LDO : Chapitre 7
LDO : Chapitre 9

008     Excursion vers les ruines

 

 

 

Plus tard, Ren Fen m’emmena chez moi. On m’avait donné l’adresse de ma nouvelle demeure, qui ressemblait en tous points à celle de mon nouvel ami.

Sur la table, il m’expliqua que comme pour tout nouvel arrivant, un cadeau était laissé, en guise de bienvenue : un sac avec quelques pierres spirituelles, de ténèbres dans mon cas. À bien y penser, une organisation de cette taille pouvait effectivement se permettre de faire ce genre de cadeau, la Ligue devait posséder des trésors incroyables.

S’ils t’offrent des pierres, profite, Osumba. On ne sait jamais de quoi demain sera fait, et pour le moment, ces pierres sont largement suffisantes pour te permettre de cultiver.

– Oui. Je ne comptais pas les laisse pourrir là.

Il y avait dix pierres spirituelles des ténèbres dans une petite sacoche. D’après Zhou XueFang, j’allais grâce à elles pouvoir parcourir au moins la moitié du chemin vers l’ouverture de la troisième porte Terrestre. Je n’aurais ensuite plus qu’à cultiver grâce à la technique qu’il m’avait enseignée pour rendre mon corps capable de supporter l’afflux de Qi.

Je pouvais raffiner une pierre par jour à mon niveau. Si j’en raffinais une deuxième, le Qi que mon dantian n’aurait pas encore digéré et venant de la première pierre serait perdu, remplacé par le nouveau. Aussi, ce fut la première chose que je fis le soir-même, je m’installai en tailleur dans un coin de la pièce et avalait une des pierres de la sacoche.

 

*

 

Dissoudre la pierre entière afin d’en extraire le Qi me prit plus de temps que je ne le pensais. Je la sentais dans mon estomac, elle tournait et se retournait, diminuant peu à peu en taille. Lorsque le dernier grain de Qi en fut tiré et guidé vers mon dantian, qui se chargeait alors de l’utiliser afin de renforcer le mien.

Une fois la pierre totalement digérée, le soleil se levait. Je n’avais toujours pas dormi.

Ce n’est pas grave mon garçon, lorsque tu cultives, surtout en raffinant une pierre spirituelle, le Qi te maintient dans un état léthargique, couvrant tes besoins en sommeil, nourriture et eau. Tu ne le sens pas ? Tu n’es pas fatigué.

– C’est vrai. Je ne l’avais pas vraiment remarqué, mais oui, je suis en pleine forme. C’est pratique, quand même.

Je sentais le Qi de mon dantian tourbillonner en absorbant le Qi de la pierre, petit à petit. Alors cette sensation aller durer toute la journée ? La différence immédiate était imperceptible, je ne pouvais pas sentir mon Qi se renforcer.

Il gagne en puissance, ne t’en fais pas. Tout le Qi de la pierre spirituelle que tu as avalée et raffinée circule dans ton corps. Durant les prochaines heures, il va lentement être dirigé vers là où le Qi est invariablement attiré, le dantian. Etant un Qi étranger à ton corps, le Qi de ton dantian va lentement l’absorber comme s’il s’agissait là d’un système de défense immunitaire. Une fois totalement intégré, ton propre Qi sera un peu plus puissant qu’avant.

– Mais tu m’as déjà expliqué ça il y a deux minutes. Je ne suis pas idiot.

– Et puis je le sens. Mon Qi à moi est en train d’attirer à lui tout le Qi qui circule sauvagement dans mon corps. C’est super lent, par contre… On peut pas aller plus vite ?

Tu veux prendre le risque d’exploser ? Si oui, alors je peux t’aider à aller plus vite…

– Hmm… Je pense que ça ira, merci quand même. On va attendre.

C’est bien ce que je pensais.

BAM BAM BAM !

Interrompant ma très importante discussion avec Zhou Xuefang, on frappa… Non, on tambourina à la porte, le bruit faisant vibrer mes oreilles. Quelqu’un voulait me faire savoir de manière violente qu’il était là et qu’il voulait que je lui ouvre.

Si j’avais été en train de raffiner ma pierre, je n’aurais même pas fait attention à ce qui se passait autour de moi. Mais j’avais terminé et maintenant que l’assimilation du Qi allait se faire toute seule, je pouvais aussi bien aller voir qui était là.

BAM BAM BAM BAM BAM !

Bon, évidemment, pendant que je ruminais des pensées dans ma tête, la personne inconnue continua à frapper sur ma porte comme si elle avait tué ses parents et violé sa famille dans une vie antérieure. Non mais oh, c’était ma porte, fallait pas la casser non plus.

