MoL : Chapitre 76
MoL : Chapitre 78

Chapitre 77 — Tests

 

Les Primordiaux étaient d’étranges créatures, bien énigmatiques. Supposées êtres les premiers-nés du Dragon Primordial à partir duquel le monde avait été façonné, ancien et puissant être au-delà de toute probabilité. Lors de son vivant, ses compétences avaient rivalisé avec celles des dieux eux-mêmes. Par la suite, une fois mort, il avait permis à une multitude de Primordiaux inférieurs de continuer la lutte. On pourrait penser que des créatures si effrayantes et tout ce qui y était lié aurait été largement reconnu par l’Histoire, et leurs archives claires comme de l’eau de roche, mais ce n’était pas le cas. Au cours de sa recherche des prisons en-dehors de Cyoria, Zorian avait consulté de nombreux documents religieux, historiques et mêmes parlé à des Élémentaux, assurément en vain. Les Primordiaux avaient peut-être été des demi-dieux puissants lors de leur temps, mais avaient été scellés des milliers d’années auparavant. C’était long, très long. Suffisamment long pour que les informations eussent le temps d’être oubliées, en particulier parce que les dieux avaient activement tenté de limiter l’épanchement des connaissances les concernant, eux et leurs prisons. Aussi, découvrir quoi que ce fût de pertinent à leur sujet relevait de l’impossible.

De plus, même lorsqu’une information était trouvée par chance, il était difficile d’en juger la légitimité, certaines n’étant que pure invention. Nombre d’histoires qui entraient dans le détail de la nature des Primordiaux se contredisaient ouvertement, et il n’y avait aucun moyen d’en tester aucune pour se rapprocher de la vérité.

— En d’autres termes, vous ne savez virtuellement rien sur les Primordiaux, si ce n’est qu’ils existent et que l’un d’eux est enfermé à Cyoria, résuma la sorcière après avoir entendu son explication.

— C’est à peu près ça, confirma Zach.

Bien qu’ils eussent cherché à découvrir la localisation des autres Primordiaux durant leur temps libre, ils n’avaient rien obtenu de concret à ce propos.

— Mais… reprit-il immédiatement. Qu’est-ce que ça a à voir avec le fait de confirmer notre histoire ?

— Patience, garçon, patience, intima la sorcière sur un ton hautain. Une maison doit être bâtie sur des fondations solides. Afin de répondre à cette question, je dois d’abord vous montrer la vérité au sujet des Primordiaux et la manière dont ils ont été emprisonnés…

Oh ? Pouvait-elle réellement répondre à ces questions ? Zorian était déchiré entre l’excitation et une dose de prudence certaine. D’un côté, il s’agissait d’une sorcière puissante, qui avait vécu plus d’un siècle. Elle ne prétendrait pas connaître ces choses sans une bonne raison pour appuyer sa confiance ? D’un autre côté… Eh bien, c’était Lac d’Argent.

Après y avoir pensé un peu, il décida de lui faire part de ses doutes.

— Gamin ignorant, se plaignit-elle. Penses-tu que je puisse plaisanter à propos d’une chose aussi sérieuse ?

Zach et Zorian échangèrent un regard entendu.

— Eh bien… Ouais, ricana Zach, comme s’il s’était agi de la chose la plus évidente au monde.

— Maintenant que tu le dis, je pourrais bien pratiquer ce genre d’humour noir, supposa-t-elle pour elle-même en se frottant le menton tout en observant les branches des arbres.

— Pas exactement de quoi être fière, en revanche, fit remarquer Zorian, peu ravi.

— Peu importe. Voulez-vous entendre ce que j’ai à dire ou pas ? demanda-t-elle ouvertement, abandonnant sa pose songeuse pour rassembler ses mains et les regarder d’un air défiant.

— Bien sûr, répondit Zorian ; aussi ennuyeuse qu’était cette veille folle, elle possédait des compétences et des connaissances uniques, impossibles à trouver autrement. Je suis tout ouïe.

Elle garda le silence pendant quelques douloureuses secondes. Avant que les adolescents n’eussent pu dire quoi que ce fut, l’entrer de son monde secret s’ouvrit en grand et ils virent la sorcière en sortir en portant un énorme livre brun.

Zorian leva un sourcil. Qu’elle possédât un double n’était pas surprenant, il existant nombre de sorts capables de dupliquer une apparence, après tout. Même s’il s’agissait d’un vrai simulacre, Zorian ne se laisserait pas surprendre, la vieille étant clairement douée en magie de l’âme. La question réellement intéressante était alors de savoir laquelle était la vraie. Celle à qui ils parlaient depuis un moment, où celle qui venait d’arriver ?

Il activa sa toute nouvelle compétence de perception des âmes pour jeter un œil.

Ce n’était pas facile pour Zorian. L’entraîner était lent et frustrant, bien qu’Alanic lui eût dit qu’il progressait très bien selon des standards normaux. Il possédait cette capacité depuis moins d’un mois, et il était certain que son contrôle allait être brut et qu’il aurait du mal à interpréter les résultats. Zorian s’imaginait que les non-psychiques ressentaient ce genre de peine lorsqu’ils tentaient de transformer la magie non-structurée en quelque chose d’utilisable sur les esprits.

