DMS : Chapitre 32
DMS : Chapitre 34 Bonus

Et hop, ninja !

Merci à Enguerran, Philippe et Adrien pour leur soutien sur cette série !

Et un chapitre qui va en faire jouir plus d’un, un !

 


 

Chapitre 33 – Politique (4)

 

Dans la salle où j’avais accusé Krahn le sympathique, une paire d’yeux accueillit mon arrivée en lançant des éclairs, une tempête, un maelstrom. S’il avait réellement pu faire sortir ce qu’il avait dans le regard, il aurait certainement été capable de faire chavirer toute l’Armada Espagnole de la grande époque.

Evidemment, Krahn était là, assis sur la chaise et il me regardait entrer dans la pièce. Il n’avait pas honte, il n’avait pas peur, il n’était même pas anxieux. Il m’observait simplement, fou furieux. Je pus même déceler une trace d’incrédulité au fond de ses yeux comme si, jusqu’au dernier moment, il ne pouvait pas croire que j’allais réellement venir le dénoncer.

Il était là, assis face à la dure réalité, et il savait que les choses n’allaient pas bien se passer. Le voyant cogiter, je me rendis compte de ce qu’il avait en tête. Il avait deux options.

Soit il faisait profil bas et admettait ses torts, acceptait la punition et surtout, surtout ne cherchait plus à me créer d’ennuis sous peine de recevoir à nouveau une punition méritée ; il savait maintenant que je n’avais plus peur de le dénoncer.

Soit il mettait sa fierté au premier plan, jetait tout le reste en l’air et venait m’agresser directement pour bien me faire comprendre qui était le patron, ici ; du reste, il subirait une peine encore plus lourde et détruirait la réputation de sa secte pour de bon.

Evidemment, je savais qu’il rêvait d’agir selon cette dernière possibilité. Ses jambes tremblaient tandis qu’il luttait pour ne pas se lever et se jeter sur moi. Tout à coup, le type de l’autre côté du bureau prit la parole.

— Monsieur Krahn le sympathique. Vous êtes aujourd’hui accusé d’avoir commis un meurtre de sang-froid contre mademoiselle. Elle est victime, témoin et accusatrice. Nous allons donc immédiatement et sans préavis procéder aux vérifications mnémoniques.

Tout était dit. En une phrase, il avait résumé tout ce pour quoi j’étais là et sa voix posée et dominante avait calmé mon meurtrier d’un seul coup. Il ne lui avait rien demandé, il ne lui avait pas posé de question, il lui avait simplement signifié qu’il allait procéder à la vérification des faits.

C’était réellement un système judiciaire sans faille !

Il se leva et s’approcha de Krahn qui était comme collé sur sa chaise. Il ne pouvait pas bouger, de peur, peut-être, ou était-il bloqué par un étrange pouvoir ?

— Mais… Pourquoi…

Et il s’étonnait lui-même.

— C’est le pouvoir de la justice, monsieur Krahn. Vous ne pourrez pas bouger tant que toutes les vérifications n’auront pas été faites. C’est un crime grave dont vous avez été accusé. Veuillez ne pas vous agiter, cela ne servira à rien.

— …

Je sentais qu’il était stressé, qu’il cherchait à s’échapper de l’emprise du pouvoir de la justice. Mais il n’était rien face à la toute-puissance du haut-gradé de l’administration. Il y avait certainement quelque chose dans le système qui lui permettait de contrôler à loisir tout accusé de la sorte. C’était presque effrayant de savoir que nos corps pouvaient ne plus nous appartenir.

Non ! Mon corps m’appartenait ! Quoi qu’il fasse, j’étais la seule à pouvoir l’explorer…

Il posa ses mains sur la tête de Krahn, et leva la tête au plafond, les yeux révulsés. Il bégayait des choses incompréhensibles tandis que Krahn le regardait faire, impuissant.

Au bout de quelques minutes, il s’arrêta et reprit ses esprits.

Merde, ça va être mon tour… Non… Mon corps… Il est à moi seule !

— Bien. Je vois. Toutes les informations nécessaires sont déjà présentes dans vos souvenirs. Je n’ai donc point besoin d’aller chercher dans ceux de mademoiselle.

…Hein ? Ouah, bingo, sauvée !

— Je constate, monsieur Krahn, que mademoiselle a raison. Vous avez sorti une arme de votre propre chef pour la poignarder en plein cœur. Vous avez ensuite tenté de vous déculpabiliser en lui disant que tout cela était de sa faute.

Krahn, face à une vérité affirmée et non-négociable, craqua.

— …Et alors ?! Elle m’avait cherché ! Elle n’avait qu’à pas me manquer de respect ! Je ne l’aurais pas tuée !

