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Chapitre 170 – L’oracle 1/2

 

La scène, en dépit de sa dangerosité, était d’une beauté à couper le souffle. De gigantesques colonnes d’eau se formèrent sous l’impulsion des dragons qui en sortaient, et qui eux-mêmes crachèrent de puissants jets d’eau. Car puissants, ils l’étaient réellement. La moindre goutte aurait pu décapiter un homme en armure complète. Ce fut donc sans grande surprise que Woojin observa que l’elfe était inconsciente. La vision l’avait terrorisée au point qu’elle ne respirait plus, forçant son sauveur ou son bourreau, selon l’angle, à intervenir. Lorsqu’elle reprit conscience, elle vit des centaines de milliers de gouttelettes se dissiper en heurtant une barrière invisible.

« Ouf… » se soulagea-t-elle.

« C’est que de la flotte, ça ne craint rien. » lui lâcha Woojin.

Elle fut cette fois pour de bon convaincue par la folie de cet homme. Même les plus puissants lieutenants de Trahnet ne se seraient pas risqués à oser prendre d’assaut la cité aquatique. Pour cause, Litan avait encore quelques surprises en réserve.

« Il n’y a pas que leur souffle ! » lui cria-t-elle.

« Les bêtes géantes ne peuvent pas voler. » répondit-il froidement, mais d’une voix puissante.

« Si ! »

« C’est… C’est impossible ?! »

« Il faut qu’on se tire ! »

Les dragons apparurent soudain clairement à Woojin. Ils poussèrent de puissants hurlements en déplaçant leurs gueules monstrueuses à son niveau, une bonne partie de leur corps toujours immergé dans l’eau, témoin manifeste de leur taille hallucinante. Woojin se déplaça dans l’urgence sur le côté afin d’éviter l’un de ces espèces de silures aux dizaines de rangées de crocs. Au nombre de 17, ils prirent tous leur envol afin de le poursuivre. Ils étaient bien plus rapides que lui.

Les âmes devraient tenir le choc…

Cependant, leur quantité vint à baisser à une vitesse trop élevée. À ce rythme, il aurait bientôt épuisé ses réserves, ce qui constituait une promesse d’un péril plus grand encore.

« Putain ! » s’agaça-t-il, à mi-chemin entre la colère et un étrange sentiment de peur.

Il fonça alors comme un missile hors des eaux, sur la terre ferme. Les dragons restèrent un moment à le regarder, avant de s’enfoncer dans les eaux.

« Bordel, si je m’étais attendu à ça… »

« Je vous avais prévenu, Immortel ! » s’offusqua Latasha en s’époussetant.

Elle s’en tint à cette seule remarque. Il était déjà bien assez furieux ainsi pour prendre le risque de le rendre encore davantage. Et pour cause, c’était la première fois qu’un véritable obstacle se dressait face à lui. De fait, Woojin comprit enfin la raison pour laquelle les maîtres des Marches évitaient cet endroit comme la peste.

« Hahahaha… »

« Qu’est-ce que… » balbutia Latasha, sidérée.

« Haha ! Putain, on va se marrer. »

Il dégaina son arme d’un air décidé, au grand dam de l’elfe. Allait-il vraiment retenter ?

« Vous prenez des risques inconsidérés, arrêtez ça tout de suite ! »

« Tout de suite, les grands mots… Ça vaut le coup d’essayer. » répondit Woojin, faisant bien comprendre que la prudence ne faisant pas partie de son vocable.

De par le passé, le premier dragon qu’il avait affronté lui avait donné beaucoup de fil à retordre, mais il avait réussi. Depuis, il en avait chassé des quantités, mais toujours seuls. Néanmoins, l’entreprise lui sembla viable. Car s’il avait été seul, il ne l’était aujourd’hui plus. Plusieurs nuages très compacts, chargés d’une énergie noire, apparurent soudain.

« Des dragons ! Ça faisait des plombes, enfin une chasse intéressante ! » beugla Ramson, plus que jamais volontaire.

« C’est le lac Litan. » remarqua Rakto.

Tous les chevaliers noirs ne le connaissaient pas. Certains n’avaient même jamais combattu de dragons. Pourtant, ils partageaient tous la même excitation à l’idée de ce nouveau combat au nom de leur maître et Roi. Comme eux, un autre de ses familiers apparut soudainement, à la différence près que lui était venu de sa propre volonté.

