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Chapitre 46

La ville de la Lune d’Or

 

Shi Kun s’était éveillé dans une ruelle et avait rapidement compris qu’il n’était pas dans la ville qui l’avait vu naître. La sensation n’y était pas la même, le sol non plus. Même l’odeur différait. Par-dessus tout, il pouvait sentir qu’il y avait là une puissante énergie spirituelle qui flottait dans l’air. Jamais il n’avait pu ressentir l’énergie du ciel et de la terre couler avec tant d’intensité et si Shi Kun avait bien compris ce que le patriarche lui avait dit, alors il devait se trouver plus proche de la Montagne Impériale qu’il ne l’était avant d’entrer dans le Gouffre insondable.

« Où puis-je bien me trouver, maintenant ? » Shi Kun aurait aimé dormir encore un peu, quelques heures de plus au moins, mais il savait que le patriarche l’attendait et qu’envers et contre tout, il ressentait déjà un sentiment d’appartenance lorsqu’il pensait à sa secte de la Porte Azure.

« Je ne peux pas rester ici. Il faut que je sache où je me trouve et que je rentre chez moi. »

Shi Kun se souvint alors de la carte que lui avait donné le patriarche avant de l’envoyer dans le Gouffre. Il tapota légèrement sa sacoche spirituelle qui s’ouvrit légèrement. Des rai de lumière en sortirent et se rassemblèrent pour devenir une vieille carte parcheminée entre les mains de Shi Kun.

 

 

Shi Kun se gratta la tête quelques instants avant de chercher à comprendre.

« Si j’ai bien suivi, la préfecture mineure de Jiaoju dans laquelle je vis se trouve à l’ouest du continent. Si le patriarche disait vrai, alors ce petit point doit être notre belle ville… » Shi Kun observa la carte pendant encore quelques souffles avant de décider de laisser tomber. Après tout, savoir où il se trouvait ne lui permettrait pas de retrouver son chemin. La première chose à faire était de demander aux habitants locaux.

Shi Kun entra donc dans la boutique derrière laquelle il était apparu afin d’y quérir quelques informations utiles. Aussitôt à l’intérieur, une clochette attachée à la porte signala sa présence d’un tintement cristallin et un homme leva la tête, à l’autre bout de la salle.

« Bonjour ! Bienvenue, chez client ! Que puis-je pour vous ? »

L’homme esquissa un sourire froid, ni poli ni dédaigneux et attendit la réponse du nouvel arrivant. Shi Kun observa les lieux et constata qu’il était entré dans une sorte d’épicerie, une petite boutique qui vendait toutes sortes de provisions à qui voulait bien les acheter.

Mais Shi Kun n’avait point besoin de tout cela et il se rendit rapidement en direction du comptoir depuis lequel le propriétaire des lieux le fixait d’un air absent.

« Bonjour. Je… » Soudain, Shi Kun se rendit compte qu’il ne savait pas comment expliquer la situation. Il fit alors au mieux en essayant de ne pas paraître trop idiot. « …je viens d’arriver en ville par une formation de téléportation qui a malencontreusement fonctionné de travers, et… j’avoue être un peu perdu. Je souhaiterais rentrer chez moi au plus vite mais je ne sais même pas où je me trouve. J’espère que ce n’est pas à l’autre bout du monde, ha ha… »

Shi Kun se gratta l’arrière de la tête, un peu confus par sa propre excuse. Le mortel en face de lui allait-il réellement gober ça ?

« Oh ! Je comprends, exalté ! J’ai moi-même déjà été témoins de problèmes de ce genre concernant les formations, et même si je ne peux m’en servir moi-même, mon cousin est un cultivateur et je m’y connais un peu… » Le marchand se mit à sourire un peu plus largement et de façon plus sincère cette fois. Il avait enfin compris qui était ce disciple à la robe aux couleurs inconnues : il venait de loin !

« Vous vous trouvez actuellement dans la ville de la Lune d’Or, exalté. Il s’agit d’une petite ville, de quelques centaines de milliers d’habitants à peine, située en plein milieu de la préfecture majeure de Mianshen. Puis-je vous demander d’où vous venez, exalté ? »

Shi Kun fronça légèrement les sourcils. Une préfecture majeure ? Il ne connaissait pas leurs noms et se rendit alors compte qu’il pouvait se trouver dans n’importe laquelle des cinq préfectures majeures entourant la Montagne Impériale. Peut-être était-il réellement vraiment très loin de chez lui ?

