Chapitre 29 – Les chasseurs et la proie
Considérant la réputation de la grande forêt du nord parmi les gens des contrées plus australes et civilisées, on pourrait s’attendre à n’y trouver là qu’un piège à rats géant dans lequel chaque animal et chaque plante tenterait de vous tuer à la moindre occasion. La vérité, Zorian l’avait découvert, était un peu plus complexe. Tandis que oui, la forêt était pleine de créatures dangereuses – même les cerfs étaient agressifs et avaient tenté d’éviscérer Zorian à plusieurs reprises au lieu de fuir face à son approche – il était entièrement possible de passer une journée entière sans avoir à mettre votre vie en danger si vous saviez ce que vous faisiez. D’accord, Zorian avait un avantage injuste dans le fait d’être capable de sentir les dangers avant que les dangers ne l’approchent ; de plus, la région qu’il fréquentait une zone périphérique – donc légèrement moins inamicale envers l’humain que les profondeurs du bois et la nature sauvage peu touchée dans le nord lointain. Pourtant, il était confiant. Même un civil suffisamment talentueux pouvait se déplacer dans la forêt sans risquer sa vie, et c’était encore plus vrai pour un mage. Merde, il allait très bien à ce moment-même alors qu’il n’avait que moins d’un mois d’expérience.
Habituellement, Zorian ne cherchait pas à se déplacer sans se faire détecter. L’objectif principal de son périple était l’expérience de combat et éviter le danger était simplement contre-productif. Cette fois, cependant, se faufiler était plus ou moins obligatoire. Il ne voulait vraiment pas se laisser distraire aux alentours d’une menace du niveau d’un chasseur gris et il voulait clairement pas alerter le monstre qu’il était venu chasser par un combat violent, lumineux et bruyant à quelques pas de son antre. Il contourna lentement la zone atour dudit antre à la recherche de menaces annexes et d’un terrain hostile qui pourrait le gêner s’il devait choisir de fuir dans n’importe quelle direction. En plusieurs endroits, il grava des ensembles de runes explosives dans l’écorce des arbres et sur les rochers exposés – ce ne serait certainement pas suffisant pour éliminer un chasseur gris mais potentiellement suffisants pour lui offrir le temps nécessaire à se téléporter en toute sécurité.
Il faillit réussir à atteindre l’antre sans le moindre combat. Heureusement, le trio mouches-moustiques-truc qui essayaient de le bouffer étaient facile à dérouter – et brûlaient merveilleusement bien – et le combat ne fut pas assez violent pour attirer l’attention de l’araignée monstrueuse. Zorian choisit un grand arbre à proximité – mais pas trop près – de l’antre du chasseur gris et lévita jusqu’à la plus haute branche, sur laquelle il s’installa pour sortir les jumelles qu’il avait enchantées un peu plus tôt dans ce but.
L’endroit était digne d’une carte postale – Un petit ravin rocailleux entouré par la forêt, des lignes sédimentaires plutôt jolies croisant la pierre et quelques parterres d’herbe stratégiquement placés qui poussaient entre les fissures. Sur l’un des murs se trouvait un trou parfaitement circulaire qui se trouvait être l’entrée d’une grotte. D’un noir profond, il n’était même pas particulièrement notable et n’avait pas l’air spécialement menaçant. Si Lac d’Argent ne lui avait pas dit qu’il était là, il était parfaitement possible que Zorian l’aurait totalement manqué ou se serait même aventuré à l’intérieur un jour ou l’autre.
Ç’aurait été la dernière erreur de l’une de ses vies. Les chasseurs gris étaient d’excellents sauteurs et étaient capable de se déplacer à une vitesse surréaliste. Zorian aurait parié n’importe quoi que celui à l’intérieur de ce trou pouvait bondir d’un seul coup de pattes de sa grotte jusqu’à l’autre côté du ravin et qu’il pouvait le faire avant que Zorian le réalise.
Le chasseur gris était fondamentalement un monstre très simple. Il s’agissait d’une araignée grise et très touffue de la taille d’un homme adulte. Il s’avérait que ce monstre était également incroyablement rapide, puissant, résistant aux sorts et également aux coups. Il pouvait courir plus vite qu’un mage sous accélération, parcourir des distances phénoménales d’un seul bond, dévier des balles d’armes à feu classiques et les sorts de bas niveau comme un canard glissait sur l’eau, ignorer la plupart des sorts à effet direct et broyer l’acier. Oh, et sa morsure était sacrément venimeuse, un poison qui, au lieu de détruire les tissus et perturber le système nerveux comme la plupart des poisons, pirataient simplement la capacité d’un mage à utiliser le mana. Une fois mordu, vous ne lanciez plus de sort pendant un bout de temps et il fallait des semaines au poison pour s’évacuer totalement de votre système. Apparemment, c’était un type de poison qui avait évolué naturellement pour chasser les créatures magiques qui se trouvaient être les proies typiques des chasseurs gris mais les mages humains pouvaient en faire les frais tout aussi méchamment. Simplement, si vous combattiez un chasseur gris seul et que vous vous faisiez mordre, vous étiez mort.
