LDO : Chapitre 10 BONUS
LDO : Chapitre 12

011     Plus noir que noir

 

 

– W… Wang Wei ?

– Doyen ?

Kong Jia avait l’air tout aussi surpris que moi et s’était exclamé en même temps que moi. Alors c’était ça qu’il essayait de me dire, le doyen était noir. À cause de moi ?

La formation que tu as activée dans la tour servait à amplifier le Bagua du Taiji. Mais elle était faite pour ceux qui maîtrisent cette technique à haut niveau. Toi, tu as du mal à contrôler ton Qi, et la formation a réagi de façon chaotique lorsque tu n’as pas su le retenir en toi. L’explosion qui a suivi a très probablement envoyé une onde de choc contenant l’essence même de la rune, que la formation détruite n’a pas été capable de retenir.

Alors c’était ça. Toujours là pour expliquer les choses, sacré bon vieux Zhou XueFang. Mais ça ne réglait pas mon problème. Je supposais que les quelques centaines de disciples balayés par l’onde de choc avaient tous subi le même sort, mais le seul à avoir réussi à me suivre était Wang Wei, le doyen. Et il fallait que je fasse quelque chose pour tenter de le calmer, parce que dans cet état, j’allais très sûrement mourir.

– Euh… C’est que… T’as bonne mine, hahaha…

Ses yeux blancs, au milieu de son visage noir, s’injectèrent de sang et il s’approcha de moi en grognant, d’un pas lourd.

– Hé… Hé ! Tu sais, je ne voulais pas faire ça. C’était un accident, il y avait ce rassemblement dehors, et je voulais juste voir ce qui se passait, mais sans m’approcher et…

Kong Jia prit ses jambes à son cou après avoir lentement reculé. Wang Wei ne se préoccupait absolument pas de lui. Super. Il aurait quand même pu m’aider, lui qui se prétendait dans les bonnes grâces de la Ligue.

– Erm… Euh… Je… Je ne voulais pas m’approcher à cause de cette aura meurtrière et… il y avait cette tour, d’où je pouvais voir ce qu’il se passait en bas… J’ai juste ouvert pour trouver un escalier et…

VLAM !

La main de Wang Wei s’abattit lourdement sur mon visage, m’envoyant m’écraser au sol d’un seul coup. Je ne sentais plus ma joue, ma langue me picotait sévèrement et le sang battait dans mes gencives et dans mes dents. Bon sang, je n’y voyais plus rien d’un œil parce qu’il commençait à gonfler.

Il leva à nouveau la main, je vis du coin de l’œil qu’il voulait m’en coller une autre. Merde ! Il voulait me tuer ou quoi ? Il allait m’en foutre une exactement là où il m’avait touché juste avant. Pendant une seconde je fus certain que ma tête se décollerait s’il y arrivait, alors par manque d’autre solution, je tendis l’autre joue.

BLAM !

Et rebelote. Je fis trois tours sur moi-même, déjà au sol, avant de totalement perdre conscience. Tout s’éteignit autour de moi, à la fois parce que mon esprit avait décidé de m’abandonner et parce que j’avais le visage tellement gonflé que je n’y voyais plus rien.

Tombant dans un abîme obscur, je me mis à flotter sans but, sans force et sans conviction. Pendant ce qui me sembla être des heures, je dérivais sans savoir d’où je venais et où j’allais et sans pouvoir y faire grand-chose de toute façon. Après tout, je savais que j’étais juste inconscient, et que j’allais finir par me réveiller.

Ou alors… Etais-je mort ? Après ce qui avait l’air d’être une éternité, plusieurs jours, peut-être plusieurs semaines, je n’arrivais plus à compter et je m’ennuyais drôlement. Et si ça devait durer jusqu’à la fin des temps ? Si c’était ça, la mort, alors ça n’avait vraiment pas l’air très drôle. J’espérais être juste inconscient.

Heureusement, je finis par avoir la tête qui tourne, et j’ouvris les yeux. Enfin, du mieux que je le pouvais, parce qu’ils étaient sacrément enflés. Je sentais tout mon visage battre la chamade en même temps que mon cœur et je n’osais pas vérifier s’il ne me manquait pas quelques dents. Au moins, j’arrivais à bouger, c’était déjà ça.