Je me dépêchai d’ouvrir afin d’éviter un destin sinistre à la porte de ma maison, et quelle ne fut pas ma surprise quand de l’autre côté, je vis un visage familier.

– Ah ! Enfin !

C’était un type chauve, avec une jambe de bois sous le genou, et un œil de verre surmontant un nez tranché. Il semblait avoir un bras paralysé et me souriait.

– Bonjour ?

– Hé, le nouveau ! Je ne t’ai pas fait peur ?

– …Non, ça va. Il y a un problème ?

– Nous allons partir explorer une ruine qui vient de faire son apparition. Nous sommes les seuls au courant pour le moment, notre éclaireur est revenu il y a une heure à peine, alors que le soleil n’était pas encore levé. Et Kong Jia m’a envoyé te chercher, si tu nous rejoins, nous irons ensemble.

Une ruine ? Qu’est-ce que c’était que cette histoire de ruine qui apparaissait ?

Déjà en mon temps, Osumba, des ruines apparaissaient çà et là. Ce sont des reliques d’un ancien passé, une civilisation inconnue qui a foulé ces terres bien avant nous ; on ignore s’ils ont disparu dans l’espace ou le temps, ou si autre chose leur est arrivé, mais de temps à autres, des vestiges en ruines apparaissant comme ça, sans crier gare. Une fois apparues, ces ruines sont vidées de tout trésor et détruites. Si vraiment l’une d’entre elle est apparue… Si tu peux y aller avant quiconque, tu en seras récompensé…

– Vraiment ?

Je répondis à Zhou XueFang par réflexe. Evidemment, l’infirme en face de moi crut que je lui parlais.

– Oui, vraiment. Si tu choisis de rejoindre les Repoussants, alors tu feras partie des premiers à y pénétrer, en même temps que nous.

– Mais je croyais que plus personne ne vous laissait faire quoi que ce soit ? Comment pourriez-vous y aller ?

Il me regarda, esquissant un demi-sourire.

– La Ligue ne nous donne plus de mission, c’est vrai. Mais cela ne veut pas dire pour autant qu’elle nous restreint. Nous pouvons faire ce que nous voulons. Et Si nous désirons sortir dans le monde, nous sommes libres de le faire.

– Oh, je comprends… Et vous vous servez de cette liberté d’action pour explorer, et vous avez découvert cette ruine…

– Exactement. Alors ? Tu viens avec nous, n’est-ce pas ?

S’il m’avait dit ça plus tôt ! Moi qui pensais être coincé à tout jamais si je les rejoignais… Mais ma décision était prise en mon cœur, je ne pouvais pas me résoudre à changer d’avis d’un seul coup sans peser le pour et le contre. Je ne désirais absolument pas faire partie d’un groupe qui allait limiter ma cultivation sur le long terme.

– Non. Je suis désolé, mais je ne peux pas venir avec vous. Je ne veux pas… faire partie de votre groupe. Après, tout, il ne me manque pas de morceau, à moi.

– …

– J’aurais dû me taire ?

– Il ne te manque pas de morceau, mais si c’est tout ce qui te dérange, ça peut s’arranger facilement, tu sais.

– Non, non, merci mais non. Je tiens à chaque bout de mon corps, répondis-je rapidement, agitant les mains devant moi.

– Oh… Bon.

Il semblait un peu triste, il pensait certainement que j’allais vraiment les rejoindre, et qu’ajouter l’exploration exclusive de cette ruine allait faire pencher la balance et me convaincre définitivement. Il ne s’attendait pas à ce que je refuse et pense plus à mon avenir à long terme qu’aux bonnes fortunes que les Repoussants auraient pu m’apporter rapidement.

– Mais je veux bien venir explorer les ruines !

J’exhibais un grand sourire, montrant le plus de dents possibles et essayant de lui faire part de ma bonne volonté, mais il avait sûrement pris sa décision bien avant parce qu’il me répondit aussitôt :

– Non, désolé, le nouveau. Mais nous ne faisons pas d’exception.

Son visage était grave, en plus d’afficher la déception de ne pas avoir pu m’enrôler dans son équipe de bras cassés. Et de jambes. Et d’un peu partout, en fait.

À bien y réfléchir, ces types étaient dans un tellement sale état, comment est-ce qu’ils comptaient explorer une ruine d’un ancien temps ? Si je restais logique, elle devait être bourrée de pièges ou de monstres en tous genres…

– Ce n’est pas dangereux, comme exploration ?

Semblant voir un espoir dans ma question, il s’exclama :

– Ah, non, pas du tout ! Il y a quelques pièges, mais rien d’alarmant, et puis les quelques monstres qu’on y trouve sont uniquement ceux qui y sont entrés après son apparition. Une ruine sur Irus, c’est une partie de plaisir, et des trésors gratuits ! Rejoins-nous ce soir à la tombée de la nuit, et nous sortirons sans être remarqués pour aller piller cette ruine. Elle est perdue dans les montagnes, d’ici-là, personne ne l’aura repérée. Nous serons les premiers à y pénétrer.

