IATM Chapitre 67
IATM Chapitre 69

Chapitre 68 : La guerre, toujours la guerre… 6/7

 

Qu’est-ce qu’il se passe ?

Prain, le soldat de garde, était totalement perdu. Le campement des soldats de Rins était en flammes, et ils avaient de toute évidence grand-peine à maîtriser l’incendie. C’est tout excité qu’il ouvrit la porte à Luther Bale et ses hommes revenant après leur assaut. Hélas, ce n’était pas Luther Bale.

Des soldats de Rins !

Il ne le réalisa hélas que trop tard, les intrus s’étaient déjà engouffrés dans la brèche qu’il avait lui-même ouverte.

« Sonnez la cloche ! Préparez-vous, on nous attaque ! » hurla-t-il à s’époumoner.

Dans la panique, ses camarades s’activèrent et sonnèrent l’alarme pour tenter de reprendre le contrôle de la situation. En vain.

« Argh ! »

Des centaines de flèches les assaillirent de toutes parts tandis que les cavaliers commencèrent à passer le campement à sac.

« Tuez-les tous ! »

« Incendiez leurs tentes ! »

« Libérez leurs chevaux ! »

À en juger par le chaos sonore, ils étaient au moins 5000. Prain était comme bloqué sur place.

Comment est-ce qu’ils ont fait ?! Je dois prévenir le Colonel !

Il fit soudain volte-face, l’air plus déterminé que jamais. Cependant, il ne se mit pas à courir. Quelqu’un venait derrière lui… Prain tenta à nouveau de se retourner, mais n’y parvint jamais. La pointe d’une lance l’atteignit à la nuque, et il retomba au sol comme un sac de sable.

« Chargez ! » cria le lancier répondant au nom de Roan.

Les troupes d’Istel étaient incapables de réagir. Neuf jours de marche forcée dans les pattes, leur fatigue était telle que seule une poignée d’hommes était restée monter la garde, s’en remettant totalement à Luther Bale pour assurer leur défense. D’un air hagard et en chemises, ils sortirent des tentes avec pour seule protection leur arme. Il en était de même pour les plus gradés, du simple Major au Colonel.

« On nous attaque ?! »

« Bon Dieu, ce sont les armures de Rins ! »

« Le Colonel Bale serait tombé ?! »

« On s’en fout, empêchez-les de passer ! Éteignez les incendies ! »

Les commandants eurent beau mieux réagir, leur campement était dans un tel chaos qu’ils ne parvinrent pas à résister. C’était un véritable massacre.

« Ordures, retournez dans votre pays de merde ! »

« Crève, sale istellien ! »

Tout à leur inverse, les soldats de Rins étaient comme enragés. L’un d’eux était particulièrement féroce, mélangeant à la fois les capacités de l’anneau de Brent, l’artéfact de Kalian et la technique de combat du Monarque de Feu. À chacun de ses gestes, c’était plusieurs hommes qui mouraient. Il n’eut de pitié pour personne, pas même ceux au sol, qu’il acheva les uns après les autres.

Pas le choix…

Car en effet, malgré le succès de cette attaque, Rins ne pouvait espérer totalement défaire les troupes d’Istel. Il fallait en tuer autant que possible avant de fuir.

Surtout, je dois garder les idées claires. La moindre erreur pourrait me coûter cher.

C’était une attaque surprise, et elle devait le rester. Le campement contenait malgré tout plus de 8000 soldats ennemis, qui finiraient bien par reprendre l’avantage.

« Major Mendel ! Reculez ! » cria-t-il tout à coup.

Mendel se rendit soudain compte qu’il s’était enfoncé beaucoup trop profondément dans le camp. Il tira sur ses rênes et regarda autour de lui afin de se rendre compte de la situation.

« Vous avez entendu ?! On bat en retraite ! » ordonna-t-il aux nombreux cavaliers à sa suite, après quelques secondes.

Laissant de côté des cibles pourtant faciles, les cavaliers entreprirent de faire marche arrière.

Heureusement que Roan m’a prévenu… Enfin, on s’en tire à bon compte.