— Monsieur Krahn, il n’y a pas de bonne excuse pour tromper la loi d’Imperos. L’agression et le meurtre d’un architecte est strictement prohibé et vous avez transgressé cette loi, quelle qu’en soit la raison. Je constate également que vous ne vous êtes pas privé pour vous en vanter auprès de votre père une fois l’acte accompli. Vous avez même demandé à ce qu’il vous couvre en utilisant le pouvoir d’un Maître de Secte ; n’avez-vous donc pas honte de vous prétendre architecte ?

— …

Krahn ne disait plus rien. Il était conscient que tout ce qu’il pouvait objecter allait le desservir et il préférait maintenant garder le silence.

Mais l’employé administratif qui tenait lieu de juge, juré et avocat ne s’arrêta pas là.

— Monsieur Krahn, vous méritez une peine exemplaire pour avoir fait ce que vous avez fait. Il faut qu’à l’avenir, avant de bafouer la loi d’Imperos, vous y réfléchissiez à deux fois ; et pour quelqu’un de votre trempe, il n’y a pas beaucoup de solutions. Je crains que quelle que soit la punition, vous ne la compreniez pas une fois libre. Je pourrais vous enfermer, je pourrais vous faire tuer, je pourrais même vous torturer, et je prendrais un plaisir certain à le faire moi-même, mais…

— …Me torturer ? Savez-vous qui je suis ?

Il avait tenté de jouer une dernière carte, toujours la même cela dit. Mais l’homme qui le regardait de haut ne se laissait pas facilement impressionner et lui répondit directement.

— Voilà le genre de comportement dont je parle. Oui, je sais qui vous êtes, monsieur Krahn. Vous êtes le fils d’un Maître de Secte, qui ne sera jamais qu’une secte face à l’administration. Vous êtes, monsieur Krahn, un meurtrier. Vous êtes quelqu’un d’arrogant et n’avez cure de vos collègues architectes.

— Evidemment ! Pourquoi devrais-je m’intéresser à leur bien-être ?! Ce sont tous des êtres inférieurs. Ils ne méritent même pas de me parler.

Il montrait enfin son vrai visage, face à l’inévitable.

— Monsieur Krahn, en vertu de votre crime et de vos réactions passées et présentes, de votre potentiel futur et de la façon dont vous allez très certainement évoluer en continuant ainsi, je…

— Non mais, vous vous prenez pour qui, à la fin ?! Vous n’êtes qu’un employé sans âme !! Attendez que mon père s’occupe de vous ! Vous n’allez pas faire le malin bien longtemps !

— …je déclare que les faits qui vous sont reprochés sont avérés dans leur intégralité et que votre comportement ne montre aucun signe de remords.

Bon sang, il allait se prendre la totale ? Il allait se faire enfermer, et torturer, puis tuer ? Encore et encore ? Je le sentais venir de si loin…

— Vous êtes désormais banni d’Imperos. Vous avez une heure pour quitter la ville. Suite à quoi, les gardes vous tueront à vue. J’ajoute à ça que vos donjons en activité vont être définitivement supprimés et que vous ne bénéficiez plus d’aucun accès à quelque boutique que ce soit au sein de la ville.

— … !!

Quoi… ?!

Il l’avait complètement détruit ! Une condamnation à mort était passable, ça aurait pu lui servir de leçon et il aurait repris son quotidien. Même l’enfermement ou la torture. Tout ça n’aurait jamais été définitif et un jour ou l’autre, il aurait pu reprendre sa vie d’architecte. Mais là, c’était clairement le pire qui pouvait arriver à un architecte ! Etre banni de la cité, n’était-ce pas équivalent à voir sa vie définitivement ruinée, et ce pour toujours ?

Sans pouvoir gérer un donjon, un architecte n’était plus rien. C’était une torture infinie, pour l’éternité… Un architecte était immortel ; dehors, il allait vivre une éternité de vide, d’ennui et de malheur. Il ne pourrait jamais revenir, ne pourrait jamais posséder de donjon à nouveau et était condamné à ne jamais devenir un dieu. Peut-être même allait-il devoir se faire tuer par des créatures sanguinaires à tout jamais…

C’est quand même extrêmement violent comme sentence…

— Vous… Vous êtes fou… Vous êtes tous fous, dans cette ville !!

Il se leva d’un seul coup, libéré de ses étreintes invisibles et bondit hors de la pièce d’un coup de fusil, en me lançant le pire des regards qu’il pouvait lancer juste avant de disparaître pour de bon.

Je me tournai vers l’homme qui venait de le bannir.

— Pour de vrai… ? Il va quitter la ville pour toujours ? …Pour un petit meurtre, c’est énorme, quand même.

— Pour toujours ? Ha ha, mademoiselle, il n’existe pas de concept comme ‘pour toujours’ ici. Les sentences comme celles-ci sont applicables pour cent ans au maximum.