« Ryong va être content. Je charge ! » hurla Jaenis.

Sa magie dévastatrice allait être un atout de poids, comme le serait la puissance brute de Dolsae. Il avait pleine confiance en ses capacités à gagner cet affrontement. Il interrompit soudain pourtant Jaenis.

« Quoi ? » s’étonna la liche.

Woojin fit un signe de la tête en direction du lac. Sur un petit bateau se trouvait un jeune garçon, d’à peine dix ans, vêtu d’une tenue bien trop grande pour lui.

« J’aimerais bien comprendre, justement. » répondit Woojin à l’intention de Jaenis.

Une fois sur la terre ferme, le garçon qui portait, en réalité, les vêtements sacrés du haut prêtre de Lécia, vint à la rencontre de l’intrus.

« Bonjour. Vous êtes l’Immortel ? » demanda-t-il d’une voix fluette.

« Hmm. Vous êtes le haut prêtre de Lécia ? »

« Tout à fait. »

« Je n’ai pas demandé après vous, que faites-vous ici ? » s’étonna Woojin.

« Je ne vous ai pas invité non plus. Que faites-vous ici ? »

Woojin le toisa du regard. Non par défi, mais par réelle curiosité. Le petit prit conscience de son interrogation et dissipa immédiatement ses doutes.

« Je ne reculerai devant rien pour protéger l’île. Même si je dois en mourir. »

« Pourquoi pensez-vous que je vais vous tuer ? »

« Vous êtes là pour les gants, n’est-ce pas ? »

La relique sacrée de Lécia, dieu de la fertilité, était capable de faire naître des fruits même sur les terres les plus désolées. Ce qui était plus surprenant encore, c’était qu’en lui remettant cet objet, le haut prêtre se séparait d’une importante fraction de son pouvoir. Pour le champion d’un dieu, la mort valait mieux que la perte de sa relique. Pourtant, sans même chercher à négocier, le garçon lui tendit les précieux gants.

« Hmm. Soyez rassuré, j’en ferai bon usage. » répondit Woojin en les prenant.

La Punition de Gehen se trouva soudain à sa portée. Chacun des objets de cet ensemble d’équipements nécessitait l’une des reliques sacrées des dieux afin d’être conçu. L’obtenir si aisément était par trop surprenant… Et une nouvelle fois, le jeune garçon le surprit de par sa clairvoyance.

« La volonté de Lécia est accomplie. Prions à présent pour que l’oracle se réalise. »

« Elle disait quoi, votre vision ? »

« De vous remettre la relique sacrée. Ce n’est qu’à ce prix que se réalisera ce que je souhaite le plus au monde. » expliqua le prêtre, avant de revenir s’installer sur son bateau.

Woojin le regarda s’éloigner sans pouvoir exprimer le moindre mot, se contentant de renvoyer ses familiers à leurs activités avant de lui-même tourner le dos au lac. À présent, il était capable de créer la Défense, la Marche et la Punition de Gehen. Il ne lui manquait plus que deux objets…

 


 

« Qu’avez-vous à vous hurler dessus, à la fin ?! » vociféra Kruger, le chef orc.

Au sein de la colonie, placée au sommet de la montagne Sauros, les constructions avançaient à bon train. Il restait cependant un litige à résoudre…

« C’est un lion, je te dis ! » s’énerva de plus belle Graham, suite à une nouvelle provocation du jeune roi humain.

« Non. C’est un tigre. » s’opposa Kontz, encore en pleine possession de son calme.

Le choix de poser ou non le drapeau d’Alandal ne leur ayant pas été laissé, ils se battirent sur son symbole, seul point où il leur était encore possible d’argumenter.

« Il est très fier. Il rugit face au monde, comme pour le prévenir qu’il ne faut pas chercher à plaisanter avec lui. » observa Raul.

« Vous avez tout faux. Il bâille, et c’est un chat. » expliqua Kruger d’une voix glaciale.

Sans doute ceci aurait-il suffit à dissiper leurs doutes, si l’image ne jurait pas tellement avec celle qu’ils se faisaient de l’Immortel.

« Non, je suis sûr que c’est un lion. » reprit Graham, comme si de rien n’était.

« Un tigre ! » s’énerva cette fois Kontz.