Osumba ? Tu es enfin éveillé ? Ça fait plus de vingt-quatre heures que tu n’as pas repris connaissance. Je commençais à m’inquiéter.

– Ah… Non, ça va… J’ai mal.

– À qui est-ce que tu parles ?

Une voix familière résonna dans mes oreilles. Je pensais être seul, mais après tout, je n’avais pas pris le temps de vérifier. D’ailleurs où est-ce que j’étais ? Wang Wei ne m’avait pas tué, et il m’avait emmené…

Ouvrant les yeux du mieux que je le pouvais, j’aperçus de manière floue un plafond familier.

– Je suis de retour en prison… ?

– Evidemment. Je ne sais pas ce que tu as fait pour ça, espèce de lâche, mais tu y es bel et bien, et dans un sals état.

À nouveau cette voix. Je tournais la tête, et comme je m’y attendais, c’était elle. Chen Xiulan, la fille du Seigneur Chen Tao, ce type qui dirigeait soi-disant la ville de la Vouivre Ardente, une ville mineure du coin.

Articulant difficilement plus de quatre mots d’affilée, je parvins à lui demander :

– Lâche ? Je ne suis pas un lâche. Je tends l’autre joue et…

– Tu as rejoint les Assassin il y a déjà plusieurs jours, tu crois que je suis idiote ? N’essaye pas de me mener en bateau ou de me raconter des histoires. Tu es un lâche qui acceptes de prendre des vies pour son propre bénéfice, voilà tout.

Elle était vraiment froide et me parlait sur un ton de reproche absolu. Comme si son avis était important à mes yeux, elle me foudroyait du regard tout en courbant ses lèvres vers le bas de façon prononcée. Elle était en colère ou elle boudait ? Elle était juste vexée que j’ai choisi la Ligue ?

– Mais tu sais, je n’aurais pas pu te sauver de toute façon. Il fallait bien que je fasse au mieux.

– Arrête de divaguer ! N’as-tu point d’honneur ?!

– Honneur ? J’ai l’honneur d’être en vie. C’est déjà pas mal, je crois. Tant que l’on vit, on peut se venger. Si on n’est pas trop fainéant pour ça, évidemment.

Et moi, venger ne m’intéressait pas. J’essayais juste de paraitre cool et je faisais semblant de savoir ce que je faisais, pour qu’elle me foute un peu la paix. Mais nous n’étions que deux dans une petite pièce, et elle n’avait pas l’air de vouloir me lâcher la grappe.

– Je t’ai dit, assez de stupidités. Tu as rejoint la Ligue, et maintenant, tu les as offensés d’une quelconque manière, et tu sais quoi ? Je ne suis pas étonnée le moins du monde, vu ta façon de parler.

– Oh, c’est bon, raconte ce que tu veux.

J’avais trop mal et ma tête était trop embrumée pour tenter de dialoguer avec elle. Je me retournai, conscient que de toute façon, son opinion n’avait aucun intérêt à mes yeux. Je voulais juste dormir un peu pour soulager la douleur dans ma tête toute entière.

Mais elle ne le voyait pas de cette oreille.

Osumba, tu es tellement perturbé que même tes expressions sont à l’envers ?

– Quoi ?

Oublie ça…

Chen Xiulan reprit la parole, comme si elle essayait de ne pas me laisser seul dans mon coin.

– Tu as l’air plus fort que lorsque tu es entré la première fois. Quelque chose d’autre se dégage de toi. Tu as percé ?

– Percé ?

– Tu as ouvert une porte Terrestre ?

– Ah. Oui, j’ai… D’ailleurs, ça me fait penser… Wang Wei a sans nul doute essayé d’activer le poison dans mon corps, et a clairement vu que ça ne fonctionnait pas. Il va sûrement venir me demander pourquoi. Il va falloir que je trouve quelque chose à lui dire si je ne veux pas me faire cravacher encore plus.

