LVL1S : Chapitre 98
LVL1S : Chapitre 100

Chapitre 99

 

« Pourquoi le manoir du Comte a-t-il été intégralement brûlé ? »

Clairement, l’endroit dans lequel je venais de me téléporter était la bibliothèque du manoir du Comte mais il n’y avait rien d’autre que ruine et cendres à perte de vue. En explorant un peu, je remarquai que le village au pied du manoir avait souffert de la même sentence.

« Que… s’est-il passé ? »

Je courus le plus rapidement possible vers Gartmar. Le soleil se couchait déjà et personne ne pouvait me reconnaître. En moins d’une heure, j’étais arrivé devant la maison du maire.

* Toc toc *

« Qui est là ? »

« Monsieur le maire, c’est Johra. »

« Hmm… Alors de tous les moments possibles, tu as choisi de te montrer maintenant ? »

Il ouvrit la porte et m’invita à entrer comme s’il m’avait attendu depuis longtemps. Je vis une bouteille d’alcool ouverte sur la table et il était déjà quelque peu ivre.

« Monsieur le maire, avez-vous trop bu ? »

« Non, ce n’est rien. »

Je pouvais lire la colère au fond de ses yeux vitreux.

« Que s’est-il passé ? »

« Le Comte Sion a été capturé en tant que traître. »

« Quoi ? »

Je ne pouvais pas le croire. Il n’avait aucune raison de trahir son pays.

« Tu vois, avec assez de pouvoir, un homme seul peut décider ce qui est vrai et ce qui ne l’est pas. »

Mes mains se refermèrent et j’entendis mes phalanges craquer.

« Et ceux qui vivaient au manoir ? »

« Le Comte lui-même a été fouetté et brûlé au bûcher pour donner l’exemple. Sa famille et ses serviteurs ont été soit tués soit vendus en tant qu’esclaves. Et on ne peut même pas imaginer aller les secourir, il y a simplement trop de gardes dans la zone, personne n’en ressortirait vivant. Et puis ensuite, ils iraient où ? »

Le maire tentait visiblement de tester ma résolution.

« Hah. Pensez-vous que je suis effrayé par si peu de choses ? »

« …Alors, comptes-tu te rebeller ? »

La lueur d’espoir au fond de son regard trahit son ton neutre. Bien entendu… c’était quelque chose qu’il avait déjà considéré.

« Qui est derrière tout ça ? Dites-moi tout à propos de l’endroit où ils sont retenus et sur le nombre de gardes. »

Il me tendit quelques documents sur lesquels étaient couchées les informations essentielles avant de me balancer quelques pièces d’or.

« Je ne t’ai pas donné tout ça. »

« Bien sûr. Vous n’avez pas à vous en faire, je ne suis pas venu ici ce soir. »

« Je ne suis pas inquiet, parce que si tu échoues, je n’hésiterai pas à me rebeller. »

Je hochai la tête en réponse. La raison pour laquelle le maire était déprimé était claire maintenant : sa prochaine décision allait impacter la vie de tous ses citoyens.

« C’est parti. »

Comme je quittai la maison, je me mis à courir. À cette époque et dans ce contexte social, il n’existait aucun moyen de transport plus rapide que moi en train de sprinter. À moins de se servir de cercles de téléportation ou d’être une créature magique puissante, personne ne pouvait être capable de me rattraper.

À fond, je pouvais atteindre une vitesse de pointe se situant quelque part entre 300 et 400 km/h. Tout autour de moi se transformait en un mélange flou de couleur et de lueurs tandis que je courais en ligne droite, écrasant tout ce qui se trouvait sur mon passage.

Ma destination était le marché aux esclave royal. J’y arrivai après une petite heure et me servis de mes toiles pour ralentir en les balançant contre des bâtiments. Finalement, j’atterris au sommet du château et jetai un œil autour de moi.

« Je devrais commencer par là. »

C’était la boutique que je venais de repérer au milieu du marché.

Tournant autour de cette dernière, je plaçai un cercle de téléportation dans l’ombre d’une ruelle derrière le bâtiment.

« Pouvons-nous jeter un œil à l’intérieur et voir s’il y a quelque relation du Comte ? »

« Il semble y avoir cinq servants, tous endormis à ce moment. Je vais projeter leur position dans ton œil. »

J’entrai discrètement dans la boutique, les sauvai tous les cinq et en profitai pour kidnapper ceux qui travaillaient là pour faire bonne figure. Grâce à la formation magique, je les téléportai tous dans mon manoir, dans le donjon.