– Oh, d’accord. Mais non. Ma décision est prise, et je ne vous accompagnerai pas.

Sans dire un mot, il baissa la tête, déçu, et me salua avant de s’en aller. J’avais presque de la peine pour ce pauvre bonhomme qui espérait tellement me voir rejoindre sa bande…

Mais une fois seul, j’entrepris d’interroger un peu Zhou XueFang, qui s’y connaissait un peu en ruines.

– Dis… Parle-moi de ces ruines.

Je t’ai déjà tout dit… Ah, quoique, peut-être… Mais ce n’est pas quelque chose de sûr…

– Oui ?

Il attisait ma curiosité. Maintenant, il fallait que je sache.

J’avais quelque peu étudié les apparitions aléatoires de ruines… Et j’avais cru comprendre qu’elles n’étaient pas si hasardeuses que ça. Il y avait un certain mécanisme qui les faisait apparaitre à certains endroits à certaines dates, et j’ai tenté de l’étudier. Je n’étais pas loin de percer ce secret, et… Et je suis mort. Après tout, si l’ancienne civilisation a disparu, on suspecte que c’est parce qu’ils étaient si puissants qu’ils ont tous subi l’ascension divine… Et comprendre leurs secrets pourrait permettre de comprendre également une puissance démesurée.

– Ouh, ça fait beaucoup à assimiler, tout ça. Donc si je comprends bien, tu étudiais ces ruines ?

Tout à fait.

– Peux-tu me dire quelque chose d’autre sur ces ruines ?

J’ai peur que non. Mais ce que je peux faire pour toi, c’est tenter de deviner l’emplacement de celle qui vient d’apparaitre dans les montagnes. Tu veux aller y faire un tour ? Si nous parvenons à la trouver avant la tombée de la nuit, nous les coifferons au poteau.

– Et tu me demandes si ça m’intéresse ? Evidemment ! Tu crois que je vais hésiter ? J’ai besoin de puissance, et tu me dis que je peux en trouver dans ces ruines, et sans rencontrer de vrais dangers. Comment pourrais-je refuser ? Allons-y tout de suite, nous avons toute la journée.

Comment comptes-tu sortir d’ici ?

Il me prit au dépourvu. Il avait raison, je ne savais pas où j’étais, ni dans quelle direction partir, ni si les abords de la Ligue étaient gardés, ni si…

– Je vais juste sortir, dis-je en haussant les épaules.

Qu’est-ce que ça doit être facile, d’être toi.

– Ouaip. Je sais.

Mais je ne pouvais pas aller me promener dans les montagnes sans un moyen de transport. J’avais vu au loin, dans l’enceinte de la Ligue, ce qui semblait être des montures volantes. J’aurais bien aimé conduire un rhinocéros comme le doyen, mais je supposais que c’était son animal de compagnie personnel, n’en ayant pas vu d’autre. Et je ne me voyais absolument pas la lui voler, en encore moins lui demander de me la prêter.

Par contre, ces espèces de chauves-souris géantes que j’avais remarquées pendant à un haut porche étaient équipées de selles. Il y en avait au moins une dizaine, et il était quasiment certain que je pourrais en « emprunter » une plus facilement que le super rhinocéros laineux de mes rêves.

En mettant le pied dehors, je me rendis compte que je n’étais pas si loin, finalement. Elles pendaient, là-haut, à une centaine de mètres au-dessus de ma tête, un peu plus loin.

– Mais est-ce que je vais réussir à piloter une créature pareille ? …Bon, allez. De toute façon, ma décision est prise. J’y arriverai forcément, elles ont été dressées pour ça.

Je me mis en route tout en continuant à sentir le Qi tourner dans mon corps et se diriger lentement vers mon dantian, qui l’absorbait dans un fracas silencieux. Une pierre spirituelle était très loin d’être suffisante pour ouvrir la troisième porte Terrestre, mais il fallait passer par là. Le tout étant de ne pas louper le coche et de raffiner la deuxième dès que je le pouvais, et ainsi de suite pour ne pas perdre de temps.

Effectivement, en y pensant, le plus long dans la cultivation était le temps nécessaire pour que le Qi de la pierre renforce celui de mon dantian. L’absorption de la pierre elle-même n’était pas trop compliquée, il suffisait de la digérer en dirigeant le Qi qui en sortait vers mes veines spirituelles et mes méridiens.

Et puis, …attendre.