– Quoi ? Poison ? Qu’est-ce que tu racontes ? Je ne comprends pas.

Elle était assise là, confuse. En la regardant un peu mieux, je pus constater qu’elle avait maigri. Elle n’avait clairement pas beaucoup mangé ces quelques derniers jours, depuis que nous ne nous étions pas vus. Mais peu m’importait, il fallait que je trouve un moyen de sortir d’ici…

– Ce n’est rien. Je me parlais tout seul.

– ……

Nous n’allons pas pouvoir quitter cette cellule comme ça, Osumba. Il ne le permettra jamais.

En parlant du loup, j’entendis un bruit venant de l’extérieur de la cellule, et je vis Wang Wei arriver de l’autre côté des barreaux. Il était toujours aussi noir que moi, et même s’il s’était calmé, son visage respirait toujours la fureur et la contrariété.

– Toi. Tu es enfin debout. Fais ce qu’il faut pour me rendre ma couleur. Immédiatement.

Il était si direct ! Mais d’un côté, je pouvais le comprendre. Qui rêverait d’être noir d’un seul coup, sans avoir le temps de s’y préparer ? En plus, il n’avait pas du tout le physique d’un Africain ou d’une personne des îles, il avait gardé son visage plat et ses petits yeux de fouine, ses lèvres fines coupées au couteau, et il était noir. C’était réellement une scène bizarre. Si j’avais été lui, je n’aurais pas voulu rester comme ça, moi non plus.

Et puis, si je lui rendais sa couleur, il me pardonnerait peut-être. Sans doute serait-il toujours en colère pour la tour, et ne me permettrait-il plus de rester dans sa Ligue, mais au moins il pourrait peut-être me relâcher.

Et même si je lui retirais sa couleur, il n’avait pas parlé des centaines d’autres pauvres victimes touchées par l’onde de choc. Il s’en fichait ? Quoi qu’il en fut, il fallait que j’essaye.

– Je vais essayer.

Je m’approchai des barreaux et me retrouvai à quelques centimètres du doyen. Fermant les yeux, je libérai le Bagua du Taiji, et le Qi de ténèbres dessina un cercle tourbillonnant autour de moi, l’englobant lui aussi. Je rouvris les yeux de mon mieux, tout gonflé qu’était mon visage. Je le vis écarquiller les yeux, surpris. Il n’avait sans doute jamais vu cette technique, je pouvais comprendre ce que ça faisait de voir un rare génie à l’œuvre. Il devait déjà regretter de m’avoir battu et sans doute de penser à me virer.

Face à moi, dans son dos à lui, apparut le pilier Qos du Paradis. Il contenait la technique ancestrale de la transformation par le Qi, et par ma volonté uniquement, il libéra un gaz noir qui vint envelopper le pauvre doyen.

Le gaz tourna et se retourna, tourbillonna et dansa, et lorsqu’il disparut, totalement absorbé par le corps de Wang Wei, je reculai d’un pas.

– …Ah. Désolé, hein… Je…

Ma technique, comme je le pensais, ne permettait pas du tout d’inverser la couleur pour lui rendre celle d’origine. Elle ne pouvait faire que renforcer l’imprégnation de Qi dans un corps, et effectivement, quand je pus voir le pauvre, pauvre doyen en face de moi, je me rendis compte que même le blanc de ses yeux avait changé de couleur pour devenir aussi noir que sa peau. Ses ongles également étaient teint d’un noir profond, on aurait dit une ombre vêtue de vêtements bizarres.

Il regarda ses mains, l’une après l’autre, et ouvrit la bouche, sa mâchoire tombant au plus bas.

Oh, regarde. Même sa langue et ses dents ! Hahaha !

Zhou XueFang commença à rire en moi. Mais il était fou, j’allais me faire cravacher encore et encore juste parce que j’étais incapable de lui rendre sa couleur, et qu’au contraire, je ne faisais qu’empirer les choses !

– Gamin ! Qu’est-ce que tu m’as fait ! C’est une malédiction ! Annule ça tout de suite !!

