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Chapitre 64 : Le propriétaire 3/6

 

Kang Mirae lui donna rendez-vous dans le salon de thé de la dernière fois. En l’absence de son masque, Yu Ilhan put profiter de chaque mouvement de son visage tandis qu’elle lisait les informations relatives au bâton.

– Monsieur Yu ? lança-t-elle en essayant de contenir sa surprise.

– Ouais ? répondit-il.

– Comment est-ce que… non, laisse tomber, décida-t-elle finalement.

Elle dut invoquer toutes ses forces pour parvenir à lâcher l’arme. Le visage baissé, seul son regard lui était désormais réellement visible, et ce qu’il renvoyait ne semblait pas exactement à l’aise.

– Ça a vraiment été fabriqué à ma requête ? parvint-elle à dire.

– Oui. Je crois qu’il y a toutes les options que tu m’as demandé, lui confirma Yu Ilhan.

– Je vois ça. C’est un peu… trop ? Ton ami artisan a dépassé toutes mes représentations… je suis vraiment pathétique.

Elle se mordit légèrement les lèvres. L’ami artisan comprit immédiatement que ce n’était pas seulement la gratitude qui la torturait. Un savant mélange de jalousie et de sentiment d’infériorité avaient fait tomber toute la stature de l’Impératrice.

– Ce n’est qu’un forgeron, hein. Ça ne veut pas dire qu’il sait se battre, tenta-t-il pour la rassurer.

– Là n’est pas la question. Le simple fait que tu connaisses quelqu’un capable de réaliser un tel artéfact est déjà incroyable, surtout qu’il a été capable d’y insuffler des intentions autres que les siennes. Tu es vraiment quelque chose, Yu Ilhan…

Elle ferma les yeux un instant afin de se contenir. La peine laissa soudainement place à une indignation furieuse.

– Je crois que tu n’as pas compris ce qu’il se jouait, Yu Ilhan, lui lança soudainement Kang Mirae.

– Comment ça ? s’étonna-t-il.

– À quel prix estimerais-tu cette arme ?

– 20 mil… s’interrompit-il en la voyant sourciller. 40 milliards ?

– Ces 10 dernières années, les Terriens ont expérimenté des événements qui ont remis en cause toutes leurs conceptions, reprit-elle froidement, comme si elle n’avait prêté aucune attention à sa proposition. Certains d’entre eux ont eu la chance d’acquérir des artéfacts aux pouvoirs insoupçonnables. Je peux d’ores et déjà t’assurer qu’aucun d’entre eux n’arrive à la cheville de ce bâton, et l’humanité n’est certainement pas en cause dans ce fait.

– Ok… Qu’est-ce que tu veux dire par là ? Qu’aucun artéfact de ce niveau n’existe dans l’univers ? lança-t-il, la mine un peu déconfite.

– Oh, il doit bien y en avoir quelques-uns. Tout au plus une dizaine.

Une dizaine dans l’univers ? Si elle disait vrai, il n’y avait rien de très étonnant à ce que personne sur Terre n’ait réussi à en obtenir.

– Voilà qui nous amène au nœud du problème. Comment est-ce qu’on détermine la valeur d’un objet ?

– En fonction de l’offre et de la demande, répondit Yu Ilhan sans hésitation.

– Précisément. Donc, combien coûte ce bâton ?

– Autant que je le désire… comprit-il enfin.

– Exactement, confirma-t-elle. C’est pour cette raison que je ne peux pas te l’acheter. J’ai été par trop avide.

– Hmm…

Pourquoi réagissait-elle ainsi ? Il savait parfaitement qu’en dépit de ses admirables capacités, elle ne pouvait se permettre un tel achat. Ce n’était pas uniquement pour l’argent qu’il lui proposait le bâton, mais pour augmenter ses talents naturels. Elle pouvait accepter dès maintenant et le régler, mais en lieu et place, elle s’était indignée de son geste. Rapidement, l’incompréhension fit place au sein de son esprit au plus grand respect. C’était par principe.