Pourtant, identifier la présence d’une âme dans un corps face à lui n’était pas en-dehors de ses modestes capacités. En gardant ça à l’esprit, il se concentra sur la sorcière et se rendit compte qu’elle possédait une âme. Elle n’était pas une illusion, une marionnette contrôlée à distance ou un simulacre. Alors ils avaient discuté avec l’originale, pendant tout ce temps. C’était bon à savoir. Juste pour être sûr, il fit passer sa perception sur l’autre sorcière…

…qui possédait une âme, elle aussi. Quoi ?

Zorian observa l’une et l’autre pendant un certain temps, tentant de comprendre ce qu’il se passait. Inutile, bien sûr – il n’était pas assez doué pour délier les mystères de ce niveau et ne voulait pas commencer à lancer des sorts de divination sur la sorcière et son clone étrange. Analyser les gens ainsi sans leur permission explicite était vraiment malpoli et insultant.

L’autre sorcière atteint rapidement la première et lui donna le livre qu’elle portait. La première hocha la tête et fit claquer ses doigts.

La nouvelle venue implosa en observant Zach et Zorian d’un air amusé, sa forme s’effondrant sur elle-même jusqu’à devenir une petite balle de fumée noire, qui exista l’espace d’un souffle avant de se reformer en un grand oiseau noir, qui se percha immédiatement sur l’épaule de Lac d’Argent. C’était un corbeau.

Mais bien sûr !

Zorian se frappa le front. Elle possédait un familier ! Le lien entre un mage et son familier permettait à l’un et l’autre de prendre l’apparence de l’autre et de l’un facilement, à condition de connaître les sorts nécessaires.

Et il ne faisait aucun doute qu’elle les connaissait. La magie des familiers était l’une des choses dont les sorcières étaient fières. Merde, elle avait même trouvé le moyen de protéger l’esprit du corbeau afin de prévenir l’indentification de sa nature d’animal transformé !

Zorian ouvrit la bouche pour se prononcer, mais fut interrompu par la sorcière qui tenta de souffler sur la couche de poussière couvrant le livre et qui finit par simplement tousser dans un nuage opaque de ce qu’elle venait de soulever.

Le corbeau se mit à caqueter de façon indigne face à la scène, faisant battre ses ailes à plusieurs reprises pour y donner plus d’emphase.

— La ferme, lui dit-elle entre deux quintes de toux et d’éternuements. Et pourquoi est-ce que vous deux restez là comme ça ?! Venez là et prenez ce satané bouquin ! Pour qui pensez-vous que je l’ai amené ici ? Croyez-vous que je voulais juste me rafraîchir la mémoire ?

Zorian s’approcha et Lac d’Argent lui fourra immédiatement le livre dans les mains. Il grogna légèrement et recula d’un pas, pris par surprise par son mouvement soudain et par le poids insensé du volume. Merde, c’était si lourd !

— Lisez ça, et tout deviendra clair, leur ordonna-t-elle, reprenant enfin son souffle.

Zorian jeta un coup d’œil sur la couverture de cuir d’un air suspicieux. Il n’y avait rien sur celle-ci, mis à part ce titre prétendant qu’il s’agissait d’une référence sur les recettes de cookies. En feuilleter les pages aléatoirement sembla confirmer ce fait.

Il leva la tête vers la sorcière et vit qu’elle et son piaf l’observaient avec attention, attendant sa réaction.

Dans un soupir despéré, Zorian ferma les yeux et passa sa main sur le livre pour lancer un sort de désenchantement particulier, pelant l’illusion qui couvrait l’objet. Il fut immédiatement confronté à un nom bien moins banal : Cultes Indicibles, Volume Quatre.

— Vous ne pouvez simplement pas vous empêcher de jouer ce genre de tours à tout bout de champ, n’est-ce pas ? demanda Zorian sur un ton rhétorique.

— Vous avez prétendu beaucoup de choses grandioses, aujourd’hui, fit-elle en haussant les épaules. Il est naturel pour moi de vous tester de diverses façons çà et là. Si vous deux êtes vraiment des voyageurs temporels comme vous le prétendez, une simple illusion ne devrait pas vous poser problème. D’ailleurs, je ne peux pas exactement laisser un livre comme celui-là rangé proprement sans le déguiser un peu…

— Que voulez-vous dire ? grimaça Zach.

Cultes Indicibles est l’une des séries de livres les plus largement bannies au travers de Cyoria et Xlotic, expliqua Zorian, feuilletant les pages sans trop y penser, assailli par toutes sortes de dessins et descriptions surnaturelles. Ces livres ont été écrits par un auteur inconnu, qui avait un penchant pour infiltrer les cultes secrets et les organisations de mages afin d’observer leurs cérémonies et activités. Personne ne sait comment il a fait, mais en considérant la fureur que ces livres ont levée, il est clair qu’il n’a pas tout inventé. De toute façon, après les avoir infiltrés et observés pendant qui sait combien de temps, il a écrit huit livres entrant dans le détail de ce qu’il avait vu et vécu. Chaque débauche, chaque sacrifice, chaque expérience immorale, tout est décrit sans rien oublier. Il a même illustré certaines scènes à l’aide de diagrammes et représentations. Bien que ces livres ne contiennent aucun sort ou rituel, ils ont immédiatement été bannis, jugés blasphématoires.