Il ne perdait pas le nord, et voulait que je renverse la situation une fois de plus. Mais est-ce qu’il n’avait pas remarqué que je n’avais pas réussi une fois, et que si je recommençais encore, je ne sais même pas ce qu’il avait encore qui pourrait se colorer en noir ! Ses organes, peut-être ?!

– Je crois que je suis incapable de faire ça. Ce que je viens de faire est la seule technique que je connaisse.

Décidé à être franc avec lui, je le lui annonçai tout de go. Après tout, j’en étais réellement incapable, alors ça ne servait à rien de faire semblant, autant qu’il le sache tout de suite.

Il s’énerva, j’allais dire ‘tout rouge’ mais non, même pas, il resta d’un noir d’encre. Par contre, il avait les sourcils très froncés. Je n’avais jamais vu de sourcils aussi froncés ! On aurait dit que ce n’était plus le même homme !

Je ne savais pas s’il était conscient de la profondeur à laquelle je l’avais noirci, mais il était clairement tout sauf content. Je me demandais même ce qu’il allait m’arriver, parce que s’il comprenait que je n’allais pas pouvoir lui rendre sa couleur, que ma compétence ne marchait que dans un sens, j’étais mal. Très mal.

Et il était là, de l’autre côté des barreaux, à fulminer. J’avais l’impression de voir un taureau prêt à charger.

– Il ne te fera pas de mal.

Chen Xiulan parlait calmement, même s’il aurait tout à fait pu la tuer aussi, vu l’état dans lequel il était.

– C’est pas vraiment l’impression que j’ai…

– En tout cas, il ne te tuera pas.

Elle se mit à ricaner doucement.

– Tu as vu à quoi il ressemble après être passé sous ta main ? Il ne permettra pas que tu meures, il va tout faire pour que tu renverses la vapeur.

Je l’avais déjà compris, mais…

– Je ne peux pas. Ma technique ne fonctionne que dans un sens, il semble.

– Regarde-le. Il est en train de souffrir le martyr parce qu’il veut entrer et te rosser, mais en même temps il cherche dans sa tête un moyen de te convaincre. Il trépigne. On dirait un animal. Je suis certaine qu’il n’est même pas vraiment conscient de ce que je dis là.

Soudain, à son grand désarroi, Wang Wei répondit, le visage crispé et ridé de colère.

– Crois-tu ça ?! Petite impudente ! Tu as de la chance que le paiement ait été si bon, sinon tu serais déjà six pieds sous terre !

Je voulus profiter de ce moment pour essayer, encore, de m’expliquer face à cet homme… À bien le regarder, avec ses yeux entièrement noirs, il ressemblait à un démon.

– Wang Wei, écoute… Je ne savais pas ce qui allait se passer, ni à la tour, ni à l’instant. Si je pouvais revenir en arrière, je le ferais ! Sauf si tu me tuerais juste après, évidemment. Là, je ne le ferais pas. Quoi qu’il en soit, peut-être qu’à l’avenir, je trouverai une rune permettant d’annuler ce que j’ai fait ? Mais pour ça, il faut que je reste en vie…

Je tentais le moindre argument qui me passait par la tête, peut-être qu’il allait se laisser convaincre par l’un d’eux.

– Une rune ?! Qu’ai-je à faire de tes runes ! Je ne sais même pas… Oh… Une rune, tu dis ?

Il se calma d’un coup, au beau milieu de sa phrase, et se mit à réfléchir, comme s’il n’était qu’une ombre sur un mur, sans expression faciale, ses longues moustaches retombant de chaque côté de son visage noir. Je savais qu’il réfléchissait parce qu’il se triturait la moustache droite.

Je n’osais plus parler. Je n’osais plus bouger. J’osais à peine respirer. Je savais le faire en silence alors ça allait.

Au bout de quelques dizaines de secondes, il agita sa longue manche et m’attira en-dehors de la cellule. J’étais même passé à travers les barreaux comme s’ils n’existaient pas !

– Toi, écoute-moi bien.