Il pourrait alors revenir au bout de cent ans… Il ne semblait pas vraiment en avoir conscience lorsqu’il était parti comme une furie.

— Cela dit, il l’ignore sans doute. Il n’a jamais eu affaire à nous avant ça, alors comment le pourrait-il ? Mais son père va sans doute l’éclairer sur le sujet, puisqu’il va se dépêcher d’aller le voir avant de partir. Sans doute pour essayer de le faire agir, mais ce sera inutile. Il ne peut rien faire contre l’administration.

— …

Je ne savais plus que dire. Même un siècle, c’était tellement long, seul dehors, dans la nature, aux proies avec les monstres et destiné à mourir un nombre incalculable de fois. Ce type ne s’en rendait sans doute pas compte.

J’avais presque pitié pour Krahn. En réalité, j’éprouvais presque de la sympathie pour le sympathique…

Mais bon, je ne peux rien y faire et il l’a cherché, après tout.

Il fallait que j’aille de l’avant, maintenant. Et pour être certaine qu’il ne me cherche pas d’ennuis avant de partir, puisqu’il n’y avait personne derrière moi dans le bureau des dénonciations, je fus autorisée à rester assise là pendant la durée de mon choix ; la journée de travail du juge-juré-avocat était visiblement terminée et il avait quitté les lieux, me laissant libre de partir quand bon me semblerait.

— Bon… Je vais attendre longtemps, pour être vraiment sûre… Restons là pour le reste de l’après-midi… D’ailleurs, hm… Je voulais aussi dénoncer le père pour m’avoir enfermé… Tout ça m’a complètement fait oublier ce détail. Il faudra que je revienne lorsque les choses se seront un peu calmées et que ce grand type sera de retour. Après tout, je ne suis pas à un jour près.

Seule, assise sur ma chaise en bois et face à un silence de mort, je n’eus rapidement plus grand-chose à penser. Laissée seule face à des heures d’attentes, j’en vins bientôt à constater que Friderik était toujours profondément endormi et que même en le secouant, il restait plongé dans un sommeil de plomb.

Ce jour-là, pendant plus de trois heures et assise sur une chaise en bois dans une pièce vide, mes mains se promenèrent de mon ventre à mes cuisses au rythme d’une respiration de plus en plus saccadée.

Quand vinrent les prémices d’une fatigue sans bornes après de nombreuses ascensions – et je ne parle pas de celle vers le royaume des dieux – je me décidai enfin à me lever en titubant un peu pour quitter les lieux.

— Fiou. J’espère qu’on ne m’a pas trop entendu crier, là-dehors…

Il n’y avait plus personne dans le bâtiment, pas plus qu’à l’extérieur. La sanction exemplaire qui avait été appliquée les avait sans doute convaincus de ne plus trop s’approcher de moi ; en tout cas, je l’espérais fortement.

— Bon. Il est temps d’aller voir les crédits que j’ai gagnés pendant ma détention.

— …Hm ? Il était temps.

— Ah, tu te réveilles enfin, toi ?

— …Moi ? Mais je suis réveillé depuis… Oh, quelque part entre le moment où l’autre imbécile s’est fait bannir et où le grand type bizarre t’a laissée seule dans son bureau.

— …

Je le tue tout de suite ou je cherche un moyen de le torturer avant ?

 

**

 

[Niveau 6 / 2000 crédits.]

C’était encore mieux que ce que je me l’imaginais. Friderik avait tellement bien travaillé pendant ces cinq jours d’absence qu’il m’avait fait passer un niveau et j’avais même gagné tant de crédits !

— Je vais pouvoir aller m’acheter quelque chose… Je suis curieuse de voir ce que je peux acquérir, maintenant, après cette compétence buguée de la dernière fois.

Merde, je lui en veux ou pas, finalement ? Je le tue ou je le félicite ? …Bon, on va se taire pour le moment et y penser plus tard.

Et sur ces pensées, je me dirigeai d’un pas assuré vers la boutique de structures et de monstres, curieuse et anticipant quelque chose d’exceptionnel.

Raka
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18 thoughts on “DMS : Chapitre 33 Bonus

  1. Vraiment sympa.
    Merci pour ce chapitre.
    Je pense que la musique de « New York Police Judiciaire est parfaite pour la conclusion de ce chapitre.

  2. Merci pour le chapitre
    Cette phrase a jamais été aussi vrai je pensais tellement qu’il allait s’en tiré sans soucis merci beaucoup vive la justice ultime

  3. Merci au don les gars !
    Et merci au chapitre raka.

    Enfin le retour du donjon ?
    J’ai adoré la petite phrase final subtil 😀

  4. Merci pour le chapitre !
    Il y va pas de main morte administrateur xD
    Le slime a du être heureux dans la salle d’attente xD

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