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Chapitre 74 – Le donjon imprenable (4)

 

Tandis que je voulais rentrer dans le donjon, il y avait toujours une foule exceptionnelle à l’extérieur. Le temps était venu, il me restait moins de dix minutes avant de redevenir une architecte. Je m’approchai de l’entrée en me frayant un chemin parmi désormais un attroupement de plus de quarante explorateurs. Toute la population de Roram était-elle là ?!

Non, j’en avais vu plus que ça rien qu’en me promenant. Il en manquait encore.

Toujours était-il que la barrière était fermée et interdisait à quiconque d’entrer. Je ne pouvais rien y faire, j’étais obligée d’attendre et de prier pour réussir à entrer avant la fin du temps imparti. J’étais fin prête, près de l’entrée, à bondir à la moindre fluctuation de la barrière énergétique ; j’étais confiante, je pourrais y entrer avant les autres.

J’étais également prête à fuir si jamais les chose se compliquaient. Si jamais je n’arrivais pas à voler une place à temps, alors je m’en irais avant les deux dernières minutes. Après tout, ça me laissait le temps de voir venir : les explorateurs mourraient en moins de trente secondes à chaque fois.

— Allez… Sors de là, murmurai-je à l’attention de celui qui monopolisait les lieux actuellement.

Une minute s’écoula. Puis deux, quatre et six. Enfin, lorsqu’il ne resta plus qu’une minute et trente secondes, je pris ma décision. La barrière n’était toujours pas tombée et le type à l’intérieur devait être sacrément costaud pour avoir tenu tout ce temps face à Friderik !

Je fis demi-tour, je ne pouvais pas me permettre d’attendre plus longtemps. Me frayant à nouveau un chemin à travers la foule, je pus la distancer rapidement. J’allais bientôt être hors de la vue de tous et je perdrais mon apparence humaine. Je n’aurais d’autre choix alors que de relancer le sort et de repartir pour un tour de vingt-quatre heures supplémentaires…

— C’est toujours mieux que de me faire découvrir… conclus-je pour me rassurer.

Je bondis derrière un arbre afin de vraiment être cachée des yeux indiscrets et hasardeux qui auraient la malchance de me voir me transformer.

Le temps était écoulé et je pus sentir des fourmillements le long de mon corps, les mêmes que lorsque j’avais lancé le sort.

— Ouf… Bon, reste plus qu’à le relancer, hein ? Polymorphe humain.

Ne perdant pas de temps, je lançai à nouveau le sort d’humanisation. Ceci dit, rien ne se passa et mes mains étaient toujours d’un rouge aussi coloré que celui du cœur qui battait alors à toute allure dans ma poitrine.

— Hein ? Mais… Polymorphe humain. Polymorphe humain !

Je retentai le coup plusieurs fois, mais pas une seule d’entre elles ne parvint à m’offrir les effets escomptés. Je me demandais déjà ce que j’allais bien pouvoir faire quand j’entendis une voix venant depuis l’autre côté de l’arbre, non loin.

— Wuying ? Est-ce que ça va, Wuying ?

Putain, Wayne !!

— Wuying ? répéta-t-il en s’approchant avec la voix un peu plus inquiète, je t’ai vu bondir derrière cet arbre, de loin. Est-ce que tout va bien ? Réponds !

Ma voix était-elle seulement la même, désormais ? Je n’avais même pas assez de confiance pour l’affirmer assurément ! Je n’osais pas lui répondre et lui, il s’approchait. Je n’avais plus le choix…

— N… N’approche pas ! criai-je à son attention.

Mais il sembla se méprendre et enchaîna sur une autre question :

— Heh ? Mais à qui parles-tu ?

Il ne pouvait pas s’imaginer que je m’adressais à lui ? Se sentait-il trop important pour qu’on puisse lui interdire d’approcher, ou peut-être ne comprenait-il simplement pas la logique derrière mon ordre ? Toujours était-il qu’il était là, juste de l’autre côté de l’arbre. Et il en fit le tour pour tomber nez à nez avec moi.

— …

Il était dans la foule d’explorateurs lorsque mon armure les avait rendus fous. Aussi ne pouvait-il plus se faire affecter par la magie du rut… Mais ça ne l’empêcha pas d’ouvrir de grands yeux face à moi, et il dégaina instantanément son épée.

— Architecte !! hurla-t-il, peut-être pour que tout le monde puisse bien l’entendre.

— Ah ! répondis-je par réflexe.

Je ne savais plus que dire. Devais-je le tuer ? J’allais devoir affronter toute la foule des trente et quelques explorateurs stationnés devant le donjon.