« Merci, Johra, mais s’il vous plaît, sauvez les enfants du Comte au lieu de vous préoccuper de nos, pauvres servants ! Le Comte n’est plus mais nous devons sauver ses deux enfants ! »

« Ne vous inquiétez pas et reposez-vous. Viezda, quand ce marchand d’esclave se réveille, assure-toi qu’il brise le contrat d’esclavage avec ces cinq-là. »

« Que se passe-t-il ? Pourquoi les servants du Comte… »

« C’est une longue histoire, fais-moi confiance. Je dois retourner en ville. »

« Ok. Je m’en occupe. »

« Parfait, merci ! »

Je me rendis à nouveau dans le marché aux esclave grâce à mon dernier cercle magique.

« Johra, si tu trouves un point élevé, je pourrais créer la carte des environs. »

« Bien ! »

En utilisant mes capacités d’araignée, je me rendis au sommet d’une tour de garde.

« Ce marché royal est plutôt grand mais j’ai pu identifier la position des huit esclaves restant, ceux connectés au Comte. »

La même tactique que précédemment me permit de secourir tout ce beau monde durant la nuit.

« Cette voix… Johra ? »

« Si c’est toi… »

Jillian et Jerna étaient tous deux aveugles, leurs yeux ayant été brûlés par leurs tortionnaires. Au moment où je vis l’état pitoyable dans lequel ils se trouvaient, je ne pus retenir mes larmes. Je me trouvais dans le donjon en train de profiter de la vie et des plaisirs interdits pendant que tout ça était arrivé. Si j’avais été là, rien de tout ça n’aurait eu lieu.

« Désolé, Jillian, Jerna… »

« Pas du tout ! Nous avons pu garder espoir pour la simple raison que tu n’avais pas été capturé ! »

Jillian tenta de paraître optimiste et objectif mais je pouvais sentir la chaleur des émotions au travers de ses mots. De même, Jerna était heureuse de mon retour et ne le cachait pas.

« Bien. Je vous emmène dans un endroit sûr. »

Capturant leur maître, j’activai le cercle de téléportation.

« Jeune maître ! »

« Mademoiselle ! »

Aussitôt les servants du Comte en présence des enfants, ils accoururent et les prirent dans leurs bras, soulagés qu’ils étaient toujours en vie.

« Je vais préparer des globes oculaires artificiels. »

« Huh ? C’est possible ? »

« Ce ne devrait pas être trop long. Les paupières sont simples à répliquer et même si la cornée est un peu technique, je pense que ça ira. Prépare le matériel dont j’ai besoin et je m’occupe du reste. »

« Ok, faisons ça comme ça. »

La voix de Lena, transmise par le biais d’Hannah, permit à tout le monde de se rassurer.

« Allons-nous être capables de voir à nouveau ? »

Jerna ne put retenir le tremblement de sa voix.

« Oui, peu importe la difficulté de la procédure, je ferai de mon mieux. »

« Comment… Comment est-ce possible ? »

« Ne t’en fais pas, je m’assurerai que ça se passe bien. Et je vais faire en sorte que ces deux marchands vous libèrent de vos contrats. »

« Je ne pense pas qu’il soit possible de supprimer un contrat. Peut-être avec le niveau d’un dieu ? »

« Lena ? »

« Selon les archives historiques, il semble avoir raison. »

« Alors il n’y a aucun moyen ? »

« Peut-être est-ce possible de faire en sorte qu’ils soient liés à toi, et non plus à eux. »

« Ce serait bien mieux en effet. Faisons ça. Je ne voudrais pas qu’ils vivent leur vie entière en tant qu’esclaves. »

Les maîtres semblaient avoir été rebelles au début mais après avoir été proprement éduqués par Viezda, à en juger par le nombre de bleus et de plaies qui couvraient leurs corps, s’étaient grandement calmés.

« Vous allez tous transférer vos contrats à Johra. »

« Oui… oui ! »

Incapable de refuser l’ordre de leur tortionnaire Viezda, ils devinrent eux-mêmes mes esclaves avant de me transférer tous ceux qui étaient connectés à la maison du Comte. Un total de quinze, en comptant les deux enfants.

« Viezda, il est temps de sortir les poubelles. »

« Oui, Johra. »

« Oh, non ! »

« Nous ne sommes pas coupables ! Nous avons même complètement suivi vos demandes ! »

Ignorant leurs cris de désespoir, elle les balança par-dessus son épaule et les abandonna dans la forêt infestée de chiens infernaux et nous n’entendrions plus jamais parler d’eux.