Je n’arrivais même plus à voir ses lèvres bouger vraiment tellement il était noir et uni. Je ne parvenais plus à faire la différence entre son visage et l’intérieur de sa bouche. Son visage était si noir qu’il ne reflétait plus la lumière et l’absence d’ombre lui donnait un aspect excessivement plat. J’avais l’impression que quelqu’un avait dessiné un Wang Wei tout noir et tout plat en l’air devant moi.

– Oui ?

– Il existe un ancien souterrain sous la Ligue, créé par les premiers Assassins. La tour que tu as détruite en faisait partie, et en était même le seul et unique point d’entrée. Depuis la première génération d’Assassins, plus une seule personne n’a été capable d’y mettre les pieds car pour ça, il faut maîtriser la technique que tu as employée pour activer la formation dans la tour. Ces souterrains sont intimement liés à la tour en question, et quelque chose me dit qu’il existe là-dedans la solution à mon… Non, à TON problème.

En prononçant ces derniers mots, il augmenta légèrement la pression qui me maintenait déjà en l’air ; d’ailleurs, ça faisait longtemps. Je sentis ma gorge se serrer et je savais que si j’osais faire le moindre mouvement, je pourrais me briser le cou. Aussi gardai-je le silence en attendant qu’il finisse ce qu’il avait à dire.

– Tu vas donc descendre, et trouver ce qu’il faut. Ne t’avise pas de remonter sans avoir trouvé comment renverser ce que tu as fait. Même si ça doit te prendre des jours ou même des semaines, me crois-tu si je te dis que je vais poster des gardes devant la seule sortie ? Tu as tout intérêt à ne pas me décevoir cette fois…

Je sentais qu’il cherchait à me lancer un regard menaçant en me disant ça, mais comme je ne voyais plus ses yeux, perdus dans la masse noire de son visage, je n’en fus pas plus intimidé que ça. Mais peu importait, j’avais compris. Il allait m’envoyer de force dans des souterrains dont je ne connaissais rien, peut-être emplis de dangers, et ne m’en laisserait pas sortir tant que je n’aurais pas trouvé un remède, ou une technique, ou n’importe quoi pour lui rendre sa couleur.

Résigné, je sentis que mon regard s’éteignit. Et comme il me relâchait, il était certain qu’il avait compris qu’il avait gagné et que j’allais faire ce qu’il exigeait.

Je jetai un œil à travers les barreaux de la cellule et vis Chen XiuLan complètement ébahie, les yeux ronds et la mâchoire pendante. Elle avait sans doute été choquée par l’apparence initiale du doyen, et probablement complètement achevée par ce que j’avais rajouté par-dessus le marché. Ou alors peut-être que c’était simplement parce que j’avais traversé les barreaux comme un fantôme. Je n’eus pas l’occasion de le lui demander ou de lui adresser un dernier mot.

Wang Wei m’avait certes relâché au sol, mais une légère pression me forçait à avancer devant lui malgré tout, comme un esclave ou un otage avec une arme dans le dos.

Alors que nous nous dirigions vers la tour, je me rendis compte, en jetant des coups d’œil à droite et à gauche, que j’étais la victime de nombreux regards emplis de haine et d’envie de tuer. Tous étaient des disciples de la Ligue, mais certains étaient tout à fait normaux alors que d’autres étaient noirs, comme moi ! Ils faisaient partie du groupe que j’avais renversé, c’était certain. Ils étaient d’ailleurs ceux qui avaient envie de me tuer.

Mais quelque chose me dérangeait malgré tout. Lorsque je discutais avec Kong Jia ou Ren Fen, tous deux me disaient à quel point ma couleur était un atout, un avantage, pour le genre de mission qu’effectuait la Ligue. Je pouvais d’ailleurs le comprendre, il était plus simple de se cacher dans l’ombre… Mais alors pourquoi est-ce que le fait d’être comme moi rendait tout le monde fou de colère ? Ils auraient tous dû être ravis ! Surtout Wang Wei : une fois dans l’ombre, il était maintenant parfaitement et totalement invisible.

Et pourtant, j’étais dans cette situation et je n’osais pas demander une explication, de peur de le mettre à nouveau en colère maintenant qu’il semblait s’être un peu calmé en ayant plus ou moins repris le contrôle de la situation.