« Mianshen… Mianshen ? Comme dans le dieu des nouilles ? » Shi Kun secoua la tête, ne comprenant pas même pourquoi ses pensées l’avaient mené à analyser le nom de la préfecture. « Je viens de la préfecture mineure de Jiaoju. Est-ce réellement loin ? »

Le mortel fronça légèrement les sourcils et l’espace d’un souffle, Shi Kun prit peur. Ne connaissait-il pas ce nom ? N’était-ce pas l’une des préfectures mineures proches ? Le visage de Shi Kun se mit à pâlir à l’idée du chemin qu’il allait devoir parcourir. Pourrait-il vraiment devoir marcher pendant des mois, voire des années, avant de retrouver les murs de sa secte de la Porte Azure ? Rien que l’idée commençait à le dissuader de rentrer chez lui un jour.

« Exalté, la préfecture mineure de Jiaoju se trouve être l’une des deux préfectures mineures sous la tutelle de notre préfecture majeure de Mianshen. Vous avez de la chance, vous n’être pas à l’autre bout du monde, ha ha ! » Le marchand claqua ses mains comme pour fêter la bonne nouvelle.

« Proche… ? À combien de temps de marche ? » Shi Kun connaissait la distance extravagante qui pouvait exister entre les différents endroits de ce monde. Proche ne voulait pas forcément dire qu’on était à quelques jours de marche de l’un ou l’autre lieu.

« D’ici à la frontière ? Je pense qu’un exalté tel que vous devrait pouvoir y arriver en trois ou quatre mois de marche. Cela ne vous fait pas peur, n’est-ce pas ? Un temps si court ne représente rien pour un exalté, n’est-ce pas ? »

« R…Rien ? »

« Ne passez-vous pas si facilement des mois entier en méditation recluse afin de cultiver ? »

Shi Kun pâlit une deuxième fois. Allait-il sincèrement devoir mettre un pied devant l’autre pendant plusieurs mois ? Hors de question, naturellement.

« E… Existe-t-il quelque formation de téléportation, peut-être ? » Il s’essaya à glaner des informations sur un moyen plus rapide de franchir cette distance mais à son grand dam, son interlocuteur mortel secoua la tête.

« Non. Il n’y a rien de tel ici, exalté. Vous ne pouvez trouver ce genre de formation que dans les capitales de préfecture, je le crains… Vous savez, la quantité d’énergie requise… Ah, mais puisque vous allez sans doute effectuer ce trajet afin de rentrer chez vous, pourquoi n’en profiteriez-vous pas pour acheter quelques provisions ? Je sais, vous autres exaltés pouvez survive sans manger ni boire pendant très longtemps mais… C’est toujours plus agréable d’avoir le ventre plein, n’est-ce pas ? »

Shi Kun se gratta la tête une nouvelle fois. Il allait certainement devoir marcher, en effet, et même si son corps de cultivateur lui permettait désormais de le faire sans vraiment se fatiguer, il allait bien évidemment s’ennuyer à mourir et ressentir d’autant plus son ventre vide le rappeler à l’ordre.

« Je peux m’estimer heureux de ne pas être arrivé plus loin… Je suppose que je vais vraiment devoir rentrer chez moi à pied. » Shi Kun se tourna vers les étagères où étaient empilées un bon nombre de provisions en tout genre.

« Que vais-je pouvoir emporter… ? »

Le marchand s’inclina dans le dos de Shi Kun et lui fit une proposition.

« Si cet exalté me le permet, je vais remplir moi-même une petite sacoche spirituelle avec des provisions de choix, des mets locaux et autres délices que vous ne trouvez sans doute pas dans votre préfecture mineure de Jiaoju. »

« Eh ? » Shi Kun se retourna, les sourcils levés. « Une sacoche spirituelle ? N’est-ce pas un objet rare ? »

Le marchand se redressa en souriant et secoua la tête.

« Non, non, ce genre de sacoche spirituelle est à usage unique. Lorsqu’on la remplit la première fois, on ne peut ensuite la vider qu’une fois avant qu’elle ne devienne inutilisable. Pour des achats permettant de remplir une telle sacoche en entier, je l’offre comme bonus, cher exalté. »

Shi Kun prit quelques instants pour comprendre. La sacoche serait remplie par le marchand, et une fois qu’il l’aurait vidée, il pourrait s’en débarrasser car elle serait inutilisable ? Il pouvait bien offrir une telle sacoche spirituelle, en effet !