Kruger lâcha un soupir lourd de colère avant de s’éloigner. À l’évidence, dissiper leurs doutes était bien au delà de ses forces. Leur curiosité pour l’Immortel brûlait d’un feu trop important, tout particulièrement chez Kontz. En tant que roi, il avait beaucoup entendu parler de l’Immortel, qui avait fini, bon gré mal gré, par faire partie de l’histoire d’Alandal. C’était pourtant la première fois qu’il le rencontrait, et il découvrait là un tout autre personnage que celui que son défunt père lui avait conté.

« Une boule de feu… Sunggoo est de retour. » dit soudain le Roi nain.

Kontz se tourna tout à coup en sa direction, un large sourire au visage. Les compagnons d’arme de l’Immortel n’étaient-ils pas tout aussi séduisants ? Un seigneur vampire et un esprit de feu versé sur les arts de la bouteille… Rien de plus normal à ce qu’ils se soient rapprochés.

« Eh, salut Sunggoo ! » lui lança le jeune humain.

« Ah, Kontz ! » répondit Sunggoo dans un sourire.

« Merci pour tout ce travail… »

« Héhé, il faut bien que je m’entraîne. »

« Je n’en attendais pas moins. J’aimerais te demander quelque chose, Sunggoo. »

« Quoi donc ? Au fait, la colonie est terminée ? » s’étonna Sunggoo, avant de se laisser lui-même emporter par une nouvelle interrogation.

« Hmm… Si. Ce sera probablement bientôt terminé, j’ai l’impression qu’elle n’évolue plus. » répondit l’intéressé en jetant un rapide coup d’œil autour de lui.

« Marchons un peu, j’ai besoin de me dégourdir les jambes. » l’invita Sunggoo.

« Excellente idée ! »

Après un moment à apprécier le silence, Sunggoo céda à la curiosité.

« Qu’est-ce que tu voulais me demander ? »

« C’est que… nous sommes tous très curieux au sujet du symbole d’Alandal. Est-ce un lion, ou bien un tigre ? » avoua Kontz, légèrement honteux.

Sunggoo regarda avec attention le drapeau qu’il eut l’impression de voir véritablement pour la première fois. Ce ne pouvait être qu’elle…

« C’est un chat. » trancha Sunggoo, l’image de Vivie encore fraîche en tête.

« Comment ? »

« Tu ne sais pas ce que c’est ? »

« Si, bien sûr, mais… ça me semble peu probable. » hésita Kontz.

« Je n’ai aucun doute, c’est un chat. »

Kontz eut l’air déçu par la réponse, autant parce qu’elle donnait raison au chef orc que parce qu’elle venait briser l’aura divine qu’il offrait au conquérant Immortel. Sunggoo en vint alors à se demander lui-même pourquoi ce symbole avait été choisi.

« Hmm… Peut-être que Melody en sait plus, tu devrais lui demander. »

« Oh ! Mais c’est une excellente idée. J’y cours ! »

Une fois seul, Sunggoo continua de marcher tranquillement jusqu’au plus haut point de la montagne. Il vit soudain Jaemin, l’air grave.

« Il y a un souci, Jaemin ? » demanda-t-il d’une voix douce.

« Hyung. » répondit-il, laissant à son interlocuteur le choix de deviner s’il s’agissait de lui ou de Woojin.

« Ok, il va falloir être plus clair. Qu’est-ce qu’il y a ? »

« Tu as entendu l’oracle ? »

« De quoi tu parles ? » s’étonna Sunggoo.

« Hmm, tu n’es pas au courant. Avant qu’on vienne sur Alphène, la déesse Aria a chargé Melody de transmettre quelque chose à Woojin. » expliqua Jaemin.

« Et donc ? »

« Aria est la déesse des prophéties. »

Sunggoo apprécia quelques secondes durant cette révélation, afin d’en mesurer toutes les implications. À n’en point douter, l’affaire devait être sérieuse.

« Qu’est-ce qu’elle a dit ? » finit-il par lâcher, le regard perdu dans le vague.

« Eh bien… » commença Jaemin, l’air morose.

Nostra
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11 thoughts on “SSN Chapitre 170

  1. Merci pour le chapitre !

    Je suis sûr qu’elle a prédit la mort de Woojin, mais bon la mort n’est pas la fin pour un necromancien ! ^^

  2. Merci pour le chapitre.
    Et donc au prochain on aura changé de scène et il faudra encore attendre pour connaître cette prophétie, c’est ça ?

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