Je me promis de demander plus tard, si j’en avais l’occasion, parce que j’étais vraiment curieux, il fallait que je sache pourquoi leur mentalité était aussi bizarre.

Arrivés aux décombres de la tour, Wang Wei me mena vers un endroit où il y avait effectivement une entrée au sol, et cette entrée était recouverte par une espèce de bloc jaune transparent.

– Voici l’entrée des souterrains. La formation qui en bloque l’entrée est infranchissable, à moins de maîtriser la technique liée à cette tour. C’est un enseignement transmis depuis des centaines de générations. Tout est lié, gamin. Tu as été capable d’entrer dans la tour et d’en activer la formation, alors tu dois pouvoir passer par ici.

Ainsi, le moment était venu, déjà. J’allais devoir m’aventurer dans l’inconnu. Je voulais entrer dans le sous-sol des ruines du temple de Kong Jia pour en piller les trésors, et voilà que j’allais pénétrer dans un souterrain inconnu et aux dangers potentiellement mortels. Qui savait si j’étais même capable d’y faire trois pas sans me faire attaquer et dévorer par des bêtes géantes ?

Une légère pression me rappela que je n’avais pas voix au chapitre.

– Awawa !

Il me poussa contre le bloc translucide et au moment où je m’attendais à me faire presser contre ce dernier, je fus surpris de constater que je passai simplement à travers.

Et au moment où je me retrouvai dans ce bloc jaunâtre, je me retournai vers Wang Wei, qui avait cessé de m’oppresser de son Qi. Non… Ce n’était pas qu’il avait cessé, mais plutôt qu’il ne pouvait plus. Il n’avait aucune possibilité de passer à travers cette formation, évidemment trop puissante pour lui ; sinon il serait sans doute descendu en personne au lieu de se reposer sur moi par manque de choix.

– Toi. Maintenant, descends. Et ne remonte pas tant que tu n’as pas la solution au problème. La prochaine fois que je revois ton visage, si je ne suis pas guéri dans la minute qui suit, je te cravache, je te décortique vivant, et je me sers de tes tendons et de ta peau pour tisser un drapeau, sur lequel je collerai ton visage niais que j’aurai arraché au préalable. Puis je planterai ce drapeau dans le tronc de l’Arbre Immortel afin que tout le monde sache ce qu’il en coûte de s’en prendre à moi.

Mais il était fou ! Il voulait me décortiquer vivant ? J’avais tout intérêt à trouver ce qu’il voulait, parce que s’il avait raison et que cet endroit était la seule sortie, je ne pourrais pas lui échapper. Mais… Il était un peu idiot aussi, il fallait le souligner. Si je ne trouvais pas ce qu’il voulait, pensait-il que j’allais sortir ? Si c’était pour mourir de toute façon, alors je préférais encore mourir de faim là en bas plutôt que de devenir un drapeau après d’atroces souffrances.

Cela dit, j’allais bien me garder de le lui dire. On ne savait jamais ce qu’il pouvait encore inventer pour essayer de me torturer psychologiquement.

Résolu, et sans aucun autre choix de toute façon, je m’engageai dans les escaliers s’enfonçant dans le sol, vers l’obscurité absolue. Bientôt, je fus enveloppé par les ténèbres, et je m’y sentais étrangement bien. Décidément, les ténèbres étaient vraiment mon élément.

Mais je n’y voyais rien, malgré tout. Alors en avançant à tâtons dans le silence et l’obscurité, je m’enfonçais toujours plus bas dans les abysses en veillant à ce que chacun de mes pas soit stable, une marche après l’autre.

Je me sentais vraiment seul dans cet endroit, loin sous terre, et même Zhou XueFang ne parvenait pas à me rassurer, et cessa bientôt de parler pour retourner à sa méditation ou à je ne savais quelle autre activité amusante que pouvait proposer mon dantian.

Au bout de ce qui me sembla être au moins une heure, je vis de la lumière plus bas. D’abord faiblement, puis de manière plus marquée. Une lumière vacillante, comme une flamme. Mais personne n’était venu là depuis des milliers d’années, donc qui pouvait entretenir un feu ?