Soudain et par le plus grand des miracles, au lieu de me frapper, il m’adressa une question des plus agressives :

— Tu lui as volé son armure ?!

Il grimaçait et clairement, clairement, me haïssait. Il se jeta sur moi en tentant de me balancer un coup de bouclier. Mais je possédais désormais la maîtrise du bouclier et je pus comprendre et prévoir son attaque, ce qui me permit de l’esquiver au dernier moment. J’avançai simplement le pied pour lui faire perdre l’équilibre et gagner un peu de temps.

Réfléchis… Réfléchis, bon sang !!

— Je… Euh, je… balbutiai-je, ha ha ha !

J’éclatai alors d’un rire des plus hautains. Je n’avais plus trop le choix. Dans tous les cas, j’allais mourir dès que tous ces explorateurs allaient réaliser et arriver. Fuir ? Pour aller où ? Sur Albion, c’était comme courir dans la tanière du tigre en criant que le petit déjeuner était servi.

— Cette petite exploratrice m’a vue, cachée derrière cet arbre, et a voulu se jeter sur moi ! m’écriai-je de toutes mes forces afin que les autres puissent également saisir le contenu de mon propos, mais j’ai été plus forte et l’ai massacrée ! J’ai même volé son armure juste avant sa mort ! Ha ha ha ! Moi qui suis une entité démoniaque et aux goûts lugubres, je trouve que cette armure me va si bien !!

Je trouvais que j’en faisais un peu trop, mais ce qui était dit était dit, après tout.

Wayne se releva et enregistra ce que je venais de lui dire.

Il tomba aussi naturellement dans le panneau que ce que j’espérais. Il ne me demanda même pas comment j’avais fait pour sortir de mon donjon, en tant qu’architecte. Son épée ne fit qu’un mouvement et avant que je puisse réaliser, les mains toujours posées sur les hanches d’une manière affirmée et le sourire aux lèvres, j’avais la gorge tranchée.

Sans avoir le temps de prononcer le moindre mot, je m’effondrai et les ténèbres m’enveloppèrent.

 

*

 

[Niveau 18 / 22765 crédits.]

Ma mâchoire faillit se décrocher. Pendant plus d’une minute, je restai là, devant le miroir, à me demander si c’était une blague ou un autre bug du système. Je m’attendais évidemment à gagner un, peut-être deux niveaux, mais je venais d’en recevoir sept d’un coup !

— C’est une blague ?

Calculant rapidement le nombre d’explorateurs qu’il aurait dû tuer en une nuit, je me rendis compte que Friderik n’avait absolument pas chômé. De plus, mon donjon étant devenu une attraction touristique majeure à Roram, il devait y avoir du monde au balcon.

Je m’étais faite tuer en-dehors de mon donjon, et je n’avais donc même pas perdu mes crédits !

— Putain. Désolée à la déesse de la politesse, mais putain de merde.

Je courus aussi vite que je le pouvais en direction de la boutique de donjons. Sans même prendre la peine de laisser le vendeur me saluer, je criai en fracassant la porte :

— Montre-moi ce que tu as du niveau 12 au niveau 18 !

Le principal intéressé leva la tête d’un air surpris avant d’ouvrir de grands yeux.

— Vous… Mademoiselle, vous êtes déjà aussi haut niveau ?!

— Oui ! lui répondis-je hâtivement, alors dépêche-toi de tout me montrer !

Il sembla désolé, fit une légère moue et baissa la tête, sans me lâcher du regard pour autant.

— Je suis désolé, mademoiselle, mais vous êtes sous le coup d’une accusation de crime. Vous n’avez pas accès à ma boutique. Vos droits d’achat ont été scellés pour le moment, et ils le resteront tant que vous ne vous serez pas présentée devant l’administration.

Pour la deuxième fois en quelques dizaines de minutes, j’étais sous un choc intense. Je ne savais plus que lui dire. Une accusation ? Un crime ? Mais qu’avais-je fait ?!

Il sembla encore plus navré devant mon incompréhension.

— Je suis réellement impuissant, mademoiselle, je ne peux que suivre les ordres. Même si je le désirais, je ne pourrais pas désobéir.

— Oui… Oui, je sais… murmurai-je sans trop m’écouter parler, mais quel crime ai-je… ?