Ces choses étaient connues pour décimer des groupes de mages de combat entiers envoyés spécifiquement pour les chasser. Un sacré exploit pour une créature de plutôt bas niveau – la plupart des monstres non sensibles, aussi impressionnant fussent-ils, étaient facilement attirables dans des pièges et ne présentaient pas un grand danger pour les groupes spécialisés. Naturellement, Lac d’Argent voulait que Zorian aille se confronter seul à cette super-araignée tueuse de mages comme prix pour son aide. Bonne nouvelle, elle ne lui avait pas demandé de la tuer, ce que Zorian aurait sans doute trouvé au-delà de ses capacités pour l’instant. Mauvaise nouvelle, sa requête n’était qu’un poil plus simple que ça. Elle voulait qu’il aille se frotter à la femelle qui vivait dans cette grotte qu’il observait actuellement et qu’il lui vole quelques-uns de ses œufs.
Le cycle de vie des chasseurs gris était un mystère total, considérées trop dangereuses pour être étudiées autrement que via des rapports post-combat ou vivisection, mais Zorian pariait sur le fait que les mères, comme la plupart des mères, étaient sauvagement protectrices. Récupérer un simple œuf allait probablement s’avérer être un challenge de tous les diables. En toute probabilité, elle serait réticente à s’éloigner de son sac d’œufs quelle qu’en soit la raison et attendre la chance d’en dérober comme un opportuniste était un doux rêve. Futile. Pour ce qu’il en savait, cette femelle araignée restait très sûrement assise sur son sac d’œufs jour et nuit et vivait de ses réserves de gras jusqu’à la naissance des bébés.
Zorian rangea les jumelles dans son sac et entreprit de coucher des notes dans le calepin qu’il avait emmené avec lui. Comment récupérer les œufs sans se faire massacrer comme un malpropre était une question qu’il se poserait une autre fois – il était actuellement là à des fins d’observation, afin de voir si la tâche était seulement possible. Autant il désirait prouver à cette vieille cinglée qu’il était capable de mener à bien une autre quête qu’elle estimait sans doute impossible, autant mourir là serait incroyablement stupide. Il était sur une limite de temps. Une limite à long terme mais mourir à répétition parce qu’il décidait qu’affronter des adversaires trop forts pour lui était une norme serait un gâchis sans nom. Chaque fois que la boucle recommençait de façon précoce, c’était autant de temps perdu, une boucle qu’il n’utilisait pas à son plein potentiel. S’il pouvait trouver un moyen de récupérer les œufs et qu’il était certain que ça fonctionnerait, il le ferait. Dans le cas contraire… Et même s’il parvenait à trouver une solution, il ne tenterait le coup qu’à la toute fin de la boucle, quand ce qu’il risquait de perdre se limiterait à deux ou trois jours.
— Très bien, marmonna-t-il en refermant le calepin. Voyons voir à quoi j’ai affaire.
La première chose qu’il fit fut de tenter de localiser la chasseuse grise afin de s’assurer qu’elle n’était pas à l’extérieur pour l’heure. Il ne pouvait pas pister des chasseurs gris via divination uniquement car il n’en avait jamais aperçu auparavant et il ne possédait pas de partie de corps provenant de ces bêtes. Cela dit, un sort de localisation simple se devait de fonctionner si on le mettait à la recherche d’une araignée géante en direction de la grotte. Puisque les deux autres variétés d’araignées géantes vivant dans la région – l’araignée arboricole géante et l’araignée mygalomorphe géante pour être précis – ne vivaient pas dans les grottes, la conclusion serait évidente. Il tenta d’espionner sa cible, ce qui échoua aussitôt. Bon… Techniquement, ça fonctionna, mais la grotte était parfaitement obscure. Pas de cristal brillant ou de mousse lumineuse qui se trouvaient parfois là de façon naturelle – une simple caverne ordinaire emplie de ténèbres impénétrables qui cachaient tout.
Bordel, il n’avait pas pensé à ça. Se triturant le cerveau à la recherche d’une combinaison gagnante qui lui permettrait de scruter l’intérieur de la tanière sans avoir à retourner fouiller les livres en ville, il décida de se servir de deux sorts précis. Tout d’abord, l’œil arcanique qui créait un globe oculaire flottant au travers duquel il pouvait voir comme s’il y était. Il créa ensuite une boule lumineuse volante grâce au sort de lanterne flottante mais en altérant les paramètres afin qu’elle suivit l’œil ectoplasmique où qu’il aille. Il envoya ensuite ce même œil directement vers la grotte, fermant se ses propres paupières pour connecter sa vue à celui de sa création. Il y avait une chance que la lumière énerve la chasseuse grise mais il doutait qu’elle put sortir le chasser juste pour ça ou qu’elle pourrait simplement le traquer jusqu’en haut de son arbre, pour commencer.
Il s’avéra que soit la chasseuse grise était très, très contrariée par la lanterne flottante, soit elle la vit directement comme une proie potentielle parce que l’œil avait à peine faire quelques mètres dans la caverne, la lanterne sur ses talons, qu’une ombre grise et floue s’écrasa sans prévenir et renvoya violemment la conscience de Zorian dans son corps. Cillant de surprise face à ce soudain changement de perspective, Zorian se sentit aussitôt menacé par l’araignée qui venait de surgir hors de son antre, à la recherche de quelque chose.