« Bien. Je vais être votre obligé, dans ce cas. » Shi Kun accepta de bon cœur la proposition du vendeur de la boutique, qui allait s’occuper lui-même de la fastidieuse tâche de remplir sa sacoche de provisions. « N’oubliez pas d’y ajouter de l’alcool, surtout. Le meilleur que vous avez. »

« De l’alcool ? Mais vous… Bien, exalté. » Le vendeur hésita quelque peu face à l’apparence somme toute jeune de Shi Kun mais finit par plier face à leur différence de statut. Shi Kun était un cultivateur, s’il voulait acheter de l’alcool, qui était-il pour remettre son bon droit en question ?

« De l’alcool, bien entendu. » Le marchand fit le tour de son petit comptoir après avoir attrapé une petite sacoche spirituelle. Il se rendit en direction des étagères et commença à choisir avec attention ce qu’il y plaçait.

De son côté, aussitôt le marchand lui ayant tourné le dos, le regard de Shi Kun devint glacial tandis qu’il le suivait du regard. Il se mit à sourire de toutes ses dents, un sourire sadique et trop large pour un visage humain, tranchant son visage presque d’une oreille à l’autre. Sa peau plus pâle que jamais et d’une légère teinte verdâtre, comme éclairée par un lointain soleil amande, semblait être revenue d’outre-tombe et ses yeux se mirent à se révulser, à moitié retournés dans leurs cavités orbitales.

De Shi Kun se mit à émaner une étrange énergie verte qui serpenta et se tortilla en direction du pauvre marchand inconscient comme autant de tentacules éthérés. Lorsqu’ils l’atteignirent, ils se frayèrent un chemin jusqu’à son dantian de mortel incapable de cultiver et se mirent à le transformer en un nid spirituel dans lequel se matérialisa très rapidement une copie stupide d’un ver spirituel.

Ce dernier, totalement inconscient de ce qu’il était, ne possédait qu’un simple but dans la vie : suivre les ordres de son père créateur. Aussi créa-t-il rapidement des excroissances spirituelles qui se frayèrent un chemin jusqu’à la tête du marchand toujours aussi incapable de déceler ce qui lui arrivait.

Seulement alors Shi Kun retrouva-t-il son expression normale, totalement naturel après avoir été semblable à un monstre humain. Le vendeur se retourna finalement, pas plus au fait de ce qui venait de lui arriver que son client du jour.

« Cher client, voici le dernier article que je puis mettre dans cette sacoche spirituelle. Le tout vous coûtera 20 pièces d’or. Cela vous convent-il ? Je ne peux pas aller plus bas et… »

« De l’or ? » Shi Kun lui coupa la parole sans trop faire attention. « Je n’ai pas d’or… J’avais oublié ce léger détail. »

Le marchand se mit à sourire.

« Désirez-vous payer en pierres spirituelles, dans ce cas ? Vous autres exaltés en possédez toujours un certain nombre sur vous, n’est-ce pas ? »

« Ah… Eh bien… En réalité, je… » Shi Kun n’avait plus la moindre pierre spirituelle non plus. « Je possède beaucoup de fruits spirituels… »

Le vendeur secoua la tête. « Que voulez-vous que je fasse de fruits spirituels ? Non, je ne peux pas accepter. Ils ont naturellement de la valeur, mais je mettrai trop de temps à les vendre et j’ai bien peur qu’ils ne pourrissent avant que je ne le puisse. Hm… Ne possédez-vous pas quelque chose que vous pourriez troquer ? Mon frère fait le commerce d’objets magiques et de reliques, d’artefacts et d’étrangetés qui intéressent toujours les cultivateurs. Je pourrais m’arranger avec lui. »

Shi Kun se gratta le menton. En y réfléchissant bien, il possédait cette sacoche spirituelle presque sans fond qui contenait assurément un grand nombre d’objets hors de prix… mais le patriarche Destinée avait scellé le tout à l’aide d’une formation qu’il n’avait aucune chance de passer.

Finalement, Shi Kun tenta de lui proposer quelques fruits spirituels malgré tout ; après tout, ils provenaient d’un endroit particulier et peut-être y trouverait-il quelque chose de rare qu’il accepterait d’échanger contre le sac de victuailles. Dans le cas contraire, Shi Kun devrait alors abandonner et partir le ventre vide et sans alcool pour accompagner son long voyage. Non, c’était impensable, il devait encore essayer de convaincre ce mortel.

« Mon bon marchand, j’aimerais tout de même vous présenter quelques fruits spirituels que j’ai trouvé dans… Eh ? » Tout en tapotant sa sacoche, Shi Kun y envoya un peu de sa conscience afin d’y chercher un fruit spirituel plus rare que les autres. Cependant, s’il ne parvenait toujours pas à apercevoir le fond de la sacoche spirituelle, quelque chose avait assurément changé en son sein.