Il ferma le livre, totalement torturé. Il ne voulait vraiment pas lire ce truc…

— Je suppose que vous n’allez pas me dire quelle page lire ? demanda Zorian, observant la sorcière d’un air incertain.

Elle se contenta de lui sourire. Putain de vieille saloperie…

Zorian jeta un œil en direction de Zach, mais celui-ci secoua immédiatement la tête.

— Non, non, non, fit-il en tendant les bras devant lui. Désolé, Zorian, mais c’est clairement un job pour toi. Tu as une tolérance nettement plus élevée pour ce genre de trucs.

Ugh. Autant Zorian avait horreur de l’admettre, mais il marquait un point. Lire les pensées de Sudomir, des cultistes de haut rang, des envahisseurs ibasiens et d’autres gens mal intentionnés lui en avait déjà montré suffisamment sur la face sombre de l’humanité, celle encline aux horreurs et aux abus.

Et il ne voulait malgré tout pas se plonger dans un tel livre. Aussi décida-t-il de se montrer créatif. Il commença à lancer un sort de divination après l’autre, tentant de découvrir la partie du livre qu’il était censé lire. C’était plus compliqué qu’il n’y paraissait, parce que le tome était lourdement protégé contre cette pratique et ne mentionnait pas les Primordiaux par leurs noms, mais Zorian était meilleur que ça en divination. Spécialement ce genre-là. Ses simulacres en charge des recherches et de la consultation de montagnes de documents à la recherche d’indices lui avaient appris beaucoup de choses, et ce n’était qu’une routine banale que de contourner ces protections.

Après cinq minutes, il trouva la section qui l’intéressait et ouvrit le livre. À la fois Zach et Lac d’Argent se penchèrent au-dessus de ses épaules pour observer.

— Tu n’es pas marrant, gamin, grimaça la sorcière.

Zorian prit ça pour une admission : il avait trouvé la bonne page. Aussi commença-t-il à lire.

Le chapitre en question décrivait un petit culte de mages, quelque part en Xlotic, qui vénéraient une entité emprisonnée sous ce qu’il appelait un voile dimensionnel. Ils capturaient des voyageurs imprudents, leur implantait une espèce de ver magique dans la tête et établissaient un contact forcé entre leur esprit et celui de l’entité prisonnière. Normalement, un tel lien résulterait immédiatement en une folie certaine – voire la mort – à cause du tsunami de pensées incompréhensibles et d’images étranges, mais les produits chimiques libérées par le ver et imbibant le cerveau de l’hôte lui permettait de résister plus longtemps à l’assaut. Drogué jusqu’à n’en plus finir pour les faire parler, à moitié fou, le pauvre hère passait des heures à hurler, supplier, jurer et délirer tandis que les cultistes écrivaient diligemment tout ce qui se disait.

Après avoir répété ce processus un nombre inouï de fois, les cultistes étaient enfin parvenus à assembler une certaine quantité d’informations sur l’entité, qu’ils appelaient désormais Le Ver aux Plumes Dorées. Aux yeux de Zorian, il était clair qu’il s’agissait d’un Primordial, même si le livre n’en faisait pas mention à une seule reprise.

À cause de la nature déplaisante du texte, du langage archaïque dans lequel il était écrit et de la nature tordue des connaissances obtenues par les cultistes, il fut tenté de simplement bouter leurs découvertes comme autant de stupidités. Mais après avoir relu le chapitre plusieurs fois et y avoir réfléchi un peu plus avant, il sentant qu’il existait une vérité profonde parmi ce lot de folies. Les délires des victimes, parlant d’yeux entre les espaces, du temps qui se déplace en tresses et spirales, des os qui se recourbent en-dedans et en-dehors, et d’autres choses insensées insinuaient toutes que ce Ver aux Plumes Dorées était une entité dimensionnelle complexe.

La voie du Ver aux Plumes Dorées est la voie de l’univers lui-même, disait le livre. En effet, le reste de ses pairs est de même ; chacun d’eux un monde en soi, leur chair rien qu’une fine cape poreuse qui en cache les profondeurs sous-jacentes.

C’était intéressant, pour en dire le moins. Le bouquin disait clairement que les Primordiaux n’étaient pas des créatures comme Zorian le comprenait généralement, mais des univers miniatures vivants. Il… ne savait qu’en penser. C’était quelque chose de fou, et sachant d’où il venait, Zorian aurait normalement rejeté cette idée sans y repenser.

Il passa le livre à Zach, qui avait abandonné la lecture par-dessus son épaule longtemps auparavant, mais qui désirait malgré tout sans doute voir ce que ces pages racontaient. Zorian était impatient de voir son expression lorsqu’il tomberait sur les dessins détaillés de l’implantation des vers dans le cerveau des victimes.