Après dix secondes d’observation, Zorian remarqua deux choses. D’abord, les femelles de cette espèce n’avaient pas à rester assise sur leur sac d’œufs pour le surveiller parce qu’elles portaient ce putain de sac d’œufs sous leur abdomen ! C’était absolument et totalement injuste. Il retira tout ce qu’il avait dit à propos de la vieille sorcière lui donnant une tâche plus facile que prévu en ne le forçant pas à tuer la créature – c’était en réalité bien plus dur, il n’obtiendrait les œufs que sur le corps raide et froid de la mère et il devait en plus faire attention à ne pas endommager ce délicat trophée en tuant le monstre.
La seconde chose… Eh bien, l’araignée se rapprochait peu à peu.
Il ne l’avait pas immédiatement noté. Plutôt que de directement se ruer vers lui, elle avait bondi dans une direction aléatoire ; elle s’arrêta un moment comme pour se réorienter, et repartit dans une direction étrange à nouveau. Après avoir répété cette routine pendant quelque secondes, Zorian se rendit compte que les déplacements n’étaient pas totalement dépourvus de sens : il constata avec effroi qu’elle se rapprochait lentement mais sûrement de son arbre à mesure que le temps passait.
Ainsi, l’araignée tueuse de mage possédait un sens hypertrophié lui permettant de le sentir, d’une façon ou d’une autre ? La chasseuse grise le traquait à travers son bouclier. Ses proies naturelles étaient des créatures magiques. Elle possédait un poison étudié spécifiquement pour contrer la magie. Elle possédait plus que probablement un sens lui permettant de ressentir tout être vivant utilisant la magie, borde ! : Plutôt que le protéger des sens de l’araignée, les protections magiques que Zorian avait placées révélaient sa position. Le fait qu’elles étaient si faibles était sans doute la seule raison pour laquelle la chasseuse avait du mal à le pister avec rapidité ; mais elle allait y venir, tôt ou tard.
Si c’était le cas, il était en danger. Il ne pouvait rien faire, le monstre allait finir par le renifler. D’un autre côté, au moment où il tenterait de se téléporter, sa couverture serait certainement totalement explosée.
Dix secondes encore, et l’araignée s’était un peu plus rapprochée. Pas de solution en vue. Zorian décida qu’il devrait faire de son mieux et prier. Prenant une profonde inspiration pour se calmer, il commença à lancer son incantation de téléportation, aussi rapidement qu’il le pouvait.
Comme il le craignait, la chasseuse grise réagit instantanément. Au moment où le premier mot du cantique quitta la bouche de Zorian, elle se tourna et se précipita vers lui en abandonnant son avancée précédente, incertaine et aléatoire. Tout en sprintant vers sa proie, elle se déporta juste assez loin des glyphes explosifs qui se trouvaient sur son chemin, consciente de leur présence et de leur fonction d’une manière ou d’une autre et s’élança dans les airs. Elle percuta verticalement le tronc d’un arbre et bondit une nouvelle fois sur le côté, rebondissant d’arbre en arbre et prenant de l’altitude avec chaque poussée jusqu’à ce qu’elle fut à la fois assez haute et proche pour atteindre la canopée où se situait Zorian.
Il termina le lancement du sort juste à temps et fut aspiré dans un tourbillon au dernier instant. La vision terrifiante d’une araignée géante fendant les airs, pattes en avant et dents noires prêtes à frapper, allait le hanter pour les nuits à venir.
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À la suite de sa rencontre quasi-mortelle avec la chasseuse grise, Zorian décida de mettre la quête de Lac d’Argent en suspens sans limite de durée. Il y avait beaucoup d’autres gens sur la liste de Kael, après tout, et peut-être que s’il parlait à la sorcière dans une nouvelle boucle, elle l’enverrait sur une mission moins suicidaire.
C’était très frustrant, cela dit. Penser à la façon radicale dont il avait été surclassé par ce qui était fondamentalement une bête stupide lui rappela ce dernier mois à Cyoria, quand il avait croisé le fer avec Robe Rouge dans le campement Aranea. Le fait que la chasseuse grise était une araignée géante, tout comme les Aranea, créa un parallèle encore plus dérangeant. Malgré le fait qu’il savait très bien qu’il n’y avait aucune honte à perdre face à une créature que même de célèbres mages peineraient à combattre et qu’il devait s’estimer heureux d’être encore en vie, il trouvait cette impuissance de plus en plus énervante.
Il passa la journée entière qui suivit à traquer des araignées mygalomorphes géantes, d’une taille similaire aux chasseurs gris mais d’une couleur brune et terriblement moins dangereuses, pour les enfumer afin de les faire sortir de leurs trous. Tout ça pour les achever d’une multitude de façons plus sadiques les unes que les autres. Leurs yeux et glandes venimeuses se vendaient bien mieux encore que les peaux de loups hivernaux. Il pourrait faire ça plus souvent.