« Johra, l’aile médicale est prête. Puis-je commencer la procédure sur les enfants ? »

« Immédiatement ? »

« Je devrais avoir besoin de deux jours pour créer une cornée artificielle. »

« Ok, Jerna et Jillian, suivez ces servantes afin de recevoir un traitement. »

« Oui, maître. »

« Oui… »

Tous deux attrapèrent le bras de l’androïde et disparurent avec elle.

« Johra… Pouvons-nous réellement rester ici ? »

Le précédent majordome du manoir était inquiet. Je pouvais voir la douleur dans son regard, la colère et la haine aussi. Après tout, une tragédie pareille ne pouvait pas laisser insensible.

« Bien sûr. Tous les amis du Comte sont les miens également. Vous pouvez rester les invités de mon manoir aussi longtemps que vous le souhaitez. »

« Je ne peux pas simplement vivre en tant que parasite alors que vous êtes si bon avec moi. Je vais m’occuper d’une charge de travail dans ce manoir. Je sais y faire… »

« Lena ? »

« En quelques heures, nous devrions être capables d’avoir un nouvel androïde à même de les accompagner et de leur apprendre tout ce qu’ils doivent savoir. »

« Alors je vous accueille comme mon majordome. Veuillez attendre ici un moment, quelqu’un va rapidement arriver pour vous guider dans le manoir. »

« Merci, merci beaucoup, monsieur Johra. »

Ayant tout géré correctement chez moi, je me rendis à nouveau au marché afin de capturer un plus gros poisson. Il restait forcément un responsable et j’allais m’en occuper personnellement. Il ne fallait pas qu’il s’attende à s’en sortir après avoir joué avec la vie de mes amis. C’était là la plus grosse erreur de sa vie.

Et je pus trouver la demeure dans laquelle il se trouvait grâce aux informations reçues du maire de Gartmar.

« Il a une dette astronomique à payer et il va la payer, qu’il le veuille ou non. »

J’étais comme l’émissaire de la mort, une faucheuse implacable qui allait ramper dans les ténèbres du marché royal.

« J’espère que tu fais de jolis rêves, parce qu’à partir de maintenant, tu ne feras plus que des cauchemars. »

* Kriiii *

La marquise de Leon ferma la fenêtre de sa chambre et rejoignit le marquis dans le lit.

Je les capturais aisément tous deux ainsi que les quatorze membre de leurs maisonnée et les ligotai avant de les transférer vers mon manoir.

Leon, obèse et soufflant bruyamment, me regardait avec toute la colère du monde dans les yeux tout en tentant de se libérer. Les servants du Comte se tenaient tous de côté et arboraient désormais le regard le plus froid que je pouvais imaginer.

« Majordome, veillez à ce qu’aucun malheur n’arrive à ces personnes. Jillian et Jerna ont le droit de savourer leur vengeance lorsqu’ils pourront voir à nouveau. Pour l’instant, il y a plusieurs pièces au sous-sol qui peuvent accueillir ces invités. »

Un androïde avec des oreilles de saint-bernard et une truffe humide apparut en compagnie du majordome. Décidément, Lena avait vraiment un faible pour ces cosplays animaliers.

« Quel est ton nom ? »

« Je m’appelle Riley, monsieur Johra. »

Acquiesçant en retour, je laissai les prisonniers entre leurs mains.

« Viezda, aide le majordome. Veille à ce qu’ils ne se rebellent pas. »

« Bien sûr, Johra. »

Je me rendis à nouveau à Gartmar et même s’il était tard dans la nuit, le maire ne dormait toujours pas.

« Toc, toc ? »

« Johra ? »

« Exact. »

« Entre. Tu es de retour bien rapidement. Il te manque des informations ? »

Je secouai la tête. Le maire n’était plus du tout ivre.

« Je suis venu au rapport. J’ai rempli ma mission. »

Ses yeux s’ouvrirent sous le coup de la surprise mais il hocha la tête comme s’il avait compris quelque chose.

« Même s’il serait mieux que tu ne montres plus jamais ton visage dans le royaume à l’avenir, personne ne saura jamais ce que tu as fait pour nous… »

« Aucune importance. »

« Je me sens mal, je suis toujours endetté envers toi. »

« Monsieur le maire, le marquis était derrière tout ça, comme les documents le laissaient supposer ? »

« Peut-être… Mais je pense que Miriam était celui qui tirait les ficelles. »

« Alors c’est encore lui. »

« As-tu tué Leon ? »

« Non. Je ne veux pas lui donner une mort aussi paisible et facile. Mais ne vous inquiétez pas, il ne reviendra plus jamais. »

« Ouais. Et à propos des survivants du manoir ? »

« De même, ils ne réapparaitront plus dans ce royaume. Mais ne vous inquiétez pas, ils vont très bien et même s’ils n’oublieront jamais, ils vivront heureux. »

« Hmm… C’est difficile à croire mais tu as tant accompli en si peu de temps… »

J’acquiesçai en silence.