Mais pour le moment, je n’étais pas encore là. J’arrivais rapidement au pied d’une immense tour qui n’était pas gardée, et au sommet de laquelle pendaient les créatures volantes. À l’intérieur, un simple escalier en colimaçon montait droit jusqu’en haut sans escale et sans rampe. Il ne fallait pas tomber !

Mais c’était sans compter sur mon endurance. Monter une centaine de mètres à peine n’était pas… Enfin… Bon, d’accord, je suis arrivé en haut après trois pauses et complètement épuisé, les cuisses en feu. Je dus reprendre mon souffle, assis sur la dernière marche, pendant plusieurs minutes, me massant les jambes au passage sous le regard intrigué d’une chauve-souris géante qui, contrairement à ses sœurs, ne dormait pas.

– Salut, toi.

– Kliiii, kli kli kli.

– Hé, t’as vu ça, elle répond. Zhou XueFang, tu as vu ?

J’ai vu… J’ai entendu, surtout. Bon, tu comptes vraiment la chevaucher et t’en aller ?

– Evidemment ! Cette douleur aux jambes n’est rien ! Elle passera.

Alors allons-y. Attrape sa bride, accrochée là.

Une corde de cuir était effectivement attachée à un anneau au mur. À bien y regarder, chaque bête possédait son propre anneau d’accroche, et il était facile de choisir celle que l’on voulait monter. Je m’approchai du vide pour détacher ses rennes, et j’eus le malheur de regarder en bas du coin de l’œil.

– Oh… Woo… Hé… Là, c’est…

Reculant de deux pas, la tête me tournait.

Tu as le vertige, Osumba ?

– Non ! Je suis un fier guerrier qui n’a peur de r… Oh… Mais c’est vachement haut, en fait…

J’avais osé pencher la tête en avant pour regarder en bas à nouveau. Comment allais-je pouvoir monter un truc qui aller décoller de cette hauteur, sans avoir jamais pratiqué ?! Je courais au suicide. Et c’était sans compter sur son caractère. Si jamais la chauve-souris ne m’aimait pas, ou si elle avait peur de moi ? J’étais noir, après tout, et elle pouvait instinctivement essayer de me faire passer par-dessus bord.

En même temps, je ne pouvais plus vraiment reculer. Je voulais à tout prix sortir de la Ligue seul et aller explorer cette ruine, et il était évident qu’on ne me laisserait pas passer les portes si j’y allait en marchant gentiment.

Je devais à tout prix miser sur ma chance. C’est ça qui me faisait peur.

Regardant volontairement vers le ciel pour essayer d’oublier ce qu’il y avait, ou plutôt ce qu’il n’y AVAIT PAS sous mes pieds à peine quelques mètres devant moi, je m’avançai et attrapai fermement la bride de ma future monture pour la détacher.

Ce fut apparemment un signal pour elle, parce qu’elle se décrocha en battant violemment des ailes en se retournant et vint se poser devant moi, à l’endroit. Elle avait été bien dressée… Se penchant vers le sol dans une posture soumise, pour m’aider à monter, elle attendit sans bouger.

La voyant de près, j’étais impressionné. Elle mesurait plus de 4 mètres de long et sans doute bien plus que ça en largeur si elle déployait ses ailes. On pouvait monter à deux sur la selle, et je ne me fis pas prier pour l’escalader. Docile, elle releva la tête lorsque je fus bien assis et, pour mon plus grand bonheur, attaché à la selle grâce à des lanières de cuir prévue pour ça !

– Héhéhé. Qui a dit que j’avais le vertige, hein ? Tu croyais vraiment que j’avais peur de tomber ? Regarde-moi, est-ce que j’ai l’air d’avoir peur ?

…Vraiment ?

La chauve-souris se redressa, secouant la tête pour se débarrasser de la poussière dans laquelle elle avait traîné. Tout son corps vibra de droite à gauche.

– Woh, WOAH ! Doucement ! Hééé !

J’eus soudain une folle envie de vomir en apercevant le vide à côté de moi.

Qui n’a pas le vertige, tu disais ? N’oublie pas où je suis… Tu crois pouvoir te pavaner devant moi ? Hahaha !

Il se foutait de ma gueule ! Mais je ne pouvais rien y faire, je n’allais pas me frapper moi-même pour lui faire du mal, je risquais surtout d’être le seul à souffrir. Alors je ne répondis rien, et me contentai de donner un léger coup sec sur les rennes pour faire décoller ce que j’espérais ne pas être la toute dernière monture de ma vie.

Et elle comprit immédiatement ce que je voulais. Elle se retourna et d’un coup de patte, bondit pour prendre son envol, ses immenses ailes déployées et battant la cadence encore plus rapidement que mon pauvre cœur affolé.