L’humeur toujours aussi massacrante, il se mit en route pour voir si l’un des autres contacts de Kael serait disposé à l’aider. Lorsqu’il arriva au village où vivait le premier candidat et qu’il fut informé par les habitants que l’homme en question n’avait pas été vu durant les deux derniers mois, il ne s’inquiéta pas. Cette personne était un mage à la retraite fasciné par les familiers – il en possédait six ainsi qu’un grand nombre d’animaux de compagnie plus classiques et était toujours à la recherche de créatures exotiques à ajouter à sa ménagerie. Une absence de deux mois n’avait absolument rien d’inhabituel, pas au point de tirer un signal d’alarme.
Mais d’autres disparitions commencèrent à s’empiler. La vieille herboriste qui retirait parfois des malédictions n’était tout simplement plus là et ses voisins n’avaient aucune idée d’où elle pouvait être allée. Les deux frères qui vivaient dans une tour qu’ils avaient construite loin de la civilisation afin d’y étudier la magie de l’âme en secret n’étaient pas chez eux, la porte de leur demeure détruite et l’intérieur pillé de toute chose de valeur. Le prêtre dans une ville proche dévoué à l’étude des morts-vivants et sur les moyens de les combattre avait été trouvé mort chez lui quatre jours plus tôt de cause inconnue. Il était jeune et on ne lui connaissait pas de problème médical particulier, on suspectait un acte criminel. Un alchimiste spécialisé dans la transformation magique fut mis à mort en-dehors de son village par une meute de sangliers étrangement agressifs. Et ainsi de suite… Seule la mort du prêtre et de l’alchimiste avaient été confirmées, les autres tous partis en voyage soudain ou ayant simplement disparu et elles étaient suffisamment espacées pour que personne ne les considère dans leur ensemble. Mais Zorian savait que ce n’était pas accidentel.
Quelqu’un ciblait avec méthode toute personne possédant des connaissances en magie de l’âme. La seule question se postait quant à la disparition de ces gens : étaient-ils morts ou retenus prisonniers ?
Heureusement, il parvint finalement à localiser l’une des connaissances de Kael. Malheureusement, ce type ne connaissait rien sur la magie de l’âme. Vani était juste un érudit et pourrait, selon Kael, rediriger Zorian vers quelqu’un de plus capable. Probablement. Le seul truc, c’était que Vani adorait parler, sautant d’un sujet à un autre comme ça lui venait et il refusait d’aider quiconque qui ne fut pas poli envers lui. Aussi, toute personne cherchant à obtenir ses faveurs devait s’attendre à devoir faire preuve de patience face à de trop fréquentes digressions.
Zorian pouvait être patient. Il frappa à la porte et fut prestement attiré à l’intérieur par Vani, un vieil homme enjoué qui ne fut pas du tout surpris que quelqu’un vienne lui demander des conseils.
L’intérieur était… encombré. C’était la seule façon de le dire, vraiment. Presque chaque centimètre carré de la maison était empli de boîtes, d’étagères pleines de livres, de piédestaux, de statues, de plantes et d’animaux en bouteille, de présentoirs en verre contenant des modèles de bâtiments et d’autres choses. Là où les murs étaient visibles, ils étaient bien trop tapissés de peintures et de dessins. Tandis que Vani le conduisait vers son bureau, les yeux de Zorian tombèrent sur le statue particulièrement grande et vivante représentant une femme nue possédant de fort imposants… avantages et qui le fit lever un sourcil en direction de l’homme.
— C’est une… euh… déesse de la fertilité, se hâta-t-il d’expliquer. C’est temporaire, un ami me l’a envoyée pour que je la garde en sécurité et vous savez comment ça fonctionne… Fascinant. Peu importe ! Ne pensez pas que j’ignore qui vous êtes, jeune homme ! Vous êtes le chasseur de loups hivernaux !
— Euh… Est-ce un problème ? demanda Zorian.
— Un problème ? éclata-t-il de rire. Bien au contraire ! Enfin quelqu’un qui a fait quelque chose pour calmer un peu ces affreuses bêtes. Elles ne sont pas trop agressives maintenant mais quand viendra l’hiver, ces créatures vont se montrer entreprenantes et attaquer les voyageurs et la communauté. Il y a eu bon nombre de disparitions d’enfants ces derniers hivers et tout le monde sait que c’est probablement la faute des loups. Saloperies qui deviennent de plus en plus confiante chaque année…
— Pourquoi personne n’a jamais organisé de battue, dans ce cas ? demanda Zorian. La Guilde des Mages est plutôt bien équipée pour répondre à ce genre de situations, après tout.
— Il neige durement en hiver dans ces contrées et des villes entières peuvent être coupées du reste du monde pendant des jours et il est compliqué de construire n’importe quel type de réponse dans les temps. La plupart du temps, personne ne découvre même la crise avant des jours, quand plus rien ne peut être fait, répondit Vani en tapotant la table de ses doigts, perdu dans ses pensées. Ou en tout cas, c’est ce que les chasseurs et les autorités aiment à prétendre. Personnellement, je pense qu’ils ont juste peur de l’Argenté.
— L’Argenté ? demanda Zorian, curieux.