« Johra… Es-tu le messie d’un Haut-Dieu ? »

« Pas du tout. »

Je ne m’attendais pas à cette question tout droit sortie de nulle part.

« Je ne suis pas très sûr de ce que je dois faire de toi… Une fois de plus, tu es responsable du sauvetage de tant de vies. Fais-moi savoir si tu as un jour besoin de mon aide et je ferai de mon mieux pour te fournir toute l’aide dont je suis capable. »

« Je vous souhaite simplement tout le bonheur du monde et le succès que vous méritez, pour vous et votre famille. »

« Eh bien, merci. »

« C’est un adieu, monsieur le maire. »

« Oh… Nous n’allons plus jamais nous revoir ? »

« Hmm… Si. Mais je doute que vous me reconnaissiez alors. Quant à moi… Je ne vous reconnaitrai pas, c’est certain. Lorsqu’un aventurier du nom de Gaspar arrivera dans vingt ans, vous saurez. »

Nous nous fîmes rapidement nos adieux et je quittai la maison du maire, le cœur lourd. Je savais déjà que sa famille allait mourir dans un futur proche.

Devrais-je revenir pour les sauver, ou cela changerait-il le futur de façon trop évidente ? J’ai déjà sans doute eu un impact si important, où se situe cette ligne que je ne devais pas franchir ?

Je sentais le poids du futur peser sur mes épaules, il était en train de vaciller et menaçait de tomber à chaque instant. Mais ma priorité restait dans le fait de sauver les gens que j’aimais. Je ne pouvais pas m’arrêter et corriger chaque injustice du destin.

« L’empire Balkan, huh ? Ne sont-ce pas ceux qui sont parvenus à créer des chimères ? Les développent-elles actuellement ? »

J’avançait en direction de l’empire Balkan et en atteignis rapidement la frontière. Ils y avaient bâti un mur imposant afin de séparer Balkan et Mirin mais aucun mur ne saurait être assez grand pour m’arrêter.

J’atterris dans une forêt, loin de toute garnison frontalière, loin de toute patrouille, avant de me rendre vers un village proche juste au moment où le soleil commençait à se lever au-dessus de l’horizon.

« Je recommande la prudence et la collecte d’informations, Johra. »

« Ok, ça me va. Miriam ne devrait pas être alerte et fuyard, il doit se sentir en sécurité ici. Il ne s’attend pas à ce que quelqu’un le pourchasse jusqu’au sein de l’empire Balkan. Bon, s’il apprend que le marquis de Leon… a rencontré un tragique destin, il risque de se montrer plus prudent. Mais bon, ce ne serait pas plus compliqué à gérer. »

Je laissai échapper un rire sinistre, par pur instinct.

Même si mon plan n’avait jamais été d’affecter l’Histoire, il devait payer pour ses actes. Si quiconque s’en prenait à mes proches, aucun destin, aucune Histoire ne saurait alors m’empêcher de lui faire payer au centuple ce qu’il me devait. C’était simplement ma façon de faire les choses.

« La boutique Jir… N’est-ce pas une succursale de l’entreprise de la famille de Miriam ? Devrais-je commencer ici ? …Non. »

Au lieu de ça, je me rendis chez un concurrent.

« Bonjour ? Quelqu’un est là ? »

« Qui est-ce, si tôt le matin ? Nous ne sommes pas encore ouverts ! »

Je répondis en balançant une bourse remplie d’or et son expression changea du tout au tout.

« Je m’appelle Ben et je suis le gérant de cette boutique ! En quoi puis-je vous aider ? Nous venons tout juste d’ouvrir, vous tombez à la perfection ! »

« Je veux acheter des informations. »

Raka
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10 thoughts on “LVL1S : Chapitre 99

  1. L’auteur ne va quand même pas nous faire le coup de l’oncle ben ? 

    Je ne le dis pas souvent, mais merci pour la traduction, c’est toujours sympa de pouvoir lire nos chapitres tranquillement et gratuitement.

  2. Faut pas faire chier Johra au risque de subir des sévices pires que la mort ^^.

    Merci pour ce chapitre 🙂 !

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