L’administration savait-elle pour ma balade sur Albion ? Avoir reçu une classe était-il un crime ? Étais-je accusée d’avoir perdu Pythagore, ou de m’être enfui en désobéissant à mon Maître de Secte ? Savaient-il… pour les géants ?! Je ne pouvais que trouver tant et plus de raisons pour lesquelles je pourrais être accusée d’un quelconque crime. Après tout, les trois quarts de ce que j’avais fait depuis mon arrivée à Imperos étaient des actes en quelque sorte répréhensibles. Évidemment, ça allait bien craquer à un moment ou un autre, et ils allaient découvrir des choses !

Pour autant, je me sentais lésée ! Si je n’avais pas toujours suivi les règles, c’était la plupart du temps à cause de bugs, et dans le pire des cas pas très grave. Je ne voyais aucune raison d’en arriver au point de m’accuser de crimes et de révoquer mes droits !

Il fallait dire que je n’étais pas outrageusement perdue ; après tout, même si je ne pouvais plus acheter quoi que ce fut pour mon donjon, je n’en avais plus vraiment besoin. J’avais Friderik, et c’était tout ce qu’il me fallait, la nuit précédente me l’avait largement prouvé.

Il fallait absolument que j’aille voir ce qu’il se passait du côté de l’administration.

Et si je devais être bannie… Je trouverais le moyen de retourner dans mon donjon à ce moment. Même si je devais retourner chez les géants – après tout, je possédais toujours cette flûte – et demander à Pythagore de me créer un sort afin de remplacer les miroirs, je n’étais pas perdue.

Je pouvais toujours vivre ma vie d’exploratrice pendant cent ans s’il le fallait ! Ils allaient voir de quel bois se chauffait Qian Wuying ! Ce n’était pas une administration ridicule qui allait me mettre des bâtons dans les roues ! Ici, c’était moi qui décidais de ce que je pouvais faire ou non !

Le pouvoir de la justice ? Peuh ! Inutile face à mon génie ! Un bannissement ? Qu’ils rêvent m’avoir punie si ça leur faisait plaisir !

Grognant intérieurement et désormais définitivement remontée contre ce système de merde qui accusait les gens pour tout et n’importe quoi, je sentis mon visage crispé et même le pauvre vendeur ne savait plus que dire.

Sans lui faire mes adieux, je sortis comme une furie en claquant la porte avant de me diriger en lévitant à toute vitesse vers le bâtiment administratif dans lequel j’avais fait bannir Krahn le Sympathique.

— Bordel ! Vous allez voir ce qu’il en coûte de m’accuser pour n’importe quoi !

J’étais maintenant persuadée, en voyant se dérouler dans la rue ce qui me semblait assurément être la même chasse à l’Homme qu’avant mon départ, que la cause de tout ce ramdam était Pythagore et que celui qui avait plus que probablement lancé une accusation contre moi était ce connard de Maître de Guilde !

— Je te retiens, toi !

Filant toujours à toute vitesse, je me promis de lui démonter la gueule si j’arrivais un jour à être assez puissante. Punition ou pas punition, je m’en foutais alors royalement. Il fallait qu’il comprenne ce qu’il en coûtait de se mêler des affaires de Qian Wuying !

— Je vais détruire ta putain de Secte !! Tu ne perds rien pour attendre !!

Complètement hors de moi, je ne m’arrêtai même pas devant les portes du bâtiment administratif et les ouvris de plein fouet et dans un vacarme de tous les diables, en hurlant à pleins poumons.

— Mes niveaux, bordel de merde ! Mes articles de donjon ! Mes compéteeeeeences !!

L’employé à l’accueil me regarda arriver comme un boulet de canon et ne prêta pas plus attention que ça à la tonitruance de mon entrée. Il se contenta de me demander, de la façon la plus paisible qui puisse être :

— Bonjour, mademoiselle. Quel bon vent vous amène de bon matin ? Avez-vous un rendez-vous ? Une plainte à formu…

— Une plainte, oui, c’est ça !! J’ai une plainte à formuler, nom d’un échafaudage !

— Oh ? me répondit le PNJ impassible, dans ce cas, veuillez vous adresser à…

— Rien à foutre ! hurlai-je, je veux voir la personne responsable de l’accusation qui a été formulée à mon encontre !! J’ai quelques mots à lui dire, façon Qian Wuying !

Cette fois, l’employé se leva et m’observa avec plus d’attention. Je venais de lui avouer être une criminelle en cavale et son job dans l’administration impliquait bien évidemment, même si je ne le compris qu’un peu trop tard, mon arrestation.

Il tenta de calmer la situation en me parlant calmement, en m’expliquant que tout irait bien. Je savais que ce n’était que du pipeau ! Il ne m’avait pas répondu, et j’attendais toujours de savoir de quoi il retournait !