– … Uuuuuuh…

Je sentais que tout ce que j’avais mangé, qui s’élevait à une pierre spirituelle déjà complètement digérée, menaçait de sortir à tout moment. Je n’avais pas le mal de l’air. J’étais totalement paniqué.

Mon visage devait certainement avoir viré au vert, tandis que mes bras tremblaient tant mes mains serraient fermement les bandes de cuir me servant à diriger la bête. Les articulations de mes doigts étaient blanches tant je serrais les poings, mais je n’en avais rien à faire.

Du calme. Tu vas nous faire une syncope… Il serait idiot que tu tombes dans les pommes en plein vol, hein ? Même si tu es attaché…

Attaché… Mais oui, j’étais attaché ! …Mais j’avais peur quand même ! Ce n’était que du cuir, et s’il ne tenait pas le coup ! Et si la selle se détachait ! Je ne pus m’empêcher d’imaginer l’intégralité de toutes les situations qui pouvaient arriver et mener à une catastrophe.

– Uhh… P… Par où doit-on aller ? …Argh.

Autant en finir au plus vite. J’avais fait mon choix, il fallait maintenant aller de l’avant.

Si je ne me trompe pas, alors la ruine qui est apparue doit se situer quelque part dans cette direction.

Il ne me désignait rien depuis l’intérieur de mon ventre, mais je savais. Je savais quelle direction ses yeux fantomatiques regardaient. Et je décidai d’y aller.

Il me fallut un moment avant de réaliser que pour faire comprendre à ma monture ce que je voulais, je devais insuffler du Qi dans les rennes. C’était une matière spéciale qui transmettais mes ordres à l’animal, apparemment. En tout cas, ça fonctionnait même si ce n’était pas le cas.

Nous filâmes à une vitesse folle dans une direction où deux pics jumeaux se dessinaient. Bien entendu, je savais où je devais aller, et plus nous nous en approchions, plus ce que Zhou XueFang me disait correspondait à des coordonnées précises.

Personne ne me suivait. On aurait dit que j’étais passé inaperçu, en m’envolant sur mon monstre volant sans permission. Peut-être n’avait-on pas besoin de permission pour ça, finalement ? Et si l’envol d’une chauve-souris géante n’était que la plus banale des situations ? Me rassurant quelque peu sur ce plan, je prenais tout doucement l’habitude de la hauteur également.

À vrai dire, on aurait presque pu dire que je m’amusais… Presque. Et presque n’est point, aussi hurlai-je quand ma fidèle monture se rua presque à la verticale vers le bas, agile comme un dieu, au moment où nous arrivâmes près de notre destination.

Osumba. Regarde, là-bas. J’avais raison.

– On dirait… Une vieille église ? Un temple ? Quelque chose dont il manque le toit ?

C’est ça. Il y a fort à parier qu’il s’agit d’un ancien temple, dédié à une divinité depuis longtemps oubliée. Et comme je le pensais, cette apparition suit également les règles que je m’apprêtais à percer.

Il m’épatait.

– Mais alors, tu sais réellement où vont apparaître les ruines ?

C’est maintenant que tu le réalises ? Tu m’as fait confiance jusque-là sur quelle base ? Juste pour plaisanter ?

– Non, mais…

Alors que je débattais avec le type qui logeait dans mon dantian à titre gratuit, la bête volante avait atterri devant l’entrée, et après s’être presque allongé au sol, commençait à lécher ses pattes avant, au bout de ses ailes.

Je bondis pour me retrouver au sol, et ce fut d’ailleurs la première fois de ma vie que j’avais envie de me mettre à quatre pattes et de l’embrasser.

– C’est moins grand que ce que j’imaginais de loin…

J’étais bien moins impressionné maintenant que lorsque je voyais le bâtiment depuis les nuages. Il n’était pas très grand et de forme carrée, uniquement affublé d’une tour, carrée elle aussi. La pierre grise qui le composait semblait des plus banales, et j’aurais pu croire qu’il ne s’agissait là que d’une ruine qui n’avait jamais bougé, s’il n’y avait pas eu cette sensation l’entourant, cette aura étrange.

C’est bien une ruine venant de l’Ancienne Civilisation. Je suis formel ; tu peux sentir les vagues de Qi temporel qui l’entoure…

– Qi temporel ? Mais tu ne m’as jamais parlé de ça. C’est égal…

On ne sait pas ce que c’est. C’est bel et bien du Qi, mais on ignore d’où il vient, comment le créer, c’est comme s’il était lui aussi une relique d’un lointain passé, n’existant plus aujourd’hui.

– Oh…

J’étais un peu déçu. Je me voyais déjà étudier un Qi inconnu, et devenir le plus fort des cultivateurs.

Désolé.

– Non, ça va.

