière zélée et ne posa pas la moindre question à Zach à propos de son apparemment infinie réserve de mana ou sur sa connaissance de sorts qu’il ne pouvait logiquement même pas maîtriser à son niveau. Il se contenta simplement de profiter des talents de son camarade ; il n’aurait jamais pu arriver si loin sans son aide et il lui en était sincèrement reconnaissant. Zach pouvait garder ses secrets, quels qu’ils fussent.

Ils finirent par trouver Akoja barricadée au premier étage d’une maison. Visiblement, elle avait été chassée par une meute de loups hivernaux et avait refusé de quitter sa cachette de peur que d’autres créatures l’attendent à l’extérieur. Vraiment intelligente. Bien plus malin que ce que Zorian avait fait, c’était certain. Heureusement, il n’y avait plus trace de loups à proximité – non pas que Zach aurait eu le moindre souci s’ils avaient été là – et ils se mirent à la très frustrante tâche de convaincre Akoja qu’il était sûr de les laisser entrer. Apparemment, son expérience avec les loups l’avait secouée plus que de raison.

Zorian était certain qu’elle allait lui reprocher sa fuite hors de la sécurité du hall du bal et il fut plutôt surpris quand elle lui bondit dans les bras en ouvrant la porte, sanglotant et chouinant sur son épaule.

Zorian ouvrit la bouche, confus et peu sûr de la manière dont il devait réagir à cet élan émotionnel. Il posa sur Zach un regard suppliant, mais ce dernier lui accorda à peine un sourire large jusqu’aux oreilles, amusé par sa réaction.

— Ah, les amours naissants, acquiesça Zach tout bas comme un grand connaisseur. Mais j’ai peur que vous ne deviez reporter votre réunion à plus tard, lorsque nous serons en sécurité.

— Oui ! s’écria immédiatement Akoja en levant le visage de l’épaule de Zorian. Elle avait parfaitement ignoré la remarque de Zach concernant leur relation – même si Zorian la soupçonnait de ne même pas l’avoir entendue. Elle était toujours fermement agrippée à son torse comme si elle craignait de le voir disparaître aussitôt qu’elle le lâcherait. C’était un peu douloureux, mais il réprima toute remarque.

— Les abris ! Nous serons en sécurité dans les abris !

Zach recula d’un pas mais se reprit rapidement. Ce fut si rapide qu’Akoja eut l’air de ne même pas l’avoir remarqué, mais Zorian n’y manqua pas. Alors les abris n’étaient pas sûrs, eux non plus ? Mais apparemment toujours plus que l’endroit où ils se trouvaient actuellement parce que Zach semblait d’accord pour s’y rendre.

— Parfait ! décida Zach de manière enjouée en applaudissant de satisfaction avant d’attraper l’une des baguettes qui pendaient à sa ceinture pour la tendre à la déléguée. Toi aussi, Zorian.

— C’est quoi ? demanda Zorian d’une voix suspicieuse. La baguette ne possédait aucune des marques qui pourraient identifier son utilité et Zorian était un peu méfiant à son égard. Utiliser des objets magiques sans avoir une parfaite connaissance de ce à quoi s’attendre était un gigantesque non si on désirait rester en bonne santé et vivre vieux.

— C’est une baguette de téléportation, expliqua Zach. Elle est programmée pour transporter quiconque la tient vers les abris. Je l’ai lancée avec un délai de trente secondes, alors tiens-là avant d’être abandonné ici.

— Et toi ? questionna Akoja d’emblée. Tu dois la tenir aussi avant qu’elle s’active !

— Ah… Non, balaya Zach d’un mouvement de main. J’ai encore quelque chose à faire ici.

— Quelque chose à faire ?! protesta Akoja. Zach, ce n’est pas un jeu ! Ces choses veulent et vont te tuer !

— Je suis parfaitement capab –

Zorian fut incertain de ce qui venait de provoquer ce sentiment – il eut cette même impression que lorsque le loup lui avait sauté dessus, un peu plus tôt – mais il se libéra de l’étreinte d’Akoja d’un bond soudain et poussa Zach à l’écart d’un sort qui allait le percuter au milieu de sa phrase. Un rayon rouge colérique fit craquer l’air devant eux, traversant l’endroit exact où se trouvait Zach deux secondes plus tôt et frappa le mur en y creusant un long sillon. Le tout ne laissa finalement qu’un nuage de poussière dans la pièce.