Avançant avec prudence, je dépassai bientôt une porte, tout en bas des escaliers.

Et ce qui se présenta devant moi était gargantuesque. On aurait dit une grotte, mais dont je ne pouvais pas voir le bout, pas plus que le plafond. La lumière vacillante et fluctuante ne venait pas d’une flamme, mais d’un soleil artificiel, haut, très haut, à des centaines de mètres au-dessus de ma tête. Il illuminait l’endroit d’une douche chaleur, comme s’il venait de se lever un matin de printemps sur la savane.

Et face à moi, loin sous mes yeux, se trouvait un lac. Une étendue d’eau immense qui semblait constituer le centre de la caverne, et aussi calme et plat que le ciel, dehors.

– Mais qu’est-ce que c’est que cet endroit ? Il y a un soleil et un lac dans une grotte ?

Je n’eus cependant pas le temps de chercher de réponses à mes questions. Un hurlement furieux résonna au loin, comme le rugissement d’un lion. Mais quelque chose me disait que c’était bien plus dangereux qu’un gros matou, vu l’intensité de ce cri.

– On fait quoi, maintenant ?

Cet endroit m’a l’air scellé du monde extérieur, et comme ce cri le laisse entendre, on dirait bien qu’il existe ici un règne animal propre, qui s’est développé avec le temps, possédant ses propres lois et sa propre hiérarchie. Sans vraie prédation, les monstres les plus puissants ont eu l’occasion de devenir très puissants avec le temps. Il nous faut nous cacher, et explorer du mieux que nous pouvons cet endroit sans nous faire repérer, ou ça risque de très mal finir. Sans parler du fait que la formation que tu as activée dans la tour et qui a tout détruit était déjà faite pour une maîtrise de haut niveau, alors qui sait quelle puissance peut avoir la faune ici ?

– Tu crois que ces monstres sont dangereux ? Ils n’ont jamais rencontré d’être humain, peut-être qu’ils seront curieux, et pas agressifs.

Naïf. Quel que soit l’être vivant qui leur fait face, c’est la loi du plus fort. Ils t’attaqueront pour te dévorer si tu es plus faible qu’eux.

– Et… Si je suis plus fort ?

Crois-tu l’être ?

– …

Comme je le pensais. Bon, qu’allons-nous faire, maintenant ? Si tu te déplaces sans connaître les lieux, tu risques de tomber sur des monstres. Mais nous n’avons pas trop le choix. Donc à choisir, je peux te donner quelques indications sur ce que je ressens, mais je ne peux pas te garantir plus de choses que ça.

Il y a une puissance relative qui émane d’un endroit sur la droite ; ce sont peut-être des ressources de cultivation. Ou un trésor puissant. Ou… la tanière d’un monstre.

Je ressens un calme absolu vers le lac en contrebas. Il n’est qu’à quelques kilomètres d’ici et je suis à peu près certain que rien ne bloque la voie, ni pièges, ni monstres. Mais je ne peux pas te promettre que tu trouveras des choses intéressantes une fois sur place.

Puis, là, tu vois cette forêt, sur la gauche ?

Il y avait même une forêt dans cette grotte ?! Mais à bien y penser, l’endroit ressemblait réellement bien plus à des plaines, des collines et un paysage enfermé dans une grotte qu’à une grotte.

– Qu’y a-t-il avec cette forêt ?

Je ressens une formation en son sein. Peut-être que quelque chose y est caché. Par contre, il y a quelques monstres, je peux ressentir leur aura.

 


 

Concernant les votes précédents, dont voici les résultats, mis à part un seul d’entre eux que personne n’a eu la mauvaise idée de choisir, le choix s’est avéré plutôt tendu.
Les gens ont bien entendu choisi la première solution, à savoir qu’il essaye de s’expliquer, pour 36 voix.
Suivi de la dernière, faire comme si tout était sous contrôle, pour 30 voix.
22 personnes voulaient lui faire du chantage, 8 avaient décidé qu’il devait se cacher derrière Kong Jia.
Et PERSONNE n’a voulu attaquer Wang Wei (remarque, hein… C’était peut-être effectivement pas l’idée la plus intelligente du siècle !)