— Alors ? demanda la sorcière, ne se préoccupant pas de Zach. Qu’en penses-tu, toi, l’érudit du lot ?

— Je présume que vous faites référence à l’idée que les Primordiaux sont des univers vivants se promenant dans une carcasse de chair et d’os ? demanda Zorian.

— Quoi, vraiment ? s’étonna Zach, incrédule, tournant lentement les pages, si rapidement que Zorian estima qu’il se faisait que survoler le texte à la recherche de mots-clés. Comment est-ce que ça fonctionne ?

— Lis, et tu pourrais obtenir ta réponse, dit simplement Lac d’Argent.

Quel mensonge.

Zorian avait lu ce chapitre à plusieurs reprises, et il n’avait toujours aucune idée de la façon dont ça pouvait fonctionner.

— Mais oui, continua-t-elle. C’est de ça que je parle.

— Super, soupira Zach. Mais qu’est-ce que ça –

— Je pense que nous vivons à l’intérieur d’un Primordial, le coupa-t-elle.

Le silence qui s’ensuivit fut le plus lourd à digérer de l’histoire des silences.

— Je pense que vous allez devoir vous expliquer un peu, dit lentement Zach, laissant le livre pendre dans sa main afin de pouvoir se concentrer sur elle.

— Eh bien, disons que ce que vous dites est vrai, expliqua-t-elle. Vous me dites que ce Portail du Souverain peut copier le monde entier et créer un univers miniature pour héberger cette copie. Oh, et le faire fonctionner à un niveau de dilatation temporel parfaitement absurde, ne l’oublions pas. Ce n’est pas du tout le niveau de puissance qu’on peut attendre d’un artefact divin. Les dieux peuvent être capables de fabriquer ce genre de choses, je ne sais pas, mais je n’ai jamais entendu nulle part qu’ils eussent un jour donné cette puissance à quiconque. Certainement, un artefact de cette qualité demanderait une quantité absolument titanesque d’énergie divine, rien que pour être produit, non ? Il semble peu probable qu’ils donnent ça à des mortels pour qu’ils puissent s’amuser. D’un autre côté, si le Portail du Souverain n’est qu’un Primordial mutilé, modifié… eh bien, tout d’un coup, le tout semble bien plus plausible. Transformer l’un de leurs anciens ennemis en un artefact et le donner à des mortels pour qu’ils puissent en abuser est exactement ce que j’imagine les dieux capables de faire. Spécialement si ce Primordial les avait irrités particulièrement…

Un autre silence succéda à sa longue tirade, tandis que tous deux réfléchissaient à cette possibilité. La sorcière attendit calmement leur réaction, les mains derrière le dos. Elle semblait tenter de projeter un air de sérénité et d’inébranlabilité, mais l’effet était clairement ruiné par le fait qu’elle ne pouvait s’empêcher de tapoter le pied au sol.

Lac d’Argent pouvait être sur quelque chose, finit par décider Zorian. Il lui avait depuis toujours semblé que le Portail du Souverain était ridiculement trop puissant, même pour un artefact divin, et c’était une explication qui tenait la route. Il se souvint soudain d’un mythe ikosien qui disait que le monde dans lequel ils vivaient avait été façonné par les dieux à partir du corps du Dragon Primordial. Il n’avait jamais pris cette histoire très au sérieux, mais peut-être que…

— Vous dites qu’il y a une manière simple de vérifier nos dires, reprit prudemment Zach. Est-ce lié à ça ? Dites-vous qu’il est possible de vérifier si nous sommes dans un Primordial ?

— Eh bien, peut-être, sourit la sorcière. Tu vois, je sais, pour le Primordial sous Cyoria, je sais depuis un moment, et j’ai étudié sa prison prudemment, vraiment très prudemment. Elle n’a jamais été le sujet principal de mes études, mais j’avoue connaître le sujet plutôt bien. Si ma spéculation est correcte, je devrais être capable de remarquer un changement dans sa prison si je l’étudie à nouveau. Je refuse de croire qu’être recréée à l’intérieur du corps d’un autre Primordial n’aurait aucun effet remarquable. Bon, pour dire vrai, je suis encline à dire que ce type d’objets ne pourrait pas affecter une entité du niveau d’un Primordial, même s’il est scellé… mais ce que vous avez dit à propos de Panaxeth me dit que je peux avoir tort à ce sujet. Alors peu importe, allons vérifier !

— Maintenant ? demanda Zorian, un sourcil levé.

— Y a-t-il une raison d’attendre ? le défia-t-elle.

— Je suppose que non, admit Zorian. Je suis juste un peu surpris par votre… spontanéité.

— J’ai juste découvert que je pouvais être enfermée à l’intérieur du corps d’un Primordial qui déteste probablement l’humanité, dit-elle en le regardant comme s’il était le dernier des idiots. Bien sûr que je veux confirmer ou infirmer ça aussi rapidement que possible ! Pas toi ?

— Une copie enfermée à l’intérieur d’un Primordial, corrigea Zorian.