— Merde, cracha Zach. Il m’a trouvé. Vite, agrippe-toi à la baguette avant qu –

Akoja scintilla et disparut sans crier gare.

— …qu’elle s’acti… Eh merde ! termina Zach sur un ton exprimant souffrance et regret. Merde, Zorian, pourquoi tu ne l’as pas tenue ?!

— Tu serais mort, à l’heure qu’il est ! protesta Zorian. Il n’allait tout de même pas laisser une personne qui lui avait sauvé la vie mourir d’un sort perdu s’il pouvait l’en empêcher. D’ailleurs, quiconque l’avait lancé ne tiendrait sans doute pas face à la puissance de Zach, un peu comme le reste de toutes les créatures et les mages ennemis qu’ils avaient rencontrés cette nuit-là. À quel point ce mage ennemi pouvait-il être mauvais, sérieusement ?

Un courant d’air soudain souffla la poussière et une silhouette humanoïde fit son apparition. Zorian hoqueta de surprise en constatant ce qu’était la chose qui venait de surgir devant eux. Un squelette baigné d’une lueur verte morbide, les os noirs et reflétant un étrange aspect brillant comme s’il n’avait été qu’une construction artificielle de métal les regardant de haut comme un roi revenu d’entre les morts et toujours vêtu d’une armure aux gravures dorées, une couronne sertie de gemmes sur le crâne et un sceptre à la main.

Une liche. Une putain de connerie de liche ! Oh, ils allaient tellement ne pas survivre à ça.

La liche avait déjà posé ses orbites vides sur eux. Et comme Zorian croisait son regard insaisissable, un sentiment malsain le doucha froidement, comme si cette créature était en train de décortiquer son esprit. Après moins d’une seconde, la liche tourna paresseusement son attention vers Zach, jugeant visiblement Zorian comme étant une existence indigne de tout intérêt.

— Alors… grinça la liche, la voix résonnant d’un pouvoir incommensurable. Tu es celui qui as tué mes sbires.

— Zorian. Cours pendant que je m’occupe de lui, claqua Zach en serrant le bâton qu’il tenait encore dans la main.

Sans attendre sa réponse, Zach lança un barrage de missiles magiques en direction de la liche qui répondit à l’aide d’un trio de lasers violets tout en érigeant une barricade autour d’elle d’un simple geste de sa main décharnée. Deux d’entre eux se dirigèrent vers Zach, mais malheureusement, la liche vit un intérêt à réserver le dernier à Zorian, qui cherchait à fuir. Même si ce dernier ne fut pas touché directement, l’impact avec le sol donna lieu à une explosion qui mitrailla ses jambes d’une pluie de pierres tranchantes. La douleur fut immense et Zorian s’effondra en un instant, incapable de faire un pas de plus.

Durant les cinq minutes suivantes, Zorian se traîna avec peine et douleur derrière une charrette proche, espérant qu’elle lui permettrait de se protéger d’une partie de la puissance destructrice que le combat en cours ne manquait pas de libérer. Zach occupait la liche avec assez de talent pour que celle-ci n’ait plus l’occasion de cibler Zorian ; ce qui était bienheureux, car il n’avait aucune chance de pouvoir s’échapper plus qu’il ne l’avait déjà fait. Il observa l’affrontement entre deux lattes tordues avec une inquiétude grandissante. Zach et la liche échangeaient une averse d’attaques, des sorts que Zorian ne parvenait même pas à identifier. Il réalisa bien vite avec un effroi désormais ancré que la prédiction de leur mort proche et sinistre était fondée – peu importait le talent de Zach, il ne jouait pas dans la même cour que la liche. Le monstre s’amusait avec lui et était destiné à se fatiguer tôt ou ta…

Une fois de plus, Zorian fut coupé dans le fil de ses pensées. Il grimaça alors qu’un éclair rouge passa au travers de l’aegis de Zach en l’explosant de part en part et empala le jeune génie sous les côtes. Zorian suspecta que le coup n’était pas mortel, et ce, uniquement parce que la liche voulait se divertir encore un peu, et ses doutes furent confirmés par le fait que la créature ne termina pas Zach immédiatement après, pour préférer le faire léviter dans les airs d’un geste des plus banals de la main. Zach se prit le mur près de Zorian de plein fouet et gémit de douleur.