S’il avait voulu lui faire du chantage, par exemple « Si tu me touches, je ne te rends pas ta couleur », le doyen se serait calmé et le temps qu’il réfléchisse à ce qu’il devait faire, la trappe sur laquelle se tenait Osumba se serait ouverte au terme des 24h, et il serait tombé dedans.

S’il l’avait attaqué, l’autre se serait tellement énervé qu’il lui aurait balancé, sous le coup de la folie, sa technique la plus puissante, qui aurait déformé l’espace-temps à cause du Qi temporel des ruines, et aurait téléporté Osumba dans sa grotte de départ. Pas dans le temps, hein, juste dans l’espace. Il lui aurait cependant couru après pendant très longtemps.

S’il avait voulu se cacher derrière l’handicapé, Wang Wei n’aurait pas fait dans la dentelle, et les aurait traités tous deux de la même manière, hop, rossé et en taule.

Et s’il avait fait comme si tout était sous contrôle, par exemple « Ok, j’ai fait une couille, mais regarde : maintenant c’est avantageux pour la Ligue ! », il se serait fait cravacher pour avoir détruit la tour, mais Wang Wei, admettant finalement qu’il avait raison, l’aurait simplement banni de la Ligue.

 


 

Maintenant, pour le choix du jour, qui sera clos vendredi 5/10 à 23h, entrons dans le vif du sujet, et n’oubliez pas de vous connecter pour pouvoir voter !

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Raka
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22 thoughts on “LDO : Chapitre 11

  1. Hey, petit conseil en tant que lecteur, essaie de rajouter de l’imprevu dans tes choix car sinon sa destinée est trop évidente. Ca irait très bien en plus avec la personalité simplet du héros, qui le rend imprévisible. Par exemple en tentant d’agresser le chef, finalement il se rend compte qu’il peut le controller vu qu’il est noir, au lieu de simplement se faire battre à plat de couture comme tu le prévoyais. Dis moi ce que t’en penses, et continues comme ca c’est vraiment du super taff !

    1. En toute honnêteté, les lignes directrices des différents choix sont écrites avant le début des votes, et pour la plupart, sont emplies de choses « surprenantes » et qui n’ont pas grand chose à voir avec le choix en question.

      Quant au contrôle du chef, non, certainement non. A ce moment-là, dans 4 chapitres il contrôle la totalité du continent.

      Surtout quand tu te rends compte que ce n’est à la base pas un LN fait pour décrire un personnage pété comme dans 99% des LNs, et qu’à côté de ça les pouvoirs et ce qu’ils font, je ne l’invente pas au fur et à mesure, tout est décidé à l’avance. Je ne vais pas d’un seul coup le faire contrôler les gens comme ça, juste parce que ce serait imprévisible.

      Ce qu’il faut garder en tête surtout, c’est que les choix proposés ont la plupart du temps une logique ; Il s’attaque à un personnage plus fort que lui, il va se faire rétamer. Il manger un champignon vénéneux, il va se faire empoisonner. Parce que c’est logique, tout simplement.

      Mais à côté de ça, il ne faut pas simplement rester béat face à un choix « dangereux et rentable » ou « peu dangereux et peu rentable » parce qu’au final, il n’y a jamais de choix vraiment vide 🙂

  2. merci pour ce chapitre et bravo j’ai tellement rigolé lors de la description du doyen c’était terrible 😉

  3. J’ai l’impression que Osumba va mourrir à chaque chapitres ^^ .
    Raka t’es sur de pas plutot l’appeler Kenny ?

  4. mais sinon, vu qu’il doit pas remonter sans solution, pourquoi ne pas allez dans les trois endroit du plus safe au plus dangereux ?

    1. Ça serait pas con du tout en effet, eh.
      J’aime ce genre de réflexion posée plus que dictée par les tripes.

  5. Merci pour le chapitre, et complètement d’accord avec Sai1905 puisque j’ai le temps, je vais en profiter pour récupérer le plus possible et remonter avec le plus d’atout en main 😉

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