– Bon… que dirais-tu de 100 milliards ? tenta-t-il alors.

– Ce n’est pas assez du tout, s’opposa-t-elle immédiatement.

– Je ne te demande pas ce qu’il vaut. Je te le donne pour ce prix, c’est différent.

– Et moi, je refuse.

Il comprit immédiatement son erreur. Elle commençait à être mal à l’aise… pourtant, il devait persister. Il ne s’agissait pas de lui.

– Tu disais que j’étais quelque chose, c’est ça ? lui demanda Yu Ilhan d’un ton bien différent, comme pour changer de sujet.

– Oui. J’ai par contre du mal à voir le rapport avec cette arme, le recadra Kang Mirae.

– Si tu considères que je suis quelqu’un simplement parce que je connais quelqu’un, ne peut-on pas considérer que tu es toi aussi exceptionnelle, puisque tu as la possibilité de t’offrir un tel artéfact ?

– Je ne vois absolument pas le rapport ! Tout dépend de toi.

– Sans ton intervention, la panthère noire géante m’aurait certainement tué. Tu as été capable de la paralyser alors même que tu étais de faible niveau. Ceci a suffi à prouver ta valeur à mes yeux, et dès lors, je tiens à ce que tu récupères ce bâton. Ce n’est que pure logique.

Elle était vexée, mais en caressant ainsi sa fierté, le sourire lui revint rapidement. Yu Ilhan ne la méprisait pas, loin de là.

– Ton raisonnement est un peu tiré par les cheveux… dis-moi, Yu Ilhan. Quelle est la véritable raison pour que tu souhaites me donner cet objet ? lui lança-t-elle d’un ton inquisiteur.

Échec critique ! Il allait maintenant falloir lui révéler ses véritables intentions…

– Je souhaite que tu progresses plus vite, Mirae.

– Pourquoi ? lui demanda-t-elle, satisfaite qu’il ait dit la vérité.

– L’humanité est trop faible. Je crains qu’à ce rythme, la Terre ne soit détruite dans quelques mois.

Elle tira une grimace. Pour qui se prenait-il, au juste ? À exagérer de la sorte… mais à bien y réfléchir, qui était-elle pour oser remettre en cause ses propos ? La jeune femme n’eut d’autre choix que de les prendre pour argent comptant.

– J’imagine que je ne t’apprends rien en t’affirmant que la Terre va mal, reprit Yu Ilhan pour se justifier. Tout évolue bien trop vite, et on risque d’avoir à gérer un certain nombre d’imprévus incessamment sous peu. Aussi faible soit l’humanité, c’est bien à elle qu’il appartient de faire face à cette situation de crise. C’est dans cette optique que je t’ai contactée. Je pense qu’avec cette arme, tu seras assez forte pour faire une différence.

– Ah…

Kang Mirae lâcha un étrange soupir, puis un deuxième, comme si elle hyper-ventilait. La vérité était pourtant tout autre.

– Ouf… Ah… Ah…

– Euh… ça va ? s’étonna-t-il.

– Pfouahahahaha !

Vite, Yu Ilhan, elle est en train de devenir folle ! Fuis ! Enfin, avant même qu’il ne put réagir, elle cessa de rire et reprit le bâton entre ses mains.

– Soit, trancha-t-elle soudainement. Je te l’achète pour 100 milliards, et au diable ma fierté. Je te remercie de ton geste.

– Vraiment ? voulut-il s’assurer.

– Oui, mais rappelle-toi bien d’une chose, lui dit-elle d’un regard à mi-chemin entre la détermination la plus profonde et une colère de même intensité. Je vais devenir plus forte que toi. Tu m’as bien comprise ? Je vais t’écraser, alors ne me traite plus avec autant de déférence. Tu vas regretter d’avoir été aussi gentil.

– Ça m’importe peu, répondit-il simplement.