« Elle a l’air plus spacieuse qu’avant ? »

Shi Kun tenta, l’espace de quelques souffles, de l’explorer un peu plus ; il ne se rendit absolument pas compte que la formation du patriarche avait disparue. Las de se poser des questions, il finit par abandonner et se remettre en quête d’un fruit spirituel possédant une quelconque valeur lorsqu’il tomba nez à nez – ou plutôt conscience à nez – avec une étrange boussole sur laquelle était gravée un dragon de bronze et de jade. Elle dégageait une puissance considérable et Shi Kun était persuadé qu’il n’aurait absolument pas le niveau pour l’utiliser s’il venait à s’y essayer.

« On dirait que le patriarche a laissé quelques objets hors de sa formation ! Sans doute pour un cas comme celui-ci ! Il a dû se dire que j’aurais pu avoir besoin d’argent… » Shi Kun fut pris d’un profond sentiment de gratitude. Le patriarche était allé jusqu’à sacrifier des objets magiques puissants pour le cas exceptionnel où Shi Kun devait avoir besoin de ressources monétaires. Il se comportait décidément comme un vrai père pour Shi Kun et ce dernier en fut tout à coup ému aux larmes.

Ce serait un affront, un outrage, de ne pas respecter le vœu du patriarche et Shi Kun n’envisagea même pas une seconde de garder la boussole pour un cas plus extrême.

« Mon bon marchand, je possède ici un puissant objet magique… Pourriez-vous l’accepter en guise de paiement ? » Tout en tapotant la sacoche spirituelle du patriarche, Shi Kun en sortit la boussole. Le marchand mortel ouvrit immédiatement de grands yeux.

« Une… Une boussole Feng Shui de Jade ?! » Il faillit tomber à la renverse et se rattrapa in extremis sur le rebord d’une étagère. « Ch… Cher client, êtes-vous bien certain ?! »

Shi Kun se gratta la tête. Le vendeur semblait avoir conscience de la valeur extrême de l’objet magique – peut-être le connaissait-il – et en toute honnêteté, il voulait être certain que Shi Kun ne fasse pas une erreur en le lui cédant.

« Eh ? Le patriarche l’a placé là pour ça, je ne vois pas d’autre possibilité. Il a bien dit qu’il avait isolé toutes ses possessions et que je ne pourrais pas y toucher même si j’essayais toute ma vie durant. Si j’ai pu attraper cette boussole, c’est qu’il l’a bien voulu. Il me fait confiance, je ferai ce qu’il faut avec. » Arrivé à ce point dans ses pensées, Shi Kun adressa un sourire au propriétaire de la boutique.

« Mon bon marchand, je suis bien conscient de la valeur de cet objet. Cela dit, c’est tout ce que je possède et qui pourrait vous intéresser. D’un autre côté, j’ai grand besoin de cette nourriture pour le voyage que je vais entreprendre… Mais puisque cette boussole a une si grande valeur, pourquoi ne me donneriez-vous pas une valeur équivalente de victuailles ? »

Le mortel vacilla légèrement et sembla calculer quelque chose dans sa tête. Finalement, il secoua la tête.

« Mon magasin tout entier n’a pas la valeur de cette boussole… »

Shi Kun serra les dents. Cette discussion commençait à le fatiguer sévèrement. Un simple objet magique, plus précieux qu’un magasin tout entier ? Le patriarche n’aurait absolument jamais laissé un tel trésor entre ses mains afin qu’il puisse le vendre. Non, cet homme devait faire erreur. Shi Kun en eut assez de tergiverser.

« Si je ne pars pas bientôt, je risque de changer d’avis. Alors donnez-moi tout ce que vous pouvez pour cet objet et nous serons quitte. Tout le magasin, vous dites ? Soit. Emballez-moi tout ce que vous avez, je pars aussitôt les préparatifs terminés. »

Raka
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13 thoughts on “TheDAB : Chapitre 46

  1. Merci pour le chapitre
    le patriarche va être content x))
    PS : y avait il une chance que Shi Kun apparaisse dans la mer ??

      1. D’accord XD
        Mais alors… si le monde ne se compose pas seulement de ce continent se peut il que certains soient apparus sur d’autres continents, ou juste des îles éloignées ?? Et qu’ils aient créé des civilisations mais trop éloignées pour rejoindre le continent principal en bateau ???
        (Je pars un peu loin là)

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