Par contre, j’avais une folle envie d’entrer. Réellement. Il y avait des trésors à l’intérieur, je le savais, et les dangers étaient bien moins importants que les richesses que j’allais pouvoir trouver. Clairement, ça valait le coup.

Au moment où j’allais poser le pied à l’intérieur, une étrange sensation s’empara de ma nuque. Je ne pouvais pas dire comment je le savais, mais j’étais observé. Une paire d’yeux me scrutaient, et je ne pouvais déterminer s’il s’agissait là d’un regard amical ou hostile.

Me retournant d’un seul coup dans la direction que j’estimais être la bonne, je vis une tête s’enfoncer dans un buisson, rapidement suivie par des bruits de pas courant dans la direction opposée. On m’avait suivi ?!

Quelqu’un se sauvait, et j’entrepris de lui courir après. Bondissant par-dessus le fourré, j’atterris directement face à un croisement sur ce qui ressemblait à un vague sentier de montagne, peut-être à peine emprunté par des animaux… Enfin, des monstres.

– Merde ! Il est parti par où ?!

Osumba, ne perds pas de temps. Même s’il t’a vu, à moins qu’il ne possède un moyen de transport caché, il va mettre plusieurs heures à retourner à la Ligue, qui semble être le seul rassemblement d’humains des environs. Le temps qu’il revienne, on sera parti.

– Tu en es certain ? Comment peux-tu savoir que cette ruine ne va pas être plus longue que les autres à fouiller ? Que je ne vais pas me retrouver coincé dans un piège ?

Mais tout en lui demandant ça, j’avais déjà commencé à rebrousser chemin. Bien sûr que j’allais y entrer, j’étais là pour ça, après tout. Si ce type que j’ai aperçu dans le buisson s’était sauvé, alors tant pis pour lui. Je ne savais de toute façon pas pourquoi il était là, dès le départ, et en fin de compte, je m’en moquais s’il ne se mettais pas en travers de mon exploration.

– Allons-y.

Prenant une grande inspiration, je franchis ce qui devait sans doute jadis être une porte d’entrée, traversant par la même occasion ce qui restait de Qi temporel.

– Est-ce que je peux raffiner ce Qi ?

L’idée saugrenue me vint comme ça. L’endroit en était empli, et s’il s’agissait d’un Qi mystérieux, alors peut-être qu…

Oublie ça. De nombreux autres ont essayé avant toi. Ce n’est pas un Qi que l’on peut raffiner. Tu vas perdre ton temps à essayer.

– Je vois. J’aurais eu une bonne idée, au moins.

La lumière du jour filtrait à travers le toit en ruine. L’intérieur du bâtiment ressemblait vraiment à une petite chapelle occidentale, comme j’avais pu en voir dans des ouvrages historiques. Il y avait des vieux bancs – qui, s’ils n’avaient pas été en pierre, seraient sans doute complètement pourris – mais également une espèce d’autel tout au bout, recouvert de vigne et de ronces.

– Il y a quelque chose…

Quelque chose ? Que veux-tu dire par là ?

Zhou XueFang ne le sentait pas ? Etrange… Pourtant, je pouvais clairement ressentir la puissance qui se dégageait de cet autel. Irrésistiblement, je m’en approchais. Pas à pas, il fallait que je découvre ce qui était à l’origine de cette attraction… J’avais réellement envie de voir, il le fallait.

Osumba ? Il y a quelque chose ?

Je ne l’entendais qu’à moitié, comme une voix lointaine, résonnant dans la pénombre d’un ravin.

– Là… Juste là…

Il n’y a rien, ici, mon jeune ami. Reprends-toi. Tu devrais découvrir, derrière cet autel, une trappe, menant au sous-sol de ce temple. S’il suit la même règle que toutes les autres ruines, alors les trésors seront…

– Garde tes trésors… Je veux cette puissance…

Tu m’entends ? Est-ce que tu me comprends ?

Je me mis à arracher à mains nues les ronces et les lianes qui entouraient l’autel. Le sang me ruisselait jusque sous les coudes, mais je m’en fichais. Il fallait absolument que je nettoie tout ça pour accéder au cœur même de l’autel.

– Regarde… Tu ne le vois pas ? C’est magnifique. Ce… Cette chose… Elle me veut…

Il y avait sous mes yeux une forme gravée à même la pierre, et aussi éblouissante que dix soleils. Je dus plisser les yeux pour ne pas avoir mal. Il s’agissait d’un caractère que je ne connaissais pas, et…

Qu’est-ce que tu regardes, Osumba ?! Il ne peut pas y avoir de piège ici, ça n’est jamais arrivé ! Ce n’est donc pas une illusion… Osumba ? Osumba !

– Elle ne me veut pas de mal. Elle me veut.