— Une rumeur. Il y a quelques années, quand les loups ont commencé à se montrer entreprenants, il y a eu des tentatives visant à organiser une immense battue. Elle a terminé… de façon malheureuse. Selon les histoires, plusieurs meutes de loups hivernaux se sont mises à travailler ensemble afin d’attirer les humains vers des pièges, les séparant en de plus petites cohortes qui furent toutes annihilées dans le détail. Ils agissaient plus comme une armée que comme des bêtes sauvages et les survivants prétendaient qu’ils étaient dirigés par un énorme loup hivernal à la fourrure argentée et brillante. L’Argenté – un alpha parmi les alphas, aussi intelligent qu’un homme et capable de diriger ses frères inférieurs contre les humains. La Guilde des Mages a bien déclaré une tentative officielle visant à éradiquer l’Argenté mais ils ne le trouvèrent simplement pas – ni lui ni aucune preuve du travail de cohésion entre les meutes. Beaucoup d’habitants locaux sont encore convaincus qu’il existe, cela dit : ils disent que quiconque s’aventure trop profondément dans la forêt pour chasser les loups finit par le rencontrer tôt ou tard.
— Je vois, fit Zorian en fronçant les sourcils. Et qu’en pensez-vous, personnellement ?
— Que c’est possible, admit Vani. Nous vivons dans un monde dingue et on ne peut jamais vraiment dire que quelque chose est impossible. Ce pourrait être une expérience qui a dégénéré faite par un mage quelconque dans la forêt. Ce pourrait être une nouvelle espèce provenant du Cœur de l’Hiver. Ou même un mage polymorphe en plein milieu d’une croisade dérangée afin de protéger les monstres assoiffés de sang de ces terribles chasseurs humains… Tout ce que j’en sais, c’est que je suis heureux que quelqu’un ne soit pas intimidé par toutes les élucubrations qui traînent…
Il fallut encore 15 minutes à Vani pour arriver au bout de ce qu’il avait à dire et il finit par demander ce qui amenait Zorian.
— Je viens de la part de Kael, dit-il. Ou plutôt, il m’a indiqué votre nom sur une liste, comme source potentielle de conseils.
— Kael ! s’écria Vani joyeusement. Oh, je me souviens de lui… Vraiment dommage, ce qui est arrivé à sa femme et la vieille Fria. Le Nettoyage a emporté tant de si bonne personnes. Il a toujours sa fille, n’est-ce pas ?
Zorian acquiesça en silence.
— Bien. Les enfants sont le plus grand trésor de la vie. Dites-lui que je l’ai dit. Il m’a aidé à écrire un livre, vous savez ? Vous l’a-t-il dit ?
— Il l’a fait, confirma Zorian.
Kael l’avait prévenu que Vani était un peu bavard et adorait parler de ses livres. Et qu’il était judicieux d’en lire un ou deux avant d’aller le voir. Zorian avait accepté ce conseil et s’était exécuté. Le premier livre qu’il avait lu était celui que Kael avait aidé à écrire en rassemblant les histoires de nombreuses personnes de la région et parlait de l’histoire récent de la région, surtout une grande collection d’anecdotes, quelques-unes amusantes et intéressantes, d’autres parfaitement ennuyantes. Si ce n’était pas pour le conseil de Kael, il n’aurait jamais dépassé le premier chapitre.
— Je l’ai même lu, parmi d’autres.
— Oh ?
— Il s’appelle Histoire d’une Altazia pré-ikosienne, continua Zorian, se demandant s’il devait lui dire la vérité ou simplement le flatter et décidant qu’il allait simplement lui dire la vérité. Je… C’était plutôt intéressant mais je ne suis pas vraiment d’accord avec l’intégralité de son contenu. Ce qui me dérange principalement, c’est que vous persistez à parler des tribus pré-ikosiennes qui vivait à Altazia comme si elles vivaient en autarcie totale alors qu’en vérité, toute la côte sud était parsemée de colonies ikosiennes et des forts s’y élevaient déjà depuis au moins un millénaire. Les Ikosiens n’étaient pas du tout les étrangers que vous décrivez, pour les habitants d’Altazia.
— Ah, mais les preuves historiques montrent clairement que l’influence culturelle de ces états côtiers ne s’étendait pas très loin dans les terres, fit remarquer Vani, l’air triomphant.
— C’est peut-être vrai d’un point de vue strict mais les Ikosiens étaient bien plus avancés technologiquement que les tribus altaziennes dans la plupart des domaines et je pense que vous avez grandement sous-estimé l’effet de la diffusion technologique dans une culture…
Ouais. Ça allait probablement prendre un sacré bout de temps.
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— Ah, merci, dit Vani.
Ils avaient discuté pendant plusieurs heures et Vani semblait étonnamment surpris d’avoir trouvé une personne qui n’était pas d’accord avec ses conclusions tout en étant désireuse d’en discuter. Zorian avait également découvert que l’homme possédait un esprit étonnamment bien construit et avait mémorisé plus d’une demi-douzaine d’encyclopédies parce qu’il se trouvait être un puits de culture. Quoi que Zorian désirait dire sur ses conclusions, il prit son temps pour y réfléchir avec soin.