Tout du moins le crut-il jusqu’à ce qu’un son particulièrement déplaisant ne vienne lui chatouiller les oreilles. Plus grave qu’une flèche mais tout aussi rapide, la source du son s’avéra être une lance. L’impact fut terrible et tua trois soldats d’entrée de jeu. Les soldats qui faisaient jusqu’à présent face à la formation de Mendel s’écartèrent sur le côté.

« Qu’est-ce qu’ils foutent ? » s’étonna Mendel, tout comme ses soldats.

Profitant de l’accalmie, les cavaliers penchèrent légèrement la tête en avant, comme pour mieux voir vers l’intérieur du camp. C’est alors qu’ils comprirent la raison de cet étrange enchevêtrement d’événements. Tout comme Roan.

Des chevaliers ?!

Même lui n’en avait encore jamais affronté. Outre leurs armures étincelantes, les chevaliers se différenciaient aussi des autres soldats par leur maîtrise du mana. Ils n’étaient qu’une trentaine, mais c’était bien assez pour ne surtout pas tenter de les ignorer.

« Battez en retraite ! Maintenant ! » hurla à nouveau Mendel.

Tirant de toutes leurs forces sur les rênes de leurs montures, les cavaliers tentèrent de s’extirper de là. Trop tard, trop lents, toujours était-il que les chevaliers étaient déjà sur eux. Leurs longues épées ne trouvèrent aucune résistance, et des dizaines de cavaliers commencèrent déjà à tomber.

Bon sang, qu’est-ce que font des chevaliers ici ?!

Que faire, sinon serrer les dents ? Dans le groupe d’assaut, seuls quelques individus, dont Roan faisait partie, étaient rodés au mana. Il en allait de même pour le reste de l’armée de Rins.

Tu parles d’un point faible !

C’était précisément ce point qui avait poussé Roan et Aaron Tate à augmenter sans cesse le nombre de troupes dans les terres de l’est… mais Benjamin Doyle avait préféré ignorer la menace, de crainte sans doute de se salir les bottes.

Il n’y a vraiment que sur le Comte Lancephil que je peux compter…

Il était le seul à avoir immédiatement réagi au rapport du Baron Tate, mais son armée et ses chevaliers avaient déjà beaucoup à faire pour la défense de leur propre territoire, plus au nord. À l’inverse, le royaume d’Istel était organisé en une force concentrée et avait même pu s’octroyer le soutien de chevaliers…

J’étais sûr qu’ils n’arriveraient qu’au moment du combat décisif…

Roan soupira.

Si une escouade de mages se pointe maintenant…

Mais mieux valait sans doute ne pas y penser. Le raid était un succès, il était temps de passer à la deuxième étape afin de conserver l’avantage.

On doit sonner la retraite maintenant !

Il serra sa lance et commença à avancer en direction des cavaliers, toujours plus nombreux à tomber sous les coups des chevaliers. Soudain, un détail attira son attention.

Je rêve, ou ce sont des bleus ?

Leurs mouvements, quoique puissants, étaient aussi lents que peu assurés. Ceci expliquait en outre leur présence : ils étaient là en formation. Leur manque d’expérience était une aubaine.

Ils seront bien trop concentrés sur les cavaliers de Mendel pour faire attention à moi.

Il prit une grande inspiration et entreprit de concentrer du mana dans sa paume tandis qu’il leva calmement le bras. Et d’un seul coup, il lança son arme comme un javelot. L’un des chevaliers l’entendit et se mit face à elle pour la bloquer.

« Qu’est-ce que tu fais, imbécile ?! Tire-toi de là ! » lui cria celui qui devait être son chef.

Le jeune chevalier réalisa que le projectile arrivait beaucoup trop vite pour avoir été lancé par un simple soldat. Il tenta alors de se jeter au sol pour l’éviter, mais c’était déjà trop tard.

« Ugh… Pardon, chef… »

Désolé de sa propre bêtise, le chevalier retomba à même le sol en déglutissant. L’hémorragie étouffa ses derniers mots, mais les chevaliers alentours n’eurent pas besoin d’une longue explication pour comprendre que quelque chose leur avait échappé.

« C’est impossible… »

« Comment un soldat a pu tuer un chevalier à une telle distance ?! »

Leurs regards se remplirent d’une incrédulité mêlée de crainte. Mendel et ses cavaliers profitèrent de la cohue pour tenter à nouveau de s’échapper.