Je couvris sans trop y songer la lumière de ma main. Je ressentis une vive brûlure sur ma paume, et la retirai par reflexe, soufflant dessus. Cela dit, elle n’était pas brûlée, pas même un tant soit peu blessée.

Et quelque chose frappa mon esprit, de plein fouet, me percutant comme une balle tirée au milieu de mon front, me faisant voler en arrière et tomber au sol.

– Qos… Qos… Je comprends, maintenant. Elle s’appelle Qos.

De quoi parles-tu ? Pourquoi es-tu tombé à la renverse ? Eh, ça va ?

– Je viens de trouver une rune du Paradis. Elle s’appelle Qos.

Me rasseyant sur le sol froid et dur au milieu de débris de bois et d’une végétation éparse, je compris que je venais de trouver une rune. M’asseyant immédiatement en tailleur, je me mis à méditer, à la chercher en moi, à en faire converger chaque infime partie dispersée dans mon corps vers mon dantian afin de la reconstituer.

Je comprenais l’essence de cette rune, la connaissance m’avait été accordée. Elle s’était éclatée en moi, et circulait à la recherche de pouvoir. Il fallait que je m’en serve pour bâtir le pilier du Paradis. Voilà pourquoi Zhou XueFang n’avait rien vu. Les runes lui étaient invisibles.

Osumba ? Il ne faut pas perdre de temps… Si jamais l’homme qui s’est enfui revient…

– Je ne peux pas, répondis-je les yeux fermés. Je dois absolument faire ça avant qu’elle ne se dissipe.

La rune n’allait pas rester longtemps en moi. Si je ne la recréais pas au plus vite, elle disparaitrait, et serait perdue à jamais. Je le savais.

Et petit à petit, je sentis cette énergie étrangère dans mon corps, éparpillée dans les recoins les plus infimes de mes cellules, de mes méridiens et de mes veines spirituelles, se rassembler. D’abord un peu, quelques parties par-ci par-là, et puis en morceaux plus gros, et puis je sentais cette lumière chaude traverser mon corps à la recherche de ce qui lui manquait…

Jusqu’au moment où elle fut entière. La rune Qos était là, elle flottait dans mon Qi, à l’intérieur de mon dantian.

J’ouvris les yeux. Je sentais qu’ils émettaient une lumière aussi vive que celle de la rune lorsqu’elle était gravée sur l’autel. Mais ça ne me brûlait pas. Pas du tout, même. Autour de moi, alors que je ne l’avais pas demandé, le Bagua du Taiji apparut en un tourbillon de ténèbres, vortex tranchant et informe dont j’étais le centre.

Devant moi, je vis mon Qi s’agrandir, et se matérialiser petit à petit jusqu’à former un pilier noir et brillant, comme un concentré de Qi. Un pilier de plus d’1,50 m, rond et dans lequel je pouvais voir mon propre reflet. Sur celui-ci, juste en face de mon visage, était gravé la rune Qos, dans toute sa splendeur, et d’un noir plus profond que la nuit.

Incroyable. Tu as donc trouvé ta première rune… Une rune du Paradis, rien que ça.

– Le pilier du Paradis est puissant ?

Les runes de Paradis sont puissantes quand elles représentent un pouvoir puissant. Le crédo du pilier du Paradis est « Etablir l’esprit de la réalité ». Si le pouvoir n’est pas ridicule, alors tu viens de tomber sur quelque chose d’exceptionnel. Dis-moi, quel est le pouvoir de la rune Qos ?

– …

Il est si mauvais ?

– Je…

Ne sois pas comme ça ! Dis-moi !

– La rune Qos… Le pilier du Paradis des Ténèbres Qos permet de…

Osumba ! Encore une hésitation comme ça et je ne te parle plus pour toute la semaine !

Il était vraiment, vraiment intéressé par les runes ! Mais je comprenais, c’était l’un des seuls mystères qu’il n’avait pas pu résoudre lorsqu’il était en vie.

Et moi, je pleurais.

– Ce pilier permet de… transformer… de changer… la couleur des êtres vivants… de les teinter de ténèbres, irrémédiablement. C’est nul !!

Quoi ? Je ne comprends pas…

– Je peux transformer les gens en noirs. C’est tout. Voilà.

J’étais triste. Moi qui pensais être le seul noir du coin, et pouvoir m’en servir comme je l’avais fait pour vider la place publique la veille, je me rendais maintenant compte que je pouvais maintenant produire d’autres noirs en masse… Vive la production en série…

J’avoue que ce n’est pas ce qu’on peut appeler le plus grand des pouvoirs. Mais qui sait, peut-être que tu pourras lui trouver une utilité à l’avenir. Pour le moment, nous n’étions pas venus pour ça, et tu as perdu plusieurs heures à créer ce pilier. Aventurons-nous dans le sous-sol du temple.