— Et vous avez été précédée par d’innombrables autres copies, toutes ayant vécu et répété leur courte vie en vain, leurs pensées et actions annulées à la fin de chaque mois, ajouta Zach.

— Vous êtes des vrais gosses, tous les deux, leur dit-elle. Allons déjà jeter un œil à cette prison. Vous savez comment vous téléporter, n’est-ce pas ?

— Bien sûr, mais il n’y en aura pas besoin, la coupa Zorian. Je peux nous y amener bien plus rapidement.

 

___

 

 

Après que tous trois eurent atteint Cyoria à travers le sort de portail dimensionnel de Zorian, ils se rendirent immédiatement là où le Primordial était emprisonné – l’abysse circulaire connue sous le nom de Gouffre.

Heureusement, y accéder ne fut pas terriblement compliqué. Bien que le mana qui en suintait était la fondation même de la ville, le Gouffre lui-même n’était pas spécialement surveillé. Le plus gros souci de la ville à son propos reposait dans le fait que les gens trouvaient un moyen rapide de se suicider en s’y jetant, ce qui forçait des patrouilles à rôder de temps à autre afin de dissuader ce genre de pratiques. Ces patrouilles n’étaient pas très strictes et ne vérifiaient que les accès les plus évidents. Tant qu’ils n’attiraient pas trop de monde à les imiter, les gens pouvaient bien s’y jeter et y disparaître autant qu’ils le voulaient.

Tandis qu’ils descendaient dans les profondeurs du Gouffre, Zach et Zorian interrogèrent la sorcière sur son intérêt pour les Primordiaux. Elle prétendait que ce n’était pas une chose qui l’inquiétait réellement, qu’elle avait juste vécu assez longtemps pour que même une étude nonchalante finît par construire des connaissances solides sur n’importe quel sujet. Elle prétendit également que, comme eux, elle ne connaissait aucune autre prison que celle sous Cyoria.

Zorian ne savait quelle légitimité donner à ses paroles, pour être honnête. Elle connaissait la prison de Panaxeth suffisamment bien pour avoir confiance en disant qu’elle ne détecterait les changements, mais elle ça n’avait jamais été le sujet principal de ses études ? Zach et Zorian pouvaient à peine détecter légèrement la présence de la prison, et ce n’était pas comme si leur maîtrise du dimensionnalisme était médiocre. De plus, tandis que leur recherche d’autres sites d’emprisonnement ne menait toujours nulle part, ils avaient malgré tout trois pistes prometteuses… et ils ne fournissaient pas beaucoup d’efforts pour ça. Ils ne faisaient que pousser la recherche lorsqu’ils le pouvaient, sans laisser tomber tout le reste. Et il était supposé croire que la vieille n’avait pas été capable de trouver la moindre prison additionnelle après avoir passé dieu sait combien de décennies à étudier le sujet ? Il avait l’impression qu’elle sous-estimait à la fois leur intérêt et leur maîtrise du sujet. Il suspectait même son incroyable niveau en création de dimensions… eh bien, il suspectait qu’il venait de l’étude de ces prisons.

Il ne lui en fit pas part, cela dit. Il pouvait dire que, bien que la sorcière gardait un visage serein et calme face à eux, ce qu’ils lui avaient dit l’avait profondément dérangée et l’avait mise mal à l’aise. S’il poussait un peu trop loin, elle pourrait se sentir acculée et leur sauter à la gorge. Franchement, elle ne l’avait jamais marqué comme étant la plus stable des personnes.

Ils n’eurent pas à descendre bien loin dans le Gouffre pour accéder à la prison de Panaxeth. Contrairement au palais dans l’orbe et les autres dimension miniatures auxquelles Zorian était habitué, la prison d’un Primordial semblait posséder une ancre bien plus large et complexe, qui s’étendait sur une grande surface. En fait, en considérant que Zorian avait un jour assisté à la libération de Panaxeth sous le ciel de Cyoria, il suspectait l’ancre de s’étendre même en-dehors du Gouffre… Ces parties de l’ancre étaient simplement trop subtiles pour Zach ou lui. Dans tous les cas, une fois atteinte la profondeur voulue, Lac d’Argent leur demanda de la laisser étudier la prison en paix, et de ne pas commencer à discuter. Aussi firent-ils ainsi, s’asseyant sur des rochers proches tandis qu’elle faisait ce qu’elle avait à faire.

Zorian prêta une attention particulière aux sorts qu’elle lançait. Bien qu’on ne pouvait pas apprendre un sort simplement en observant quelqu’un le lancer, cela permettait de donner une bonne idée de ce qu’il était supposé faire, si l’on était familier avec la théorie, ou expérimenté sur le terrain. Zorian était les deux, et il pouvait en apprendre beaucoup en la voyant faire tandis qu’elle observait la prison de Panaxeth. Elle utilisa des dizaines de sorts lors de son investigation, chacun d’eux d’une longueur et d’une complexion à faire bailler un paresseux. De tels sorts sous-efficaces et non-optimisés étaient probablement de sa propre création, afin d’analyser spécifiquement la prison d’un Primordial. Pour ne rien louper, elle les lançait avec une aisance naturelle en ne faisant pas la moindre erreur, ce qui tendait à insinuer fortement qu’elle les avait déjà lancés un sacré paquet de fois.