Au bout d’un instant, le grand type à qui j’avais eu affaire lors de l’affaire Krahn sortit de son éternel bureau et me toisa de haut en bas.

— C’est bien elle, confirma-t-il. Elle est recherchée depuis ce matin, 7 h. Mademoiselle, veuillez me suivre, dans cette pièce, je vous prie.

Il me paraissait bien poli, et moi… moi, je n’avais pas le choix. Il avait beau me proposer sereinement de le suivre, je me sentis tirée en avant par une force irrésistible – le pouvoir de la justice. N’essayant même pas de lutter, je ne fis que mâcher mon ressentiment ; le jour où je choperais ce Maître de Secte, je ferais tout pour foutre son travail en l’air. Son travail ? Sa vie, oui ! Je me fis alors la promesse de demander à Pythagore un sort me permettant de bousiller son expérience et ses niveaux.

Le grand type m’installa sur la chaise de l’accusé et s’assit en face de moi, de l’autre côté du bureau. Croisant les doigts et posant son menton dessus, il commença :

— Bien. Mademoiselle. Tout d’abord, vous me voyez désolé pour cette façon de faire un peu brutale. Je sais bien que les gardes ne sont pas venus vous signifier votre état d’accusation, et que vous êtes là de votre propre chef malgré tout. Les choses peuvent se passer fort bien si vous coopérez. Après tout, le crime qui vous est imputé n’est pas si grave que ça, ha ha… À peine quelques anné… Oh, mais procédons, voulez-vous ?

J’ouvris la bouche – la seule chose que je pouvais encore bouger – et fis de mon mieux pour paraître le plus calme possible, réprimant ma fureur et tentant de ne pas faire ressortir les veines sur mon front.

— Et on me reproche quoi, exactement ? demandai-je de but en blanc.

Il fallait bien commencer par quelque part, et entendre l’accusation de sa bouche serait déjà un bon début. Il me regarda droit dans les yeux et m’accusa sans honte aucune :

— Le système a émis à votre encontre une accusation de piratage, de triche ou de contournement. À vous de m’expliquer, parmi ces trois accusations, quel est la nature exacte de votre crime.

Je ne sus que répondre. Je m’attendais à ce qu’il me balance que j’avais relâché un fou dans les rues, ou même provoqué sa disparition, pourquoi pas. Que j’avais refusé de me soumettre à un ordre du Maître de Secte ne m’aurait pas surpris. Mais… Triche, contournement ? Piratage ?!

Ils sont au courant pour les bugs. Et merde.

Raka
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18 thoughts on “DMS : Chapitre 74

  1. Je n’ai pas encore lu le chapitre mais je tiens à te dire que j’aime vraiment vraiment beaucoup ton histoire !

  2. Elle est grillé
    Apres cest pas de la triche ou du contournement ou du piratage, mais du usebug. Ca passe du coup non?;)

  3. Merci pour le chapitre
    Je trouve que c’est pas vraiment du piratage ou de la triche parce que c’est le système qui lui donne ces compétences complètement cheater

    1. Mais elle ne s’est pas gênée pour les exploiter sans les signaler.
      Ce type en face n’est pas « le » système, il ne fait qu’appliquer des règles. Qui sait ce qu’il pourrait décider ? :3

      1. Parcequ’elle savait peut-pas qu’on devait signaler les bugs.
        Donc c’est du contournement intentionnelle votre honneur

  4. Merci pour le chapitre 

    Ils sont soupe-au-lait quand même, c’est juste un peu de bug exploit.

  5. Pffffff
    Le système il est un peu soupolè quand même
    Merci pour ce chapitre de cette histoire géniale 

    D’ailleurs,
    Es-ce que tu connais Wattpad ?
    Une appli où tu publies des histoires
    Si tu postais les 5 premiers chapitres par exemple et indiquais que la suite est sur xiaowaz.fr plus de personnes viendrait voir no ?

  6. Nooooooooon. Non non non non NON. Me dis pas que tu va nerf le slime, l’empêcher d’aller dans les dongons ou le renvoyer sur Albion… Pas Friderik…

  7. En même temps le système espérait coi ? On lui donne une capacité c’est pour c’en servirent ? surtout retour comment tu peux faire autre chose que tricher avec une capacité pareil. Par contre j’avoue Friderik c’est chaud.

    1. Ca y est. Raka est officiellement un dealer. Ceci dit, DMS reste une drogue douce bien que hautement addictive…

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