— Cela fait longtemps que je n’ai pas discuté ainsi avec quelqu’un, ajouta-t-il. Habituellement, les personnes qui acceptent de me parler n’en savent pas assez pour me mettre au défi et ceux qui en savent suffisamment ne sont pas intéressés par la moindre discussion.
— Vous me flattez. Je ne pense pas sincèrement que mes opinions ont le même poids que les vôtres. Je n’ai certainement pas effectué un centième des recherches que vous avez minées à bien, répondit Zorian en se disant qu’engraisser un peu l’ego de son interlocuteur ne pourrait pas faire de mal. Mais je ne devrais vraiment pas vous faire perdre votre temps plus avant. Je suis venu parce que je désirais votre conseil avisé sur la façon de trouver un expert en magie de l’âme.
— La magie de l’âme ? s’étonna Vani dans un froncement de sourcils.
— C’est un problème personnel dont j’aimerais ne pas parler, expliqua Zorian. Il est suffisant de dire que j’ai été frappé par un sort de l’âme aux effets inconnus et que je chercher quelqu’un avec qui en parler pour découvrir ce qui s’est passé exactement afin de m’en protéger à l’avenir.
— Hmmm, murmura Vani. Et Kael vous a envoyé me trouver ?
— Vous êtes sur une liste de nom qu’il m’a confiée, en effet. Cependant, vous êtes le seul que j’ai réussi à trouver. Les autres sont… Eh bien, c’est très perturbant. Laissez-moi vous parler des quelques jours précédents…
Vani écouta en silence la narration de l’aventure de Zorian et apprit pour les disparitions successives dans un malaise grandissant, couchant tout ce que Zorian pouvait dire sur une feuille de papier.
— C’est en effet très dérangeant, acquiesça Vani lorsque Zorian eut terminé. Penser qu’une telle chose pouvait arriver sans que personne ne le remarque… Je vais attirer l’attention des autorités sur ce problème, n’ayez aucune crainte à ce propos. Je me demande qui je puis vous recommander lorsqu’autant de choix évidents sont devenus… eh bien, inaccessibles ou obsolètes. Laissez-moi y réfléchir quelques instants.
Cinq minutes plus tard, Vani trouva une solution.
— Dites-moi, demanda-t-il. Que savez-vous des métamorphes ?
— Qu’ils sont des personnes capables de se transformer en animaux ? tenta Zorian.
— Les métamorphes sont des personnes possédants deux âmes, rectifia Vani. Il y a longtemps, les ancêtres de ces métamorphes pratiquaient des rituels servant à faire fusionner leurs âmes avec celles d’animaux élus pour leur permettre d’adopter la forme de ces bêtes et même accéder à certaines de leurs capacités sous forme humaine. C’est une très ancienne forme de magie qui précède l’invasion ikosienne et je suis navré de dire que la plupart des tribus de métamorphes ont perdu les connaissances des rituels d’origine. De nos jours, ils perdurent par reproduction classique, les enfants héritant des capacités de leurs parents. On dit qu’il existe, cependant, des tribus possédant toujours le savoir ancestral et les moyens de l’utiliser dans notre monde moderne. Tandis que le but d’une telle expertise est de permettre de convertir des humains normaux afin qu’ils puissent rejoindre lesdites tribus, celle-ci pourrait très bien vous permettre d’en apprendre davantage sur votre… problème, quel qu’il soit.
— Je vois. Et où puis-je trouver ces… métamorphes particuliers ? s’enquit Zorian.
— Ça, reprit Vani en écartant les bras d’un geste d’impuissance, je ne sais pas. Les tribus de métamorphes ont une histoire mouvementée avec, devrions-nous dire, les communautés civilisées. Elles veulent rarement être trouvées. Mais ! Je sais qu’il existe une puissante tribu de métamorphes lycanthropes qui vivent dans cette région. Une tribu qui possède définitivement l’expérience que vous cherchez. J’ignore à qui vous devez parler pour obtenir le droit de rencontrer leur dirigeant mais je sais qu’il a envoyé sa fille à Cyoria afin qu’elle y obtienne une éducation sur les formes plus modernes de magie. Elle se nomme Raynie, je pense. Une rouquine. Très mignonne, m’a-t-on dit. Peut-être pourriez-vous démarrer par là ?
Zorian cligna des yeux. Raynie, une lycanthrope… ? C’était… Ouah. Ouais, maintenant qu’il y pensait, certains indices lui avaient échappés.
— Eh bien, répondit Zorian en se levant de son siège. Vous m’avez donné matière à penser. Merci pour votre temps.
— Il n’y a vraiment pas de quoi, sourit Vani. Tuez quelques loups de plus pour moi, c’est tout ce que je demande.
— Une tribu de lycanthropes ne risque-t-elle pas de me détester si je continue à tuer tous ces loups ? s’inquiéta Zorian.
— Ce sont des lycanthropes, pas des lycanthropes hivernaux, conclut Vani. Je suis plutôt certain qu’ils ne s’aiment pas des masses les uns les autres. Leurs cousins blancs ont pour fâcheuse habitude de tuer les loups normaux et d’envahir leurs territoires.
Zorian le laissa sur ces mots, incertain de la façon de continuer.
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— Déjà de retour ? lui demanda Lac d’Argent, ne se préoccupant même pas de lever la tête de son tas d’herbes. Je ne vois pas de sac d’œuf, cela dit.