Pas un sujet d’étude principal, bien sûr. Bien sûr.

Le temps passa et Lac d’Argent commença à grimacer de plus en plus, lançant ses sorts de manière de plus en plus fiévreuse, mais restant totalement silencieuse malgré ça, et concentrée sur sa tâche. Elle ne se murmura même pas ses habituelles frasques, cette fois. Finalement, après plus de deux heures d’analyse, elle resta là, à observer silencieusement l’espace vide face à elle, et laissa tomber ses bras, soupira, et se tourna vers Zach et Zorian.

— Très bien, dit-elle. Vous gagnez. Je vais temporairement croire à votre histoire de fous.

— Temporairement ? s’étonna Zach.

— Nous sommes clairement dans un monde différent d’il y a quelques mois, annonça-t-elle. Ce qui ne veut pas nécessairement dire que votre version spécifique des évènements est la bonne, mais je n’ai pas de meilleure explication pour l’instant. Alors, tant que je n’en ai pas, j’accepte la validité de votre histoire.

— Juste pour le confirmer, vous avez réellement détecté un changement notable entre la prison de Panaxeth actuelle et celle d’il y a quelques mois ? demanda Zorian.

— Je suppose que tu peux dire ça, répondit-elle, une note de malaise dans la voix.

— Pourquoi cette expression sinistre ? renchérit Zach, sautant sur l’occasion. Ne vous attendiez-vous pas à découvrir exactement ça ?

— Je m’attendais à découvrir que la prison était soit une version bas de gamme humaine, la copie d’une prison de Primordial pour donner le change, ou peut-être découvrir que la vraie prison n’a jamais été modifiée, et que vous cherchiez à me faire gober un paquet de conneries.

— Mais ? tenta Zorian.

— Mais c’est la même prison qu’elle a toujours été… simplement vue d’une perspective différente, dit-elle, perdue dans ses pensées, l’espace d’une seconde, avant de grimacer en se concentrant à nouveau sur ce qu’elle disait. Bah ! Je ne peux pas croire que je doive m’expliquer à des amateurs comme vous ! Bon, tentons ainsi… Vous savez qu’une porte dimensionnelle a l’air de deux objets différents, placés en deux endroits différents, mais qu’en réalité, ce n’est qu’une seule et même construction, composée de la même matière, des mêmes atomes…  La prison face à nous est identique. Je peux en sentir les changements, mais une étude plus approfondie me révèle qu’ils ne sont que superficiels. C’est l’exact même objet, vu sous un angle différent. La prison de Panaxeth existe à la fois dans le monde réel, et dans quoi que ce soit que ce satané endroit est supposé être. Le Portail du Souverain ne pourrait pas répliquer une prison de Primordial, mais il pourrait en attacher une à ce monde en plus du monde réel… et ça me file la migraine. Je ne sais pas comment ça pourrait possiblement fonctionner et je ne sais pas pourquoi quelqu’un s’embêterait avec ça. Pourquoi ce jouet divin ne néglige-t-il pas simplement les Primordiaux au lieu de s’emmerder sévèrement à assurer l’accès à leur prison, même pour… Pour quelle raison, d’ailleurs ?

Elle se tira les cheveux, pendant une seconde – pas très fort, voyez-vous, uniquement pour se donner un effet mélodramatique – et se tourna une fois de plus vers l’abysse béant sous leurs yeux, l’observant, perdue dans ses pensées.

Après quelques instants d’un silence dérangeant, Zach posa la question évidente que Zorian avait en tête depuis un moment.

— Si les prisons de Primordiaux sont des objets qui existent à la fois dans le monde réel et dans la réalité de la boucle temporelle, cela ne fait-il pas d’elles une sorte de… pont, à défaut d’un autre terme ? demanda Zach à Zorian en chuchotant. Si c’est le cas, il devrait être possible de les utiliser comme sorte de conduit pour ouvrir un passage entre ici et le monde réel. Merde, en libérer un de sa prison ne serait peut-être même pas nécessaire !

— Je ne placerais pas mes espoirs sur une telle idée, dit soudain la sorcière, qui n’était apparemment pas si perdue dans ses pensées qu’il n’y paraissait. Une prison de Primordial est difficile à percevoir, ne parlons même pas d’interagir avec elle. Il faudrait des compétences bien plus énormes pour les utiliser en tant que tunnel que –

Elle s’arrêta soudain et se tourna d’un seul coup pour leur faire face, une expression incrédule sur le visage.

— Attends, c’était quoi cette histoire au sujet de la libération de l’un d’eux ?

 

___

 

 

Après avoir convaincu la vieille que quelque chose ne tournait pas rond dans le monde dans sa globalité et que la boucle temporelle était l’explication la plus probable qu’elle pouvait accepter, elle accepta de continuer à leur enseigner la création de dimensions miniatures. Zorian avait de plus réussi à lui faire accepter de leur vendre les sorts d’analyse qu’elle avait employés pour étudier la prison de Panaxeth en échange des ingrédients pour sa potion de jeunesse. Autant elle se plaignait qu’un tel échange était profondément injuste à cause des mécanismes de la boucle temporelle, autant elle ne pouvait simplement pas résister à la possibilité de mettre la main sur les deux ingrédients de ses rêves.