Apparemment peu pressée, la liche s’approcha au pas. Elle semblait parfaitement peu concernée par Zach, qui se relevait en tremblant, une baguette dans la main gauche. Zorian pouvait voir que son autre main était fermement pressée contre son ventre qui ne cessait de saigner.

— Tu t’es bien battu, enfant, le félicita la liche. Impressionnant pour quelqu’un qui n’est supposé être qu’un simple étudiant académique.

— Pas… assez impressionnant encore, hein ? hoqueta Zach en lâchant son arme pour presser sa blessure des deux mains, ne pouvant plus cacher l’intensité de sa douleur. Je suppose… que je devrai… faire mieux… la prochaine fois.

La liche ricana tout bas. C’était un son étrange qui ne correspondait pas vraiment à l’idée de ce qu’on se faisait de la créature.

— La prochaine fois ? Stupide enfant, il n’y aura pas de prochaine fois. Crois-tu que je peux te laisser vivre ? Tu dois bien sûr savoir que non.

— Bah, cracha Zach en même temps qu’une gerbe de sang avant de se redresser, le visage tordu de douleur. Assez parlé… Finis-en.

— Tu m’as l’air bien insouciant pour quelqu’un qui va mourir, fit remarquer la liche avec précaution.

— Ah… Peu importe, s’impatienta Zach en levant les yeux au ciel. Ce n’est pas comme si j’allais mourir pour de bon.

Zorian regarda vers Zach d’un air incrédule, ne voyant pas où il voulait en venir. La liche, quant à elle, sembla y voir clair.

— Aaah, je vois, répondit-elle finalement. Tu dois être bien débutant en magie de l’âme si tu penses que ça te rend invulnérable. Je pourrais simplement emprisonner la tienne dans un réceptacle mais j’ai une bien meilleure idée.

La liche fit quelques gestes vers Zorian qui sentit son corps entier se figer d’un seul coup, comme congelé. Un autre mouvement, et il fut attiré à grande vitesse vers Zach, choqué et les deux se percutèrent avec violence. Ils finirent au sol, savant mélange de bras et de jambes et Zorian fut quelque peu soulagé qu’au moins, cette paralysie avait disparu.

— Peu importe si ton âme peut être réincarnée ailleurs, si on la mutile au-delà de toute reconnaissance, expliqua le monstre. Après tout, l’âme est certes immortelle mais personne n’a dit qu’on ne pouvait pas l’altérer.

Faiblement, Zorian put entendre la liche chantonner un cantique dans un langage étrange qui n’était clairement pas de l’Ikosian standard comme les invocations traditionnelles l’exigeaient, mais toute curiosité fut balayée par une vague de souffrance et quelque chose d’étrangement faux, le tout le percutant avec une puissance qui le laissa totalement perplexe. Il ouvrit la bouche, incapable de retenir un cri, et son monde s’illumina d’un coup d’un seul avant de plonger dans le noir le plus total.

Raka
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16 thoughts on “MoL : chapitre 4

    1. Bordel, surtout que là, le monde et l’histoire sont posés.
      C’est LA que ça commence à devenir intéressant pour de bon. (et je risque de dire ça de nombreuses fois mdrrr)

  1. Zut Raka tu peux supprimer le 2e message s’il te plaît

    En tout cas si je comprend bien Zach revit (avec d’autres personnes) la même année en boucle ! C’est génial comme concept surtout quand le héros est un point de vue extérieur !
    Re-merci pour la traduction

        1. C’est plus je pense que zack reviens à cette année là après sa mort. Et d’après ce qu’il dit ça doit faire un paquet de fois qu’il vit et meurt. Et Zorian ne fait pas parti du cycle du moins pour le moment. 

          Pour que cette boucle soit impactante c’est la liche qui va le faire. Peut-être que cette fois une fois que zorian aura ou n’aura pas fait quelque chose le flambeau lui sera passé.

          En tout cas j’attends la suite avec grande impatience 😀

          1. En vrai le scénario est tellement bien construit et tellement complexe…
            Tu peux jamais dire des choses si simples que ça. C’est juste épatant, à chaque chapitre qui passe.

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