— C’est parce que maman araignée porte ses œufs collés à son ventre, répondit-il. La tâche est impossible. Pourquoi même m’envoyer à une errance d’imbécile ? Kael m’a dit que vous étiez excentrique mais ultimement inoffensive. Ce n’était pas très inoffensif, j’ai failli mourir.
— Si je pensais que tu étais du genre à foncer tête baissée et à moitié préparé juste pour te faire botter et bouffer le cul par un monstre pareil, je ne t’aurais pas envoyé le faire, pour commencer, pouffa la sorcière. Et de toute façon, n’est-ce pas un peu prématuré pour déclarer un échec, après moins d’une semaine ? Je suis patiente. J’ai attendu des années, je peux pour sûr attendre encore quelques mois jusqu’à ce que tu penses à une solution. Tu es un garçon intelligent, je sais que tu trouveras un moyen.
Zorian ouvrit la bouche mais la referma aussi vite. Soudain, la logique de cette femme semblait bien plus… raisonnable. Elle ne savait pas qu’il était lié à une limite d’un mois, après tout. Pour autant qu’elle était concernée, lui donner une tâche qui pourrait lui demander des mois était parfaitement sensé. Où était l’urgence ? Quant à la nature suicidaire de la tâche donnée… Apparemment, elle avait bien plus confiance que lui en ses capacités. Avait-il vraiment abandonné si rapidement ?
— Quelques mois, c’est trop tard, souffla-t-il. Tout ce qui se passe après le festival d’été est trop tard, pour moi.
Lac d’Argent cessa finalement de triturer ses plantes et le regarda sévèrement, les yeux brillants l’espace d’une seconde.
— Tu n’es pas mourant, conclut-elle. Donc pas de maladie, hein ? Quelqu’un te pourchasse ?
Zorian hésita, l’image de Robe Rouge dansant devant ses yeux et il ouvrit la bouche pour confirmer mais la sorcière lui coupa cette occasion.
— Non, pas vraiment, conclut-elle une fois de plus, en retournant à son travail. Il y a un ennemi mais bon, qui n’en a pas ?
Zorian soupira, irrité, et se leva, décidé à partir avant de perdre son calme et de l’attaquer. Il se ferait probablement démolir, de toute façon. Juste avant de se téléporter, une pensée le frappa.
Et merde, qu’ils aillent tous se faire foutre avec ça. Pourquoi pas, hein ?
— Hypothétiquement parlant, reprit-il, si vous receviez la visite d’un voyageur temporel prétendant connaître votre version future, que lui demanderiez-vous comme preuve ?
— Hypothétiquement parlant, répéta-t-elle, la bouche s’étirant en un rictus cruel, je lui demanderais de retrouver un sac d’œuf de chasseur gris.
Levant les mains en signe de défaite, Zorian se téléporta à Knyazov Dveri, le ricanement sadique d’une vieille femme résonnant dans son dos.
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Dans la sécurité de sa chambre à l’auberge, Zorian était assis sur le lit, démontant un fusil qu’il avait acheté plus tôt. Il était plutôt amusant de constater à quel point il était facile de se procurer une arme à feu comparé aux sorts de haut niveau alors que les deux étaient tout aussi létaux l’un que l’autre. On pouvait en trouver encore plus facilement à Knyazov Dveri, si proche de la nature sauvage ; dans tous les cas, il tentait de comprendre comment fonctionnait l’engin, et plus important, si et comment il pouvait être enchanté.
Les armes à feu étaient compliquées à améliorer par magie, telle était leur notoriété. Comme toutes les armes à distance, on ne pouvait enchanter l’objet en lui-même que pour être plus résistant et précis et si l’on voulait que le projectile eût le moindre effet magique, il fallait l’enchanter lui-même. Les balles étaient malheureusement très difficiles à enchanter, bien plus petites que les flèches et les carreaux et usuellement faites de matériaux aux propriétés relativement imperméables à la magie. On ne pouvait pas non plus toucher la balle pour y insuffler du mana une fois qu’elle était dans l’arme… bien qu’il fut sans doute possible d’installer un cristal de canalisation quelque part à l’intérieur par altération…
Tout en étudiant l’arme devant lui, Zorian réfléchit béatement à des moyens de venir à bout de la chasseuse grise. Il n’avait aucunement l’intention d’en tester le moindre car ils n’étaient pas plus réalistes que sa première tentative mais il ne faisait pas de mal d’imaginer des scénarios plausibles.
Les chasseurs gris possédaient des faiblesses connues. Tout d’abord, ils étaient des combattants de mêlée – si l’on parvenait à les maintenir à distance, ils ne pouvaient simplement rien faire. Le problème ? Ils étaient très, très bons dans l’art de s’approcher de leur cible. Ensuite, ils n’étaient ultimement que des créatures magiques et pouvaient de fait être attirés dans des guet-apens bien préparés et tués une fois à l’intérieur. Le problème ? Ils étaient rapides et suffisamment solides pour survivre à toutes sortes de pièges mortels pour d’autres créatures. Leur sens magique, dont Zorian avait été témoin, les aidait probablement à éviter la plupart des pièges de ce genre.