Malheureusement, la convaincre qu’ils étaient sur quelque chose de ce calibre eût un autre effet indésirable : elle s’intéressa soudain énormément à eux. Elle voulait tout savoir à leur sujet, d’où ils venaient, qui étaient les membres de leurs familles, quelle était leur allégeance, ce qui composait leur répertoire de compétences, combien d’argent ils avaient à disposition, tout. Et lorsqu’ils refusèrent de coopérer sur ce point, elle se mit à les espionner, mobilisa certains de ses contacts – elle n’était apparemment pas l’ermite solitaire qu’elle prétendait être – pour rassembler des informations à leur sujet lorsqu’elle comprit qu’ils étaient trop doués pour se faire personnellement analyser. Ce serait vraiment très ennuyeux dans le meilleur des moments, mais ce qui rendait la chose réellement problématique cette fois, c’était que tous deux avaient déjà des projets susceptibles d’attirer l’œil, arrangeaient des marché et un commerce de haute volée, et utilisaient des sommes d’argent ridicules à tout va. Ce genre de pratique fonctionnait très bien tant que personne ne les observait avec attention… Et soudain, ils eurent une raison bien plus particulière de s’intéresser à la curiosité de leur hôte. Même si elle revenait en arrière et leur disait qu’elle avait changé d’avis, ces contacts n’allaient certainement pas arrêter leur enquête.

Ugh.

Pris par surprise par le changement dans leur routine et forcés de faire profil bas temporairement, Zach et Zorian trouvèrent d’autres choses pour s’amuser. Pour Zorian, ce fut l’étude des artefacts divins.

Assis dans une maison secrète et lourdement protégée, Zorian observait la petite collection d’objets face à lui. Il y en avait sept au total : une petite pyramide d’argent, un bâton d’un bois brun banal, une cloche dorée, un disque d’un noir profond couvert de rayures, une énorme gemme verte dans laquelle étaient emprisonnées plusieurs papillons de lumière, une boussole de bronze et une dague de fer tout ce qu’il y avait de plus classiques récupérée dans les ruines de l’orbe. Tous les autres objets avaient été volés sans honte dans des collections privées et des trésors d’autres pays. Bien que peu remarquable, cette pile d’objets provoquerait l’envie et la convoitise des plus riches personnes du pays.

— Tu sais qu’il est presque impossible de découvrir quoi que ce soit en étudiant des artefacts divins, n’est-ce pas ? lui demanda son frère en observant attentivement la pile de trésors, frère que Zorian avait invité à contrecœur afin de l’aider dans sa tâche, puisqu’il avait bien plus d’expérience que lui dans ce domaine. Des groupes entiers ont dédié leurs vies à étudier un artefact divin en particulier, et n’ont rien découvert.

— Oui, je sais, répliqua Zorian en ramassant la dague.

Il n’avait toujours aucune idée de ce qu’elle faisait, à part être acérée de façon surnaturelle. Les artefacts divins étaient immunisés à la divination magique, et la seule façon de découvrir leurs fonctions était de tester, échouer, et succéder, tout en parcourant les écrits historiques et les descriptions de l’objet dans les anciens textes.

— Mais j’ai quelque chose, reprit-il. Quelque chose que ces groupes n’avaient pas. Je n’ai pas peur de détruire ces objets pour les étudier.

Daimen lui offrit une expression meurtrie.

— Ça a l’air si… mal, dit-il, mal à l’aise. Leur valeur est incroyable, ce sont des reliques irremplaçables. C’est un sacrilège.

— Et pourtant, tu as accepté de venir et de participer, nota légèrement Zorian.

— Eh bien… Je ne peux pas dire que je n’ai jamais été tenté de faire ça, soupira Daimen. Tu es sûr qu’ils vont redevenir… normaux, à la fin du mois ?

— Parfaitement sûr, confirma Zorian en désignant la dague dans ses mains. J’ai déjà démonté celle dague le mois dernier, et regarde. Peu importe le mystère derrière les artefacts divins, le Portail du Souverain n’a aucun souci à les répliquer.

— C’est à la fois rassurant et terrifiant, conclut Daimen.

Zorian se demanda ce que son frère dirait s’il lui disait qu’ils étaient actuellement coincés à l’intérieur d’une espèce d’étrange Primordial qui pourrait – ou pas – être en vie en attendant une chance de tous les dévorer. Hélas, aussi drôle que ce pourrait être d’imaginer sa réaction, ça ne justifiait pas le drame qu’il ferait naître.

— Alors, avant que nous commencions, je suis plutôt curieux… déclara Zorian. Comment Fortov a-t-il réagit à ce disque d’illusion que j’ai fait pour toi ?