Sa grande déclaration n’avait sur lui aucun effet. Il ne s’agissait pas d’un concours pour lui, mais de la sécurité de la Terre. Si elle devenait plus forte que lui, alors il ne ressentirait rien d’autre que de la satisfaction. Leurs personnalités étaient décidément à l’opposé l’une de l’autre… enfin, après s’être échangés un sourire de par la joie d’avoir accompli cet échange, Yu Ilhan sortit autre chose de sa besace.

– Tu veux voir la robe, maintenant ? Rassure-toi, elle n’est que de rang unique, lui dit-il.

Kang Mirae ne répondit absolument rien, se contentant de prendre la robe entre ses mains afin de l’inspecter. Puis, d’une voix faiblarde…

– Je suis désolée, mais tu me permettrais d’appeler une amie ? Je n’ai pas assez d’argent à ma disposition, lui expliqua-t-elle après un moment.

– Fais donc !

Bien sûr, s’il avait su de qui il s’agissait, il n’aurait certainement pas fait montre d’un tel enthousiasme. En effet, 10 minutes plus tard débarquait son pire cauchemar… Na Yuna.

– Quoi ?! explosa-t-il.

– Ilhaaaaaaaan ! s’exclama Na Yuna, un large sourire au visage.

– Je suis pas ton pote, pour toi c’est monsieur Yu ! s’indigna-t-il.

Il se sentit soudainement idiot de ne pas avoir découvert le pot aux roses de lui-même. D’un autre côté, s’il les savait amies, comment aurait-il pu s’imaginer qu’elle lui emprunterait de l’argent à ELLE ? Alors qu’il semblait sombrer dans une dépression gravissime, Kang Mirae intervint à son secours.

– Cesse de te comporter comme une enfant. Je ne t’ai pas fait venir pour ça, lui ordonna-elle froidement.

– Mais Mirae, attends ! Tu m’as dit que tu ne connaissais pas monsieur Yu, la dernière fois, s’opposa Yuna en insistant sur les syllabes du monsieur.

– Nous avons été accointés, répondit Mirae.

– C’est ça, ouais… vous sortez ensemble ? Ça ne me plaît pas du tout !

– Je te dis qu’on vient de se rencontrer…

Perdant patience, Kang Mirae fit apparaître une boule de foudre au creux de sa main droite. Aussitôt, Na Yuna se tut et, convaincue de l’importance de se comporter de manière civile, inspecta à son tour les deux artéfacts.

– Wouaaah ! Tu me feras de l’équipement aussi, hein ?! lança-t-elle après un moment, des étoiles dans les yeux.

– C’est bien pour ça que je t’ai dit de te procurer des pierres magiques sacrées… lui rappela Kang Mirae.

– Ah ! Enfin, si tu crois que c’est facile ! Bon, bref. 150 milliards et un immeuble, ça ira ?

– Il est où, cet immeuble ? lui demanda l’Impératrice.

– Dans la zone sécurisée de Gangnam. Il appartient à mon grand-père, mais je suis sûre qu’il me le donnera contre un simple bisou !

– Ça devrait aller… estima-t-elle.

La conversation le surprenait beaucoup trop pour continuer à l’écouter plus longtemps, aussi Yu Ilhan s’efforça-t-il de mettre son cerveau en mode veille. Ils n’avaient décidément rien en commun… rien qu’à en voir le fait que lui avait été oublié alors qu’elles étaient parties dans d’autres mondes. Et puis ce n’était pas avec des cuillères en argent qu’elles étaient nées, mais en diamant… et que dire de leur force, ou de leur apparence si soignée ? Il ressentit soudainement l’envie de les insulter pour évacuer sa frustration.

– Tu as dit que tu équiperais aussi Kang Hajin, non ? Il va falloir que j’ajoute quelque chose, lui dit soudainement Yuna.

– Non, c’est bien assez. Je ne suis pas là pour faire des profits, lui répondit poliment Ilhan.

– Ah, tu es si riche que ça ? s’étonna-t-elle. Dire que j’étais persuadée d’avoir la meilleure baraque de Corée…

– Non, ce n’est pas de ça qu’il est question.