« Rattrapez-les ! » se reprit le chevalier en chef.

Furieux, les chevaliers se reprirent aussitôt et s’élancèrent à leur poursuite. C’est alors qu’ils virent pleinement celui qui avait tué leur camarade, celui qui leur fonçait dessus, et qui n’avait plus même d’arme à leur opposer.

Il faut que je gagne du temps !

Confiant dans ses capacités à pouvoir au moins couvrir la retraite de ses frères d’armes, Roan vint à toute vitesse à leur rencontre, les poings chargés de mana. Pour cause, il ne s’était pas contenté de travailler les possibilités de synergie de la technique de pugilat de Reid avec sa lance.

« Espèce de taré, je vais t’apprendre ! » lui lança d’un air méprisant l’un des chevaliers les plus avancés.

Ils n’étaient plus tout à fait bleus. La mort de leur camarade les avaient éveillés à la fièvre du champ de bataille et à ses relents de mort. Le chevalier abattit alors toute la colère du monde vers le mystérieux soldat au visage juvénile, son épée en position haute. Roan n’eut aucun mal à éviter le coup et frappa des deux poings dans l’armure.

« Offffff ! »

Le chevalier retomba en arrière, repoussé par une force si violente qu’elle en avait plié son armure, laissant deux magnifiques empreintes de poings au niveau de l’estomac. Profitant du choc, Roan lui subtilisa son épée et le poignarda à la nuque.

« Le fils de pute ! Chopez-moi ce con ! » beugla le chef, furieux d’avoir perdu un deuxième chevalier en un temps si court.

Sidérés de la situation, les chevaliers entreprirent de l’attaquer à plusieurs. L’un d’eux fut immédiatement empalé par l’épée longue, balancée par Roan à la manière de sa lance, avant de soulever le corps et de leur envoyer pour les ralentir. Pas tout à fait stupides, ils évitèrent sa carcasse en se séparant. Hélas, c’était justement là-dessus qu’avait compté Roan. En une fraction de seconde, il était déjà à leur niveau et récupéra sa lance, repoussant d’un coup de pied le cadavre qui la détenait.

Il fit alors un saut en arrière pour marquer une distance et plaça sa lance vers le ciel, avant d’y déverser du mana. Le groupe de Rins était trop occupé pour prêter attention à ses faits et gestes, aussi pouvait-il laisser libre cours à ses talents réels. Il la fit alors danser, exécutant successivement plusieurs attaques dévastatrices.

« C’est pas un soldat normal ! »

« Faites attention, la lance va trop vite ! »

Ils réalisèrent enfin à quel type de soldat ils avaient à faire. C’était pourtant bien Roan qui se trouvait en difficulté. Il s’était certes entrainé à des techniques exotiques, mais depuis si peu de temps qu’il ne pouvait espérer survivre à l’assaut conjoint des 27 chevaliers restants.

Moi aussi, il va falloir que je batte en retraite.

Dans tout ce qu’il entreprenait, Roan ne comptait pas sur ses seuls souvenirs. C’était vingt ans d’expérience au combat qui guidaient son intuition. Elle lui indiqua ainsi qu’il était temps pour lui de frapper.

« Arrrgh ! »

Il n’y eut plus que 26 chevaliers restants. Pour autant, ces soldats-là n’étaient pas à prendre à la légère, évitant ses coups tandis qu’ils essayaient de l’atteindre. Cependant, comment prévoir qu’il allait à nouveau leur envoyer son javelot improvisé ? Déstabilisés, ils s’écartèrent à nouveau sans même tenter de la bloquer, le souvenir de la mort de leur camarade encore trop frais.

Maintenant !

Roan frappa du gauche un chevalier en plein visage avant de commencer à courir vers les portes du campement.

« Encore ?! Rattrapez-le, restés pas plantés là, abrutis ! » aboya encore le chef.

Un ennemi capable d’utiliser du mana n’était pas à laisser libre. Il fallait le capturer ou le tuer.

« Bloquez-le ! »

Roan vit soudain des soldats d’Istel lui faire front. En dépit de l’urgence de la situation, son regard était parfaitement calme.