Le disque était une chose que le Daimen du mois précédent avait pensée. Afin de l’aider à convaincre Fortov de s’ouvrir et de lui parler, Daimen avait imaginé que ce disque pourrait, une fois activé, projeter une scène illusoire de leur discussion précédente. Zorian était sceptique face à cette idée ; pourquoi voir une telle illusion convaincrait Fortov de quoi que ce fût ? Pourtant, Daimen avait insisté, et Zorian l’avait honoré. Il avait puisé dans ses souvenirs afin de construire l’illusion la plus réaliste possible avant de la fixer sur un disque que Daimen avait laissé dans la boîte aux lettre de son frère. C’était là la fin de sa responsabilité en la matière, mais pour le dire franchement, il était curieux du résultat.

— Eh bien, on peut dire que ça a fonctionné, lui répondit Daimen avec un petit sourire.

— Oh ? fit Zorian en levant les sourcils.

— Il me parle, au moins, avoua Daimen en haussant les épaules. C’est ce que je voulais obtenir avec ce disque, alors je n’ai pas de raison de me plaindre.

— Comment lui as-tu expliqué le contenu ?

— Je ne l’ai pas fait, ricana Daimen en arborant un sourire narquois, d’une oreille à l’autre. Je lui ai dit que je lui avouerais tout dans un mois.

Zorian leva les yeux au ciel. Oui, il avait fait pareil, par le passé… Pourquoi ne s’y était-il pas attendu ?

— Quoi qu’il en soit, j’ai aussi quelque chose à dire avant que nous ne plongions là-dedans, reprit Daimen. Je suis presque sûr que j’ai localisé la clé que tu cherches à Xlotic.

— Vraiment ? s’étonna Zorian, en s’avançant sur sa chaise, plein d’anticipation.

Il devait dire que l’aide que son frère lui apportait était énorme lorsqu’il s’agissait de tâches de ce genre. Si Zach et Zorian avaient dû cherches les pièces manquantes, il leur aurait probablement fallu bien, bien plus de temps que ce dont ils avaient à disposition.

— Et donc, continua-t-il, où est-elle ? Dans la tour de Hulos-Na ? J’espère que –

— C’est dans le Ziggurat du Soleil, l’interrompit Daimen.

Zorian s’enfonça contre le dossier de sa chaise en grognant. De toutes les options possibles, c’était la pire. Situé profondément dans les terres de Miasina du nord, dans une zone où se trouvaient jadis des prairies à perte de vue et qui était aujourd’hui le cœur du désert de Xlotic. Il n’y avait aucun campement humain majeur à proximité, juste une simple étendue de sable désertique. Rien qu’approcher du Ziggurat demandait une avancée longue et pénible dans un désert désolé et aride.

Et toute expédition parvenant jusque-là serait alors confrontée à un autre problème : ils devraient faire face aux habitants actuels des lieux, les sulrothums, une espèce guêpe du désert géante intelligente qui avait proclamé les structures du désert son nouvel habitat. Elles mesuraient près de trois mètres de long, possédaient une force physique énorme et une résistance non des moindres. Le meilleur ? Des centaines d’entre elles habitaient à l’intérieur du bâtiment. Quant à leur hospitalité, eh bien… Sulrothum était un mot d’un dialecte local grossièrement traduit en guêpe du diable. Zorian doutait quelque peu qu’elles leur permettraient de fouiller leur maison paisiblement à la recherche d’un ancien artefact.

— Désole, annonça Daimen. Je sais ce que tu ressens, mais je suis quasiment certain d’avoir vu juste. L’anneau impérial est là-bas, si l’on part du principe que les sulrothums ne l’ont pas trouvé et emmené ailleurs.

— Ce qui est clairement possible, nota Zorian.

— Au moins, tu possèdes un détecteur de clé natif, alors on le saura rapidement. Nous n’aurons pas besoin de sécuriser les lieux si tu me dis que l’anneau n’est pas là.

— Bien sûr, cette saleté d’anneau devait être dans le pire des endroits possibles, grommela Zorian. Rien que s’y rendre va poser problème.

— En fait, je pense que j’ai une solution pour ça, et pour rejoindre Blantyrre en un temps raisonnable, sourit Daimen avant de lui envoyer une affiche enroulée. Regarde, et dis-moi ce que tu en penses.

Zorian attrapa l’affiche au vol avant qu’elle n’atteignît son visage, regarde Daimen d’un air pas vraiment amusé, et déroula le tout sur la table.

C’était une propagande, qui dépeignait un énorme et étrange bateau en bois commandé par le roi d’Aranhal, l’une des plus grandes nations de Xlotic. Zorian réalisa qu’il s’agissait d’un bateau volant.

Un bateau volant expérimental et hors de prix créé par les meilleurs ingénieurs d’Aranhal afin de montrer la grandeur de leur nation. Il était presque achevé, l’équipe de construction ajoutant encore les dernières touches de la finition çà et là ; son vol d’essai était prévu dans les prochaines semaines.

— Alors ? le pressa Daimen avec un sourire entendu. Tu en dis quoi ?

Zorian observa l’affiche pendant encore une seconde avant de regarde son frère droit dans les yeux.

— J’en dis que nous avons un bateau volant à nous approprier.

Raka
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