Il pouvait imaginer plusieurs façons de piéger cette femelle mais la plupart demandaient des connaissances de sorts qu’il n’avait pas. S’il savait comment créer un simulacre et ouvrir des portails, il pourrait simplement envoyer son simulacre comme appât et ouvrir un portail menant directement à l’endroit où il aurait préparé un piège suffisamment efficace… Merde, rien que le fait de savoir créer un simulacre rendrait la chose un million de fois plus facile car il pourrait tester ses idées sans avoir à se mettre en danger. S’il connaissait des sorts d’altération de large zone, il pourrait simplement la sceller dans son antre et attendre qu’elle suffoque. S’il connaissait les sorts pour manipuler de grandes quantités d’eau, il pourrait la noyer… S’il connaissait…
Il caressa également l’idée de l’empoisonner ou de l’endormir, d’utiliser une potion capable de la tuer ou la paralyser… mais tout ce qui aurait pu être assez virulent pour tuer une telle bête était hautement restreint, fait d’ingrédients très rares et vendus plus cher que certains organes humains. Il ne savait pas créer une telle potion et ne pouvait pas mettre la main sur quoi que ce fut d’aussi précieux et interdit via de simples échanges commerciaux.
Il pouvait tenter la force brute et construire un golem pour plaquer l’araignée au sol. Puisque les golems étaient des machines animées par la magie, ils étaient immunisés au poison et pouvaient se montrer extrêmement puissants physiquement – assez pour écraser cette stupide bestiole en combat singulier. Malheureusement, il ne savait pas comment construire un golem. N’importe quel golem, d’ailleurs, alors il ne songea même pas tenter d’en créer un capable de tenir tête à la chasseuse grise. L’art de la création de golem était assez compliqué pour que plusieurs maisons s’associent afin d’en maîtriser les secrets, pas une chose qu’on pouvait comprendre en une ou deux semaines. Ou un mois ou deux.
De plus, même s’il savait comment faire, la construction nécessiterait au moins une semaine, probablement plus, un atelier spécialisé et énormément de matériaux coûteux. Il ferait banqueroute avant d’avoir fini une seule jambe.
Ce qui l’avait amené aux armes à feu. Le révolver avait assez bien fonctionné contre Robe Rouge là où ses sorts avaient échoué, après tout. Aucune arme à feu normale ne fonctionnerait contre cette araignée, par contre – il lui fallait quelque chose de plus puissant que ça. Malheureusement, les gros calibres étaient réservés aux militaires et il devrait prendre une base militaire d’assaut s’il voulait s’en procurer. Ce qui pouvait – et allait – se terminer sacrément mal : qui savait quel genre de défenses possédait une telle base ? Et puis, être capturé et interrogé par des inquisiteurs militaires tout en se retrouvant drogué par divers sérums de vérité était presque aussi mauvais qu’être découvert par un mage hostile ou un nécromancien. Et encore, il était plutôt sûr qu’il y avait quelques mages et nécromanciens dans le tas, de toute façon.
Oh, et même s’il trouvait quelque chose d’acceptable sous un matelas, laissé là par un soldat peu consciencieux, il y avait encore le souci de l’enchantement, et Zorian ne savait même pas par où commencer pour enchanter un simple fusil à ce point précis. Probablement que ça ne changerait pas d’ici la fin du mois, d’ailleurs.
On toqua à sa porte, ce qui le fit sortir de ses pensées. Il rangea rapidement l’arme dans sa boîte et la poussa sous le lit. Qu’il possédât un fusil n’était pas illégal mais il préférait malgré tout ne pas laisser savoir à quiconque frappait à sa porte qu’il en avait un. Il s’assura que son bracelet bouclier était bien à son poignet, au cas où, et alla ouvrir la porte.
C’était Guery, ce vieux Guery, ce qui ne surprit pas Zorian, finalement. L’homme avait acheté avec zèle et devoir toutes les ressources alchimiques qu’il avait à lui vendre et avait permis à Zorian d’utiliser son atelier et sa bibliothèque en retour. Il avait d’ailleurs déjà commandé quelques objets magiques de Zorian et celui-ci s’attendait à le voir passer une nouvelle commande.
Et il s’avéra que Guery avait un autre genre d’idée dans la tête. Une fois les plaisanteries d’usage échangées, il sauta sur le sujet.
— Je veux que vous m’aidiez à voler mon rival.
- EER : Chapitre 225 - 26 décembre 2023
- EER : Chapitre 224 - 8 décembre 2023
- EER : Chapitre 223 - 7 décembre 2023
merci pour le chapitre
Merci pour le chapitre.
Merci pour le chapitre
PS : dis-donc il est sacrément immoral ce monde-ci !
ah oui ?
Bah oui franchement ! Demander à quelqu’un de voler son concurrent… est-ce quelque chose qu’on ferait dans la réalité ?
Ben… oui 😀
Bienvenue dans le monde de l’espionnage industriel !
C’était encore plus vrai à une époque où, comme dans ce monde, les techniques scientifiques de recherche sont à revoir (ou à découvrir).
Merci pour le chapitre
Merci pour le chapitre !
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