Gauche, droite, là je fonce sur la droite… Reste un seul soldat.

La Larme de Kalian n’avait de cesse de le ravir. Sûr de ses déplacements, il courut en évitant les soldats, attrapant à la nuque ou au bras les rares à pouvoir l’atteindre de leurs épées ou de leurs lances, avec pour résultat de blesser leurs propres collègues… Rapidement, ils n’eurent d’autre choix que de le laisser avancer, sous peine de continuer à s’entretuer. Ainsi, Roan parvint à atteindre l’entrée du campement. Sain et sauf.

« Où crois-tu aller comme ça ?! »

Alors que l’agitation gagnait les soldats, s’accusant tantôt de meurtre, tantôt d’inconscience, un chevalier le chargea à toute vitesse, s’isolant même de sa formation. Roan le reconnut immédiatement.

« Viens te battre en homme ! »

Sa voix résonna comme le tonnerre. C’était Vernon Pollet, une formidable lame au tempérament de feu qui lui avait valu le surnom de l’Ours Fou d’Istel. Roan s’écarta encore davantage des soldats, frappant quelques-uns du plat de sa main droite. Il n’était pas en position de combattre à proprement parler. C’est alors qu’il vit, vers un coin légèrement excentré du campement, une monture de guerre isolée.

Parfait !

Il avança à nouveau vers l’intérieur du camp, vers le cheval, Vernon Pollet aux talons. C’est alors qu’il entendit un cheval renifler et hennir. Hélas, pas celui qu’il visait, mais bien celui du chevalier.

« Arrête-toi ! » lui cria Vernon, l’épée levée.

Roan eut un léger moment d’hésitation, conscient du terrible danger qu’il courait. Regardant autour de lui, il vit quelque chose.

Oh ! Parfait !

Il reprit immédiatement ses esprits et entreprit à nouveau de courir vers la monture de guerre, un léger sourire au visage. C’est alors que Vernon tenta de le frapper.

Maintenant !

Roan se jeta à terre, peu avant que ne leur parvienne à tous deux un sifflement. Celui d’une flèche, qui lui chatouilla à peine l’oreille tandis qu’elle vint se ficher en plein dans l’œil gauche de Vernon Pollet.

« Aaaaaaargh ! »

Il laissa retomber son épée en même temps que lui-même. L’occasion était trop belle pour la laisser passer. Roan enfourcha immédiatement sa monture et partit au galop, une nouvelle fois vers l’entrée du campement.

« Ce con m’a crevé l’œil ! Je t’aurai, sale merdeux ! » hurla Vernon avec une telle colère qu’il s’en irrita les cordes vocales.

De nouvelles flèches abondèrent en sa direction, mais c’était cette fois lui qu’elles visaient et Roan fut contraint de se coucher sur sa monture, tout en se dirigeant non pas vers le campement de Rins, mais vers une zone légèrement isolée, plus en hauteur. Il s’y trouvait un jeune soldat.

« Attrape mon bras ! » lui cria Roan.

L’intéressé, en réponse, s’exécuta aussitôt et se servit de la force de Roan afin de grimper. Ils prirent enfin la direction de la place forte de Rins.

« Harrison, tu m’as sauvé la vie ! »

« Fiou… Je vais être honnête, je n’étais pas sûr d’y arriver. » répondit Harrison.

« Tu plaisantes ? Il n’y a pas eu la moindre place pour l’erreur, tu l’as eu ! »

L’Ours Fou d’Istel l’aurait-il réellement tué ? La flèche d’Harrison avait tout au moins tué la possibilité, et il se sentit le plus sincèrement du monde reconnaissant envers ce génie de l’archerie.

« En tous cas, le raid est un succès ! » s’exclama Harrison, l’air satisfait.

« Non, ce n’est pas qu’un succès. C’est une formidable victoire ! » répondit Roan, tout aussi fier.

Mais son inquiétude n’avait pas tout à fait disparu.

La guerre ne fait que commencer…

Nostra
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10 thoughts on “IATM Chapitre 68

  1. Merci beaucoup pour le chap ! je l’imaginais plutôt brun passant assez inapercu… à des kilomètres de son apparence assez voyante

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