L’entrée était en réalité une simple trappe en bois.

Attention, si tu n’es pas sûr de toi, alors prépare-toi bien d’abord. Une fois cette trappe franchie, le passage sera scellé pout une journée complète.

– Pas de problème, je suis prêt.

Je soulevais la trappe, et vit une échelle, que je m’apprêtai à descendre. Au moment où j’allais poser le pied sur le premier barreau, une voix résonna derrière moi.

– Stop !

Me retournant par réflexe, je vis Kong Jia, l’handicapé. Mais il n’était pas censé venir avant la nuit ?

– Alors le type qui m’espionnait…

– C’était un Repoussant qui surveillait les ruines, bien entendu.

– Et pourquoi veux-tu m’arrêter ?

Tu es idiot ? Il veut y entrer avant toi. Tu as refusé leur offre, et en même temps tu veux leur voler ces ruines sous leur nez.

– Tu es idiot ? Ces ruines sont à nous. Si tu essayes d’y entrer… Je risque d’être un peu moins gentil, même si en toute franchise, j’aimerais rester en bons termes avec toi. Cela dit, ces ruines… Nous sommes ceux qui les avons découvertes. Retire-toi, je te prie. Laisse-moi entrer.

– …

 


 

Concernant les choix précédents, 95 contre 9 ont choisis de ne pas rejoindre l’équipe des bras cassés. Je me suis donc très largement plié à votre volonté !

Pour aujourd’hui, nous allons décider de ce que va faire Osumba, et attention, pesez bien TOUTES LES CONSEQUENCES, parce que rien n’est pris à la légère. Je le dis souvent, mais ça ne fait pas de mal de le répéter.

Sorry, there are no polls available at the moment.

 

Comme d’habitude, il vous faut être connecté pour pouvoir voter, et comme d’habitude, les votes se termineront vendredi soir, à 23h. Vendredi 21 septembre, donc, pour ceux-là.

 

Bon courage pour faire le choix qui s’avèrera le plus intéressant !

Raka
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22 thoughts on “LDO : Chapitre 8

      1. Ah non c’est juste que j’ai pas excessivement le temps en ce moment donc je fais au plus court.
        Je vais faire de mon mieux cela dit pour la suite.

  1. Merci pour le chapitre Raka 🙂
    Je lui est laissé l’accès parce que je sais pas se que va faire Osumba si Kong Jia n’accepte pas de faire équipe et vu qu’il a déjà une rune qui pourrai lui servir pour plus tard.
    Le mec en face est quand même 3 fois plus fort que lui. Je pense qu’une retraite s’impose et sa permet d’évité de se mettre à dos tout une association qui a l’air quand même d’être bien aidé dans une ligue d’assassin qui pourrait les jeter quand il veulent. Il doit y avoir quelqu’un de puissant qui doit faire pression pour les gardez à mon humble avis.

    Ps : je suis désolé pour les fautes. 😉

  2. Merci pour le chapitre.
    Pour ma part j’ai choisi le fait qu il se jette dans le trou, car osumba reste quelqu’un de simplet et il veut de la puissance tout de suite, donc pour moi sa colle au personnage.

  3. J’ai voté pour la proposition d’entrer tous les deux. 

    Déjà, il peut essayer d’entrer dans la trappe, mais c’est pas sûr qu’il y réussisse vu que le repoussant est beaucoup plus puissant que lui et aura surement le temps de l’intercepter. Et même s’il réussissait, il se mettrait à dos tout un groupe de barjots. Ce qui dans le court terme lui vaudrait beaucoup d’ennuis.

    Et pour ce qui est d’essayer sa nouvelle technique… C’est pas une si mauvaise idée, mais c’est à double tranchant. J’aime beaucoup ce choix malgré que je ne l’ai pas voté.

    Bref j’attends la suite avec impatience ! 

  4. moi j’ai voté pour qu’il utilise sa technique pour le transformer en noir comme ça sa fera une diversion et il pourra sauté

  5. Personnellement le faite de le transformer en noir serait une bonne idée la surprise créer par de changement le surprendrait et il aurait le temps de se jeter dans le trou, de plus il n’aurait pas besoin de s’occuper des conséquences, qui croirait quelqu’un qui c’est transformer en noir alors que c’est si mal vu ?

  6. Je me dit on a deja eu une technique donc mieux vaut la garder secrete donc le laisser et abandonner la quete au tresor me parait la meilleur idee du moins tant qu’il ne sera pas suffisament fort pour garder les tresor qu’il recupere pour lui

  7. Merci pour le chapitre .
    Bien que cette nouvelle capacité semble pourave . Il pourrait faire exécuter quel qu’un en le faisant passer pour un contrôlé .

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