Kang Mirae coupa court à l’intervention de Yuna d’un geste de la main, et elles se mirent aussitôt au travail. Après quelques coups de téléphones, un compte bancaire fut ouvert au nom du jeune homme avec les 150 milliards de won, mais le papi venant à faire de la résistance, les clés de l’immeuble lui seraient remises plus tard.

– Ne t’en fais pas pour les taxes, on va s’en occuper, l’informa l’Impératrice.

– Ah, vraiment… s’étonna-t-il.

Elle était décidément douée… surtout qu’elle ne cherchait nullement à lui faire plaisir. Herta tira soudainement sur une mèche de ses cheveux, mais Yu Ilhan n’en comprit pas l’objet et se contenta de sourire bêtement. Enfin, il se sépara des deux demoiselles, qui continuaient à le regarder s’éloigner.

– Tu l’aimes, Mirae ? lui demanda soudainement Na Yuna.

– Absolument pas. C’est mon rival, et je vais tout faire pour lui faire mordre la poussière, rétorqua froidement l’intéressée.

– Ah, je vois… c’est pour ça. Je pense qu’on devrait garder un œil sur lui, pendant quelque temps.

– Il t’intéresse, ou quoi ? s’étonna l’Impératrice.

– Un peu ? Disons qu’il ferait un bon parti, quoi… mais c’est juste une pensée comme ça. Rien de bien sérieux.

– Si tu le dis…

Qu’avait-elle en tête, tandis qu’elle refroidissait son café en soufflant délicatement dessus ? Kang Mirae avait toujours eu du mal à lire ses intentions. Elle n’était d’ailleurs pas la seule…

Mais fais attention, Yuna… ce type n’est pas du tout à ton niveau, pensa Mirae.

Elle ne la soupçonnait toutefois pas de s’être entichée de lui. Ils ne s’étaient jamais vus que lors d’un donjon, puis pour parler affaires. Du reste, Yu Ilhan avait un véritable don et ne s’encombrait pas d’un ego surdimensionné. Il en était charmant… si Yu Ilhan intéressait quelqu’un, c’était bien Kang Mirae elle-même.

Il est digne de moi. Peut-être trop, d’ailleurs…

Elle souhaitait plus que tout au monde le posséder, malgré toutes ses tentatives pour réfréner ce désir. Ceci étant, l’Impératrice ne croyait nullement en l’amour. En dehors de Na Yuna et son frère, elle ne considérait les relations sociales que comme des moyens d’accéder à quelque chose. De la monnaie d’échange, en somme… or, c’était bien elle-même qu’elle devait tenter d’échanger pour l’obtenir lui. Si elle ne suffisait pas, alors elle devait trouver quelque chose qui lui permettrait d’augmenter sa propre valeur.

Quel meilleur moyen pour ça que de progresser tel qu’il le souhaitait ? Peut-être alors accepterait-il enfin de la considérer à sa véritable valeur. Jamais, dès lors, ne pourrait-elle laisser Na Yuna se mettre en travers de sa route. Hélas pour elle, sa véritable rivale était quelqu’un d’autre…

Nostra
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12 thoughts on “EER Chapitre 64

  1. une simple humaine vs un ange Haut gradé. est ce que l’on peu réellement parlé d’un match équitable 😉 

    Merci pour ses chapitres récent à foison

    1. Connaissant les capacités relationnelles de Yu Ilhan, je pense qu’elle a ses chances. Le véritable défis est de le surprendre, puisque c’est la seul choses qui entraîne de l’interêt pour lui.

  2. Merci pour ce chapitre

    « Il me le cédera pour un simple bisou »
    Quelqu’un peu il m’expliquer pourquoi j’ai envie de pleurer et jurer en même temps.T-T

  3. La seule rival dans mon cœur est Herta et personne d’autre !
    Nan, mais je l’adore cette ange ! Mais vas-y, essaie de faire de lui ton partenaire de noce.

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